jeudi 11 décembre 2008

Chambre chez l'habitant ( 1 )

J’avais mon bac !… Avec mention… Et, pour mes parents, c’était une véritable catastrophe… - Tu l’imagines lâché tout seul là-haut ?… Là-haut c’était Paris… Je voulais faire Langues O… - Avec tout ce qui se passe !… Leur imagination s’affolait : j’allais passer sous un metro… me faire égorger dans une impasse… tomber sous la coupe d’une bande de malfrats qui me contraindrait aux pires ignominies… Je voulais vraiment pas faire autre chose ?… Il y avait pas que les Langues O… Non… Non… C’était les Langues O ou rien…

C’est oncle Serge qui a trouvé la solution… - Et si vous lui preniez une chambre chez l’habitant ?… Quelqu’un de sérieux… Vous pourriez garder un œil sur ce qui se passe… Ils ont trouvé l’idée excellente… Ils ont prospecté… Ecrit… Téléphoné… Ils se sont déplacés jusque là-bas et ils sont revenus enchantés… Ils avaient trouvé la perle rare, une veuve, qui vivait seule avec sa grande fille de 23 ans et qui s’était engagée à veiller sur moi comme sur la prunelle de ses yeux…

J’ai accepté tout ce qu’on voulait… L’essentiel c’était qu’on me laisse partir… Je comptais bien, une fois là-haut, profiter pleinement de ma belle liberté toute neuve… Quant à la veuve… Ce n’était pas vraiment un problème la veuve… J’étais majeur, depuis peu, mais j’étais majeur… Alors la veuve !…

C’était une femme d’une cinquantaine d’années qui, d’entrée de jeu, m’a mis les points sur les i… Mes études coûtaient cher et on tenait légitimement à ce que je m’y consacre… Elle avait des consignes : à l’exception du samedi pas question de me laisser sortir le soir… J’étais, paraît-il, extrêmement influençable : elle surveillerait donc mes fréquentations… Elle allait – c’était convenu – rester en étroit contact avec mes parents et les tenir scrupuleusement au courant de la façon dont je me comportais… A moi de me montrer digne de la confiance qu’on me témoignait… Maeva, sa fille, qui assistait à la scène, riait sous cape…

Le plus judicieux, dans un premier temps, c’était, à l’évidence, d’adopter un profil bas et de me fondre dans le moule de ce qu’on attendait de moi… Avec le temps on se rassurerait et l’étau finirait tout naturellement par se desserrer… Je me suis donc appliqué à paraître aussi studieux que possible : les cours aussitôt terminés je rentrais m’enfermer dans ma chambre pour de longues heures que je prétendais laborieuses… Puisque j’y étais autorisé je sortais le samedi, mais je prenais soin de toujours rentrer raisonnablement tôt… On n’avait rien à me reprocher… Absolument rien… Et on se félicitait ouvertement d’avoir consenti à me laisser monter poursuivre mes études à Paris…

C’est arrivé un samedi début novembre… J’avais sympathisé avec un groupe de jeunes qui fêtait un anniversaire en boîte… L’alcool coulait à flots… Je n’avais pas l’habitude… J’ai rapidement perdu la notion de ce qui se passait autour de moi… J’ai vaguement eu conscience qu’on me montait dans une voiture… Qu’on m’en descendait… Qu’on me portait… Des voix… A travers un épais brouillard celle de la veuve… - C’est pas possible !… Non, mais c’est pas possible !… Dans quel état il est !… Mais c’est qu’il s’est vomi dessus en plus !… Et pas qu’un peu… C’est une véritable infection… On m’a déposé dans la cuisine… On s’est éloigné… Encore des voix… La porte… Elle est revenue… Seule… - Enlève-moi tout ça !… Plein de bonne volonté j’ai entrepris de me déshabiller… Sans y parvenir malgré tous mes efforts… Elle a pris les choses en mains, m’a sèchement dépiauté de mes vêtements… Tous… Et m’a soutenu jusqu’à mon lit… Dormir !… Oh oui, oui, dormir !… Je m’y suis affalé de tout mon long… C’est aussitôt tombé… Une claque… A pleines fesses… Une autre… Sèche… Cuisante… Encore une autre… Je n’avais pas la force de réagir… De tenter d’échapper… Une grêle de claques… Sans un mot… Une fessée… Une vraie fessée… Comme à un gamin de huit ans… J’ai gémi… J’ai crié… Quand ça s’est arrêté je me suis endormi…

Au réveil elles étaient dans la cuisine… Toutes les deux… La mère et la fille… - Ah, tu peux être fier de toi !… Ah, ils vont être contents tes parents !… Tu sais ce que tu mériterais ?… C’est qu’ils te rapatrient illico… C’est probablement ce qu’ils vont faire d’ailleurs !… - Vous leur avez dit ?… - Pas encore, non !… Mais tu perds rien pour attendre… J’ai supplié… - Leur dites pas !… Je recommencerai pas… Je vous promets… Elle a finalement consenti, après un long combat d’arrache-pied, à passer l’éponge… - Pour cette fois… Uniquement pour cette fois… Et à la condition que tu te montres désormais absolument irréprochable… Dans tous les domaines…

( à suivre )

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