jeudi 28 octobre 2010

Escobarines: Fringues ( 2 )






- T’aurais dû venir… Comment ça valait le coup !…
- Ah oui alors !… Parce qu’on a trouvé le point faible là… Je peux te dire qu’il y est pas resté derrière son comptoir à regarder tout ça de loin comme il fait d’habitude… Comment il a rappliqué !… Toutes les trente secondes il était là derrière le rideau… Qu’on avait laissé entrebaîllé juste ce qu’il fallait… A nous demander si on avait pas besoin d’un conseil… Fallait pas qu’on hésite, hein, surtout !… D’ailleurs il venait de recevoir de nouveaux modèles… Si on voulait les essayer… Ca nous engageait à rien… Et patati… Et patata… Il partait… Il revenait… Il arrêtait pas… Et il se rinçait l’œil tant qu’il pouvait… Je te le regardais faire dicrètement dans la glace… Un vrai meurt-de-faim…
- C’était trop génial… Parce que ce type il est toujours hyper sûr de lui… T’as l’impression qu’il y a rien qui peut l’atteindre… Qu’il y a aucune prise nulle part… Et là, d’un seul coup tu le vois qui perd complètement pied… Tout ça juste parce que je me suis amenée avec le derrière tout rouge…
- Tu lui as montré ?!…
- Ca va pas, non ?… Pour qui tu me prends ?… Il a juste vu ce qui débordait de la culotte…
- C’était déjà pas si mal, moi, je trouve pour une première fois…
- Et elle qu’arrêtait pas !… Qui faisait sans arrêt semblant de pas s’apercevoir qu’il était revenu derrière le rideau… Qui faisait ses commentaires tout fort… « - Wouahh là là !… Cette tannée que t’as prise… Faut dire que tu l’avais cherchée… Que tu l’as pas volée… En tout cas comment j’aurais pas aimé être à ta place !… Se faire déculotter comme ça devant tout le monde et s’en ramasser une… Oh, la honte !… »… Il transpirait à grosses gouttes l’autre… Et il était rouge, mais rouge !…
- Il doit s’en poser des questions à l’heure qu’il est…
- Il se les pose peut-être, mais à nous il les a pas posées…
- Il s’en est fallu de peu, moi, je crois…
- Suffirait de lui en remettre une bonne couche…
- Vous êtes folles , les filles !… Vous êtes complètement folles… Vous faire mal comme ça juste pour qu’un type que vous connaissez à peine se pose des question… Faut vraiment que vous soyez cinglées…
- Oh, mais ça fait pas mal !… Enfin, si !… Dans un sens… Mais dans un autre, non… Au contraire… Ca fait du bien parce que ça fait mal justement… Je sais pas vraiment expliquer… T’en as jamais reçu ?…
- Jamais, non…
- Tu devrais essayer… Tu te rendrais compte par toi-même comme ça… Tu veux que je te le fasse ?…
- Oh non, non !… Si jamais il y a quelqu’un qu’arrive…
- Ici ?… Il passe jamais personne…
- Oui, mais alors doucement, hein !… Et si je te dis d’arrêter t’arrêtes… Promis ?…
- Juré… Allez, viens !…

- Alors ?!… Qu’est-ce t’en dis ?…
- Ben…
- Oui, hein !… C’était pas… « - Arrête !… » C’était plutôt… « Continue et tape plus fort ! »… T’as aimé… Tu viendras pas dire le contraire…
- J’aurais jamais cru…
- En tout cas comment elle te l’a mis rouge… Nettement plus que le mien hier… Qu’est-ce tu fais ?…
- Je me rhabille… Faut que j’aille quelque part… J’avais complètement oublié…

- Cette demoiselle ?…
- Il y a des copines à moi qui sont venues essayer des jeans hier…
- En effet, oui…
- J’aurais pu les voir ?… Les mêmes…
- Bien sûr… Et si vous souhaitez essayer c’est là-bas… Juste en face…

- J’en étais sûr… Non, mais à quoi vous jouez toutes les trois ?…
- A quoi on joue ?… Je comprends pas…
- Oh, si !… Si, tu comprends… Tu comprends même très bien… Qu’est-ce que vous cherchez en venant me coller comme ça vos petits derrières cramoisis sous le nez ?… A ce que moi aussi je vous en colle une ?… C’est ça ?… Oh, mais avec plaisir… Suffit de demander… Regarde-moi !… Dans les yeux… C’est ça que tu veux ?… C’est ça que t’es venue chercher ?… Hein ?… Eh bien réponds !…
- Oui...
- Eh bien allez !…
- Ici ?… Maintenant ?… Mais s’il y a quelqu’un qui rentre ?…
- C’est un risque à courir… Ca ajoute un peu de piquant… Allez !… On baisse cette petite culotte… Tu sais que tu as un très beau cul ?!… Et que le rouge lui va vraiment très bien ?… Ce serait dommage de pas en remettre une couche…

- Je voudrais vous demander ?… Vous allez leur dire ?… Si elles reviennent… Vous leur raconterez ?…
- Tu voudrais ?…
- Oh non, non…
- Alors motus et bouche cousue…
- Et moi?... Je pourrai revenir ?…
- Quand tu voudras... Il y a aucun problème… Ca, c'est quand tu voudras...
( à suivre )

lundi 25 octobre 2010

Colocataires3 ( 18 )

Quand je me suis réveillé il était pas loin de midi. Elle me regardait dormir, blottie contre moi…
- Faudrait que ça finisse jamais une nuit comme ça…
- Il y en aura d’autres… Autant d’autres qu’on voudra…
- J’aime mieux pas y penser à après… Juste profiter de maintenant… C’est déjà tellement bien… Jamais j’aurais espéré connaître un jour quelque chose d’aussi bien… Mais tu sais, faut pas que t’ailles t’imaginer des trucs…
- Quels trucs ?…
- Que je suis collante… Que si un jour t’as plus envie de me voir je te ferai la grande scène du trois… Que j’irai te harceler partout pour que tu me reprennes… Je serai triste, oui, ça c’est sûr, mais je chercherai jamais à t’obliger à rien… Jamais… Je te promets…
Elle s’est tue. A posé sa main sur mon torse. M’a caressé, du bout du pouce, la pointe du sein…
- N’empêche que chez vous aussi ça grimpe quand on y touche… Pas autant que chez nous… Pas aussi fort… Mais ça grimpe quand même… Comment j’aimerais ça sentir ce que vous sentez, vous, les hommes… Au moins une fois… Juste pour savoir… Comme quand vous êtes avec Allan… Ca vous fait quoi ?… Non… Dites rien… Me dites pas… Ca s’explique pas ces choses-là… Ca peut seulement se sentir…
- En tout cas il y en a deux hier soir ils ont dû sacrément nous attendre !…
- Ca, c’est sûr !… On a été vaches quand même… On aurait au moins pu les prévenir…
- T’inquiète pas qu’ils ont dû trouver à s’occuper sans nous…
- Oh, ça oui !… De toute façon je m’en fous un peu d’eux… Ils peuvent bien faire ce qu’ils veulent… Ce qui compte pour moi c’est comment on a passé une nuit de folie tous les deux… Et vous savez pas ce qui serait bien maintenant ?… C’est qu’on se trouve quelqu’un en dehors d’eux… Un type qu’ils connaîtraient pas et avec qui tu ferais des choses juste pour moi… Tu voudrais ?…
- Ca dépendrait…
- De quoi ?…
- Du type… Tu penses à quelqu’un en particulier ?…
- Non… Enfin, si !… Quand même un peu… Un bon copain à moi… Mais juste un copain… Il me fait ses confidences souvent… Alors je sais que ça le tenterait… Je vous le présenterai si vous voulez… Mais seulement si vous voulez… Faut pas que vous vous sentiez forcé…
- Et il faut que toi tu en aies très envie… Vraiment très très envie de nous voir ensemble… Il y a que ça qui peut me donner envie à moi…
- Oui, ben alors là !… Pour ça…

- Vous étiez où ?… Remarquez, je sais pas trop pourquoi je vous pose la question vu que je me doute… Avec cette Amandine vous étiez… C’est ça, hein ?…. Oh, mais vous faites bien ce que vous voulez… Moi, j’m’en fous… Mais il y en a deux autres je peux vous dire qu’ils ont pas apprécié… Mais alors là pas du tout… Ils ont débarqué sur le coup de dix heures du soir remontés comme des pendules… « - Ils sont pas là ?… Ils sont où ?… »… Ils ont regardé dans toutes les pièces, claqué toutes les portes… « - Et même pas moyen de les joindre… Ils ont éteint leurs portables… Oh, mais ça ils vont nous le payer… Attends qu’on les retrouve… Ils peuvent pas être bien loin… »… Et vous en avez pris pour votre grade… Je peux vous dire que vous en avez pris pour votre grade… Comment elles ont dû vous siffler les oreilles !… Et ils sont repartis comme ils étaient venus… Bon, mais alors comment on va faire du coup pour la nuit ?…
- Pour la nuit ?… Quelle nuit ?…
- Ben normalement c’est ma semaine… Et ça m’en a fait une de moins de nuit à dormir avec vous… Je la récupérerai sur la semaine suivante ?…
- Oui… Ben on verra ça le moment venu…

- Tu viens ?… Faut que je te cause…
Dans la salle de bains où elle a filé sous la douche…
- Bon, alors écoute… Je vais pas te faire de grands discours… Il y a d’abord eu cette histoire de nuits à partager avec Victorine… Par là-dessus est venu se greffer ce qui s’est passé hier soir… Sur quoi j’ai pas du tout l’intention d’épiloguer… Tu fais ce que tu veux… T’es majeur et vacciné… Sauf que… autant te prévenir tout de suite… Moi, ça me convient pas… Mais alors là pas du tout… Où il a disparu le shampooing ?… C’est encore l’autre qui l’a changé de place… A tous les coups… Dix mille fois je lui ai dit… Tu veux pas regarder s’il est pas sous le lavabo ?… Ah, merci… Oui, je vais être très claire… Si ça doit continuer sur ce registre-là c’est très simple moi j’me casse… Pas question que je supporte ça… Que je sois la cinquième roue du carrosse… Après tout ce qu’on a vécu ensemble… Alors à toi de voir… Réfléchis !… Mais réfléchis bien… Si je dois partir ce sera sans le moindre espoir de retour… Tu sais ce que ça implique à plus ou moins long terme… Tu vas te retrouver tout seul… Parce que ce n’est ni Victorine ni Amandine… Mais on va pas revenir là-dessus… Tu sais ce que j’en pense… Passe-moi mon peignoir, tiens, plutôt… Ou plutôt non… Je vais rester comme ça pour me maquiller… Vu que c’est peut-être une des toutes dernières fois que t’as l’occasion de me voir à poil…

jeudi 21 octobre 2010

Escobarines: Fringues






- Des après-midi entières j’y passerais, moi, à essayer des fringues…
- T’es pas la seule…
- Vous êtes trop dans votre genre quand même, les filles !… Vous l’avez mis dans un état le type du magasin… Comment il était rouge et qu’il transpirait !…
- Ben quoi ?!… On avait tiré le rideau…
- Aux deux tiers… Et encore…
- On l’avait fait exprès, remarque !…
- Mais en faisant quand même semblant que non… Pour quoi on passerait sinon ?…
- En attendant celui-là j’ai vraiment cru que vous alliez lui faire avoir un malaise à un moment… Il te respirait à une vitesse !…
- Ah oui ?… Quand ?…
- Quand t’as baissé ta culotte en même temps que le jean…
- C’était pas de ma faute… Il serrait trop ce truc…
- Tu parles que c’était pas ta faute…
- Disons… Pas complètement ma faute… N’importe comment personne l’obligeait à regarder, hein !…
- De toute façon je crois pas qu’on y retourne…
- Il y a nettement mieux ailleurs…
- Celui tout en haut de l’avenue, par exemple…
- Tu peux pas comparer, attends !… Il a tout pour lui ce bonhomme… Tout… Discret… Distingué… Et puis classe, mais classe…
- Et beau en plus pour dire qu’il a au moins cinquante ans…
- Jamais il a l’air de se rendre compte de quoi que ce soit quand on essaie les sapes dans les cabines…
- Et pourtant !…
- Tant qu’on veut on peut lui montrer du coup…
- Et on s’en prive pas…
- Il y a quand même des fois où je me dis que j’aimerais bien qu’il fasse un peu voir qu’il s’aperçoit de quelque chose… Où ça donne envie de le bousculer un peu…
- Tu te rappelles le jour où il nous menacées de nous donner la fessée ?...
- Un peu que je me rappelle !…
- Qu’est-ce que vous aviez fait ?…
- Dégringoler un portant… Il y avait tout d’éparpillé par terre…
- Et il vous l’a donnée ?…
- Oh, ben non !… Non… Il plaisantait… Quoique…
- Quoique, oui… C’est pas l’envie de nous la donner qui devait lui manquer…
- T’imagines si on se pointait là-bas pour essayer des sapes avec le derrière tout rouge ?… Ca le ferait réagir, tu crois ?…
- Peut-être… Sûrement… J’en sais rien en fait…
- Il serait bien obligé de se demander pourquoi on l’a reçue… Peut-être qu’il irait s’imaginer qu’on a piqué quelque part…
- Ou bien qu’on a été très vilaines… Qu’on s’amuse à se montrer à moitié toutes nues dans les cabines d’essayage…
- Ou même carrément à poil…
- Jamais on ferait une chose pareille…
- Oh non, c’est pas du tout notre style…
- Peut-être que ça le démangerait de savoir ce qui s’est passé… Qu’il nous poserait la question…
- Et on répondrait quoi ?…
- On verrait… On improviserait…
- Chiche qu’on le fait…
- Pas cap…
- Oh, alors là !…
- Vous êtes complètement folles, les filles !… Complètement…
- Qui c’est qui s’y colle ?…
- Toutes les deux ?…
- Ca va faire coup monté…
- On tire au sort alors ?…
- Pile, c’est toi !… Face c’est moi… Vas-y !… Lance-la la pièce, Aurore…
- Pile…
- C’est toi…
- Bon, ben allez !… Attends !… Sur le canapé je vais me mettre… Qu’au moins je sois confortable…
- Vous allez vraiment le faire ?…
- Evidemment qu’on va le faire…
- Oui, ben moi je viens pas avec vous… J’aurais bien trop honte…
- Pourquoi ?… C’est pas ton derrière à toi qui va prendre…
- Oui, mais quand même !… Quand même…
- Allez, vas-y, Bérénice !… Mais franchement, hein !… Que ce soit bien rouge… Qu’il croie que c’est une vraie fessée que j’ai reçue…
- Oh, mais il va le croire… Il va le croire… T’inquiète pas pour ça…

( à suivre )

lundi 18 octobre 2010

Colocataires3 ( 17 )

- Tu veux que je te dise ?… Eh ben elle est amoureuse d’Allan Amandine… Sauf qu’elle ose pas s’en donner encore complètement le droit… Mais le jour où lui, il lui montrera que de son côté aussi… Alors là !… Qu’est-ce t’as ?… T’en fais une tête !…
- Mais j’ai rien… Rien du tout… Pourquoi veux-tu que j’aie quelque chose ?…
- Oh si !… Oh si, t’as quelque chose !… Et je peux même te dire ce que c’est… C’est que tu t’es fait un film avec Amandine… T’as pas tous les torts non plus, remarque !… Elle t’a laissé croire… Elle t’a encouragé… Faut la comprendre… C’était toujours mieux que rien pour elle… Sauf que maintenant avec Allan tu peux pas soutenir la comparaison… Tu peux pas lutter avec quelqu’un qui a le même âge qu’elle et trente ans de moins que toi… Au bas mot… C’est pas possible… Et tu le sais très bien… T’as vu ce que ça a donné avec Melissa… Alors il est où l’intérêt de t’obstiner à aller t’enquiller dans des situations pareilles ?… Forcément sans issue… Si tu veux en garder auprès de toi des petites jeunes il faut pas que tu tombes amoureux d’elles… Ni elles de toi… Il te faut quelqu’un comme moi, quoi, en fait…
- Ou comme Victorine…
- Oui, oh, elle !… Elle est beaucoup trop instable… Et tu le sais très bien… Dans dix ans je suis bien tranquille qu’il y a belle lurette qu’elle aura disparu de ta vie… Qu’il y aura plus que moi avec toi… A condition que t’aies pas tout gâché d’ici là…

- Alors, cette première journée de boulot ?…
- Super !… Tout le monde a été absolument adorable avec moi…
- Vous êtes nombreuses ?…
- On n’est que deux femmes… Pour cinq hommes…
- Ah…
- Oh, mais allez pas vous imaginer des trucs, hein !… Ils sont tous en mains à ce qu’elle m’a dit Magali… Alors il se passera rien… Rien du tout… Là-dessus je suis bien décidée… J’ai pas du tout envie de retomber encore dans des galères…
- Espérons-le…
- Non, mais si, c’est vrai, hein !… De toute façon vous êtes là… Si ça dérape vous ferez ce qu’il faut… Vous me laisserez pas tomber, ça je le sais…

Elle m’a pris la main, l’a enfouie, avec la sienne, dans la poche de sa veste…
- Vous savez ce que je me disais en descendant ?… C’est que si un jour vous étiez plus là à m’attendre, à la sortie du boulot, qu’est-ce que je serais déçue !…
- Il y a aucune espèce de raison…
- Oh, si !… Au contraire… Il y en a plein des raisons… Et je me fais pas d’illusions… Ca arrivera forcément un jour… Mais bon !… J’ai pas envie de me prendre la tête avec ça maintenant… Je veux juste profiter d’être avec vous… Qu’est-ce qu’on fait ?… On va où ?…
- En principe ce qu’est prévu, c’est qu’on aille retrouver Mélianne chez Allan quand il aura fini son service…
- Je sais, oui…
- T’as pas l’air vraiment enthousiaste…
- Pas trop, non…
- Ca te plaît plus qu’on se retrouve comme ça tous les quatre ?…
- C’est pas que ça me plaît plus, c’est que quand on est tous les quatre on n’est pas tous les deux… Et j’aurais envie qu’on le soit plus ensemble tous les deux… Beaucoup plus… Non… Et puis il y a pas que ça… Elle me gonfle Mélianne en ce moment… Et c’est rien de le dire… Parce que vous savez pas ce qu’elle est allée se mettre en tête ?… De me jeter dans les bras d’Allan… Mais j’en ai rien à foutre, moi, d’Allan… Enfin, si !… Je l’aime bien comme ça… En copain… Et puis j’adore le voir faire des trucs avec vous… Mais c’est tout… Sauf que elle, elle a décidé qu’on était faits l’un pour l’autre lui et moi… Elle veut pas en démordre… Et elle insiste… elle insiste… Il y a seulement quinze jours vous étiez exactement celui qu’il me fallait… Vous et personne d’autre… Et maintenant c’est lui… Avec vous ça pourra jamais le faire… Parce que si jamais ça prenait vraiment tournure vous vous mettriez à culpabiliser… A me répéter sur tous les tons que je suis trop jeune… Qu’il faut pas que je m’attache à vous… Que ça va m’empêcher de rencontrer quelqu’un d’autre… Que vous voulez pas m’obliger à faire l’infirmière quand vous serez vraiment vieux… Et patati et patata… A ce qu’il paraît que c’est exactement ce qui s’est passé avec une autre fille avant moi…
- Melissa… Mais ça n’a rien à voir… Elle n’a rien à voir avec toi…
- Oh, mais je vous demande rien… Vous êtes pas obligé de m’expliquer si vous avez pas envie…
- C’est pas que je veuille pas en parler, mais…
- Je m’en fiche !… Un autre jour vous me raconterez… Si vous voulez… Non, mais vous savez la question que je me pose ?… C’est quel intérêt elle a, elle, à ce que maintenant je sois avec lui plutôt qu’avec vous… Alors qu’avant c’était le contraire… J’arrive pas à voir… Souvent quand ils veulent vous faire faire quelque chose les gens c’est qu’ils ont des raisons… C’est que ça les arrange… Mais là pour elle ça change quoi ?… C’est qu’elle pense que si on était ensemble ça l’éliminerait ?… Il y aurait pas de raison…
- Aucune…
- Non, je comprends pas… Ou alors c’est qu’elle a envie de décider de la vie des gens comme ça… comme ça la traverse… sans même savoir elle-même pourquoi… Juste pour le plaisir de diriger… De leur faire faire ce qu’elle a envie, elle…
- Il y a sûrement de ça… Aussi… Entre autres… Mais est-ce qu’elles ont de l’importance ses raisons pour nous ?… Est-ce qu’elles doivent en avoir ?…
- Pas vraiment non…
- C’est à nous de décider de ce qu’on veut faire… Et à personne d’autre… Non ?…
- Ben si !… Si !…
- Et si là maintenant on décidait de passer la soirée tous les deux… Et seulement tous les deux… Ca te dirait ?…
- Un peu que ça me dirait…

jeudi 14 octobre 2010

Escobarines: L'enveloppe ( 1932 )





L’enveloppe était posée à même la boîte aux lettres en bois de la directrice. Sur le dessus. Une volumineuse enveloppe blanche. Personne dans le couloir. D’instinct, sans réfléchir, sans même savoir pourquoi, je m’en suis emparée, je l’ai glissée sous mon chemisier et j’ai rejoint les autres…

Il y avait quoi dedans ?… J’ai prétexté l’arrivée inopinée de mes règles pour monter au dortoir où je l’ai fébrilement ouverte, le cœur battant. Des liasses et des liasses de billets. Que j’ai remises dans l’enveloppe. M’en débarrasser. Le plus vite possible. Avant qu’on ne la trouve en ma possession. Avant qu’on ne m’accuse d’être une voleuse… Prise de panique, je l’ai dissimulée sous un matelas, au hasard, et je me suis enfuie…

La directrice a surgi en classe, nous a fait lever et nous a laissées debout auprès de nos pupitres…
- Bien… J’attends que la coupable se dénonce…
On s’est toutes regardées, stupéfaites, sans comprendre…
- Il y en a forcément au moins une qui sait de quoi il est question…
Elle a exigé qu’on la fixe dans les yeux les unes après les autres. Je n’ai pas baissé les miens. Je n’ai pas cillé…
- Alors ?… Non ?… Bien… Vous sortez…En silence… On va fouiller la salle… Vous laissez toutes vos affaires sur place…

- Qu’est-ce qui se passe ?… Quelqu’un sait quelque chose ?…
Personne ne savait rien, non, mais tout le monde croyait savoir quelque chose quand même… Alice qu’une fille tenait un journal intime dans lequel elle disait pis que pendre de tous les professeurs… Margot qu’il y en avait une qui recevait en cachette des lettres d’un amoureux… Cécile qu’une fille descendait piquer du chocolat et des gâteaux la nuit dans la réserve…

On nous a fait rentrer. On n’avait rien trouvé. Les recherches allaient se poursuivre. En étude. Au réfectoire. Au dortoir… Au dortoir où… C’était qui la fille à qui j’avais fait ce cadeau empoisonné ?… Deuxième lit dernière rangée côté fenêtre… J’ai réfléchi… C’était Bénédicte… Bénédicte qui fixait innocemment le tableau sans se douter de rien… Bénédicte… Ca pouvait pas plus mal tomber… On est venu la chercher…
- Bénédicte… Chez Madame la Directrice…

- Elle est renvoyée…
Toutes les filles l’ont entourée Alice…
- C’est sûr ?…
- Comment tu sais ça ?…
- Qu’est-ce qu’elle a fait ?…
- Volé tout l’argent du trimestre… Chez la directrice… On l’a retrouvé dans ses affaires…
- Ca m’étonne pas !… D’elle ça m’étonne pas… Tout de suite j’ai pensé à elle…
- Moi aussi… Avec les parents qu’elle a elle a été à bonne école…
- A part piquer à droite et à gauche de quoi veux-tu que ça vive ?…
- A se demander même comment ils font pour payer la pension…
- Ils la payent pas, tu parles !… Sûrement qu’il y a des arrangements…
- En tout cas elle est dans de sacrés beaux draps…
- A vie ça va la suivre maintenant… A vie…
- La connaissant elle fera ce qu’il faut pour la directrice… Alors ça !…

- Mais c’est pas toi !…
- C’est pas moi, non !…
- Ben alors !… Pourquoi tu veux aller te dénoncer ?…
- Parce que… Parce que pour moi ça n’aura pas les conséquences que ça aura pour elle…
- Et alors ?… Qu’est-ce t’en as à faire de cette fille ?… Elle avait qu’à pas voler, hein !…
- Oui, mais quand même… Quand même…
- Faut être folle pour faire un truc pareil… Tu es complètement folle…

La directrice a poussé la feuille vers moi…
- Tu vas commencer par me signer tes aveux…
Elle l’a reprise. A vérifié…
- Bien… Eu égard à la gravité des faits je devrais te renvoyer sur le champ, mais… tu es une excellente élève, l’une des meilleures… Et j’ai toujours entretenu avec tes parents d’excellents rapports… Je veux bien en outre tenir compte de ce que rien ni personne ne t’obligeait à rétablir la vérité… Que c’est de ton propre chef que tu l’as fait… Aussi vais-je te laisser la possibilité, pour cette fois, d’opter pour une sanction moins définitive qui te serait bien entendu, si tu t’y résous, administrée publiquement… Que décides-tu ?…
- Je remercie Madame la Directrice de sa bonté…

lundi 11 octobre 2010

Colocataires3 ( 16 )

- Tu viens me le faire ?…
- Quoi donc ?…
- Tu le sais bien quoi !… Ca se voit pas peut-être comme ça en a besoin tout broussailleux comme c’est ?… Et ça nous donnera l’occasion de parler un peu en même temps puisque maintenant on peut plus le soir… En tout cas pour le moment… Bon, mais on va pas revenir là-dessus… C’est un truc que je réglerai, en temps voulu, avec elle… Tu préfères que je me mette où ?… Là ou là ?… Comme ça ça ira ?… Je t’ai tout posé sur la petite table derrière… Evidemment une solution ce serait que je me fasse faire du définitif… En institut… Au laser… Ou à la lumière pulsée… C’est le grand truc en ce moment… Sauf que si un jour j’en ai marre ou si je me mets avec un type à qui ça plaît pas du tout je pourrai pas les faire repousser en claquant des doigts… Et puis, de toute façon, j’aime trop ça quand c’est toi qui m’opères… Ils sont tout doux tes doigts… Tout légers… Ils me font des sensations que j’ai jamais eues avec personne d’autre… Peut-être parce qu’avec toi je peux m’abandonner sans arrière-pensée… Qu’il y a aucun risque que ça dérape… C’est trop ça d’ailleurs si on y réfléchit bien… Mille fois ça aurait dû… Là, quand tu me le rafraîchis, ou à des tas d’autres occasions… Avec tout ce que je t’ai fait traverser !… Mais non !… Ca le fait pas… Jamais… Et il y a qu’avec toi que ça se passe ça… Avec personne d’autre… C’est un truc que t’es quand même bien obligée de te demander pourquoi à force… Parce que même que je t’aie dit que je voulais pas au début, que je voudrais jamais, c’est quand même pas une raison suffisante… Il y en a plein c’est pas ça qui les arrête… Au contraire… Ca les motive, on dirait… Non… Ce qu’il y a avec toi c’est que tu préfères les marges… T’es un amoureux des ambiances en fin de compte… Des ambiances sensuelles en continu… Et forcément quand on couche – quand on a couché – ça la fait retomber l’ambiance… Ca peut plus être pareil… C’est vraiment pas facile pour une nana un type comme toi, tu sais !… C’est franchement déroutant… On est tellement habituées à ce qu’ils veuillent tous nous sauter dessus les types que quand il y en a un qu’a pas l’air d’avoir envie comment c’est vexant !… Surtout quelqu’un comme toi… Et surtout que tu couches quand même avec d’autres… Tant qu’on a pas compris que si tu le faisais pas avec nous c’était justement parce qu’on était importantes à tes yeux… Et même quand on l’a compris… Qu’est-ce tu fais ?… T’as fini ?… Déjà ?!… Fais voir !… Elle est pendue là-haut la glace… Oh oui !… Ca lui va bien, hein !… Tu trouves pas que ça lui va bien ?…
- Ca fait des mois et des mois que j’en suis convaincu…
- Prouve-lui alors !… Fais-lui un petit bisou dessus… Mais juste un… Et tout bref… Là… C’est tout… Tu pourras plus longtemps un jour si tu veux… Et mieux… Parce que c’est pas vraiment coucher ça… Oui… Tu pourras… Le jour où on aura décidé qu’on redort tous les soirs ensemble tous les deux…

- Vous êtes où ?…
- Là…
- Vous savez quoi ?… Vous savez pas quoi ?… Eh bien ça y est !… Je suis embauchée… Un CDD… Avec un CDI derrière si je fais pas trop l’idiote… Oh, mais je la ferai pas… Vous m’aiderez, hein ?!… Vous m’empêcherez… Je compte sur vous… D’autant que ça a l’air cool là-dedans… Même si du secrétariat c’est toujours du secrétariat…
- Tu vois que ça sert de se lever de bonne heure…
- Vous aviez raison… Vous avez toujours raison n’importe comment… En attendant comment je suis contente !…
- Et tu commences quand ?…
- Demain… Demain matin… Vous me réveillerez, hein, surtout !… Mais on dort ensemble de toute façon…

- Ca me surprendra toujours autant…
- Quoi donc ?…
- Que vous veniez m’attendre comme ça… Surtout que je le mérite pas en plus…
- Ca y est !… V’là que ça la reprend…
- Non… Si… Mais c’est vrai, hein !…
Elle m’a pris la main…
- Je sais plus où j’en suis… Mais alors là plus du tout…
- A propos de quoi ?…
- De tout… De ce qu’on fait tous les quatre… De ce qu’on vit tous les deux, vous et moi…
- Explique…
- C’est trop confus dans ma tête… Mais en tout cas une chose qu’est sûre c’est comment ça me travaille… J’en dors plus des fois… Je me pose des tas de questions… Peut-être que c’est parce que j’ai eu personne pendant des années… Que je me suis tellement habituée à être toute seule que ça me perturbe complètement tout ça… Que je suis incapable de m’y retrouver… Vous savez ce que je me suis toujours dit ?… C’est qu’avec la gueule que j’ai la seule chose que je pouvais espérer c’est un type qui me tire comme ça, de temps à autre, vite fait… Et encore !… Même ça souvent j’ai eu du mal à trouver… Je restais des mois sans rien… Ils ont tellement le choix maintenant les mecs !… Et puis voilà que vous êtes arrivé, vous !… Et puis Allan… Et que vous vous intéressez à moi tous les deux… Et que vous faites pas semblant… Je l’ai cru au début, mais non !… Vous faites pas semblant, j’en suis sûre… Ca remet tout en question pour moi du coup… Parce que je me dis que si c’est comme ça ben peut-être qu’il pourra y avoir quelqu’un un jour qu’aura envie de faire vraiment un petit bout de route avec moi… Quelqu’un pour qui je compterai…

jeudi 7 octobre 2010

Escobarines: Petit matin






- Faut que je te raconte… J’ai promis de rien dire à personne, mais toi, c’est pas pareil… Je sais que tu tiendras ta langue… Que tu répéteras pas… Figure-toi… Tu sais, la petite Gaëlle… On fait la route ensemble toutes les deux le matin… Je passe la prendre… La porte est ouverte… Je rentre – c’est convenu comme ça – et je me sers un café dans la cuisine le temps qu’elle finisse de se préparer… Seulement là aujourd’hui rien… Pas un bruit… D’habitude il y a toujours de l’eau qui coule dans la salle de bains… Ou le séchoir… Ou bien elle me crie quelque chose de là-bas… Mais là rien… Rien de rien… J’ai appelé… Pas de réponse… J’ai fini par aller voir… Personne… « Bon » je me suis dit… « Elle aura oublié de se réveiller »… Ca arrive… Et je suis allée tambouriner comme une sourde à la porte de sa chambre… « - Gaëlle ?!… Hou… Hou… Gaëlle?!… T’es là?… »… Rien non plus… J’ai fini par entrer… Le lit vide… Dans les autres pièces non plus… Personne… Alors là j’ai pris peur… Sûrement il s’était passé quelque chose… Va savoir quoi ?!… Peut-être un cambrioleur… Et ça avait mal tourné… Ou bien elle avait eu un coup de folie et elle avait fait une bêtise… Une grosse bêtise… Je suis montée au grenier… Rien… Descendue à la cave toujours en appelant… Et là… D’une toute petite voix… « - Je suis ici… »… Ca venait de derrière une porte tout au fond… Une porte fermée à clé de l’extérieur… « - Tu m’ouvres ?… »… Et alors là qu’est-ce que je découvre ?… Je te le donne en mille… Elle était assise sur un tabouret… A poil… Avec le derrière dans un état !… Mais dans un état !…
- Comment ça ?…
- Comme quelqu’un qui s’est ramassé une bonne fessée, tiens !… Faut quand même pas que je te fasse un dessin ?… Mais alors là une fessée carabinée !… Ca doit la brûler quelque chose de rare…
- Mais qui c’est qui lui a fait un truc pareil ?…
- Attends !… Attends que je te raconte !… Tu penses bien que moi aussi j’ai voulu savoir… Seulement elle s’est défilée… Sous prétexte qu’on était déjà sacrément en retard elle est allée s’enfermer dans la salle de bains… Mais tu me connais… Je suis pas du genre à laisser passer ça comme ça… Et dès qu’on a été installées dans la voiture… Bon, mais alors ?!… Qu’est-ce qui s’était passé ?… Oh, rien !… Enfin, si… Elle venait juste de se lever quand elle avait entendu du bruit dans l’entrée… Et elle s’était trouvée nez à nez avec trois types qui, sans un mot, sans la moindre explication, lui étaient tombés dessus, lui avaient flanqué une bonne fessée et l’avaient entraînée à la cave où ils l’avaient enfermée…
- Hein ?… Mais pourquoi ?…
- C’est justement ce qu’elle savait pas… pourquoi… Du moins à ce qu’elle disait… Parce qu’attends !… Je suis pas née de la dernière pluie non plus, moi !… Suppose que ça t’arrive à toi un truc pareil… Qu’on te tombe dessus comme ça chez toi sans que tu saches ni qui c’est ni pourquoi c’est quoi la première chose que tu ferais quand on t’ouvrirait la porte ?…
- Ca… J’en sais rien du tout…
- Eh ben moi je sais… C’est d’aller voir si on t’a rien volé… N’importe qui réagirait comme ça… Pas elle… Ca lui est même pas venu à l’idée… Donc, à supposer que ce soit vrai son histoire, c’était loin d’être des inconnus pour elle ces types… Il y avait forcément quelque chose de louche là-dessous, mais quoi ?… Je voyais bien que c’était pas la peine d’insister… Qu’elle dirait rien… Oh, mais pas avec moi ce petit jeu-là !… Pas avec moi… Et, au lieu de continuer tout droit vers la boîte, j’ai tourné à gauche… Vers la gendarmerie… Parce qu’évidemment elle allait porter plainte, hein ?… Elle s’est agitée sur son siège… Elle n’en avait pas l’intention, non… Non ?… Mais c’était complètement irresponsable… Elle s’exposait à ce qu’ils recommencent… Ce soir… Demain… N’importe quand… Ah non, non !… Elle pouvait pas laisser passer un truc pareil sans réagir… Et j’ai ouvert la portière… Elle m’a retenue par le bras… Elle allait m’expliquer… M’expliquer ?… M’expliquer quoi ?… Que… Qu’ils existaient pas ces types en réalité… Ah, ben voilà !… On y était… Mais c’était qui alors ?… C’était… Je le répèterais pas, hein ?!… Je promettais ?… Mais oui !… Evidemment !… Elle me connaissait… J’étais pas du genre à aller chanter sur les toits… Muette comme une tombe je serais… « - C’est mon ami… D’habitude quand il me fait ça et qu’il m’enferme en bas il vient toujours me délivrer avant de partir au travail… Mais là… Il a dû oublier… Oui… Sûrement… Ou bien alors… - Ton ami ?… C’est ton ami qui t’a mise dans un état pareil !… Raison de plus pour y aller aux flics… - Non !… Non !… Je suis d’accord pour qu’il me le fasse… C’est un truc entre nous… Disons que c’est comme un jeu… Et que souvent c’est moi qui lui demande… Presque toujours… »… Elle a baissé la tête… « - J’en ai besoin… Si j’ai pas ça… »…
- Ah oui !… Gaëlle !… Si je m’étais attendue à ça… Il y en a d’autres encore tu te dirais… Mais Gaëlle !… Comme quoi on croit connaître les gens, hein, mais en réalité…

- Emilie !… Ecoute, là… Tu travailles bien avec Gaëlle ?…
- Ben oui… Oui… Juste en face l’une de l’autre on est…
- Alors faut que je te raconte quelque chose… Tu sais pas ce que je viens d’apprendre ?… Mais t’as le temps, là ?… Le temps d’aller boire un café ?… Oui, alors tu sais pas ?…Bon, mais tu gardes ça pour toi, hein ?!… Je t’ai rien dit… Figure-toi !… Pauline… Tu vois qui c’est Pauline ?… Elle passe la prendre le matin Pauline… Tous les matins… Eh bien figure-toi que ce matin…



lundi 4 octobre 2010

Colocataires3 ( 15 )

- C’est quoi cette histoire qu’on va dormir à tour de rôle avec toi, Victorine et moi ?…
- Une semaine chacune, oui…
- En quel honneur ?
- Il y aucune espèce de raison pour qu’elle n’ait pas le droit, elle aussi, de…
- Il y en a plein au contraire des raisons… Si t’es pas capable de comprendre ça… Bon, mais je sais ce qui s’est passé… Je le sais…
- Tu sais rien du tout…
- Si !… Elle s’est branlée devant vous… J’en suis sûre… C’est dégueulasse… C’est une vraie salope… Parce qu’on s’était mises d’accord qu’on le ferait pas, ça… Et dès que j’ai le dos tourné… Mais elle va voir… Elle va voir ce qu’elle va voir… Parce que si elle croit que ça va se passer comme ça… Mais je m’en doutais… Ca, je m’en doutais… Quand j’ai su que vous partiez tous les deux je me suis dit : « Mélianne, ma fille, méfie-toi !… Il y a anguille sous roche… Elle est en train de t’en faire une… et une belle… »… Je me suis pas trompée… Seulement si elle s’imagine que je vais lui laisser le champ libre comme ça elle se fourre le doigt dans l’œil… Et jusqu’au coude… Parce que tu sais ce que c’est le but de l’opération ?… C’est que je me casse… Je suis impulsive… Elle le sait… Et elle sait qu’un coup comme ça il y a neuf chances sur dix que je prenne le mors aux dents et que je débarrasse le plancher… Sauf que là je l’ai vue venir gros comme une maison… Elle veut jouer… Eh bien on va jouer… Et rira bien qui rira le dernier…

Amandine m’a sauté au cou…
- Je pensais que vous m’aviez oubliée… Ou bien que vous saviez… Que quelqu’un vous avait dit… Et que vous étiez en colère contre moi…
- Que je savais ?… Que je savais quoi ?…
- Pour Allan…
- Qu’est-ce qui s’est passé ?…
- Il s’est passé qu’on s’est pas quittés, lui et moi, tout le temps que vous avez été absent et qu’on n’a pas arrêté de faire l’amour… C’est moche, hein ?... Je suis moche… Vous pouvez le dire… Et si vous voulez plus qu’on se voie…
- C’est pas la première fois que tu couches avec lui…
- Oui, mais les autres fois vous étiez là…
- Qu’est-ce que ça change ?…
- Tout… Tout ça change… Parce que là c’était derrière votre dos…
- Tu me dois rien… Tu n’as pas de comptes à me rendre…
- C’est parce que vous m’aimez pas que vous dites ça… Si vous m’aimiez… Même seulement un peu… Oh, mais je vous le demande pas, hein !… C’est déjà beaucoup tout ce que vous m’avez accordé… De faire attention à moi… De vous occuper de moi… J’ai pas le droit d’être exigeante… Et puis de toute façon qu’est-ce que ça veut dire « aimer » ?… Pas grand chose… Quand on voit le nombre de gens qui s’aiment soi-disant à la folie et qui huit jours après peuvent plus se sentir…
- Il y a quand même des cas où ça se passe pas comme ça…
- Je sais, oui, je sais… Mais c’est aussi que j’ai pas vraiment envie d’y croire… Vous m’avez vue… Vous avez vu ma tronche… Qui vous voulez qui tombe amoureux de moi ?…
- Ca y est !… Ca la reprend…
- Non, mais c’est vrai, hein !… Faut être réaliste…
- Tu as un corps magnifique…
- Ca fait pas tout… Et je me promène pas à poil…
- Sans te promener à poil tu pourrais au moins te mettre un minimum en valeur…
- Pour quoi faire ?… Si j’ai une gueule à mettre tout le monde en fuite…
- Tu ne m’as pas mis en fuite…
- Vous, c’est pas pareil…
- Allan non plus…
- Oh, mais Allan… Il a envie de moi, oui… Je vais pas m’en plaindre… J’ai été assez longtemps sevrée comme ça… Mais Allan ça durera ce que ça durera… Sûrement pas longtemps…
- Qu’est-ce que tu en sais ?…
- J’en sais que si vous étiez pas là, Mélianne et vous, il aurait même pas fait attention à moi… Ce qui l’excite, c’est pas moi… C’est ce qu’on fait ensemble tous les quatre… Il arrête pas d’en parler… Et s’il y avait pas ça…
- Que tu crois…
- Oh non, non !… Il fait tout pour pas le montrer, mais s’il y a quelqu’un qui compte pour lui dans tout ça c’est d’abord vous… Ensuite Mélianne… Et moi tout à la fin…
- Et pour toi ?…
- Pour moi ?… Vous d’abord… Et de très loin… Après j’m’en fous… Complètement…

- Victorine !…
- Hein ?… Quoi ?… Qu’est-ce qu’il y a ?…
- Debout, grande paresseuse !… C’est l’heure…
- L’heure ?… L’heure de quoi ?…
- D’aller chercher du travail…
- C’est pas à cinq minutes… J’ai bien le temps…
- Non, tu n’as pas le temps, non… Tu te lèves… Et tout de suite… Sinon…