lundi 29 octobre 2012

Les confidences de Camille ( 10 )


Et le samedi suivant, ma chère Camille ? Que cette attente de vos courriers est éprouvante ! Mais je suis d’autant plus mal placé pour vous reprocher de me faire languir que j’en use exactement de la même façon avec vous… Alors ! Alors je vais prendre mon mal en patience… Ce qui n’est pas, au bout du compte, si déplaisant  : l’imagination se déploie, emprunte et explore toutes sortes de pistes jusqu’à ce qu’elle sache à quoi s’en tenir vraiment…

Clara ne tenait plus en place… « Quelle heure il est ? C’est pas vrai ! Seulement ! Bon, mais t’as bien compris, hein ? Moi, je monte – on a prévu que j’arrive un petit quart d’heure avant lui – et toi t’attends dans la voiture… Le plus discrètement possible… Dès que tu le vois – une Audi grise il a – tu le laisses disparaître et tu te précipites… Chambre 312… Tu te rappelleras ? Oui ? Et tu bouges pas de là… De derrière la porte… Et si j’appelle tu te poses pas de questions… Tu rentres… Je peux compter sur toi ? Oui, hein, c’est sûr ? Mais ça devrait bien se passer… Normalement ça devrait bien se passer… »

C’était un type aux tempes grisonnantes… Élancé… Qui a traversé le parking sans hâte… Qui s’est engouffré dans l’hôtel par la petite porte à l’arrière… Je l’ai laissé prendre un peu d’avance et j’ai rejoint le poste d’observation qu’elle m’avait assigné… Il parlait fort… Comme quelqu’un qui est très en colère… « Vous êtes venue… Je le vois bien que vous êtes venue… Vous êtes venue comme une petite évaporée que vous êtes… Est-ce qu’on accepte comme ça – de but en blanc – un rendez-vous avec un inconnu ? Avec tous les risques que ça comporte… À votre âge vous devriez quand même avoir un peu plus de plomb dans la cervelle, non ? On vient pas se jeter comme ça dans la gueule du loup… S’il me prenait fantaisie de vous renverser sur le lit vous seriez bien avancée… Vous feriez quoi ? Vous iriez porter plainte ? On vous rirait au nez… Non… Vous savez ce que vous mériteriez à vous conduire comme une petite gamine écervelée ? Hein ? Vous le savez ? » « Oui… » « Quoi ? Dites-le… » « Une fessée… » « Une fessée, oui… Une bonne fessée déculottée… »

Le silence… Du silence qui a duré… Et puis une claque… Appuyée… Sonore… Une autre… Une autre encore… Des claques… À rythme lent… Régulier… Des claques qui lui ont arraché des gémissements… Puis des plaintes rauques de fond de gorge… Ça s’est accéléré… En pluie… En grêle… Elle a crié… Comme une perdue…    

De nouveau le silence… Des mots murmurés inaudibles… Son rire à lui… Son rire à elle… « Oh, si tu veux… » « Un peu que je veux ! » « Donc on reste en contact… » « Évidemment ! Ça coule de source… » « À tout-à-l’heure alors… » « À tout-à-l’heure… Sur Internet… » Juste le temps de disparaître à l’angle du couloir… La porte s’est ouverte… Ils sont redescendus ensemble…

« Tu veux conduire ? Non, parce que je me sens pas trop en état, là… Je suis encore sous le coup…En attendant n’empêche que j’avais raison… On pouvait lui faire confiance… Mais ça je le sentais… Et comment il est bien entré dans le rôle en plus ! C’était important pour moi, ça ! Le plus important… C’était pas la peine sinon… En tout cas merci… Merci, hein ! Parce que sans toi jamais j’aurais osé sauter le pas… C’était quand même prendre de sacrés risques, avoue ! Mais maintenant que je le connais, que je sais à quoi m’en tenir avec lui je te dérangerai plus pour nous surveiller… C’est pas la peine… À moins que… à moins qu’il y en ait d’autres un jour… Mais ça, franchement, je crois pas… Pas pour le moment en tout cas… À quoi ça m’avancerait de me démultiplier de tous les côtés ? Alors que j’ai la chance d’être tombée sur quelqu’un de fiable… Avec qui je me sens en parfaite adéquation… Non… Par contre là où je vais avoir besoin de toi c’est par rapport à Ivan… Parce qu’il travaille Damien… Se libérer en semaine, comme il l’a fait aujourd’hui, c’est pas évident pour lui… Ça peut être qu’exceptionnel… Il va falloir qu’on se rabatte sur le week end du coup… Et c’est là que tu vas pouvoir me servir d’alibi… Parce que… parce qu’on aille voir une expo ensemble – ou un film – il y verra aucun inconvénient Ivan… Au contraire : ça l’emmerde tout ça… Et il sait qu’avec toi il y a aucun danger… Que j’ai jamais eu la moindre attirance pour les gens de ton âge… Je sais… Je te mets encore – une fois de plus – à contribution… Mais je n’ai pas d’autre solution… Et je te revaudrai ça… Je sais pas encore exactement comment – même si j’ai déjà ma petite idée – mais tu peux être sûr que je te revaudrai ça… Au centuple…

Je vous embrasse, Camille…

FLAVIAN 

jeudi 25 octobre 2012

Escobarines: La stagiaire ( 5 )


– C’est encore loin ?
– Assez, oui…
– Mais où tu m’emmènes ? Pourquoi tu veux pas le dire ?
– Là où j’habitais avant… Souvent j’y reviens… J’y ai gardé plein de contacts… Je leur ai parlé de vous…
– De moi ? Tu leur as pas dit au moins ?
– Je leur ai pas dit quoi ? Que je vous flanquais des fessées ? Bien sûr que si !
– T’as pas fait ça ?
– Vous êtes trop, vous, dans votre genre ! Vous imaginez quoi ? Parce que… attendez ! Je suis rien qu’une petite vendeuse, moi ! Mais une petite vendeuse qui flanque la fessée à sa patronne… C’est pas si courant que ça, avouez ! Ça se voit pas tous les jours… Alors c’est quand même normal d’avoir envie de le raconter à des filles qu’on connaît depuis des années… Avec qui on a toujours échangé plein de trucs… Non ? Vous trouvez pas ?
– Et elles en pensent quoi ?
– Il y en a deux elles veulent pas le croire… Elles disent que j’invente… Et les autres… Ben qu’est-ce vous voulez qu’elles en pensent ? Elles trouvent ça trop… Sans arrêt faut que je leur raconte… Avec tout plein de détails… Elles en ont jamais assez… Et, évidemment, elles crèvent d’envie de voir ça…
– Tu vas pas… ?
– Leur montrer ? Ah, ben si ! Si ! Je leur ai promis… C’est même pour ça qu’on y va…
– Oui, ben alors ça il n’en est pas question ! Arrête ! Fais demi-tour !
– Oh, vous allez pas recommencer ! Chaque fois c’est pareil… Faut que vous fassiez la fine bouche, faut qu’on vous supplie alors qu’en réalité au fond de vous-même… Bon, mais puisque c’est comme ça…
– Qu’est-ce tu fais ?
– Ben je m’arrête… C’est bien ce que vous voulez, non ? Je m’arrête et je fais demi-tour… Là… Vous êtes contente ? C’est ce que vous vouliez ?
– C’était qui ces filles ?
– Je vous l’ai dit… Des copines à moi…
– Il y en aurait eu beaucoup ?
– Cinq ou six…
– Qui auraient fait quoi ?
– Qui auraient regardé… Vous avez l’habitude, non ? À moins qu’il faille que je vous rafraîchisse la mémoire…
– C’est pas pareil… Elles, là-bas, je les connais… Pas tes copines… Elles ont quel âge?
– Comme moi… À peu près… Un peu plus… Ou un peu moins…
– Elles auraient regardé… Que ça ?
– Ah, non ! Non ! Vous les connaissez pas… Quand elles sont toutes ensemble et qu’elles se lâchent… Elles se seraient fichues de vous… Et pas qu’un peu… Pour en entendre vous en auriez entendu… Même que vous adoriez ça avoir honte je peux vous dire que c’est dans un petit trou de souris que vous auriez voulu disparaître avec elles…
– Oh, tu crois ?
– Elles vous auraient fait chialer, oui…
– À ce point-là ?
– Alors ça, c’est sûr et certain…

– Vous dites plus rien ?
– Non… Non… Je…
– Vous vous en mordez les doigts… Qu’on ait fait demi-tour… Vous regrettez maintenant… Non ?
– Un peu…
– Beaucoup, oui, vous voulez dire… Vous, quand vous saurez ce que vous voulez…
– Qu’est-ce tu fais ?
– Ça se voit pas ? Je m’arrête… Je m’arrête pour vous en coller une… J’ai horreur qu’on me fasse tourner en bourrique…
– Ici ?
– Dans le bois, là…
– Mais il peut passer du monde… Des promeneurs… Des chasseurs…
– Fallait y réfléchir avant… Allez, amenez-vous !

– Ça m’a soulagée… J’en avais sacrément besoin…
– Tu vas où par là ?
– On rentre…
– On va pas voir tes copines ?
– Sûrement pas, non !
– On n’ira pas ? Jamais ?
– On ira quand vous l’aurez mérité… Si jamais un jour vous le méritez… Mais ça, c’est pas gagné…    

lundi 22 octobre 2012

Les confidences de Camille ( 9 )


Flavian, bonsoir…

Mon beau-père devait vraiment considérer – et sans doute n’avait-il pas tort – que l’oisiveté me faisait courir de graves dangers parce que le lendemain, à la première heure, il était là… « Tu vas te rendre à cette adresse… Au plus tôt… Tu y seras reçue par une connaissance à moi… Qui veut bien me rendre le service de t’embaucher… Alors tâche de te montrer à la hauteur et de ne pas me faire regretter d’être intervenu… »

C’était un gros homme rougeaud qui a parcouru mon CV, les sourcils froncés et qui a fait la moue… « Mouais… Mouais… Je ne vous cacherai pas que votre profil ne correspond pas vraiment à ce que nous recherchons… Mais enfin Paul est un ami de longue date… Auquel je suis très redevable… Alors je veux bien vous donner une chance… Toutefois, dans un premier temps, une sérieuse mise à niveau s’impose… En ce qui concerne en tout cas le fonctionnement de l’entreprise et les connaissances spécifiques nécessaires à l’accomplissement des tâches qui vous seront confiées…

Et je suis passée d’une Madame Bonnet à un Monsieur Servin… D’une Mademoiselle Carrère à une Madame Raton… Pour, au bout du compte, à l’usage, me trouver « spécialisée » dans la correction des fautes d’orthographe et de syntaxe dont le directeur et la plupart de ses proches collaborateurs truffaient le moindre des textes qu’ils rédigeaient…

C’est le cœur léger que je me rendais chaque matin là-bas… L’ambiance était bonne… Les collègues sympathiques… Le travail pas désagréable du tout… Quant à mon salaire je le considérais un peu comme de l’argent de poche, mais, au lieu de le dilapider en sottises, je le mettais sagement de côté sur un compte-épargne que j’avais spécialement ouvert pour l’occasion… La leçon avait porté ses fruits…

Charlie travaillait dans le bureau voisin… Le matin j’avais droit à mon café, servi à domicile… À dix heures à mon petit pain au chocolat… Vingt fois par jour il avait un renseignement à venir me demander, un dossier à récupérer, une adresse à vérifier… Il en profitait pour s’attarder un peu à bavarder… De choses et d’autres… De Manosque où il était né et où j’avais, enfant, passé de temps à autre des vacances… De Serge Lama dont il appréciait infiniment le répertoire…  Moi aussi… De cuisine… C’était l’une de ses passions… Il était clair – de plus en plus clair – que je ne lui étais pas indifférente… C’était plutôt flatteur… Et d’autant plus agréable que courtois, attentionné, empressé, il restait toujours bien sagement « dans les clous… »

Et à moi est-ce qu’il me plaisait ? Je ne me posais seulement pas la question… Il n’avait pas à me plaire ou à ne pas me plaire… J’étais mariée… Et j’avais bien trop bonne opinion de moi-même pour m’imaginer un seul instant dans la peau d’une femme qui trompe son mari… Tant et si bien que le jour où il m’a proposé de l’accompagner à un concert de Serge Lama – l’un de ses amis, a-t-il prétendu, s’était désisté au dernier moment – c’est en toute confiance que j’ai accepté… Confiance en lui, mais, surtout, confiance en moi…

À la sortie du concert, il crevait de faim… « C’est dimanche demain… On n’est pas pressés… » Moi, de toute façon, j’étais encore bien trop pleine du spectacle auquel je venais d’assister pour avoir envie d’aller me coucher… On s’est donc retrouvés tous les deux attablés, à une heure du matin, dans un petit restaurant où on a discuté, à bâtons rompus, jusque tard dans la nuit… Il faisait incroyablement doux et, quand on en est sortis, on a erré longtemps encore, au hasard, par les rues… Quand on s’est enfin quittés, à regret, le jour était depuis longtemps levé…

Il a laissé passer un peu de temps – une dizaine de jours – et puis… « Tu fais quelque chose de spécial samedi ? » « Samedi ? Non… Je crois pas, non… Pourquoi ? » « Parce que… toi qui apprécies la cuisine raffinée… je t’aurais fait découvrir un de ces restaurants ! Tu m’en aurais dit des nouvelles… » « Je sais pas… Je verrai… Je te dirai… »

C’était tout vu… Pourquoi j’aurais refusé ? Rien – que ce soit dans son comportement ou dans ses propos – ne pouvait m’en fournir le prétexte… Et puis… j’en crevais d’envie… Alors…

Et le samedi suivant…

Je vous embrasse, Flavian…

CAMILLE    

      

jeudi 18 octobre 2012

Escobarines: La stagiaire ( 4 )


– Faites voir, Madame ma patronne…
– Pas ici… Pas maintenant… Si quelqu’un rentre…
– Vous aurez le temps… Vous aurez tout le temps de la laisser retomber votre robe… Allez ! Mais allez, j’vous dis ! Plus bas la culotte… Que je me rende compte… Là… Mouais… Mouais… Si ! Elles y sont encore les marques… Oui… Mais il y en a plus pour longtemps avant qu’elles disparaissent… Va falloir en remettre une couche… On le fera ce soir… Après la fermeture…
– Écoute…
– Quoi ? Me dites pas que vous aimez pas... Après ce que j’ai vu…
– Non, c’est pas ça, mais…
– Mais vous avez peur que votre mari s’en aperçoive… Eh ben couchez plus avec… Et puis voilà… Vous avez quand même encore le droit de pas avoir envie… Manquerait plus que ça… De toute façon va bien falloir qu’il s’y fasse… Parce qu’elles lui vont très bien ces jolies couleurs à votre derrière… Et je compte bien faire en sorte que désormais elles y restent en permanence…  

– Il vous tarde qu’on soit à ce soir, hein ?
– Mais non, mais…
– Mais si ! Sans arrêt vous regardez l’heure… Et vous êtes pas du tout à ce que vous faites… Mais alors là pas du tout… Je le vois bien… Vous pensez qu’à ça… Au moment où votre petite vendeuse va honteusement vous déculotter, vous, une commerçante respectée, la fille d’un conseiller municipal de renom, vous coucher en travers de ses genoux et vous flanquer une retentissante fessée…
– Tais-toi !
– Comme vous les aimez… Interminable… Interminable et impitoyable…
– S’il te plaît…
– Une fessée qui vous mettra dans tous vos états… Une fessée au bout de laquelle… Et puis non, tiens ! C’est vous qui allez le dire…
– Me demande pas ça !
– Mais si, vous allez le dire… À quoi ça vous sert de faire votre mauvaise tête puisque de toute façon vous en passerez par où j’ai décidé… Alors ? Une fessée au bout de laquelle vous allez faire quoi ?
– Je vais me…
– Vous ?
– Me caresser…
– Un autre mot…
– Me toucher…
– Un autre… Et puis non… Non… Les autres on va les garder pour la bonne bouche… Pour une autre fois… Vous toucher, oui… Comme une petite folle… Sans la moindre pudeur… Sans la moindre retenue… Parce qu’après une fessée – quand elle vous est donnée bien comme il faut… bien comme vous aimez…  – vous pouvez pas vous empêcher… Il FAUT que vous vous le fassiez… À tout prix… C’est plus fort que vous… Et ça tombe bien… Parce que j’aurais pas cru, mais c’est pas si déplaisant que ça finalement de vous voir faire… Au contraire… J’ai bien apprécié l’autre soir… Si, c’est vrai, hein… C’était trop le top de vous regarder en train d’essayer de vous retenir… De vous empêcher… De pas y arriver… Et d’avoir honte… Non, mais comment vous avez eu honte ! Regardez-moi ! Dans les yeux…
Et comment vous crevez d’envie d’avoir encore honte… Venez !
– Maintenant ? Tout de suite ? Mais… Et le magasin ?
– Ça se ferme un magasin… Allons, venez !

– Avouez, Madame ma patronne, qu’elle a bien des qualités votre petite vendeuse…
– Attends… Parle pas ! Je suis encore toute… Hou la la !
– Des qualités que vous étiez bien loin de soupçonner…
– Tu me feras mourir…
– Et vous n’avez encore rien vu…
– Cette fessée que tu m’as mise ! Non, mais cette fessée !
– Vous l’aviez amplement méritée, non ?
– Et puis tes mots… Ils me rendent folle tes mots…
– J’ai vu…
– Et tes regards après… Pendant que…
– Quelle jouisseuse vous faites, Madame ma patronne !
– J’aurais jamais pensé… Que je pourrais m’abandonner comme ça… Complètement… Devant quelqu’un…
– Et je vous réserve encore bien des surprises…
– Lesquelles ?
– Vous verrez bien…

lundi 15 octobre 2012

Les confidences de Camille ( 8 )


Ma chère Camille…

Il y avait quelque chose… Depuis l’autre matin elle arrêtait pas d’y penser Clara… Il y avait quelque chose qu’elle voulait me demander… Puisque de toute façon maintenant j’étais au courant… C’était que… Pour le truc, là… « La fessée ? » Pour ça, oui… Ça faisait un moment qu’elle en discutait sur Internet avec un type… Un type qui voulait la rencontrer… À l’hôtel… Pour… Ben oui, je me doutais bien… Pour ça, quoi ! Sauf qu’elle avait pas du tout envie que ça dérape… Mais alors là pas du tout… À première vue il avait l’air correct… Mais on pouvait pas savoir… On pouvait jamais savoir… Alors ce qu’elle avait pensé – et il y avait qu’à moi qu’elle pouvait demander ça… À qui d’autre ? – c’était  que, peut-être, je pourrais la suivre… Et surveiller de derrière la porte… Au cas où ça se passerait mal… Comment elle se sentirait plus rassurée… « Mais si tu veux pas tant pis… Ça fait rien, hein !… Faut pas te croire obligé… » C’était pas que je voulais pas, non, mais comment je le saurais que ça se passait mal ? Et faudrait que je fasse quoi ? « T’entendras bien… Et puis je crierai n’importe comment…  Et alors là t’hésites pas surtout… Tu rentres… »

Je l’ai donc accompagnée… « Approche pas pour le moment… Te montre pas… » En retrait… Prêt à disparaître au détour du couloir… Elle a frappé… Recommencé… Encore… Entrebaîllé la porte… Jeté un œil à l’intérieur… « Il y a personne… Il est pas là… Il avait dit pourtant… Une demi-heure avant toi j’y serai… » Je l’ai rejointe… « Viens ! Entre ! Suffit de surveiller… Par la fenêtre on est obligés de le voir arriver… » Elle a jeté son sac sur le lit… «  Qu’est-ce qu’il fout ?! Je comprends pas… Non… Je comprends pas… Ça fait des semaines et des semaines qu’il me supplie… Qu’il prétend penser qu’à ça… Et le jour où c’est enfin possible… » « Il a peut-être eu un empêchement… Sûrement même… » « Tu parles ! Encore un fantasmeur, oui ! C’en est plein sur le Net… Bon, mais j’attends encore un quart d’heure… Et si dans un quart d’heure il est pas là… »

Une demi-heure… Une heure… Deux heures… « Il viendra plus, c’est clair… C’est bien ce que je disais… Un fantasmeur… » « À moins que… À moins que ce soit vous la fantasmeuse… » « Moi ? » « Vous, oui… Qui avez inventé ce personnage de toutes pièces… » « Hein ? Mais pas du tout enfin ! Pourquoi j’aurais fait ça ? » «  Oh, il y en aurait mille des raisons… En attendant j’ai perdu une après-midi entière, moi, avec toutes vos histoires… Et justement aujourd’hui… Qu’ils étaient importants les cours… » « Je suis désolée… Je suis vraiment désolée… » « Ah, vous pouvez ! Vous savez ce que vous mériteriez pour la peine ? Vous savez ? » Elle a brusquement réalisé où je voulais en venir… « Oui, mais non… Non… Pas toi… C’est pas possible… » « Et pourquoi donc pas moi ? » « Mais parce que enfin ! » Parce que… D’abord parce qu’on vivait sous le même toit… Ingérable ce serait… Un jour ou l’autre il nous tomberait dessus Ivan… Forcément… Et ça c’était un risque qu’elle ne pouvait pas – qu’elle ne voulait pas – courir… Et puis… Et puis il y avait la différence d’âge… Ça comptait pour elle… Beaucoup… Le type elle avait besoin qu’il ait de la prestance… Qu’il fasse preuve d’autorité… De fermeté… Et ça… avant quarante ans on n’était pas crédible… « Tu comprends ? » Je comprenais, oui… Malheureusement je comprenais… « Oh, mais fais pas cette tête-là… T’en trouveras des filles – des filles de ton âge – qui demanderont pas mieux… Je t’aiderai, même, si tu veux… Et puis tu es – tu vas rester – mon confident… Tu perdras pas forcément au change, tu sais… Je te promets que tu perdras pas au change… Tu verras… Bon, mais allez ! Inutile de rester ici… Il viendra pas… »

Dans la voiture elle m’a posé la main sur le genou… « Tu m’en veux pas trop ? » « Mais non ! Bien sûr que non ! » Si, je lui en voulais ! Si !

«  Je voudrais pas abuser, mais… mais si tu pouvais te libérer demain après-midi, ça m’arrangerait bien… » « Si c’est comme la dernière fois… » « Ce sera pas, non… C’est quelqu’un de fiable cette fois… Très… Aucun doute là-dessus… Mais quand même je veux pas prendre de risques… Je le connais pas ce type… Alors tout dépend de toi… Si tu peux venir ou pas… » « Je viendrai… Oui… Je viendrai… » « Merci… »

Vous connaissez mon sens du suspense, ma chère Camille… Donc je n’en dirai pas plus… Pour aujourd’hui…

Je vous embrasse

FLAVIAN  

jeudi 11 octobre 2012

Escobarines: La stagiaire ( 3 )


– C’est pas mal chez vous, dites donc ! Jamais j’y étais montée, moi, ici au-dessus… Bon, ben venez en attendant ! En travers de mes genoux mettez-vous ! Comme ça, oui… Voilà… Vous êtes bien installée ? Parce que ça risque d’être long… Non, mais si j’avais pensé, quand vous vous fichiez de moi devant les clients, quand vous me faisiez passer pour une incapable et une moins que rien, qu’un jour vous m’offririez comme ça bien sagement votre petit derrière pour que je puisse vous punir comme vous le méritez… Parce que vous le méritez… Personne n’a le droit de traiter quelqu’un comme vous l’avez fait… Personne…
– Faut rien exagérer… Ce n’était quand même pas…
– Ben voyons ! Non, mais vous vous êtes pas vue ! Vous vous êtes pas entendue ! Mais tout se paie un jour… Tout ! Et d’abord, pour commencer, vous allez bien gentiment me supplier de vous la donner la fessée…
– Oh, non !
– Eh, si ! Sinon vous l’aurez pas… Et si vous l’avez pas ce soir demain à l’ouverture je voudrais pas être à votre place… Ça va être quelque chose… Je vous jure que ça va être quelque chose…
– Tu m’épargneras rien, hein ?
– Non… Allez ! Je vous écoute…
– Donne-la moi !
– Mieux que ça ! Plus fort ! Et plus convaincu le ton… Et quoi ? Qu’est-ce qu’il faut que je vous donne?
– Donne-m’en une ! Une fessée… Donne-m’en une…
– C’est déjà mieux… Et pourquoi ? Pourquoi vous la méritez la fessée ?
– Parce que… M’oblige pas… S’il te plaît, m’oblige pas…
– Parce que ?
– Parce que je me suis mal comportée à ton égard…
– Eh ben voilà ! Enfin ! On le reconnaît… C’est pas trop tôt… Bon, mais vous la voulez ? Vous allez l’avoir… Et je peux vous dire que ça va pas faire semblant… Allez ! Vous êtes prête ?

– Comment elle piaule, Madame ma patronne, quand ça tombe ! Un vrai bonheur de l’entendre… Et comment elle gigote ! On n’ignore plus grand-chose de ses petits secrets… Vous pourriez faire preuve d’un minimum de pudeur quand même, vous croyez pas ? Une femme de votre âge…
– Facile à dire…
– Oh, c’était pas vraiment fort… Vous pouvez pas dire que c’était fort… Ou alors c’est que vous êtes doudouille… Qu’est-ce que ça serait si je tapais pour de bon… Ce que je vais faire d’ailleurs… Et pas plus tard que tout de suite…

– Et là ? C’était pas autre chose ?
– Si…
– Ça s’est vu ! Et entendu… Et comment ça vous l’a mis rouge le derrière ! Impressionnant ! Vous allez pas pouvoir vous asseoir d’un moment… Bon, mais on continue… On va quand même pas s’arrêter en si bon chemin… Ce serait dommage, non, vous croyez pas ? Allez, on continue… On en remet une couche ! Et une bonne !

– Vous aimez…
– Non, mais ça va pas ! Et puis quoi encore ?
– Si ! Vous aimez… Si ! Ne mentez pas… Ça commence… Ça commence à vous plaire… Et pas qu’un peu… C’est ce qu’elles m’ont dit les autres… « Tu verras… Avec un peu de chance tu verras… Parce que c’est assez souvent quand même que ça lui arrive… Si on sait s’y prendre… Ce qu’il faut, c’est que ça dure… Et que ce soit fort… Faut pas relâcher… Faut tenir le rythme… Et il va arriver un moment où tu vas sentir qu’elle devient plus lourde… Qu’elle s’abandonne… Elle gémit plus pareil… Ça vient de bien plus loin… De bien plus profond… Tu t’arrêtes pas surtout… Et après… Alors là après… » Vous dites rien, Madame ma patronne ? Non… Vous dites rien… Vous avez qu’une envie, c’est que je la ferme et que je continue… C’est pas vrai peut-être ?
– Si...
– Demandez-le moi… Je veux que vous me le demandiez…
– Continue ! S’il te plaît, continue…    

lundi 8 octobre 2012

Les confidences de Camille ( 7 )


Mon cher Flavian,

Chercher du travail, oui… Il avait raison… Mais quoi ? Mais où ? J’ai consciencieusement épluché les petites annonces, envoyé de multiples CV, répondu à des convocations, passé plusieurs entretiens d’embauche… Il m’est apparu très vite – je le soupçonnais, mais n’avais pas voulu, jusque là, en prendre pleinement conscience – que les études d’Histoire que j’avais suivies ne correspondaient ni aux attentes ni aux exigences du monde du travail… Il me fallait, si je voulais trouver un emploi, rabattre de mes prétentions et accepter de remplir des tâches pour lesquelles je ne me sentais pas la moindre attirance…

Sans doute aurais-je réagi autrement si j’avais été poussée par la nécessité, si j’avais dû travailler pour vivre, mais le salaire de Patrice me permettait de subvenir très largement à mes besoins… Maintenant du moins que, grâce à l’intervention de mon beau-père, ma situation financière s’était rétablie et que je ne me laissais plus entraîner par mes fréquentations – j’avais complètement coupé les ponts avec mes anciens « amis » – à des dépenses pharamineuses… Aussi me suis-je peu à peu montrée beaucoup moins assidue dans mes recherches… Au point de finir par les abandonner complètement…

À mon beau-père qui voulait régulièrement savoir où « ça en était », si j’avais enfin trouvé quelque chose, je servais systématiquement le même couplet… Pas encore, non… C’était la crise… Les entreprises rechignaient à embaucher… Mais enfin je ne me décourageais pas… C’était pas mon genre… J’étais sur une piste… Deux même… Ça allait finir par déboucher… Il y avait pas de raison… Il ne disait rien… Pas le moindre commentaire… Jamais…

Je faisais quoi de mes journées du coup ? Rien… Strictement rien… Je me levais à onze heures… Quand ce n’était pas midi… Je traînassais dans la salle de bains… J’avalais quelque chose vite fait… Sur le pouce… Et j’allais faire un tour… Au hasard… J’errais par les rues… J’entrais dans une boutique… Une autre… J’achetais parfois une babiole… S’il faisait beau je m’installais à une terrasse de café… Je regardais passer les gens… Avant de rentrer je faisais provision de magazines que je feuilletais, devant la télé, jusqu’à des trois ou quatre heures du matin…
Et le lendemain ça recommençait… Pareil… Exactement pareil…

« Ça fait un moment que je vous observe, là, de la terrasse, sur le trottoir d’en face… Et franchement, vous respirez pas la joie de vivre, hein… » Un type, un brun, aux yeux veloutés pétillants de malice, debout à côté de ma table… « Vous permettez ? » Il n’a pas attendu la réponse… Il a tiré une chaise et s’est installé en face de moi… D’autorité… Et il a parlé… Il a plaisanté… J’ai ri aux éclats… J’étais bien… Tellement bien… Il s’est fait séducteur… Charmeur… Tout en nuance… Tout en subtilité… J’ai perdu pied… Je perdais pied… Je me suis secouée… Levée… « Faut que j’y aille… On m’attend… » Il s’est levé aussi… « Merci de m’avoir accordé un si délicieux moment… Peut-être aurons-nous à nouveau l’occasion… Je suis très souvent là… En face… » « Peut-être, oui… » Et je me suis enfuie…

C’est moi qui l’ai appelé… Mon beau-père… Il pouvait venir ? Une demi-heure après il était là… « Qu’est-ce qui se passe ? Qu’est-ce qui t’arrive ? » Rien… Enfin si ! C’était pas vrai… Qu’est-ce qui n’était pas vrai ? Pour le boulot… J’avais menti… J’en cherchais pas… J’en cherchais plus… « Ah ! Et tu t’es remise en danger… » « Non, mais… » « Si ! Tu te remets en danger… Forcément… D’une façon ou d’une autre… » Il n’a pas demandé comment… Il n’a rien demandé… « C’est plus fort que toi… Tu peux pas t’empêcher… Je t’avais prévenue pourtant… Je t’avais pas prévenue ?... Dit qu’il fallait absolument que tu te mettes au travail ? » « Si… Oui… Mais… » « Mais tu n’en fais qu’à ta tête… Tu n’en fais toujours qu’à ta tête… Tu veux toujours te croire beaucoup plus forte que tu ne l’es en réalité… Sans arrêt il faut être derrière toi… Sans arrêt… Une vraie gamine écervelée… Irresponsable… Bon… Mais puisque, décidément, tu ne comprends que ça… Viens ici ! » J’ai obéi… Il a mis un pied sur la petite table basse, a passé un bras autour de ma taille, m’a courbée sur son genou… A retroussé ma robe… Qu’il a exigé que je maintienne relevée… « Plus haut ! » J’ai encore obéi… Il m’a baissé la culotte sur les cuisses… Ça a été plus intense encore que la première fois… Et beaucoup plus long… « Tu promets de faire des efforts ? » J’ai promis… Dans un souffle…

Soulagée… Apaisée… Je n’y retournerais pas là-bas… J’en étais sûre… Sûre et certaine…

Je vous embrasse

CAMILLE                    
       

jeudi 4 octobre 2012

Escobarines: La stagiaire ( 2 )


– On a parlé… Avec les filles qui vous tambourinent le derrière… On a parlé… Et elles m’ont raconté de ces trucs sur vous !
– Faut pas croire tout ce qui se dit…
– Je sais bien, mais quand tout le monde dit la même chose…
– Et quoi au juste ?
– Comme si vous le saviez pas ! En attendant qu’est-ce que vous aimez ça, à ce qu’il paraît, la ramasser la fessée ! Même qu’un jour vous lui avez carrément laissé une flaque sur le pantalon à Justine quand vous vous êtes relevée… Et qu’une autre fois… Non, mais comment elles vont se marrer mes copines d’ici quand je vais leur raconter tout ça…
– Tu vas pas… ?
– Oh, ben si, attendez ! Si ! C’est pas tellement souvent qu’on a l’occasion de rigoler… Vous devriez être contente en plus… Parce que ça va vous attirer du monde… Ils vont défiler dans votre boutique les gens… Ou devant… Ça, c’est sûr qu’ils vont défiler…
– Mais qu’est-ce tu veux à la fin ? De l’argent ? De l’argent pour te taire ? C’est ça ? Tu veux combien ?
– Non, mais ça va pas ! Vous êtes vraiment pas bien, hein, vous, par moments… Pour qui vous me prenez ?
– Mais alors quoi ? Tu veux quoi ?
– Mais rien du tout… Enfin si ! Si ! Peut-être… Peut-être qu’il y a un truc qui me plairait bien… Ce serait de vous en flanquer une de fessée…  
– Toi ? Oui, ben alors là sûrement pas ! Tu peux toujours courir…
– Oui… Vous avez raison… C’est idiot comme idée… Non… Vaut bien mieux que j’aille le raconter partout ce que j’ai vu là-bas…
– Mais c’est pas vrai cette gamine ! Il y a rien à en tirer… Rien…   
– Ah, oui ?! Vous trouvez ? En attendant si jamais vous changez d’avis vous me le dites… Avant ce soir… Après ce sera trop tard… Parce que plein de monde je dois voir en boîte…

– J’ai réfléchi…
– Et alors ? Le résultat ?
– Finissons-en…
– Oui… Vous avez raison… Finissons-en… Bon, eh bien déshabillez-vous alors !
– Ici ? Au magasin ? Ah, non ! Non !
– Il est baissé le rideau… Personne peut se rendre compte…
– Oui, mais quand même ! C’est le magasin…
– Ben justement ! C’est là que j’ai envie… C’est là que je veux… Parce que c’est là qu’on est toute la journée… Que vous m’en avez fait voir des vertes et des pas mûres… Allez ! Dépêchez-vous, va ! On va pas y passer la nuit…
­– Tu es…
– Je suis ?
– Non… Rien…
– Oui, ça vaut mieux… Bon, ben désapez-vous alors, Madame ma patronne… Désapez-vous ! Allez ! Tout ! Complètement… Eh ben voilà ! Voilà !

– Ça va durer longtemps ?
– Quoi donc ?
– Que tu me laisses là comme ça à attendre…
– On n’est pas pressées… Tout notre temps on a…
– Toi, peut-être ! Mais pas moi…
– Oh, mais faut savoir le prendre… Faut savoir savourer les bons moments… Non, vous croyez pas ? Qu’est-ce qu’il y a ? Vous tremblez… Vous avez froid, c’est ça ? Eh ben, on va vous réchauffer, vous allez voir… Moi, je vais aller m’installer à la caisse… Et vous regarder faire le ménage…
– Tu peux pas me demander ça…
– Ben pourquoi ? Vous me le demandez bien, vous… Et tous les jours…
– Tu vas quand même pas comparer…
– Ce que vous semblez oublier, Madame ma patronne, c’est que ce soir les ordres, c’est moi qui les donne… Alors l’aspirateur est là… À droite… Sous l’escalier… Le seau et les produits aussi…

– On voit vraiment que vous avez pas l’habitude, hein ! Vous vous y prenez comme un manche… Mais ça fait rien… J’ai quand même passé un bon moment… Ah, si, si ! Un excellent moment… Bon, mais il est temps de passer aux choses sérieuses… Là-haut je vais monter vous la donner la fessée… Et vous m’en direz des nouvelles… Vous allez adorer, vous allez voir… Beaucoup plus encore que là-bas… Avec les autres… En route, on y va !    

lundi 1 octobre 2012

Les confidences de Camille ( 6 )


La suite de mon récit ? Eh bien la voici, ma chère Camille…
Quand je vous ai laissée j’étais dissimulé dans cette cabane de jardin à surveiller, des heures durant, la porte du garage… Ma patience – mon obstination ? – a fini par être récompensée… Par un beau jeudi d’Octobre en effet, sur le coup de trois heures, Clara est venue s’y engouffrer d’un pas décidé… Son complice – j’en étais convaincu – n’allait pas tarder à faire son apparition… J’allais enfin savoir… Eh bien non ! Non… Personne ne l’a rejointe… Et elle est ressortie de là-dedans seule, une quarantaine de minutes plus tard, comme elle y était entrée… Un empêchement de dernière minute ? Peut-être… Mais il m’était né un soupçon… Un soupçon qui s’est trouvé confirmé quand je l’ai vu réprimer une grimace en s’asseyant, le soir, à table, au retour de la cuisine… Elle-même… Évidemment… Elle se le faisait elle-même… Toute seule…

Le lendemain j’ai regagné ma province… C’était les Vacances de Toussaint et j’en ai passé la plus grande partie à m’efforcer de mettre mentalement au point un stratagème qui me permettrait de la voir à l’œuvre dans ce fameux garage… J’ai envisagé tout ce qui était raisonnablement envisageable… Mais, chaque fois, je venais buter sur un obstacle qui rendait la chose impossible… Parce que je ne visualisais les lieux que de mémoire ? C’est ce dont j’ai voulu me convaincre… Sur place je l’aurais trouvée la solution… Elle me serait apparue avec une lumineuse évidence… Et j’ai avancé mon retour… De deux jours…

Je n’avais pas prévenu… On me verrait arriver… Bien m’en a pris… Parce que… Ça venait de la salle de séjour… Des voix… La télé… Oui… C’était la télé… Je suis entré… Clara était étendue sur le canapé… Entièrement nue… Les jambes relevées, ouvertes, les yeux rivés à l’écran, elle faisait aller et venir – lentement… très lentement – un énorme gode couleur peau le long de ses lèvres… Quelques secondes… Quelques trop brèves secondes… Elle a tourné la tête, découvert ma présence dans l’embrasure de la porte… Un cri… Et une fuite… Une fuite éperdue en direction de sa chambre… Une fuite qui m’a offert le spectacle de ses fesses zébrées d’une fouettée toute récente…

Un quart d’heure plus tard elle frappait à ma porte… « On peut parler un peu ? Avant qu’Ivan rentre… » Bien sûr qu’on pouvait… Bien sûr… Elle s’est assise, genoux serrés, au bord de mon lit… « Je suis désolée… Mais je pouvais pas me douter… » C’était moi plutôt… J’aurais pu prévenir… J’aurais dû… Elle a haussé les épaules, esquissé un sourire… « De toute façon ce qui est fait est fait… On peut pas revenir dessus… Mais quelle opinion tu dois avoir de moi maintenant ! » Hein ? Ah, mais non ! Non ! Pas du tout ! Ça changeait rien du tout… Pourquoi ça aurait dû changer quelque chose ? « Tu es gentil… Mais si ! Forcément… Ça peut pas être autrement… » C’était elle plutôt qu’avait une drôle d’opinion de moi… Parce que qu’est-ce qu’elle s’imaginait ? Que je m’en donnais pas, moi, du plaisir ? Mais tout le monde s’en donnait… Fallait pas être hypocrite… Tout le monde… « Oui… Mais il y a pas que ça… Il y a… Parce que tu t’es aperçu, je suppose… » Quoi ? La fessée ? Et alors ? Il y avait vraiment pas de quoi en faire tout un plat… Elle était pas la seule… Si elle y trouvait son compte… C’est sûrement pas moi qu’allais y trouver quoi que ce soit à redire… « Oui… ben c’est pas le cas de tout le monde… » « Ivan ? » « Ivan, oui ! Ça, pour lui, c’est quelque chose qui passe pas… Et qui passera jamais… » « Il sera pas au courant… Il y a aucune espèce de raison qu’il soit au courant… » « Merci… »

Elle pouvait si elle voulait, hein… On déjeunait en tête à tête, tous les deux, le lendemain matin… Elle pouvait… « Je peux ? Je peux quoi ? » En parler… Parce que ça c’était le genre de choses qu’on avait forcément besoin de partager avec quelqu’un… Fallait pas rester tout seul avec… Sinon… « Sinon on finit par croire qu’on est complètement cinglé… Je sais… » Et les larmes lui sont montées aux yeux… « Excuse-moi ! Je suis idiote… » « Vous n’êtes pas idiote, non, mais vous voyez bien qu’il faut que vous en parliez… » « Et pas seulement de ça… J’en crève de pas parler… Jamais… Parce qu’il a plein de qualités Ivan… Si, c’est vrai… Mais aussi tout un tas d’idées très arrêtées… Sur tout… Et si on rentre pas dans le moule… Alors tu finis par te taire… Par ne plus rien dire de ce qui est important pour toi… »

Et elle a parlé… Toute la matinée… Elle a parlé… parlé… parlé… D’elle… D’eux… De son enfance… De ses rêves… Elle a laissé s’écouler… Tant de choses… Mais pas « ça »… Elle n’en a pas dit un mot… Pas encore…

Elle s’est brusquement arrêtée sur le coup de midi… « Il va rentrer… Mais ça fait du bien… Qu’est-ce que ça fait du bien ! »

Je vous embrasse, Camille…

FLAVIAN