samedi 29 juin 2019

Les fantasmes de Lucie (58)



Tableau d’Anders Zorn

– On va où ?
– Tu verras bien.
La nuit était tombée. On roulait, depuis un bon moment déjà, en rase campagne. De temps en temps un hameau. Un bourg. Des pans de forêt.
Pourquoi il voulait pas le dire ?
– Parce que.
– Parce qu’on va retrouver Luc et Ophélie. C’est ça, hein ?
C’était pas ça, non.
– C’est quoi alors ?
– C’est que tu as triché, l’autre jour, dans les bois. Tu devais revenir toute nue à la voiture. Tu l’as pas fait. Alors on va reprendre les choses là où on les avait laissées. En mettant la barre un peu plus haut.
– Avec vous, je crains le pire.
– Pour ton plus grand plaisir, tu le sais bien.
Ça, je devais reconnaître que…

Il a garé la voiture devant une vieille maison aux poutres apparentes, avec une grande cheminée en pierre.
Il a commencé par y faire du feu.
– Que tu n’aies pas froid. Les nuits sont un peu fraîches maintenant.
Y a suspendu un chaudron.
– Parce que si on veut de l’eau chaude… C’est la campagne ici. Et j’ai laissé la maison en l’état. C’est ce qui fait son charme.
On s’est installés devant.
– Bon, alors… Comme tu peux le voir, il y a deux fenêtres.
Ça, j’avais remarqué, oui.
Sans rideaux. Et avec des volets qui vont rester ouverts. Il y a aussi des voisins. Un vieux célibataire. À une centaine de mètres. À peine. Un peu plus loin, un couple, avec un fils de vingt ans. Un peu plus loin encore un autre célibataire, plus jeune celui-là. La quarantaine. Comme ils sont à l’affût de tout, ils ont à coup sûr entendu la voiture. Et il n’y aurait rien d’étonnant à ce que l’envie de passer jeter un coup d’œil prenne l’un ou l’autre d’entre eux. Histoire de se rendre compte si je suis tout seul ou pas. Et, le cas échéant, de profiter un peu de la situation.
Je le voyais venir, là. Je le voyais vraiment venir.
– Et tu ne voudrais tout de même pas les faire se déplacer pour rien. Ce serait d’une impolitesse ! Tu n’es pas de mon avis ?
Non. Enfin, si ! Oui. Peut-être un peu.
– Un peu ?
J’ai ri. Comme il me connaissait bien !
– Allez, Lucie ! Il fait bon maintenant.
Allez ! Et je me suis déshabillée. Une fois en sous-vêtements, j’ai levé sur lui un regard interrogateur.
– Tout ?
– Évidemment, tout.
Tout.
Et je suis venue me rasseoir.
– Oh, ben non ! Non ! Ça vaut pas ! Va ranimer le feu, tiens, plutôt !
Longuement. En prenant tout mon temps.
– Tu sais qu’elle est encore là, ta fessée d’avant-hier ? Bien installée. Joliment rougissante. S’il y en a un, là, le nez collé au carreau, il doit être aux anges.
Il m’a rejoint, a passé un bras autour de mes épaules.
– C’est excitant, hein, de pas savoir. Il y a quelqu’un ? Il y a personne ? Je suis sûr que t’es toute trempée.
Il m’a passé une main entre les cuisses.
– Qu’est-ce que je disais ! Oh, mais ça mérite, ça ! Ça mérite. Et pas qu’un peu ! Une bonne fessée. Par-dessus l’autre. Mais là-haut. Dans la chambre. Ça, ils y ont pas droit. Pas encore.
Et on a gravi l’escalier.

jeudi 27 juin 2019

Fessées punitives (9)


J’y jetais un coup d’œil, mais alors juste un coup d’œil, comme ça, vite fait, sur Internet. Un truc qu’un type avait mis au point pour gagner au Keno. À coup sûr. Sur le long terme, à ce qu’il disait, on rentrait largement dans ses frais. Et même, dans l’immense majorité des cas, on dégageait un coquet petit bénéfice. Pourquoi pas ? À voir. Je pouvais toujours tester. À blanc, bien sûr. Sans engager le moindre centime. Pour me faire une idée.
Une main s’est posée sur mon épaule. Celle de Julien. Que je n’avais pas entendu arriver.
– Tu fais quoi, là ?
J’ai précipitamment rabattu le capot de mon ordinateur.
– Rien.
– T’as la conscience tranquille, on dirait.
– Mais non, Julien. Non, je t’assure. Je regardais juste. Comme ça. Simple curiosité.
– Toi, tu finirais par y repiquer…
– Sûrement pas. Alors là, il n’en est pas question.
– Mouais…
– Si, c’est vrai, hein ! Il faut que tu me croies, Julien. Tu me crois ?
– Il a quel âge, le Valentin d’Océane ?
– Au juste, je sais pas. Dans les vingt-cinq. Par là. Pourquoi ?
– Et le Clément de Bérengère ?
– Je l’ai jamais vu. Mais à peu près pareil. Sûrement. Mais pourquoi tu me demandes tout ça ?
– Parce que je te connais et que je sais que la perspective d’être, à ton âge, fessée devant deux gamins n’a rien, pour toi, de particulièrement séduisant, c’est le moins qu’on puisse dire, et qu’il me paraît souhaitable de procéder, par précaution, à une petite piqûre de rappel.
– Je t’assure, Julien, que…
– Dans ton cas, et je préfère être très clair dès à présent là-dessus, si tu devais rechuter, il n’y aurait pas de passage par la case « Fessée devant les copines. » On irait directement à la case « Fessée devant les messieurs des copines. » Alors à bon entendeur…
– Tu n’as pas le moindre souci à te faire.
– J’espère. Parce que reconnais que j’ai été patient. Et de bonne composition. Beaucoup plus que de raison. Par ta faute, on est condamnés à vivre au ralenti. Sans pouvoir s’offrir quelque plaisir que ce soit. On ne part jamais en vacances. On ne peut pas. J’ai vendu ma moto. On roule dans une voiture qui affiche plus de deux cent mille kilomètres au compteur. Et on n’a pas les moyens de s’en payer une autre.
– Je sais tout ça, Julien, je sais tout ça. Je m’en veux assez.
– Alors si tu devais en rajouter une couche…
– Je ne le ferai pas. Il est hors de question que je le fasse.
– En es-tu si sûre ?
– Absolument !
– Tu es tout de même tentée. Tout-à-l’heure, à l’ordi…
– C’était juste… Je t’ai dit… N’importe comment, tu as visé en plein dans le mille, tu sais. Parce que, franchement, une fessée devant Valentin et les deux autres, là, comment ce serait humiliant. Je n’ai pas du tout la moindre intention de m’exposer à ça. D’ailleurs…
– D’ailleurs ?
– Tu veux être sûr, absolument certain, que je ne recéderai pas à la tentation ?
– Et comment !
– Eh bien, si jamais je le fais, si jamais je recommence, t’en parleras à Cynthia et Kevin.
– Cynthia et Kevin ? Nos amis ?
– Évidemment, eux. Qui tu veux d’autre ? Tu leur diras que tu es obligé de me fesser et tu leur diras pourquoi. Et alors là, je peux te dire que c’est, pour moi, une perspective totalement dissuasive. Tu le feras ?
– Je le ferai.
– Et, du coup, tu n’auras pas à le faire. Qu’ils sachent, eux, mais j’en mourrais de honte !

lundi 24 juin 2019

Au lit



Tableau de Jacques Wely

Dans mon demi-sommeil, je l’entends. Je l’entends de l’autre côté de la cloison. Notre voisin. Le petit étudiant. Beau comme un cœur. Et rougissant comme une adolescente. Je l’entends. Il s’est douché. La cafetière a crachoté. Le micro-ondes a vrombi. Maintenant il est sagement assis à son bureau. Il a mis la musique en sourdine. Pour ne pas me réveiller. Il ne faut surtout pas qu’il me réveille. Il ne faut surtout pas que je me lève. Parce que si, à dix heures tapantes, quand Christophe va rentrer, je ne suis pas levée, je vais me prendre une fessée. Il le sait. Carabinée. Une fessée dont il va pouvoir suivre tout à loisir les péripéties, le cœur battant, l’oreille collée à la paroi.

Plus que dix minutes. Il doit prier tous les saints du paradis. Pourvu qu’elle ne se lève pas. Pourvu… Pourvu… Je le fais quelquefois. Je m’extirpe des couvertures. Au dernier moment. En riant sous cape. Comme il doit être déçu !
Mais pas aujourd’hui. Aujourd’hui j’ai décidé d’être gentille. Bonne fille. Je vais attendre, bien calée dans mes oreillers, le retour de Christophe. Et ma fessée. Je tousse. Je me retourne dans mon lit. Qu’il entende le sommier grincer. Qu’il se rassure : Non. Non. Elle n’est pas levée.

La porte. Et Christophe.
Un petit coup d’œil dans la direction de la cloison.
Il a compris. Et il explose.
– Non, mais c’est pas vrai ! C’est pas vrai que t’es encore au pieu !
– Je me lève, Christophe. Je me lève.
– Il est bien temps ! Tu devais pas aller chercher du travail ?
– Si ! Mais j’y vais ! J’y vais !
– J’espère bien, mais d’abord…
– Non ! Non ! Pas la fessée ! Ah, non, hein !
– Ah, si ! Et comment ! Parce que j’en ai assez, figure-toi ! Assez de faire les postes, de me crever la nuit au boulot alors que toi, tu te prélasses toute la sainte journée au lit.
Et il m’empoigne. Me force à me tourner sur le ventre.
J’entre pleinement dans mon rôle. Je me débats. Je vocifère. Je proteste. Je supplie. Je menace.
Lui aussi, il est dans le sien. Il relève ma chemise de nuit.
– Non, Christophe, non !
Il me découvre les fesses. Et il tape. Ça tombe dru. Bien claquant. Bien sonore. Sûr que l’autre à côté il doit entendre.. Et se régaler. Il a beau avoir une belle petite gueule d’ange à qui on donnerait le Bon Dieu sans confession, pas besoin de t’en faire qu’il est quand même comme les autres. Qu’elle doit être dressée toute droite sa queue. Qu’il doit s’acharner dessus comme un perdu. Et qu’il va jouir. Pour moi. Grâce à moi.
Je piaule de plus belle. Je m’époumone tant que je peux.
– Ça fait mal ! Oh, que ça fait mal !
Et tellement de bien. C’est tout trempé entre mes cuisses.

samedi 22 juin 2019

Les fantasmes de Lucie (57)



Tableau de Jos Vital Branco Nalhoa

Il m’a jeté un regard stupéfait.
– Mais… Mais…
– Eh, oui, mon cher ! C’est comme ça, les femmes. Tu les lâches à poil dans la nature et elles trouvent le moyen de revenir tout habillées.
Et il a fallu que je lui raconte. Tout. Le couple. La tente. Bien en détail.
– Mouais ! T’as pas vraiment rempli ta part du contrat en fait ! Faudra recommencer alors du coup.
– Oh, non !
– Eh, si !
– Mais c’est horrible !
– J’espère bien.

Dès le lendemain, il a voulu qu’on leur rende une petite visite.
– Que je voie à quoi ils ressemblent, ces oiseaux-là !
Ils étaient habillés, cette fois, et se sont avancés à notre rencontre, souriants, dès qu’ils nous ont aperçus.
– Luc…
– Enchanté ! Victor…
– Et Ophélie…
Quant à moi, Lucie, tout le monde me connaissait.
– Mais venez ! Venez vous asseoir…

Et, évidemment, la conversation a tout aussitôt roulé sur ma petite incursion de la veille.
– On n’en croyait pas nos yeux.
Des yeux que Luc, lui, avait gardés tout du long grands ouverts.
Ophélie a même cru bon de préciser.
– Surtout quand il a vu dans quel état Lucie avait le derrière.
Oh, mais elle s’en plaignait pas, hein ! Au contraire.
– Parce qu’après, sous la tente, c’est moi qu’ai tiré les marrons du feu. Cette nuit de folie !
D’ailleurs, à ce propos, c’était son anniversaire à Luc, là, aujourd’hui.
Ah !
Et Victor a fait remarquer que, pour un anniversaire, il y avait toujours un cadeau.
– Qu’est-ce t’en penses, toi, Lucie ?
Oui, oh, je les voyais venir, là, tous les trois. Gros comme une maison.
– Hein ? Qu’est-ce t’en penses ?
Ce que j’en pensais, c’est que Luc crevait d’envie de contempler une nouvelle fois mes fesses cramoisies.
L’intéressé a confirmé, à grands coups de menton convaincus.
Et Victor a conclu.
– Eh, ben voilà ! Tu sais ce qu’il te reste à faire.
Ben, tiens ! Je savais, oui. Et je me suis exécutée. Je me suis déculottée. De bonne grâce. Ça lui faisait tellement plaisir à Luc. Aux autres aussi, d’ailleurs.
Et derrière moi, tout près, penchés sur mon derrière, ils ont commenté à qui mieux mieux.
– Comment ça a changé depuis hier !
– Elles ont foncé, les couleurs.
– Et elles se sont étendues au large.
– En tout cas, c’est ravissant.
Il trouvait aussi, Victor, oui. Même si, tout bien considéré, ça aurait eu besoin, à son avis, d’un petit rafraîchissement.
– Si j’ose dire…
Ils ont fait chorus. À eux aussi, ça paraissait évident. Il fallait en remettre une petite couche. Ça s’imposait.
Victor a suggéré.
– Et si Luc s’en chargeait ? Comme c’est son anniversaire…
– Moi ? Mais je l’ai jamais fait !
– Raison de plus !
Il ne s’est pas fait longtemps prier. Moi non plus. Et je me suis retrouvée couchée en travers de ses genoux, sa queue tendue bien calée contre ma cuisse.
Il a tapé. De toutes petites claques, légères, retenues.
– Non, mais vas-y ! Carrément ! Elle sent rien, là.
Un peu plus fort. Presque pas. Tout attendrissant. Et tout émoustillant de me dire que c’était moi, moi et personne d’autre, qui étais en train de lui faire découvrir la fessée, de lui dépuceler pour ainsi dire la main.
Et je l’ai encouragé. Supplié.
– Tape ! Tape vraiment ! C’est trop bon…
Alors il s’est lâché. De grands coups réguliers, lancés avec une force inouïe. J’ai crié. Il a hésité, un court instant, et il a repris de plus belle. Ça rebondissait en grêle sur ma peau déjà tuméfiée. Insupportable. Un véritable supplice. Un véritable régal. J’ai hurlé de plus belle. Il a tapé de plus belle. J’ai gigoté. J’ai battu des jambes. Je me suis contorsionnée. Il a giclé contre ma cuisse. Sans s’arrêter de taper. Et moi aussi j’ai joui. À grands feulements éperdus.
J’ai relevé la tête. Là, dans l’herbe, tout près, Ophélie et Victor étaient en pleine action.

jeudi 20 juin 2019

Fessées punitives (8)


Océane me mitraillait de questions.
– Et Bérengère ? Comment elle a réagi, Bérengère ? Ah, oui ? Elle avait mal pour moi, quoi, en somme ! Et Émilie ? Oui, oh, elle en pensait pas moins. Elle sait très bien ne rien laisser transpraître de ce qu’elle ressent quand elle veut, Émilie. Et vous, Lucile ? Et vous ? Comment vous l’avez vécu, tout ça ?
– Ça fait dix mille fois que tu me le demandes.
– C’est pour savoir… Parce que j’ai eu honte, oui, bien sûr que j’ai eu honte, mais pas tant que ça, finalement. Je m’attendais à pire. À bien pire. Et j’ai peur, du coup.
– Peur ? Et de quoi donc ?
– Je suis plus sûre du tout que ça va m’empêcher de replonger. Et là, si je recommence, il y a toutes les chances que, cette fois, Valentin, il baisse les bras. Qu’il considère que je suis définitivement irrécupérable. Je l’entends d’ici : « Si même devant tes copines, ça a pas réussi à te vacciner, il y a plus rien à faire. C’est pas la peine d’insister. » Et il va me larguer.
– Si t’en es si sûre que ça…
– À quatre-vingt-dix-neuf pour cent.
– Eh ben alors ! Fais ce qu’il faut pour que ça n’arrive pas.
– Oui, mais je me connais. Je vais tenir le coup un mois. Deux. Peut-être trois. Et puis ce sera plus fort que moi. Il y aura une tentation. À laquelle je finirai par céder, la peur au ventre. En me disant qu’avec un peu de chance il se rendra compte de rien. Et, à supposer que tout se soit bien passé, je recommencerai. De plus en plus souvent. En prenant de moins en moins de précautions. Jusqu’au jour où, forcément… Et là !

Elle a voulu qu’on passe voir Émilie.
– Elle est toujours de bon conseil, Émilie. Et c’est son jour de congé au bar. Elle doit être chez elle, à bosser ses cours.
Effectivement, elle y était. En plein travail sur son ordi.
– Et j’ai pas intérêt à m’écarter. Parce que, ce soir, il va tout passer au crible. Et il a l’œil. Alors, si je glande, pas besoin de vous faire un dessin…
Cela étant, elle pouvait quand même nous consacrer une petite demi-heure.
– C’est pas un bourreau non plus. Il sait faire la part des choses.
Et Océane a vidé son sac.
– Mouais… Si tu pars déjà du principe que tu tiendras pas le coup, tu le tiendras pas, c’est obligé, ça ! Maintenant, d’un autre côté, si tu le tiens pas, c’est pas la catastrophe non plus. Il y a toujours des issues de secours.
– Je vois vraiment pas lesquelles.
– Joue franc jeu ! Anticipe ! Dis-lui qu’elle t’a profondément mortifiée cette fessée que t’as reçue devant nous, d’autant plus mortifiée qu’elle était largement méritée. Alors sûrement qu’après une leçon pareille, elle allait t’être complètement passée l’envie de boire, mais que si, d’aventure, on savait jamais, elle te reprenait, alors là… Alors là… « Tu me jures que tu laisseras pas passer, hein, Valentin ? Que tu feras ce qu’il faut pour m’empêcher, que tu mettras la barre plus haut. »
– La barre plus haut ? C’est-à-dire ?
– Une correction non plus devant nous, cette fois, mais devant nos trois fesseurs réunis pour l’occasion.
– Hou là là !
– L’avantage pour toi, s’il accepte, c’est que tu retardes les échéances, c’est que tu introduis une nouvelle étape avant une éventuelle rupture.
– Il voudra peut-être pas.
– Si ! À condition que tu la joues fine et que t’arrives à le persuader qu’en réalité l’idée vient de lui…
– Oui, mais recevoir une fessée comme ça devant trois types !
– Ça vaut quand même mieux que d’être larguée, non ?
– Ah, ça, oui !
– Et tant mieux si cette perspective t’effraie. Elle sera dissuasive. C’est bien le but recherché au final, non ?
– Si !
– Eh ben alors !

lundi 17 juin 2019

Réprimande



Tableau de Carl Larsson

Elle fond sur moi. Elle est furieuse.
– C’est inadmissible, Mélanie. Inadmissible !
Je baisse la tête.
– Eh, bien ! Dites quelque chose au moins !
– Je demande pardon à Madame.
– Vous demandez pardon. Ah, c’est facile. Ah, c’est commode. Mais c’est loin, c’est très loin d’être suffisant.
– Je supplie Madame…
Elle hausse les épaules.
– Vous en prenez beaucoup trop à votre aise ces derniers temps. Il faut que cela cesse.
Et elle me couvre d’une infinité de reproches. Mon travail laisse, ô combien !, à désirer. Mon comportement aussi.
– Vous devenez insolente. Vous répondez…
– Madame…
– Taisez-vous ! Je crois qu’il va malheureusement falloir que nous nous passions de vos services.
Je tombe à genoux.
– Que Madame me punisse, je l’en conjure, mais que Madame me garde !
– Vous me demandez là une faveur que vous êtes bien loin de mériter.
– Madame est si bonne…
Elle fléchit. Je la sens fléchir.
– Il faut vous reprendre, Mélanie. Il faut absolument que vous vous repreniez.
– Je promets à Madame de m’y employer.
Elle fléchit de plus en plus.
– Ne vous estimez pas quitte pour autant.
Je sais. Et je sais ce qu’il me reste à faire.
Je me lève. Je m’agenouille. Je relève ma robe. Je lui tends ma croupe.
– Que Madame me punisse ! Je l’ai mérité.
Elle reste un long moment derrière moi, silencieuse. Finit par m’y lancer une petite claque.
– Vous n’y couperez pas ! Mais nous allons attendre le retour de Monsieur.
– De Monsieur !
– Y verriez-vous un inconvénient ?
Si ! Oui. Mais non.
– Non, Madame ! Non.
– Alors, parfait !

Je prends le pardessus de monsieur. Son chapeau. Il me soulève le menton du bout du doigt.
– Vous avez encore fait des vôtres, à ce qu’il paraît, Mélanie.
Je baisse les yeux, confuse.
– Oui, Monsieur !
– Vous savez que ce n’est pas bien du tout !
Je sais, oui.
Et Madame ordonne.
– Allons ! En position !
J’obéis. Mes fesses à nu. Tendues. Ma robe maintenue bien haut. Des deux mains.
Et elle cingle. À tout-va.
Je me mords les lèvres pour ne pas crier.
C’est long. Ça dure.
Monsieur intervient.
– Plus fort, ma chère ! Plus fort ! Si vous voulez que la leçon porte.
Plus fort. Beaucoup plus fort. Ça mord. Ça entame. Je crie. Je gigote. Je me tortille. Sans la moindre pudeur.
Ça s’arrête d’un coup.
Ils me laissent là. Ils s’en vont. Précipitamment. Sans un mot.

Dans la chambre, à côté, il y a d’abord ses gémissements à elle. Ses plaintes éperdues. Puis ses rugissements à lui. Rauques. Bestiaux.
C’est à moi qu’ils doivent leur plaisir. À moi.
Ils recommencent.
Ma main s’égare entre mes cuisses. Et je les accompagne.

samedi 15 juin 2019

Les fantasmes de Lucie (56)




Tableau d’Anders Zorn

Je n’arrivais pas à me décider à me mettre en route. Parce que, d’un côté, il avait sans doute raison : il était peu probable que je croise quelqu’un, là, au milieu des bois et j’en serais très vraisemblablement quitte pour parcourir les deux ou trois cents mètres qui me séparaient de la voiture dans un état d’appréhension finalement très excitant. Mais, d’un autre côté, ça ne pouvait pas être totalement exclu non plus. Avec la chance que j’avais… Et mon imagination s’emballait. J’allais croiser un groupe de jeunes en VTT. Ou bien encore tout un escadron de militaires en exercice. Et… Et quoi ? Ben, ce serait peut-être pas si désagréable que ça finalement. Non, mais et puis quoi encore ? J’avais pas d’autres idioties à me dire ?

Et si je restais là, sans bouger, à l’attendre ? Il serait bien obligé de finir par venir me chercher. Oui. Et tu passeras pour une belle dégonflée. Tu le décevras. Il prendra ses distances. Et tu pourras dire au revoir aux moments fabuleux que vous passez ensemble. Et au merveilleux avenir dont tu t’es mise à rêver secrètement avec lui.
C’est ce qui m’a déterminée. J’ai attaqué le sentier, le cœur battant. Rien. Personne. Juste le chant des oiseaux. Et, parfois, un frémissement dans les feuilles mortes. La vie de la forêt. Rien d’autre. J’avais déjà parcouru une bonne cinquantaine de mètres quand… un embranchement. Auquel, à l’aller, je n’avais pas prêté la moindre attention. Par où on était descendus ? Celui de droite ? Celui de gauche ? Je n’en avais pas la moindre idée. Plutôt à droite. Sans certitude. Sans véritable conviction. Quelques mètres. Il m’a semblé entendre des voix. Je me suis arrêtée. J’ai tendu l’oreille. Non. Rien. J’avais sûrement rêvé. J’ai poursuivi ma route, vaguement inquiète : je ne reconnaissais rien. Il allait falloir que je fasse demi-tour. Oui, il allait falloir, mais j’ai malgré tout continué. Encore un peu. Et j’ai brusquement débouché sur une clairière. Et sur un couple allongé sur des plaids devant une tente. La quarantaine. Entièrement nus, eux aussi. On s’est regardés, interloqués. C’est la femme qui a rompu le silence.
– Alors ? En promenade ?
Et on a été pris d’un immense fou rire tous les trois.
Non, j’étais pas en promenade, non. Et je leur expliqué. Par bribes. Le challenge. Le défi. La fausse route empruntée.
Ce qui les a beaucoup amusés.
Ils ont commenté. Voulu des précisions. Des détails. De plus en plus de détails.
Je me sentais en confiance avec eux. Alors j’ai fini par le leur dire. Ils auraient bien fini, de toute façon, par s’en apercevoir.
– Non, et puis, pour rajouter un peu de piment à la situation…
Et je me suis retournée.
Ça n’a été qu’un cri.
– Wouah ! Cette fessée ! Comment vous avez dû la sentir passer, celle-là !
– Oh, pour ça, oui, mais bon !
Je leur ai à nouveau fait face.
Il bandait le type. Tout ce qu’il savait. Mais alors là, la méga érection.
Elle lui a envoyé une petite pichenette dessus.
– Ah, ben ça, Luc, c’est son truc, la fessée. Ça le met dans tous ses états.

Bon, mais c’était pas tout ça, fallait que j’y aille. Fallait vraiment que j’y aille. Parce qu’il devait être mort d’inquiétude.
Le visage de la femme s’est illuminé d’un coup.
– Oh, vous savez pas ? J’ai une idée. Et si vous y reveniez tout habillée à la voiture ? Il vous largue à poil et… Cette tête qu’il ferait !
– Ah, ça, pour sûr !
Aussitôt dit, aussitôt fait.
– On est de la même taille en plus.
Et elle est allée me chercher des vêtements que j’ai pris tout mon temps pour enfiler devant la tente. Histoire que Luc puisse se régaler tout son saoul du spectacle de mes fesses cramoisies.
– Je vous les ramènerai.
– Oui, oh, il y a pas le feu. On est encore là pour une bonne semaine. Et venez avec lui. Qu’on fasse sa connaissance.

(à suivre)

jeudi 13 juin 2019

Fessées punitives (7)


À peine le pas d’Océane s’était-il estompé dans l’escalier que Bérengère s’est, elle aussi, éclipsée. Comme une voleuse. Sans dire au revoir à personne.
Valentin a hoché la tête.
– Ça l’a secouée, on dirait…
Ça avait l’air, oui.
– Vous voulez boire quelque chose ?
Non, non, merci. Une autre fois. On allait y aller. Il y aurait d’autres occasions.

Sur le trottoir, Émilie m’a proposé de me ramener.
– C’est sur ma route.
On a roulé quelques instants en silence. Et puis elle m’a coulé un regard de côté.
– Ça a pas fait semblant, hein !
– Oh, pour ça, non !
– Mais quand même… Je suis pas convaincue. Que, dans son cas, ce sera réellement efficace, je suis pas vraiment convaincue.
– Elle y croit pourtant.
– Et c’est tant mieux. N’y aurait-il qu’une toute petite chance… Mais il y a longtemps que je la connais, Océane. On a été cinq ans voisines. Elle est vraiment très très accro.
– On est toutes accro. On en serait pas réduites à ça sinon…
– Toi, c’est le jeu, elle m’a dit…
– C’est le jeu, oui. Et je ne souhaite à personne de tomber là-dedans. On vit l’enfer. Heureusement, j’ai Julien. Qui, dans ce domaine, ne me laisse rien passer.
– Et ça marche ?
– Il y a encore des rechutes. De moins en moins souvent. J’ai bon espoir d’être un jour définitivement guérie.
– C’est tout le mal que je te souhaite.

Et elle ? Si elle me parlait un peu d’elle ?
– Oh, moi, c’est une longue histoire. Une très longue histoire.
– Dis quand même…
– J’ai eu une scolarité chaotique, c’est le moins qu’on puisse dire. En fait, j’en avais strictement rien à foutre des études. Je sortais, je m’amusais, je baisais. Rien d’autre n’avait d’importance. Et, en plus, j’avais un poil dans la main long comme ça. Tant et si bien qu’à l’arrivée je me suis retrouvée sans le moindre diplôme. Même pas le brevet. Sauf qu’il a bien fallu que, bon gré mal gré, je me mette à bosser. J’ai enchaîné les boulots. Deux mois ici. Trois mois là. Quinze jours ailleurs. Je démissionnais à tour de bras. Rien ne me convenait. Tout m’ennuyait à mourir. J’ai sombré dans la déprime. Ça allait être ça, ma vie ? Cinquante ans durant ? Mieux valait en finir au plus vite. J’allais mal. De plus en plus mal. J’ai consulté. On m’a bourrée de cachets. Ce qui ne m’a pas empêchée d’avoir des angoisses. En pagaille. Des angoisses terrifiantes. Si terrifiantes qu’une nuit, à deux heures du matin, je suis sortie de chez moi. Il fallait que je voie quelqu’un. Que je parle à quelqu’un. Absolument. N’importe qui. Il y avait de la lumière sous une porte. J’ai sonné. Il m’a ouvert. Un type d’une cinquantaine d’années. Qui vivait au milieu des bouquins et des instruments de musique. Il était rassurant. Très. Il m’a parlé. Il m’a apaisée. Je ne l’ai quitté qu’au petit matin. Et je suis revenue le voir. Souvent. Je me suis confiée. J’ai vidé mon sac. Et, à force de discuter avec lui, j’ai fini par arriver à la conclusion que, si je voulais exercer un métier qui réponde à mes aspirations, il me fallait absolument reprendre mes études. Seulement… Seulement je me connaissais : j’étais d’une incorrigible paresse.
– Et pour te guérir de ta paresse…
– Oh, ça a pas été tout de suite. C’est tout doucement, petit à petit, qu’il m’a amenée à reconnaître et à accepter que, dans mon cas…
– Une bonne fessée, c’était encore la meilleure solution.
– Pas la meilleure, non. La seule. J’ai passé mon bac. En candidate libre. Je l’ai eu. Avec mention. Et maintenant, en parallèle avec un boulot de serveuse, je poursuis mes études. Ça se passe pas trop mal. Bien, même. En grande partie grâce à lui qui n’hésite pas, chaque fois que nécessaire, à me remettre dans les clous.
– Ce qui arrive souvent ?
– De moins en moins. Mais quand même. La paresse, ça a toujours été–  et ça reste – mon plus grand défaut.

lundi 10 juin 2019

Après-midi d'été (2)

Edmund Tarbell. Rêverie (1913)

Merci, ma Violaine. Merci, merci et encore merci. Ce portrait de toi que tu m’as fait apporter est absolument magnifique. Je ne me lasse pas de le contempler. Je reste plantée des heures durant devant. Le peintre a parfaitement su restituer l’une des expressions de toi que je préfère. Quand tu te perds dans tes pensées. Qu’elles t’emmènent je ne sais où. À moins que je ne sache trop bien où au contraire. Et c’est un peu comme si tu étais là, en permanence, à mes côtés. Si seulement c’était vrai !

En ce qui concerne ma lettre de la semaine dernière, je suis sûre que tu brûles de savoir si Marthe l’a lue. Ça ne fait pas, pour moi, l’ombre d’un doute. Pourquoi ? Écoute ! Après l’avoir cachetée et confiée à Célestin, j’ai voulu rester encore un peu avec toi. Je suis donc descendue jusqu’à l’orangerie où nous avons, cet été, fait tant de folies toutes les deux. J’y étais presque parvenue quand il m’a semblé entendre des gémissements. Je me suis arrêtée. J’ai dressé l’oreille. Non, je n’avais pas rêvé. Quelqu’un gémissait. Une femme. Une femme qu’on frappait, à intervalles réguliers, à grands coups de lanière. Avec une ceinture. Ou un martinet. Je me suis discrètement approchée. C’était Marthe. Elle s’était dénudé le dos et les fesses et se fouettait à tout va. Je suis restée là à la regarder faire, fascinée jusqu’à ce que, dans un dernier cri, elle s’affaisse au sol et y reste longuement prostrée. J’ai fini par m’éclipser. Tu imagines dans quel état d’esprit. Marthe ! Marthe ! Si je m’étais attendue…
Elle a fait sa réapparition, au petit salon, une bonne demi-heure plus tard. Tranquille. Sereine. Exactement comme si de rien n’était.

Tu vois bien qu’il est plus que probable qu’elle ait lu ma lettre. Une lettre qui a suscité en elle des désirs qu’il lui a fallu aller assouvir sur-le-champ. Mais pourquoi à l’orangerie ? Je l’évoque certes dans ma missive. Ce qui a pu lui en donner l’idée. Mais il y a peut-être une autre explication. Et si, cet été, elle nous avait espionnées ? Sans que, n’étant occupées que de nous-mêmes, nous nous en soyons aperçues ? C’est plausible après tout. Si elle allait désormais régulièrement nous retrouver là-bas ? Nourrir les coups qu’elle s’octroie généreusement de ceux dont elle t’a vue presque quotidiennement me gratifier ?

Je t’imagine, là, en ce moment, en train de me lire. Tu as dans les yeux cette petite lueur sombre si caractéristique des moments où tu te fais rapace. Tu salives. Les pointes de tes seins se dressent. Tu as des fourmillements dans les mains. Tu nous vois, Marthe et moi, agenouillées côte à côte à tes pieds, le derrière pointant en l’air, prêtes à recevoir de concert la correction que tu as décidé de nous infliger. Et tu nous claques. Tu nous fouettes. Avec ferveur. Avec jubilation. Nos cris t’excitent. Nos plaintes t’enflamment. Tu nous veux. Toutes les deux. Tu veux notre plaisir. Tu veux le tien. Tu nous abreuves de tes caresses. L’une comme l’autre. Autant l’une que l’autre. Tu me jettes, de temps à autre, un regard de côté. Non, Violaine, non, ma chérie, je ne suis pas jalouse. Je suis heureuse de ton bonheur. Quel qu’il soit. D’où qu’il vienne.

Marthe vient d’arriver derrière moi. À pas de loup. De se pencher par-dessus mon épaule. D’y poser une main. Elle lit ce que je t’ai écrit. Je ne l’en empêche pas. Ses cheveux me chatouillent la joue. Elle se penche à mon oreille.
– On va là-bas ?
Tant de supplication dans sa voix.
On va y emporter ton portrait.


(à suivre)

dimanche 9 juin 2019

Les fantasmes de Lucie (55)



Tableau d’Anders Zorn

Quand je me suis réveillée, j’étais dans ses bras. Il me regardait dormir.
Il m’a caressé la joue. Souri.
– Alors ? Notre petite promenade d’hier ?
Je me suis blottie contre lui. J’ai caché ma tête dans son cou.
– Tu as aimé ?
– Tu sais bien que oui.
– Non, tu n’as pas aimé. Tu as adoré.
Je me suis pressée plus fort contre lui.
Tu sais qu’il y a encore plein de choses qu’on pourrait faire ?
– Quoi ? Dis-moi !
– Tu t’habilles ? Je t’emmène.
– Où ça ?
– C’est une surprise.
– Un truc comme hier ?
– En pire.
– En pire ? Hou là là ! Qu’est-ce que c’est ?
Il y a pas eu moyen de le lui faire dire. Il s’est montré inflexible.

On a roulé. Toute la matinée.
À midi, on a déjeuné dans une petite auberge, sous la glycine.
Et puis on a repris la route.
Quelques kilomètres encore et il a garé la voiture, un peu à l’écart, dans un chemin de terre.
On a pris un sentier. On a marché une dizaine de minutes. Jusqu’à un petit ruisseau.
On s’est baignés. Tout nus.
– On peut. Il y a personne.
On s’est étendus au soleil. On s’est encore baignés. J’étais bien. J’ai un peu somnolé à ses côtés.
Il s’est redressé sur un coude.
– Bien ! Il est temps de passer aux choses sérieuses.
Aux choses sérieuses ? Quelles choses sérieuses ?
– Tourne-toi ! Fais voir !
– Quoi, donc ?
– Ta fessée.
Je la lui ai docilement montrée.
– Mouais ! Faudrait peut-être commencer par la raviver un peu.
Il s’y est employé. À grandes claques de ses larges mains qu’il a laissé puissamment retomber sur ma croupe, à une douzaine de reprises. J’ai gémi. Et un peu crié vers la fin.
– Là ! C’est mieux !
Il s’est rhabillé.
– On s’en va ?
– Non, non ! Moi, je m’en vais. Toi, tu restes là. Pour le moment.
Et il s’est mis à rassembler mes vêtements. Il en a fait un paquet. Qu’il a glissé sous son bras.
– Mais qu’est-ce que ?
– Tu laisses passer un petit bout de temps. Disons… Un bon quart d’heure. Et puis tu me rejoins.
– Comme ça ?
– Ben oui, comme ça ! Une petite promenade dans les bois, toute nue, avec le derrière en feu. T’imagines la montée d’adrénaline ? Me dis pas que ça te tente pas. Que tu n’y as jamais pensé. Que tu n’as jamais fantasmé là-dessus.
– Si ! Bien sûr que si ! Seulement…
– Seulement quoi ?
– Si je rencontre quelqu’un ?
– Il y a peu de chances.
– Oui, mais quand même ! On sait jamais.
– Tu lui expliqueras que t’étais avec des copines au bord de l’eau, que tu t’es endormie et que, quand tu t’es réveillée, tes affaires avaient disparu. Qu’elles ont voulu te faire une blague, sûrement.
– Oui, oh, mais la honte ! Dans l’état où j’ai les fesses…
– T’auras qu’à pas te retourner.
– Pour qu’il… Ben, voyons !
Il m’a enlacée.
– T’en crèves d’envie, avoue !
– Ça me tente, oui. Évidemment que ça me tente. Seulement…
– Alors faut pas réfléchir.
Et il m’a plantée là.
Je l’ai regardé s’éloigner.
Il s’est retourné, avant de disparaître, avec un petit signe de la main.

(à suivre)




jeudi 6 juin 2019

Fessées punitives (6)



J’étais la première.
– Alors ? T’appréhendes pas trop ?
Oh, si, qu’elle appréhendait, Océane.
– Si ! À un point que vous imaginez même pas.
– Il y aura que nous. Et nous aussi, on s’en prend.
– Oui, mais quand même ! Entre savoir qu’on en reçoit et voir la donner, il y a une sacrée marge. Non, et puis ce qu’il y a, vous savez, Lucile, c’est que je suis pas courageuse. Quand il me flanque une fessée, Valentin, je crie, je pleure, je gigote dans tous les sens. Je peux pas m’empêcher. Et là, je suis sûre que, devant vous, il va taper encore plus fort que d’habitude. Pour que je me donne, malgré moi, en spectacle. Pour que j’aie honte d’être incapable de me maîtriser.
– Peut-être alors que du coup, cette fois, la leçon va réellement porter. Que tu ne te mettras jamais plus, tellement tu auras eu honte, en situation d’en recevoir. Que tu seras définitivement guérie. Et c’est ce qui peut t’arriver de mieux, non ?
– Je sais bien, oui ! Seulement…

Est arrivée Bérengère.
– Je sais pas comment tu fais. Moi, je serais allée me cacher dans un trou de souris.
Et puis Émilie.
– Salut !
Avec un grand sourire.
Elle est venue s’asseoir à mes côtés.

Valentin a presque aussitôt surgi.
– Bon. Je vois que tout le monde est là.
Il a tiré une chaise, s’est assis.
C’était un grand brun aux yeux clairs, bien bâti, tout en muscles. Effectivement, une fessée, de sa main, on devait la sentir passer.
– Et donc, puisque tout le monde est là, on peut commencer. Viens ici, Océane !
Elle s’est empressée de le faire.
Il lui a passé un bras autour de la taille.
– Tu vas tout d’abord, avant toute chose, expliquer à tes petites camarades pour quelle raison je vais te punir.
– Je… J’ai bu.
– Tu as bu, oui. Tu t’es même saoulée. En dépit de toutes les belles promesses que tu m’avais faites. Et en profitant de mon absence.
– Je le ferai plus. Je te promets.
– C’est une promesse que tu m’as faite des dizaines de fois. Et que, sur la durée, tu n’as jamais vraiment tenue.
– Oui, mais cette fois…
– Peut-être en effet… On n’est plus dans le même cas de figure. Espérons-le en tout cas. Parce que ma patience a des limites. Et tu sais ce qu’on a dit.
– Je sais, Valentin, je sais. Mais je veux pas. Je veux pas te perdre.
– Dans ces conditions…
Et il a passé ses main sous sa robe. Des deux côtés. Il a descendu la culotte. Il l’a accompagnée jusqu’en bas, sur les chevilles. Elle a levé un pied, puis l’autre, pour en sortir.
Il l’a attirée à lui, couchée en travers de ses genoux, bien calée. Il a relevé la robe. Haut. Très haut. Bien au-dessus des reins. Et il a pris possession de son postérieur. Il y a posé sa main. L’y a laissée.
– Mais quand est-ce que tu vas enfin te montrer raisonnable ? Hein ? Quand ?
Et il a tapé. En pluie. En grêle. Un véritable raz-de-marée de claques. À pleines fesses. Ça a rosi. Ça a rougi. Et Océane a crié. Et Océane a gigoté. Et Océane a essayé de se protéger de sa main, une main que Valentin lui a fermement ramenée dans le dos. Qu’il y a maintenue. Et ça a repris de plus belle.
Les yeux exorbités, le visage crispé, Bérengère s’agitait sur sa chaise.
– Oh, la vache ! Oh, la vache ! Oh, la vache !
Quant à Émilie, à mes côtés, les mains sur les genoux, le regard fixé, droit devant elle, sur le derrière d’Océane, elle restait absolument impassible.
Encore quelques claques. Lancées à pleine puissance. Qui ont fait hurler Océane.
– Pardon, Valentin ! Pardon ! Je le ferai plus.
Ça s’est arrêté.
– File dans ta chambre !

lundi 3 juin 2019

Après-midi d'été.

Edmund Tarbell, 1908, Joséphine and Mercie

Ma Violaine, ma petite Violaine chérie,

Tu me manques. Si tu savais ! Pas une heure de la journée où je ne pense à toi. Pas une heure de la journée que je ne passe avec toi. Nous nous promenons ensemble sous les frondaisons. Nous nous donnons le bras. Ou la main. Nous nous murmurons, complices, nos secrets à l’oreille. Nous sommes pris d’interminables fous rires.

Pas une heure de la nuit non plus. Malgré la présence de Charles à mes côtés. Tu me rejoins silencieusement. Nous échangeons des baisers. Nous nous couvrons de caresses. Nos lèvres se cherchent. Les pointes de mes seins se dressent contre les tiennes. Mes fesses sont toutes chaudes encore, et toutes endolories, de la fessée que tu m’as donnée dans la matinée. Nous haletons. Nous nous fouillons d’une langue impatiente. Nous sommes l’une à l’autre. Nous nous épuisons de plaisir. Au risque qu’il se réveille et qu’il nous surprenne. Mais non. Non. Il ne se rend compte de rien. Il ne se doute de rien. Il dort. Je suis toutefois constamment sous la menace. Avec toi. Pour toi. Et ça me rend profondément heureuse.

C’est toi qui m’a appris à jouer avec le feu, ici, dans le parc, cet été. À mourir de la peur d’être découverte et, en même temps, à m’enivrer de cette peur. À éprouver, à la ressentir, un plaisir insensé. Incomparable. Quels risques inconsidérés nous avons pris toutes les deux ! Rappelle-toi nos après-midis près de la volière. Mes cris quand les claques dont tu me martelais le derrière me rendaient toute pantelante de désir. N’importe qui aurait pu surgir à n’importe quel moment. Charles. Ou sa sœur. Voire même un domestique. Cela ne nous dissuadait en rien. Bien au contraire. Notre plaisir n’en était que plus intense encore. Et l’orangerie ! Quelles folies nous y avons faites ! Quels bonheurs nous y avons éprouvés. Quels délices tu m’y as fait découvrir !

Jouer avec le feu. Je continue. On continue. Installée à mon secrétaire, je t’écris. De temps à autre, je contemple discrètement ton portrait. Ou bien je serre contre mon cœur la mèche de cheveux que tu m’as laissée te dérober. Marthe, la sœur de Charles est là, tout près, absorbée dans sa lecture. Tout-à-l’heure, elle s’est inopinément levée. Elle est passée derrière moi. Dans un sens, puis dans l’autre. J’ai paré, avec succès, au plus pressé. Mais, à tout moment, il peut lui prendre la fantaisie de recommencer sans que j’aie, cette fois, le temps de réagir. Et sans, surtout, que je le puisse : ce serait admettre que j’ai quelque chose à dissimuler. Qu’elle jette alors, au passage, un coup d’œil par-dessus mon épaule, qu’elle saisisse un mot, une bribe de phrase et elle risquerait d’éventer notre secret. C’est une perspective qui m’effraie, mais qui m’excite aussi terriblement. Comme avant. Comme cet été. À tel point que je suis maintenant tout inondée des liqueurs de Vénus. Quelle vilaine femme je fais, n’est-ce pas ? Tu serais là, tu me punirais. Je te vois. Je t’imagine. Tu prendrais cet air sévère que j’aime tant. Tu m’ordonnerais de me déshabiller et je t’obéirais. Sans la moindre hésitation. Je serais nue pour toi. Je m’abandonnerais à tes mains qui m’offriraient ces si délicieuses souffrances. Qui me rendraient heureuse.
Marthe vient de se lever. Elle s’est dirigée vers moi avant de se raviser et d’aller se pencher à la fenêtre. De revenir s’asseoir. « Quelle belle journée ! On a tort de rester enfermées. » Comment réagirait-elle si elle surprenait notre secret ? Je n’en ai pas la moindre idée. Elle est si secrète, Marthe. Et si imprévisible. Est-ce qu’elle irait-elle tout révéler à Charles ? Est-ce qu’elle feindrait de ne s’être aperçue de rien ? Est-ce qu’elle viendrait m’en parler ? Oh, mais on va savoir. Parce que tu sais ce que je vais faire ? Je vais disparaître quelques instants en laissant ma lettre bien en vue sur mon secrétaire. Lira ? Lira pas ? Je suis folle, hein ? À cause de toi. Grâce à toi.


(à suivre)

samedi 1 juin 2019

Les fantasmes de Lucie (54)


Tableau de Anton Heinsl

J’ai dormi. Une heure. Peut-être deux. Les fesses brûlantes. Repue du plaisir que je venais de me donner. Qu’il m’avait regardée me donner.
Au réveil, il était là. Tout près. Il me souriait.
Il s’est approché. Il m’a caressé la joue, du bout des doigts. Il m’a prise dans ses yeux.
– Et maintenant ?
– Maintenant ?
Tout ce qu’il voulait maintenant. Tout. Absolument tout. Qu’il me fouette ! Qu’il recommence ! S’il voulait… S’il avait envie… Ou qu’il me prenne ! Que je sois dans ses bras ! Que j’aie sa queue ! Que je sente son plaisir se répandre en moi !
Il s’est penché. Il m’a effleuré les lèvres. J’ai frissonné.
– Lève-toi !
Je l’ai fait.
– Habille-toi !
Là. Voilà.
– Viens !
– Où ça ?
– Te promener, les fesses ardentes, au milieu des gens. Te dire qu’ils ne savent pas. Qu’ils sont à cent mille lieues de se douter… Ça ne te tente pas ?
Si ! Bien sûr que si ! Souvent j’y avais pensé. Mais comment il savait ?
Il a souri. Il s’est contenté de sourire.
Et on est sortis.

Il y avait du monde. Beaucoup de monde. Des couples. Des jeunes en bandes. Des femmes seules. Des hommes seuls.
Il se penchait à mon oreille.
– Regarde-le, celui-là ! Regarde-le !
Un petit vieux à la mine austère, revêche.
– T’imagines si on lui disait ? Il s’en remettrait pas, le pauvre ! On pourrait, hein !
J’ai gardé le silence.
– Tu aurais honte ?
– Je serais morte de honte.
– Il faut qu’on le fasse alors ! Il faut absolument qu’on le fasse. On va le faire.
Mais comment il savait ? Comment il pouvait savoir ?

– Celui-là, là-bas ? Oui, celui-là !
Mon cœur s’accélérait. Mon souffle se faisait court. Mes paumes devenaient moites.
Il venait à notre rencontre. Il approchait. Il arrivait. Il était à notre hauteur.
– Non, finalement…
On le laissait passer.
Et il recommençait un peu plus loin.
Deux fois. Cinq fois. Dix fois. Jusqu’à ce que…
– Monsieur ! Eh, monsieur !
C’était un petit bonhomme rougeaud, court sur pattes, qui marchait à grands pas, tête baissée. Il a levé sur nous un regard éberlué.
– On voudrait votre avis. Ma copine, là, elle est très mal élevée. C’est souvent que je suis obligé de lui donner la fessée. J’ai raison, vous croyez ?
Il s’est enfui à toutes jambes.
On a ri. De bon cœur.
– Allez, à ton tour !
– Je pourrai jamais.
– Bien sûr que si !
Il proposait.
– Lui, allez, lui ! Non ? Elle, alors ! Non plus ?
Mais impossible de me décider. Je n’y arrivais pas. Je différais toujours.
– Bon, je vais t’aider.
Il a arrêté deux jeunes, d’une vingtaine d’années, qui venaient à notre rencontre.
– Elle a quelque chose à vous dire, ma copine.
Leurs regards sur moi. Leur attente.
J’ai balbutié. Bredouillé.
– Je… Il… C’est-à-dire que je…
J’ai pris ma respiration, un grand coup, et je me suis bravement lancée.
– Il m’a donné une fessée.
Ils se sont esclaffés.
– Il a bien fait.
– S’il a besoin d’un coup de main, la prochaine fois, qu’il nous fasse signe. Ce sera avec plaisir.
Et ils se sont éloignés.
– Ben, tu vois, c’était pas si difficile. Tu as aimé ?
– Un peu.
– Seulement un peu ?
Il s’est arrêté. Je me suis arrêtée. Il m’a prise contre lui.
Nos lèvres se sont jointes.
On est rentrés.
On n’a pas eu le temps d’arriver au lit. Ça a été là, dans l’entrée, sur le tapis.