27 juillet
– T’es
sûre que ça va, Christine ?
– Ben,
oui, ça va, oui… Pourquoi ça irait pas ?
– Tu
verrais ta tête ! Une vraie tête de crevée…
– Tu
m’étonnes que j’ai une tête de crevée… Toute l’après-midi
je m’éclate avec Jaufret… Qui sait y faire, le salaud… Et le
soir faut que je remette le couvert avec Charles… Parce que quand
il t’entend te faire tambouriner le derrière à côté ou piauler
comme une perdue, ça l’excite que le diable… Et faut que j’y
passe… Dommage que ça ait pas duré finalement, toi et Enzo…
T’aurais eu ton compte l’après-midi… Et ça m’aurait fait
des nuits plus reposantes, moi, du coup…
– J’y
crois pas une seule seconde à son histoire d’angine fiévreuse à
Enzo… En plein mois de juillet…
– Faut
reconnaître que ça fait bien un peu cousu de fil blanc…
– Il
en dit quoi Jaufret ? Il doit bien savoir de quoi il retourne,
lui, non ?
– On
en parle pas… On a autre chose à faire…
– Oui,
oh… Comme par hasard le lendemain du jour où il réussit enfin à
me tirer il disparaît le Enzo… Ça va, j’ai compris… Je suis
pas idiote…
– T’as
fait exactement la même chose… T’es pas revenue le lendemain…
– Mais
c’est pas pareil enfin ! Ça n’a rien à voir… C’était
à cause de Gilles, moi… Tandis que lui…
– Tu
regrettes, hein ?
– Regretter ?
Oui, ben alors ça ! Sûrement pas, non… Il y a pas de risque…
C’était une sacrée connerie…
– Me
dis pas… Quand tu nous as accompagnées jusqu’au bateau hier…
Me dis pas que tu n’espérais pas quand même un peu qu’il serait
là…
– Pas
une seule seconde… Pas une seule seconde ça m’a effleuré
l’esprit…
11 heures
– Je
t’attendais… Je me disais… “C’est pas possible, ça… Elle
va bien finir par venir se laver quand même !”
– J’étais
avec Christine… Qui tenait absolument à me démontrer, par a plus
b, que je suis amoureuse d’Enzo…
– Lui,
il l’est de toi en tout cas…
– D’où
tu tiens ça, toi ?
– De
Ludo… On en parlait cette nuit justement…
– Cette
nuit ?
– Cette
nuit, oui… Oh, mais faut que je te raconte tout ça… Viens là,
si tu veux… Avec moi… Dans la baignoire… On sera mieux pour
causer… Oui… Parce qu’il m’a appelée Ludo… Sur le coup de
minuit… Avec Alexandre il était… Alors si je voulais faire sa
connaissance… Comme on avait dit… Tu parles si je voulais !
Ça va ? T’as assez de place ? Oui ? Et donc je me
suis pointée là-bas… Sympa le type… Et c’était vraiment trop
comme situation… Parce qu’il y pensait que je me prenais des
fessées… Il pouvait pas ne pas y penser… Ça t’avait un de ces
petits côtés excitants… D’autant que j’arrêtais pas de me
demander s’il allait mettre le sujet dessus Ludo… Il m’avait
promis que non, mais avec lui tu peux jamais savoir… Il te dit un
truc et il en fait un autre… Comment je me serais sentie gênée
s’il en avait parlé… Mais en même temps je suis sûre que d’un
autre côté ça m’aurait pas vraiment déplu… On est
compliquées, hein, des fois… Bon, mais n’importe comment la
question s’est pas posée… Il en a pas parlé… Mais, par
contre, de toi et d’Enzo… Qui, comme je te disais, est amoureux
fou de toi…
– Ben,
on dirait pas…
– Si !
Si ! Non… Parce que le truc, c’est qu’il sortait avec une
nana, quand il t’a rencontrée… Une nana avec qui il a mis
aussitôt un terme… Sauf qu’elle s’est doutée que c’était
pour une autre…Qu’elle a juré de se venger… Qu’elle le
flique comme c’est pas possible… Et qu’il veut pas te faire
courir de risques… Parce que c’est le genre de meuf à te foutre
un bordel pas possible dans ton couple si jamais elle découvre qui
tu es…
– Ah,
mais ça change tout, ça…
– Ça
change quoi ?
– Non…
Rien, finalement… Rien…
– En
attendant, qui c’est qui va y attraper dans l’histoire ? Eh
ben, c’est moi…
– Comment
ça ?
– Il
a entendu la voiture Jacques quand je suis partie… Et, du coup, il
m’attendait au retour… D’où je venais ? Qui j’avais
vu ? Tout ça… Ça aurait servi à quoi de lui raconter des
salades ? Il m’aurait pas crue n’importe comment… Ça l’a
mis dans une fureur ! Jamais je l’avais vu comme ça… D’un
peu plus c’était là tout de suite en rentrant que je me la
prenais… Il m’avait déjà empoignée… Baissé la culotte quand
Geneviève l’a arrêté… « Attends demain, Jacques, attends
demain ! Tu vas réveiller toute la maison… » Et, au
final, je suis convoquée à pile poil midi dans leur chambre… Va
falloir que j’y aille d’ailleurs… Et tu sais ce qui serait
bien ?
– C’est
que je trouve un prétexte quelconque pour attirer Charles et Gilles
sous la fenêtre de leurs parents… Ça devrait pas être trop
difficile…
– Et
Christine… Tu oublies Christine…