samedi 23 juin 2018

Les fantasmes de Lucie (5)


Anders Zorn: Badande

C’est décidément une véritable mine, ce bouquin. Je ne le quitte plus. Je m’y replonge, aussitôt rentrée. Dix fois, ving fois, je reviens sur mes pas.
Et je retourne « là-bas. »

Les trente coups de fouet nous ont été infligés. On nous fait redescendre de l’estrade, une à une, pantelantes. Et il nous faut à nouveau fendre la foule. Les pagnes sont restés là-haut et nos derrières meurtris, zébrés, sont généreusement offerts aux regards d’hommes et de femmes qui s’attardent complaisamment dessus. Qui s’en repaissent. Qui savourent. Et qui commentent à qui mieux mieux.
– Vous êtes toutes belles comme ça, dites donc !
– Oh, oui, faudrait vous le faire plus souvent…
– En attendant, qu’est-ce qu’elles ont braillé !
– Ah, elles feront moins les fières maintenant…
Le retour est interminable. Entre deux haies de visages rigolards et parfois hargneux. Aussitôt qu’ils nous ont ramenées à notre point de départ, dans la petite salle, les archers nous abandonnent à notre sort.
– Vous pouvez rentrer chez vous.
Certaines se rhabillent en toute hâte. D’autres éclatent en sanglots. D’autres encore se laissent tomber sur les bancs où elles restent longuement prostrées. La salle se vide malgré tout peu à peu. Je ne bouge pas. J’attends. J’attends qu’à l’extérieur la foule se soit dispersée. Margaux aussi. On n’est plus que toutes les deux. On se regarde et on éclate d’un immense fou rire.
– Ah, ça fait du bien !
– Comment ça me brûle n’empêche ! Pas toi ?
– Ah, ben ça !
– Ce qu’il faudrait, maintenant, c’est se le tremper dans un bon baquet d’eau froide.
Aussitôt dit, aussitôt fait.
– On va chez moi ? C’est à deux pas.
Chez elle. C’est moi qui me le plonge la première dedans.
– Houlà ! Ça soulage ! C’est fou ce que ça soulage.
– Tu veux que je te frotte le dos ? Ça te détendra.
Elle n’attend pas la réponse. Sa main est douce. Légère.
– Tu aimes ?
Si j’aime !
– C’est agréable. Très.
– Ça t’a plu de les voir toutes nues les autres ?
Je hausse les épaules.
– Il y en a deux ou trois qui sont vraiment pas mal. Qui gagnent à se déshabiller.
– Oui, hein ! Mais pas autant que toi…
Sa main descend, m’effleure le haut des fesses. Je ne proteste pas. Je la laisse faire.
– En douce qu’on n’est pas près de les revoir d’un moment, nos maris.
– Et ça va te manquer ?
Elle soutient mon regard.
– Franchement, non.
Elle s’enhardit. S’aventure dans le sillon entre les fesses.
Je me relève. Je tends ma croupe vers elle. Elle en longe les zébrures du bout du doigt,y pose ses lèvres. Je m’entrouvre. Elle se fait inquisitrice. Exploratrice.
Je l’arrête.
– Attends ! Tu voudrais pas, avant ?
– Avant ? Quoi donc ?
– M’en remettre une.
Elle sourit.
– S’il y a que ça pour te faire plaisir… Tu la veux comment ? Au fouet ou à la main ?
– Choisis, toi !
– Alors ce sera le fouet. Mais j’y mets une condition. C’est que tu me rendes la pareille aussitôt après.
– Marché conclu.
Et je lui offre mon derrière.

2 commentaires:

  1. Hé bien, il n'y a que dans les fantasmes qu'on peut en vouloir deux d'affilée... De cette force, j'entends.

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  2. Effectivement! Au réel, ça risquerait de poser quelques petits (gros) problèmes.

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