jeudi 11 décembre 2008

En public

- C’est vraiment des trucs de malades ça !… Là-dessus il était catégorique Romain… Comme sur tout d’ailleurs… Jamais le moindre doute sur quoi que ce soit… Il a même enfoncé un peu plus le clou… - Moi, je saurais que ma femme pense à des trucs pareils…

Il le saurait pas… Pas de risque… Quant à n’y pas penser… Il y avait des années et des années que c’était là, chevillé à elle… Tous les jours ça revenait… Plusieurs fois par jour… En rêves… En images… En histoires… Ca l’emportait… Ca la transportait… Ca la déposait alanguie et épuisée au petit matin sur les bords du sommeil… Ca prenait de plus en plus de place au fil du temps… Presque toute la place… Ca occupait toutes ses journées… Ca devenait envahissant… - Je deviens folle… Il a raison Romain… Je suis folle…

Folle ?… Il y en avait des fous alors !… Des quantités… Des dizaines et des dizaines de sites il existait là-dessus… Avec des tas d’hommes et de femmes qui en parlaient en toute liberté… Comme si ça allait de soi… Elle a longtemps suivi leurs échanges, par-dessus leurs épaules, le cœur battant, la tête en feu, avant de finir par oser se lancer, à son tour, sur la pointe des pieds…

Chrystelle c’était son mari qui la lui donnait… Presque tous les jours… Il trouvait toujours un prétexte… Et quand il n’en avait pas elle lui en offrait… - Et toi ?… C’est aussi ton mari ?… - Oui, ben ça, il y a pas de risque !… - C’est qui alors ?… - Personne… - Personne ?!… C’est pas vrai !… Comment tu fais ?… Je pourrais jamais, moi !… Mais tu l’as déjà reçue au moins ?… Non ?… T’es rien qu’une fantasmeuse alors ?!… Ah ben si, si !… Comment tu veux appeler ça autrement ?…

Une fantasmeuse… Des hommes aussi le disaient… Qui fondaient sur elle comme sur une proie… Qui se faisaient charmeurs… Persuasifs… Qui exigeaient presque tout de suite un rendez-vous… - Tu verras… Avec moi tu seras pas déçue… Comment il va fumer ton cul !… Tu m’en diras des nouvelles… De plus en plus pressants, insistants, impatients… - Alors c’est pour aujourd’hui ou pour demain ?!… Qui la congédiaient, excédés, au bout de quelques jours… - C’est bon… Tu m’as assez amusé comme ça… Continue à t’exciter toute seule… Bye !…

Bernard, lui, n’était pas comme les autres… Il ne demandait rien… Il ne voulait rien… Il l’écoutait… La faisait parler… - Tu l’as jamais eue ?… Vraiment jamais ?… Même toute petite ?… - Même… - Mais d’où ça te vient alors ?… Tu sais pas ?… Ca remonte forcément de quelque part… De quelque chose qui a eu lieu un jour… Peut-être enfoui très loin… Parce que tu n’as pas envie de t’en souvenir… Parce que tu ne peux pas…

Et oui… Oui… Ca avait affleuré quelquefois, oui, mais elle ne l’avait pas laissé émerger… Oui… Elle avait 10 ans et son cousin Damien 15… Et, ce jour-là, elle l’avait entraîné jusqu’à la rivière… Des barques étaient arrimées, côte à côte, tout au long de la berge et elle avait entrepris de sauter à pieds joints de l’une à l’autre… Il l’avait suivie à contrecœur…- Et si on en prenait une pour aller faire un tour ?… - Ca va pas !?… C’est beaucoup trop dangereux… - Oh, tu parles !… Quelle poule mouillée tu fais !… Elle en avait détaché une, malgré ses protestations, et vogue la galère !… Ils étaient au beau milieu de la rivière quand ils avaient constaté, avec effroi, que leur embarcation prenait l’eau… Avec une rapidité !… Panique… Des pêcheurs qui avaient suivi toute la scène s’étaient précipités à leur secours et les avaient ramenés à la maison… Où les avait accueillis grand-père qui, sans un mot, le visage fermé, les avait entraînés dans son bureau… Et là, il avait déculotté Damien - complètement - et lui avait flanqué une magistrale et interminable fessée… Damien avait crié, pleuré, gigoté, supplié… Grand-père s’était montré intraitable et l’avait expédié dans sa chambre, les fesses cramoisies, aussitôt la punition terminée… - Quant à toi… Quant à toi tu n’es pas obligée de suivre ton cousin les yeux fermés chaque fois que l’une de ses idées lumineuses lui passe par la tête… Allez, file rejoindre tes cousines !… Elle n’avait pas demandé son reste, trop heureuse de s’en tirer à si bon compte… De tout l’été Damien ne lui avait plus adressé une seule fois la parole…

Mais le pire - il savait pas le pire ? - le pire, c’est qu’elle avait pris du plaisir - et un plaisir intense - à voir son cousin ainsi puni devant elle… Du plaisir à le voir nu alors qu’il s’était toujours montré extrêmement pudique… A contempler son derrière qui rougissait à vue d’œil et se tortillait sous les claques… A regarder les deux boules qui ballottaient piteusement en cadence entre les fesses… A l’entendre geindre, se plaindre et hurler à la fin… Du plaisir à sa honte quand il s’était enfui vers sa chambre… Et surtout - surtout - une trouble satisfaction à le savoir puni à sa place… Voilà… Voilà… Il y avait vraiment pas de quoi être fière… Et… elle l’avait revu ?… - Oui… A l’occasion de diverses circonstances familiales… Des mariages.. Des communions… - Et ?… - Et rien… Il n’en a jamais été question entre nous… Ca fait trente ans maintenant… Il a dû oublier… - Parce que tu crois vraiment qu’on peut oublier une chose pareille ?…

Lui, il avait découvert la fessée à douze ans dans un livre dissimulé derrière des revues techniques tout en haut de la bibliothèque paternelle… Des photos… Des dizaines de photos… Des femmes - de tout âge, dans toutes sortes de positions, dans les endroits les plus divers - dont des messieurs, la lippe gourmande, rougissaient la croupe à qui mieux mieux… Il n’avait plus vécu dès lors qu’en leur compagnie… A chacune, page après page, il avait inventé une histoire, une vie… Il les imaginait en train de commettre les fautes pour lesquelles elles avaient été aussi sévèrement punies… Il avait fini, au fil du temps, par vouloir les châtier lui-même… Il les faisait allonger en travers de ses genoux, les sermonnait, les déculottait avec une infinie lenteur, les admonestait encore avant de laisser enfin tomber sa main à pleines fesses, d’accélérer progressivement le rythme et l’intensité des coups… Des années durant elles avaient été sa seule raison de vivre et c’est tout naturellement qu’à vingt ans il s’était mis en quête de partenaires qui se prêteraient vraiment au jeu… Ce n’était pas aussi simple qu’il lui avait de prime abord paru et il avait dû se résoudre à emprunter la filière que lui avait indiquée, avec des airs de conspirateur, le tenancier d’un sex shop auprès duquel il s’alimentait en films et revues… Contre une coquette rémunération, pour arrondir leurs fins de mois, des femmes de toutes conditions acceptaient de confier discrètement leurs derrières à des hommes qui rêvaient de les faire rougir… Et il avait sillonné la banlieue de pavillon en HLM… Mais, mais… ce n’était pas - ça n’avait jamais été - ce dont il rêvait…

- Heureusement maintenant il y a Valérie… Et avec Valérie c’était exactement comme il avait toujours voulu que ce soit… - J’aime la lui donner parce qu’elle aime la recevoir… Et elle aime la recevoir parce que j’aime la lui donner… C’est pas plus compliqué que ça… - C’est ta femme Valérie ?… - Non… Non… C’est une amie…

Il l’a proposé un soir comme ça juste au moment où ils allaient se quitter après trois longues heures de dialogue… - Ca te dirait d’y assister ?… - A quoi ?… - A la fessée de Valérie… - Je sais pas… Peut-être… Je sais pas… Sûrement… Faut que je réfléchisse…

Il s’est assis tout au bord du canapé… Il a fait signe à Valérie d’approcher… Tout près… Plus près… - Tu n’as pas tenu ta promesse… Elle a baissé la tête… - Regarde-moi !… Tu ne tiens jamais tes promesses… Jamais… Tu n’as aucune volonté… Bon… Mais tu sais ce qu’on avait dit… - Oui… - Quoi ?!… Eh bien ?!… J’écoute… - Je vais recevoir la fessée… - Tu vas recevoir la fessée, oui !… Une bonne fessée… Puisqu’il n’y a que ça que tu comprends… Il a passé les mains sous la robe… Il a descendu lentement - très lentement - la culotte… Jusqu’en bas… Elle a levé un pied, puis l’autre… Il l’a fait pencher en avant, s’allonger en travers de ses genoux… Il a ramené la robe au-dessus des reins, a négligemment promené ses doigts tout au long des fesses… - Etre obligé d’en arriver là… A ton âge… Tu n’as pas honte ?… Sèche, lancée à toute volée, la première claque l’a surprise... Elle s’est cabrée… Une seconde… Elle a poussé un petit cri rauque de fond de gorge... D’autres ont aussitôt suivi... Lentes... Régulières... Qu’elle accompagnait en rythme, chaque fois, d’un grand soubresaut du derrière et d’un petit râle plaintif... Ca a rougi à toute allure avec les marques des doigts qui s’imprimaient, chaque fois, sur tout le pourtour... Elle a voulu ramener ses mains dessus pour se protéger... Il s’en est emparé, les a fermement emprisonnées toutes les deux dans la sienne et il a tapé plus fort... Plus vite... Elle a bondi plus haut, crié plus ample... Et elle s’est distordue, les jambes lancées en désordre dans tous les sens... Ouverte… Offerte… Obscène… Longtemps…

- Tes yeux brillent, Liliane !… Comment ils brillent !… Tu n’as rien perdu du spectacle, hein !… Ne dis pas le contraire, je t’ai vue… Mais tu sais que c’est pas bien du tout de se réjouir comme ça du malheur de ses petites camarades ?… Que ça mériterait une punition… Tu vas l’avoir d’ailleurs !… Allez, à ton tour !… Viens ici !… Et elle s’est levée…

Dans la glace c’était rouge écarlate… Sur toute la surface… Avec des taches violacé sombre… - Oui… Ca va virer au jaune par endroits, puis au noir… Et dans quelques jours ça aura complètement disparu… A moins que… à moins que d’ici là on en ait rajouté une couche… Ce qu’on aura fait d’ailleurs… Non ?… Tu crois pas ?… - Si !… Et elle a coupé… Elle est allé rejoindre Romain qui s’est retourné dans le lit en maugréant… - Je me demande ce que tu peux bien fabriquer jusqu’à des heures pareilles !…

Coralie a déposé une liasse de bordereaux sur son bureau, est restée là à la regarder en souriant… - Tu es amoureuse ?… - Hein ?… Non !… Pourquoi ?… - Je sais pas… Tu rayonnes depuis trois semaines… Je t’avais encore jamais vue comme ça…

Tous les jours… Ils se retrouvaient tous les jours… Entre midi et deux heures… Et presque tous les jours elle avait sa fessée… - Tu pourras te libérer un soir ?… - Un soir ?!… C’est pas facile pour moi le soir… Il y a Romain… Il va se demander ce que je… - Ca fait rien… Ca fait rien… J’irai avec Valérie… Et il n’a plus été là… Elle l’a désespérément attendu… Tous les soirs… Pour rien… Elle est allé sonner, chaque jour, pendant sa pause déjeuner à une porte qui restait obstinément close… Elle a saturé sa boîte aux lettres de messages qui le suppliaient, qui l’imploraient… Elle s’abaissait… Elle s’humiliait… En vain…

Un mois… Un mois interminable… Et puis… - Bernard !… C’est toi !… C’est pas vrai que c’est toi !… - Est-ce que tu peux te libérer jeudi soir ?… - Je me débrouillerai… J’inventerai quelque chose… Je viendrai… Je suis heureuse, Bernard !… Tellement heureuse… Si tu savais !…

Sept couples… Et nous… Et un jeune homme… Seul… Tout le monde était masqué… Assis sur des chaises en rond dans un grand salon éclairé par une multitude de bougies… Le silence… L’attente… Une porte s’est ouverte… Une femme d’une cinquantaine d’années est entrée, entièrement nue, s’est avancée jusqu’au milieu de la pièce, immobilisée… Le jeune homme s’est levé, est allé vers elle et l’a a aussitôt vigoureusement fessée… Comme s’ils avaient obéi à un signal, les hommes - tous les hommes - ont alors couché les femmes en travers de leurs genoux… Bernard aussi… Les claques sont tombées en grêle, de tous côtés, sur les derrières… Des râles, des gémissements, des plaintes, des cris poussés à pleine gorge se sont élancés, démultipliés, envolés… Se sont répondu en échos indéfiniment démultipliés… Une femme a hurlé son plaisir… Une autre… - Tu es trempée !… Et elle aussi… Sur ses doigts… Sous ses doigts…

Et il l’a fait… Il l’a vraiment fait… En plein jour… En pleine rue… Avec les gens qui allaient et venaient dans tous les sens tout autour… Il lui a relevé la robe, l’a maintenue au-dessus des reins un temps qui lui a semblé infini… Derrière, tout près, on a sifflé… - Oh, l’autre, elle a pas de culotte !… - Et cette rouste qu’elle a pris !… Ils les ont dépassés - deux jeunes - se sont retournés longuement sur elle, l’ont dévisagée avec insistance, un sourire moqueur juché au coin des lèvres…

- C’est toi qui aurais dû être punie le jour où tu as entraîné ton cousin Damien à la rivière… Tu en as bien conscience ?… Oui… - Tu ne l’as pas été… C’était pourtant, à plus d’un titre, largement mérité… Parce que ton attitude, ton comportement, tes réactions, ce jour-là, ont été particulièrement odieux… Non ?… Tu n’es pas de mon avis ?… - Si !… - Il n’est pas trop tard… Même tant d’années après… Il n’est jamais trop tard… La preuve !… Cette fessée tu vas la recevoir… Jeudi soir, là-bas, devant eux… Toute seule au milieu… A visage découvert… - Oh non !… Je pourrai jamais… - Bien sûr que si !… - Ce n’est pas moi qui te la donnerai, mais quelqu’un que j’aurai choisi… Qui leur aura d’abord expliqué, bien en détail, pourquoi tu la reçois… Ils n’ignoreront rien, absolument rien, de ce qui s’est passé ce jour-là… - Oh non, Bernard, non, s’il te plaît…

De la petite pièce à côté elle les a entendu arriver les uns après les autres… Bernard a passé la tête… - Ils sont tous là… Tu peux te déshabiller… Elle l’a fait… Complètement… Et elle a attendu… - Tu es prête ?… Il leur raconte… Il y a des questions… C’est long… - Mais c’est qui ?… - Tu verras bien… Il s’est passé encore beaucoup de temps… - Allez !… A toi !… En piste… Elle est entrée… Sous les masques tous les regards ont convergé vers elle… Elle est allée vers lui… Jusqu’à lui… S’est arrêtée… Il s’est retourné… C’était son cousin Damien…

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