jeudi 28 avril 2016

Escobarines: Le valet (1)

Le même pas feutré et la porte presque aussitôt rouverte. Le même valet. Qui s’incline cérémonieux, impassible.
– Madame s’est donc ravisée ?
Il l’invite à entrer, main ouverte, tendue. Elle avance de quelques pas sur les volutes entrelacées du tapis, s’arrête près du fauteuil de velours rouge, hésite. Il sourit imperturbablement. Les volutes s’entrecroisent et se perdent à l’infini. Rouges. Bleues. Vertes.
– Il faut dire que Madame n’a pas vraiment le choix…
Au-delà du tapis s’enfuient les lattes vernies du parquet.
– Je suppose qu’il est inutile de rappeler à Madame les conditions de Monsieur ?
Elle fait signe que non. Non, c’est en effet inutile…
– Bien…
Il est là sans doute, de l’autre côté, derrière la porte à moulures lambrissées grise.
– Monsieur m’a chargé de mettre moi-même Madame dans la tenue où il souhaite la recevoir…
Le salaud ! Non, mais quel petit salaud !
Il se penche, crâne dégarni, épaules écrasées, saisit le bas de la robe, relève Elle rabat. Une fois… Deux fois…
– Que Madame se montre donc raisonnable !
Deux tableaux se font face, dans leurs cadres dorés, représentant l’un – elle lève les bras – un paysage de neige à l’infini et l’autre – il remet les manches à l’endroit, l’étale soigneusement sur le fauteuil, lisse un pli du plat de la main – un bâtiment de ferme avec quelques minuscules silhouettes dans les champs en arrière-plan. Il dégrafe le soutien-gorge. Sur la cheminée une horloge dorée enluminée d’angelots qui voltigent en tendant des couronnes de lauriers à bout de bras. Il pose les mains des deux côtés sur ses hanches. Il les glisse sous l’élastique de la culotte… Qu’il descend… Dans la bibliothèque, juste en face, les livres à tranches vert empire sont soigneusement alignés. Jusqu’aux chevilles. Elle lève une jambe. L’autre…
– Les chaussures maintenant… Tout… Il a dit tout…

Le couloir est sombre et étroit. Les lattes du plancher collent légèrement sous la plante des pieds. La lumière est brutale soudain, aveuglante.
– C’est cette dame que Monsieur attend…
– Fais entrer, Bastien, fais entrer !
Il s’efface, s’incline, referme la porte.

Monsieur n’a pas levé les yeux. Il écrit. Il ne lève toujours pas les yeux. Il est jeune. Très… Tellement jeune. Elle tousse. Une immense baie vitrée, le parement d’un balcon, des toits, des murs, un bout d’avenue. Elle tousse encore. La pièce est immense et claire. Il lève enfin la tête, la regarde. De haut en bas… De bas en haut… Il continue à écrire, ouvre un dossier, le referme.
– J’ai fait le nécessaire… Tout sera rentré dans l’ordre en temps voulu…
– Merci…
Il recule sa chaise.
– Àcondition… À condition bien entendu que notre contrat soit très scrupuleusement respecté. Évidemment…
Il contourne le bureau. S’approche.
– D’autant plus scrupuleusement qu’il s’agit d’une somme considérable… J’espère que vous avez conscience de l’effort que cela représente pour moi…
Il la fait pivoter, se saisit d’une de ses mains qu’il lui pose sur la hanche. L’autre, il la lui fait mettre sur le front…
– Là ! Ne bougez plus !

– Vous avez un fessier comme je les aime ! Bien en chair. Plantureux. Un derrière à fessées. Incontestablement. Je sens que je vais me régaler.
Il regarde. Il contemple. Ça dure. Ça s’éternise.
– Venez ! Venez vous asseoir… Là… Asseyez-vous !
Il sonne, s’installe, jambes croisées, face à elle. Il se tait. Ils se taisent.

Silencieuse, la jeune servante dépose le plateau entre eux sur la table basse. Sans un mot. Sans un regard.
– Merci, Jeanne… Vous avez vraiment beaucoup de chance que ce soit Lambert qui ait découvert le pot aux roses… Un autre que lui… Lait ou citron ? Lambert est un comptable hors pair qui trouve toujours une solution… Quelle que soit la situation… La preuve !
Penchée presque à l’horizontale, une main ramenée sur la poitrine pour empêcher la robe de bailler, Jeanne verse le thé.
– Sans lui – sans moi – vous seriez dans de sacrés beaux draps… Enquête… Scandale… Vous ne vous en releviez pas… Et votre mari…
Jeanne lui tend sa tasse.
– Merci…
Et puis à lui…
– Merci, Jeanne…
Elle se redresse, s’éloigne à pas feutrés.

(à suivre)

lundi 25 avril 2016

La clef USB (6)

Il m’a appelée le lendemain…
– Je suis crevé… Littéralement crevé… Par ta faute… Non, parce que j’avais beau me répéter, sur tous les tons, que ce n’était pas raisonnable, que je devrais aller dormir, que j’allais être, au boulot, dans un état pitoyable, c’était plus fort que moi : fallait que je te regarde encore et encore t’empaler sur cette queue inconnue qui te faisait à l’évidence tant de bien. Je ne pouvais pas détacher mes yeux de tes adorables petites fesses qui s’entrouvraient et se refermaient en cadence. Et tu sais ce que je n’arrête pas de me dire ? C’est qu’avec un peu de chance, sur les neuf vidéos qu’il nous reste encore à visionner ensemble, il y en aura bien une où on le verra, ce monsieur, aller rendre une visite de courtoisie à ton petit trou de derrière. Non, non ! Chut ! Ne vends pas la mèche ! Je ne veux pas savoir. Pas encore ! Que j’aie la surprise… Dis-moi plutôt : vous continuez à en faire des vidéos tous les deux ? Oui, hein, sûrement…
– Alors ça, il y a pas de risque !
– Toute seule non plus ?
– Non plus, non…
– Ben, pourquoi ? Tu devrais, tu sais ! Vous devriez… Vous êtes extrêmement talentueux… Aussi bien l’un que l’autre…
– Il n’en est pas question…
– Ah, ben si, si ! Ça se renouvelle un stock. Au fur et à mesure… Ça finit par s’épuiser sinon… Tu devrais savoir ça… Alors dorénavant pour chaque vidéo que nous aurons vue tu me donneras une vidéo tout fraîchement tournée… Que je nous mettrai soigneusement de côté… Pour plus tard… Qu’on ait de la réserve… Tu peux quand même pas me refuser ça !
Je ne pouvais pas, non ! Il le savait et je le savais. Et on savait tous les deux pourquoi. J’étais désormais enfermée dans une nasse à laquelle, toute seule, je ne parviendrais jamais à échapper. Il fallait que quelqu’un vienne à mon secours et m’aide à m’en sortir. Oui, mais qui ? Damien ! Bien sûr Damien ! Quelle drôle d’idée j’avais eue de vouloir le tenir en-dehors de tout ça. Le véritable responsable de la situation, c’était lui. Aucun doute là-dessus : s’il n’avait pas fait des pieds et des mains pour que j’apporte cette fichue clef à chacun de nos rendez-vous, rien ne serait arrivé. Alors à lui de la trouver la solution après tout… C’était la moindre des choses…

Il s’est précipité à ma rencontre, radieux.
– Toi, Christina, toi ! J’y croyais plus… J’espérais plus…
Il m’a serrée contre lui. A cherché mes lèvres.
– Attends, Damien ! Attends ! D’abord il faut qu’on parle…
– Après… Après…
– Non… Maintenant… Tout de suite… C’est important… Très…
Il m’a écoutée sans m’interrompre. Jusqu’au bout.
– C’est tout ? Je m’attendais à pire…
– À pire ?
– Oui… Que tu me dises que c’était fini nous deux… Que tu voulais plus qu’on se voie… Du moment que c’est pas le cas, le reste…
– Mais est-ce que tu te rends compte enfin, Damien ? Il a nos vidéos… Il peut en faire ce qu’il veut… Les montrer à Laurent…
– Ce n’est apparemment pas son intention…
– C’est pas une raison enfin ! Ce sont NOS vidéos. Il a pas à les avoir… À m’obliger à les regarder avec lui…
– Le moyen de l’en empêcher ?
– Il doit bien y en avoir un… Il doit bien y avoir une solution…
– Peut-être… Mais dans l’immédiat je vois pas laquelle…
– Cherche ! Tu vas chercher… Promets-moi que tu vas chercher !
– Mais oui !
– Et tu vas trouver… Hein, que tu vas trouver ?
Il n’a pas répondu. Il m’a attirée contre lui. Et je me suis abandonnée… Et j’ai hurlé mon plaisir, agrippée à lui… Il est resté en moi, m’a souri…
– L’esssentiel, c’est nous ! Ce qu’on vit nous… Que rien ne nous sépare jamais… Non, tu crois pas ?
– Si, Damien, si !
Et je me suis sentie seule. Épouvantablement seule…

jeudi 21 avril 2016

Escobarines: Le retour du voisin (4)

– Non, laisse-moi, Baptiste, s’il te plaît !
– Mais qu’est-ce t’as ?
– Rien ! J’ai rien. Seulement je voulais pas que tu viennes aujourd’hui. Je te l’avais dit…
– J’avais trop envie…
– Oui, ben ça tombe mal. Faut que je parte…
– Tu vas où ?
– À côté. Chez le voisin. Il m’attend.
– Il t’attend ? Comment ça il t’attend ? Pourquoi ?
– Comme si tu le savais pas !
– À cause d’avant-hier ? Il était là ? Il nous a entendus ? C’est ça ?
– T’es très perspicace quand tu veux…
– Il va pas encore te… ?
– Me flanquer une fessée ? Ben, si ! Si ! Justement… Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?
– Mais rien. J’ai rien dit…
– Tu veux que je fasse quoi ? Que je l’envoie sur les roses ? Il est complètement tordu ce mec. Dans le quart d’heure qui suit il aura appelé Martial. Il lui aura tout déballé. C’est ça que tu veux ? D’autant que Martial n’aura rien de plus pressé que de mettre Lydie au courant. Ah, on sera dans de beaux draps tous les deux. Toi comme moi. Alors il y a pas trente-six solutions. Faut que j’en passe par ce qu’il a décidé… Et c’est vraiment pas de gaieté de cœur, je t’assure !

– Alors ?
– Il est là, à côté…
– Il a réagi comment ?
– Comme prévu. Il a pas vraiment protesté. Même pas pour la forme. Trop content de pouvoir en profiter, tu parles ! Mais ça, j’en étais sûre…
– Bon, ben il y a plus qu’à alors !
– Il y a plus qu’à… Oui. Comme tu dis…
– Allez, mets-nous ce petit derrière à l’air…

– Ouche ! T’as pas fait semblant, dis donc !
– Me dis pas que ça t’a pas plu…
– Si ! Oh, si !
– Ah, pour piailler, t’as piaillé. Il en a eu pour son argent ton Baptiste à côté, ça, on peut pas dire…
– Il doit être dans un état !
– Et comme c’est aussi manifestement ton cas… Un vrai feu d’artifice, ça va être tous les deux…
– Je sais pas…
– Mais si, tu sais ! Allez, file, il t’attend…

– T’as eu mal ?
– Ah, ben ça !
– Fais voir !
– Non. Laisse-moi, Baptiste ! Laisse-moi, j’te dis !
– Hein ? Mais pourquoi ?
– Non, mais attends ! Je viens de m’en prendre une, il y a pas cinq minutes, parce qu’on a baisé et toi, tu veux qu’on recommence aussi sec derrière. T’es inconscient ou quoi ? C’est pour le coup qu’il va pas me louper…
– Je veux juste regarder…
– Ben, voyons ! Non. Je te connais. Je sais comment ça va forcément finir. Et, à l’arrivée, qui c’est qui va encore trinquer, ben, c’est moi…
– Oui, alors, si je comprends bien, c’est fini nous deux, quoi !
– Tout de suite les grands mots… Mais non, c’est pas fini, non ! Bien sûr que non ! Seulement faut qu’on envisage d’autres solutions… J’ai pas envie de me faire tanner le derrière chaque fois qu’on va tirer un coup ensemble…
– D’autres solutions ?
– Se voir ailleurs… Par exemple… Bon, mais on en reparlera… Je t’appelle ce soir sans faute… Va vite en attendant… Qu’on soit pas tentés…

– C’est moi !
– Je vois ça, oui !
– Je l’ai expédié Baptiste…
– Le pauvre !
– Ah, ben non, attends, normal que ce soit toi qu’en profites. T’as fait tout le boulot…
– Même que je peaufinerais bien encore un peu avant…
– Oh, ça, tant que tu veux ! Avec plaisir…

lundi 18 avril 2016

La clef USB (5)

Je ne m’en étais pas si mal sortie finalement ! Parce qu’en débarquant comme ça à l’improviste, en exigeant que je me regarde, sur cette vidéo, me caresser sous la douche, et ça en se tenant à mes côtés, son but était à l’évidence de me déstabiliser, de s’offrir le spectacle de ma confusion. De me mettre délibérément mal à l’aise. Je ne lui avais pas fait ce plaisir. J’étais restée impassible. Impénétrable. Je n’avais rien laissé transparaître de ce que j’éprouvais. Même si, à l’intérieur, c’était loin d’être simple. Comment aurait-ce pu l’être ?

Et maintenant ? Maintenant il voulait me voir me caresser « en vrai ». Ou, plus exactement, me voir jouir « en vrai » devant lui. Il s’en délectait manifestement par avance. Oui, ben alors ça, il pouvait toujours courir. Je ferais mécaniquement les gestes : bien obligée. Mais quant à avoir vraiment un orgasme, c’était totalement exclu. J’allais me contrôler, mobiliser toute mon énergie pour m’en empêcher et j’y arriverais. J’y arriverais ? J’étais bien sûre de moi, là ! Non, parce que, dans mon cas, le jet de la douche s’était toujours avéré particulièrement efficace. Et il ne suffisait pas de décider qu’il en irait cette fois-ci autrement pour que… D’un coup de baguette magique… Allais-je être vraiment capable de me maîtriser ? C’était là toute la question. J’en étais, par moments, fermement convaincue et j’étais, à d’autres moments, tout aussi fermement convaincue du contraire. De toute façon je n’allais pas tarder à être fixée. Et j’appréhendais… Comment j’appréhendais ! Finalement c’était peut-être le but qu’il visait en m’annonçant le programme aussi longtemps à l’avance : me faire vivre, plus d’une semaine durant, dans la hantise de moi-même.

Il avait rencontré Laurent. Il avait rencontré mon mari. Il s’est empressé, à peine arrivé, de me l’annoncer…
– Trois fois, en une semaine, que je tombe sur lui… Et par hasard… C’est fou ça, non ? On s’est taillé une petite bavette du coup tous les deux et on va s’inscrire au tennis. Non, parce qu’on finirait par s’encroûter à force… Bon, mais c’est pas tout ça… Dis un chiffre…
– Quatre. Pourquoi ?
– Alors la vidéo quatre on va se regarder…
– Hein ? Mais…
– Mais quoi ? Ah, le charmant petit spectacle que tu devais m’offrir sous la douche ? Tu tiens absolument à ce que ce soit maintenant ? Tout de suite ?
Ah, mais non ! Non… Pas du tout… Et même…
– Eh bien alors ! Un autre jour tu me montreras ça… On a tout notre temps… Il y a rien qui presse… Allez, tu nous la mets cette quatre ?
J’ai très vite cliqué sur la trois. Avec un peu de chance il ne s’en apercevrait pas. Parce que la quatre ! Ah, non, pas la quatre ! Seulement il avait l’œil…
– Qu’est-ce tu fais ? Non, non… La quatre on a dit…
J’ai dû me résoudre à la lancer, la mort dans l’âme…
– Ah, c’est Madame qui chevauche… Et tu mets du cœur à l’ouvrage, dis donc ! Tu rechignes pas à la besogne… Mais… Mais c’est pas Laurent le monsieur… Qui c’est ?
– Tu connais pas…
– Oui, ben ça, je vois bien que je connais pas… Mais ça me dit pas qui c’est…
– Un ami…
– Un ami très intime alors parce que… Ah, chut ! Ça y est, écoute, tu jouis ! Regarde ! Mais regarde !
En silence. Jusqu’au bout. Il a hoché la tête…
– Ça fait pas semblant avec toi, dis donc ! Ça relève carrément du raz de marée quand tu prends ton pied, oui ! Bon, mais ça me dit toujours pas qui c’est ce type… On s’en fout, remarque ! Ce que je vois surtout, moi, dans cette histoire, c’est que ce pauvre Laurent est cocu… Et on change complètement de registre, là… Ça va m’obliger à me montrer beaucoup plus exigeant à ton égard…
Il entendait quoi par là ? Je n’ai pas osé lui poser la question. Il a posé la main sur la souris…
– En attendant on va se la remettre cette vidéo… Elle en vaut sacrément la peine…

jeudi 14 avril 2016

Escobarines: Le retour du voisin (3)


– Qu’est-ce qu’on a fait, Marco ?
– L’amour…
– Idiot ! Je sais bien… Non, mais tu te rends compte ? J’ai Martial. J’ai Baptiste. Et maintenant…
– Tu m’as moi !
– Non, écoute ! On oublie tout. Il ne s’est rien passé. C’était juste une parenthèse. C’est ça, marre-toi !
– Oh, oui, je me marre, oui. Parce que ce sont des mots tout ça. Histoire de te donner bonne conscience… Mais je te parie ce que tu veux qu’avant trois jours tu seras venue me supplier de te reflanquer une fessée…
– T’es bien sûr de toi !
– J’ai tort ?
– Oui… Non… C’est complètement fou ce truc-là ! Jamais j’aurais pensé… Ça te met dans un état !
– Une fois qu’on y a goûté, tu verras, on ne peut plus s’en passer…
– Il va bien falloir pourtant…
– Les absences de Martial sont suffisamment fréquentes et suffisamment longues pour qu’on puisse…
– Oui, mais quand Martial n’est pas là…
– Baptiste rapplique dans le quart d’heure qui suit. Je sais… Je suis bien placé pour… En ce qui concerne Baptiste, il y a deux solutions. Ou bien tu le largues…
– Oh, non ! Pas mon petit croquant d’amour… Non… Ça, c’est complètement exclu…
– Alors tu le mets au courant…
– Ça va pas, non ?
– Ben si ! Tu me présentes comme le méchant de service… Dont t’as dû acheter le silence… Une bonne fessée ça t’a coûté… C’était vraiment pas une partie de plaisir, mais bon, le moyen de faire autrement ? Après, tu improvises… En fonction de ses réactions, l’objectif à atteindre étant…
– Qu’on puisse continuer… Oui, ben ça, j’ai compris…

– Alors ?
– Oh, ben alors d’abord il m’a pas crue… Il a fallu que je lui montre… Ça s’était un peu estompé, mais quand même, il pouvait pas y avoir de doute… Il a regardé… Un bon moment… « Le salaud ! Non, mais quel salaud ! ». Il en a suivi les contours… Et puis il s’est levé d’un bond… « Je vais lui casser la gueule à ce mec ! » « Mais non, Baptiste, enfin ! C’est la dernière des choses à faire… Il va vouloir se venger… Mettre Martial au courant… » Il a fini par se laisser convaincre… Non sans mal… Et puis il m’a soumise à un véritable interrogatoire : ça s’était passé comment ? Qu’est-ce que t’avais dit ? Qu’est-ce que j’avais répondu ? Et ma culotte ? Tu me l’avais baissée ou c’était moi qui l’avais retirée ? Longtemps t’avais tapé ? Fort ? J’avais crié ? Je m’étais débattue ? « Ça t’a fait mal ? » « Ah, ben ça ! » « Vraiment très mal ? » « C’est rien de le dire… » « Ma pauvre chérie ! » Il m’a prise dans ses bras… Une de ces triques il avait !
– Ça l’avait excité tout ça…
– Et pas qu’un peu ! Ah, il en était de la comédie… Je peux te dire qu’ils ont vite été expédiés les préliminaires… Et que pour gicler il a pas mis des heures…
– T’étais pas mal non plus dans ton genre… C’était, disons, tonitruant…
– Ce qu’il n’a pas manqué de pointer du doigt, lui aussi… « Ben heureusement qu’il est pas là l’autre à côté… » J’en savais rien, moi, si t’étais là ou pas… Je te surveillais pas… « Hein ! Mais je croyais qu’il bossait ! » « Ben oui, il bosse, oui ! Mais il a des horaires bizarres… Qui changent sans arrêt… » « Mais il est peut-être là alors ! Il a peut-être entendu… » C’était possible, oui… « Et dans ce cas-là, il va vouloir recommencer, tu crois ? T’en remettre une de fessée ? » Qu’est-ce qu’il voulait que j’en sache ? J’étais pas dans ta tête… Mais il y avait des chances, oui… T’étais bien le genre à ça… « Mais alors… » « Écoute, Baptiste, j’ai vraiment pas envie de me prendre le chou avec ça… Ni de vivre à travers lui… S’il est là ou pas là… Ce qu’il va penser ou pas penser… Faire ou pas faire… J’aviserai, éventuellement, le moment venu. Et puis voilà ! » Il n’a pas insisté. Il s’est perdu dans ses pensées… Et puis il a voulu qu’on recommence…
– En plus intense encore, je sais… Ce qui signifie qu’il en a strictement rien à battre de t’exposer à en recevoir une autre…
– C’est pas qu’il en a rien à battre… C’est qu’il en crève d’envie…
– Ce qui n’est pas pour te déplaire, avoue !
– Disons que… vu comme ça me le met en forme…
– Il pourrait l’être davantage encore…
– Comment ça ?
– Ta prochaine fessée, on pourrait la lui donner carrément à entendre… J’ai ma petite idée… Je te dirai…
– Oh, oui ! Génial ! Sauf que… ça va faire loin… Qu’après-demain il revient… J’ai mérité avant… Non, tu crois pas ? T’as bien entendu tout-à-l’heure…

lundi 11 avril 2016

La clef USB (4)

Je m’étais attendue à pire. À bien pire. Mais s’il devait se contenter de commenter comme ça mes vidéos par téléphone, j’allais m’en tirer à bon compte finalement. Surtout que rien ne m’obligeait à les regarder en sa compagnie : l’essentiel, c’était qu’il soit persuadé que je le faisais ! Ni à l’écouter délirer : il me suffisait de laisser traîner une oreille distraite, au cas où il aurait sollicité une réaction de ma part, et de faire autre chose pendant ce temps-là.
Je ne me faisais pas d’illusions : ce serait quand même une épreuve. Le savoir penché, comme ça, en permanence, sur ce que j’avais de plus intime, sur ce qui n’aurait jamais dû appartenir qu’à moi et, dans une moindre mesure, à Damien ! Imaginer qu’il s’en repaissait goulûment et peut-être – sûrement – s’en servait pour se donner du plaisir. Mais le moyen de l’en empêcher ? Et à qui la faute ? Si je ne m’étais pas montrée aussi inconséquente aussi ! Si je ne lui avais pas tendu moi-même les cordes pour me faire battre…

Il m’a laissée un peu plus d’une semaine sans nouvelles. Ce qui ne m’a pas surprise outre mesure. Ça faisait, à l’évidence, partie de sa « stratégie ». Dans quel but au juste ? Je n’ai pas cherché à approfondir vraiment la question. Ça ne changeait de toute façon pas grand chose à la situation…
Et puis, un matin…
– C’est moi !
Ben oui… J’avais reconnu sa voix, oui !
– Je suis devant ta porte. Tu viens m’ouvrir ?
Devant ma porte ? Qu’est-ce que ? Ah, mais ça changeait tout, ça !
Il arborait un large sourire…
– Oui, parce que j’ai pensé… Ce serait quand même nettement plus sympa de regarder tout ça ensemble. Côte à côte. Non, tu trouves pas ?
Je trouvais pas, non.
– Est-ce que j’ai le choix ?
– Pas vraiment, non.
Je n’ai pas cherché à discuter. À quoi bon ? Il était en position de force. Il me tenait. Inutile de lui offrir le plaisir de m’infliger une nouvelle défaite.
Et je me suis assise à l’ordi. Je l’ai allumé.
– Ben, vas-y ! Lance ! Qu’est-ce t’attends ?
Les première images – celles qu’il avait déjà commentées – il les a regardées, debout derrière moi.
– T’as vraiment un corps de rêve, hein !
À l’écran, j’entrais sous la douche.
– Dont tu es amoureuse… Comme je comprends ça !
Je m’asseyais, m’installais confortablement et me ciblais aussitôt, sans attendre, avec le jet.
Il a ri…
– Ça pressait, dis donc !
C’était vrai. Ça pressait ce jour-là. À cause de ce qui s’était passé au boulot avec Romain. J’avais envie. Une envie folle. En pensant à lui.
Il a encore ri…
– Oui, mets-le bien à fond le jet… T’en profiteras mieux…
Quel spectacle je lui offrais ! Non, mais quel spectacle ! Une obsédée ! Une véritable obsédée… Ouverte… Cabrée… Obscène…
– Ça y est ! Ça vient… Ça perd pas de temps en tout cas avec toi, ah, on peut pas dire ! C’est toujours comme ça ? À toute allure ? J’adore ces petits cris que tu pousses… On dirait une bête blessée… Et puis tes yeux quand ça te submerge comme ça… Je m’en lasse pas… Finalement tant qu’on l’a pas vue jouir, on connaît pas vraiment une femme, hein !
Il m’a posé une main sur l’épaule…
– Tu sais ce qu’on pourrait faire la prochaine fois ? La même chose en live… En réel… Dans ta salle de bains… Ce serait génial, non ?
– Il n’en est pas question…
– Allons, Christina, allons ! Tu sais bien que tu n’es pas en position de me refuser quoi que ce soit…
Et sa main s’est appesantie un peu plus fort sur mon épaule…

jeudi 7 avril 2016

Excobarines: Le retour du voisin (2)

J’étais pas tranquille. Non, j’étais pas tranquille. Parce qu’il était pas fiable pour deux sous Marco. Il était capable de m’avoir fichu une fessée et d’aller tout lui raconter quand même à Martial. Et moi, j’aurais quoi comme recours ? Ben, rien du tout ! J’aurais plus qu’à la fermer. Parce que j’imaginais sa tête à Martial s’il apprenait qu’en plus j’avais essayé d’acheter le silence de Marco. Non, et puis il y avait pas que ça. Il y avait que c’était pas du tout ce à quoi je m’étais attendue une fessée. Ça faisait mal, oui, mais en même temps c’était pas si désagréable finalement. Est-ce qu’il s’en était rendu compte Marco ? Sans doute pas, parce que, le connaissant, s’il avait soupçonné quoi que ce soit, il se serait empressé de me le faire savoir. N’empêche qu’il valait quand même mieux en avoir le cœur net…
Et je suis allé frapper chez lui.
Il était encore en pyjama.
– Ah, c’est toi… Bien dormi ?
– Oui… Enfin non. J’ai pas arrêté de penser à des tas de trucs.
– Quel genre ?
– Tu vas pas lui dire pour Baptiste à Martial, hein, c’est sûr ?
– Je sais pas…
– Comment ça « tu sais pas » ? T’avais dit que…
– Une punition ça devait être cette fessée. Pas une partie de plaisir. Or, en fait, t’as pris allègrement ton pied.
– Hein ? Non, mais ça va pas ? T’es vraiment pas bien, toi, par moments.
– Je sais ce que je dis. Il se trouve qu’après ton départ j’ai découvert, sur mon pantalon, deux petites taches sur l’origine desquelles il ne peut pas y avoir le moindre doute.
– Tu te le seras imaginé.
– Je me suis rien imaginé du tout. Non, mais c’est de ma faute aussi ! J’ai pas tapé assez fort. J’aurais tapé plus fort… Alors tu sais pas le mieux ? Ben, c’est qu’on recommence. Et que cette fois-ci, je mette le paquet…
– Ah, non, hein ! Non…
Il s’est assis.
– À moins que tu préfères que je lui raconte tout à Martial. Eh, ben alors ! Allez, viens là ! Perdons pas de temps. De toute façon t’as pas le choix… Si tu veux que je te garde le silence…
J’ai fait un pas en avant. Un autre. Je me suis arrêtée. Un troisième. Encore un. Il m’a attrapée par un poignet, attirée vers lui, mes genoux contre les siens. Il m’a gardée comme ça, un long moment, sans rien dire. Et puis il a saisi, à deux mains, le rebord de mon pull, l’a lentement, très lentement, relevé, a fait passer la tête, l’a jeté derrière lui. Au tour de la jupe. Qu’il a dégrafée. Qui est tombée à mes pieds. Une interminable attente avant que ses pouces ne se glissent sous l’élastique de ma culotte, ne s’y attardent. Il l’a fait descendre. Jusqu’à mi-cuisses. Jusqu’en bas. D’instinct, j’ai ramené mes mains devant moi. Il s’en est fermement emparé, les a repoussées sur le côté, est monté chercher l’agrafe du soutien-gorge dans le dos, m’en a fait glisser les bretelles le long des bras.
– Tourne-toi ! Oui, j’ai vraiment été en dessous de tout hier… T’es à peine marquée. Oh, mais on va arranger ça…
Il m’a fait basculer en travers de ses genoux, m’y a installée…
– Là… T’es bien ? .T’es prête ? Alors, feu !
Cinq ou six claques à toute volée. Sèches. Cuisantes. Il s’est arrêté, m’a posé une main sur la fesse. L’y a doucement promenée. Longtemps.
Et puis à nouveau, d’un seul coup, ça s’est abattu. En pluie. En grêle. Une bonne douzaine. Brûlant. Je me suis cabrée. J’ai crié. Ça s’est encore arrêté. Encore sa main. Qui s’est approprié mon derrière. Qui l’a parcouru. Palpé. Du bout du pouce, il s’est insinué dans le sillon entre les fesses qu’il a descendu, qu’il a remonté. Un gémissement m’a échappé. Je me suis légèrement soulevée. Il a ri…
– Vilaine !
Et ça a dégringolé. Plus déterminé encore. Une avalanche de claques. À pleines fesses. Un déluge. Auquel je me suis voluptueusement offerte. Sans retenue. Sans pudeur. Un déluge qui s’est brusquement interrompu. Je n’ai pas pu retenir un murmure de désappointement. Il a encore ri. Sa main. Ses doigts sur moi…
– Tu es trempée…
Il a musardé à l’entrée. Me l’a parcourue et reparcourue. Lissée. Ourlée. S’y est enfin engouffré. Je l’ai accueilli avec un soupir de bien-être… Me suis pressée contre lui. Contre la bosse dans son pantalon. Et j’ai joui sur ses doigts. Un plaisir intense. Éperdu.
– Merci…
Il m’a fait relever… Portée jusque sur son lit…
 

lundi 4 avril 2016

La clef USB (3)

Le lendemain, j’ai attendu son appel toute la journée. Sur des charbons ardents. À tout tourner et retourner indéfiniment dans ma tête. Il voulait pas coucher. Bon… C’était au moins ça. Mais alors il voulait quoi au juste ? J’échafaudais les hypothèses les plus folles. Je lui prêtais les intentions les plus tordues. N'importe comment j’étais à sa merci. De quelque manière que je retourne la question, j’en arrivais, de toute façon, toujours à la même conclusion : il me faudrait, bon gré mal gré, en passer par ce qu’il aurait décidé. Quoi que ce soit. Je ne pouvais pas me permettre de courir le moindre risque. Ces vidéos entre les mains de Laurent ? Du reste de la famille ? De je ne sais trop qui encore ? Non… Non. Ce n’était pas même envisageable.

Le surlendemain, il ne s’est pas manifesté non plus. Il n’appellerait peut-être pas. Peut-être qu’il avait changé d’idée. Qu’il avait juste voulu me faire peur. Me donner une leçon. Que ça allait en rester là. Tu rêves, ma pauvre Christina, tu rêves. Tu prends tes désirs pour des réalités. Comme si c’était le genre de type à renoncer comme ça. Non. Il jouait au chat et à la souris, oui, plutôt. Ce qui devait follement l’amuser.
En toute fin d’après-midi, mon téléphone a malgré tout sonné. Ce n’était pas Antoine. C’était Damien, un Damien enjôleur.
– On se voit quand ?
Oui, oh ben alors ça, j’en savais rien du tout ! Pour le moment, j’avais d’autres chats à fouetter.
Il en est resté tout interloqué.
– Mais qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qui t’arrive ?
– Oh, mais rien ! Je suis fatiguée. Et puis j’ai des soucis…
– Quel genre ? Dis-moi !
– Écoute, sois gentil. J’ai vraiment pas envie de ressasser tout ça…
Il n’a pas insisté. Il a raccroché.
Damien, c’était vraiment la dernière personne avec qui j’avais envie d’en parler. Parce que sans lui, sans tous ces petits jeux auxquels il a voulu qu’on se livre ensemble, elles n’auraient jamais vu le jour ces vidéos.

Antoine a fini par appeler. Le jeudi.
– Christina ? C’est moi, Antoine. Ça va ?
Il avait de ces questions !
– T’as ta clef à portée de main, là ? Non ? Va la chercher ! Je t’attends… Là ? Ça y est ? Alors tu mets la vidéo numéro 5. Ensemble on va se la regarder. On va bien s’amuser, tu vas voir…
C’était l’une de celles dans la salle de bains. Moindre mal au fond. Même si…
Il a attaqué d’emblée.
– J’aime trop ça la façon dont tu te désapes. Si, c’est vrai, hein ! Parce qu’en général, pour aller à la douche, une nana elle s’arrache tout en vrac. Elle se dépiaute. Pas toi ! Non. Toi, tu prends tout ton temps. Un par un t’enlèves. C’est super. On peut en profiter à fond comme ça. Ah, tes seins ! Tu sais que je les adore ? Si, si ! Même que je me les suis mis en fond d’écran. Pour les avoir toute la journée à portée de main. Je passe un temps fou à les regarder. C’est comme tes fesses. Tiens, ben les v’là justement. Le temps de poser la culotte… Tu vas te pencher en avant et me laisser entrevoir ton petit réduit d’amour. C’est un des moments que je préfère. Souvent j’y fais arrêt sur image. Et j’éternise. Tout finit par arriver n’empêche. Parce que ça fait trois ans – depuis que je te connais, depuis que t’es en couple avec Laurent – que j’essaie désespérément de deviner comment t’es faite sous tes petites robes affriolantes et tes corsages envoûtants. Et ça y est. J’y suis parvenu. Bien au-delà de mes espérances. Bon, mais on discute… On discute… Et, pendant ce temps-là, on est entrés dans le vif du sujet. Te v’là sous la douche. Et alors là ce que tu vas y faire sous la douche… On le verra demain. Pas tout d’un coup. Pas tout le même jour. Il faut savoir savourer. À petites gorgées gourmandes.