jeudi 31 mai 2012

Escobarines: Revanche


– Bonsoir, Mademoiselle Seignier…
– Bonsoir, Monsieur…
– Vous ne me reconnaissez pas ?
– Votre visage me dit bien quelque chose, mais…
– Nous avons pourtant passé de longues heures ensemble… De très très longues heures…
– Je ne vois pas…
– Alors je vais vous rafraîchir la mémoire, Mademoiselle Seignier… Martin Durtier… Ça ne vous dit rien ?
– Martin ! Mais si ! Bien sûr… Martin… Je me souviens… En CM² je t’ai eu, hein, c’est ça ?
– C’est bien ça…
– Et ça remonte à… Hou la la…
– Comme vous dites… Hou la la…
– Tu étais un élève appliqué, travailleur et docile…
– Sans doute trop… Et vous, une institutrice particulièrement injuste…
– N’exagérons rien…
– Je n’exagère rien… Vous avez peut-être oublié… Pas moi… Le 14 Avril c’était… Ça vous dit rien le 14 Avril ?
– À part celles de l’Histoire de France les dates, moi, tu sais…
– Le 14 Avril vous m’avez flanqué une fessée déculotté devant toute la classe… Me dites pas que vous vous rappellez pas !
– Si… Oui… Peut-être…
– Vous vous rappelez forcément… Parce que vous n’en avez pas mis d’autre… À personne cette année-là… Qu’à moi…
– Sans doute y avait-il une bonne raison à cela…
– Une bonne raison ?! Parlons-en, oui ! Parlons-en ! Vous aviez eu la veille des mots avec mon père… À propos de je ne sais trop quel terrain que vous convoitiez l’un et l’autre… Et vous vous êtes vengée sur moi…
– Tu te le seras imaginé…
– Je ne me suis rien imaginé du tout… Vous avez inventé un prétexte… Un soi-disant geste obscène que j’aurais fait, dans votre direction, derrière le dos d’un camarade… Il n’y a jamais eu de geste obscène… Il n’y a jamais rien eu… Et vous le savez très bien…
– C’est loin tout ça…
– Loin ? Pour vous peut-être… Mais pas pour moi… Je vis avec, moi… Tous les jours… Le regard moqueur des filles, quand vous m’avez enfin laissé me relever, je le vois encore… Il est là… Toujours aussi précis… Toujours aussi humiliant… Il me fait toujours aussi mal… Leurs rires, après, sur mon passage, dans la cour, dans la rue, je les entends toujours… C’est là… C’est toujours là… Pas un jour ne se passe sans que ça me revienne tout ça… Vos mots… Votre regard… Vous jubiliez, Mademoiselle Seignier… Vous vous efforciez de n’en rien laisser paraître, mais intérieurement vous jubiliez… Vous jubiliez parce que c’est mon père que vous punissiez à travers moi…
– Je suis désolée…
– Pas tant que moi…
– Si j’avais su…
– Vous auriez fait exactement la même chose…
– Non… Je te jure que non… J’ai honte… Si tu savais comme j’ai honte du mal que je t’ai fait… Et si je pouvais le réparer, ne fût-ce qu’en partie…
– Vous pouvez au moins reconnaître que je ne l’avais pas méritée cette fessée…
– Oh, ça, oui… Oui… Je le reconnais bien volontiers… J’avais eu des mots avec ton père… Qui avait fini par me traiter de tous les noms…
– Je n’y étais pour rien…
– Je sais, oui… Pardonne-moi !
– C’est tout sauf facile…
– Ça ne va pas être facile pour moi non plus maintenant de vivre en sachant quel mal je t’ai fait…  
– Vous ne voudriez tout de même pas que je vous plaigne ?
– Non, bien sûr que non, mais…
– Vous savez ce qui m’a aidé à supporter le souvenir de cette fessée ? À ne pas me laisser détruire par lui ?
– Non… Dis…
– C’est que j’imaginais qu’à mon tour je vous en mettais une de fessée… Déculottée… Magistrale… Vous tempêtiez… Vous gigotiez… Vous me suppliiez d’arrêter… J’étais sans pitié… Des dizaines… Des centaines de fois je me la suis repassée cette scène… Elle m’apaisait…
– Si ça a pu te faire du bien…
– Ça m’en a fait… Mais ça ne m’a jamais complètement libéré… La seule chose qui le pourrait – définitivement… totalement – c’est que je vous en donne vraiment une… La fessée que vous avez méritée… Que vous méritez depuis tant d’années…
– Si tu en certain… Si tu crois vraiment que ça peut te libérer, une bonne fois pour toutes, pour toujours, de tout ça alors vas-y ! Fais-le ! Donne-la moi ! Quoi qu’il doive m’en coûter…

– Penchez-vous, Mademoiselle Seignier… Mieux que ça… Là… On la laisse relevée bien haut cette petite robe… Et maintenant déculottez-vous ! Comme vous m’avez obligé à le faire moi-même, devant toute la classe, il y a vingt-cinq ans…  

lundi 28 mai 2012

Un mariage ( 8 )


– Vous savez ce qu’elle m’a raconté Delphine ? Qu’à ce qu’il paraît il y avait un type aux States exactement comme vous il était… Il arrivait pas à la faire jouir sa nana… Et elle, à force, tellement que ça l’agaçait, elle a fini par lui flanquer la fessée… Chaque fois qu’il se loupait – c’est-à-dire à chaque coup – il y avait droit… Eh ben vous me croirez si vous voulez, mais ça a fini par y faire… C’est pas devenu un foudre de guerre, non, mais quand même… comment ça s’était amélioré ! Spectaculaire c’était… Du coup Delphine elle disait que je devrais essayer la même chose avec vous… Que peut-être que ça y ferait… Je sais pas pourquoi, mais elle y tient absolument à ce qu’on couche tous les deux… Une véritable obsession ça devient… N’empêche que je pourrais, hein, si je voulais vous en mettre… Pas pour ça… Non… J’en ai rien à foutre de ça… Mais pour ce que je voudrais… Parce que j’ai pris complètement le pas sur vous… Suffit que je décide quelque chose – n’importe quoi – et vous dites aussitôt amen…  Là aussi ce serait pareil… Exactement pareil… Alors oui… Sûrement que je vais le faire… Ça me plaît bien comme idée… Mais surtout de voir comment vous allez réagir… Même si je le sais à l’avance… Ça va vous faire plaisir de vous laisser faire ce que j’ai envie… Même si ça vous fait mal… Parce que j’en ai envie… C’est pas vrai peut-être ? Ah, vous voyez… Et vous allez aimer encore plus si vous sentez que j’aime ça vous le faire… Sauf que ça je peux pas savoir… Tant qu’on a pas essayé je peux pas savoir...


Dans la chambre, à côté, ça a recommencé…
Elle s’est tournée, retournée dans le lit… A soupiré…
– Ça va être comme ça toute la nuit… Parce que ça débute avec lui… Et quand ça débute… Elle est pas discrète Delphine en plus… Elle l’a jamais été…



Et encore…
– Bon, allez, c’est pas la peine… Ça me donne trop envie de les entendre… Faut que je trouve quelqu’un pour me dépanner… Benjie… Benjie, lui, à n’importe quelle heure du jour ou de la nuit il demande que ça… C’est ça les vrais copains… On peut compter sur eux… Pour tout… N’importe quand… Ben, habillez-vous ! Qu’est-ce vous attendez ? Je vous emmène… Évidemment que je vous emmène… Je tiens pas à retomber dans une galère comme la dernière fois…  



– C’est là… Non, mais vous garez pas devant ! Tournez à droite, là, dans la petite rue… Voilà… Bon… Et vous m’attendez… Le temps qu’il faudra…  Vous bougez pas de là…



– Ça y est… Ça a pas été trop long ? Si, hein ! Quelle heure il est ? Ah, oui ! Quatre heures ! Quand même… De toute façon c’était couru… Avec lui je le vois pas le temps passer… Depuis toujours c’est comme ça… D’ailleurs des fois je me dis que je cherche bien des complications… Parce que v’là un type on se connaît par cœur tous les deux… Il sait exactement ce que j’aime et je sais exactement ce qu’il aime… On n’est jamais déçus… Alors le plus logique, ce serait que je revienne systématiquement vers lui quand j’ai besoin… Parce que c’est du sûr… Du solide… Eh ben non… Non… Je peux pas m’empêcher d’aller explorer à droite et à gauche… Comme si j’allais y trouver je sais pas quoi d’extraordinaire… Alors qu’en réalité… C’est pas mal… Oui… Faut reconnaître… Il y a des fois c’est pas mal… Mais bon… La plupart du temps il y a quand même pas de quoi crier au miracle… Alors vous savez ce qu’on a décidé là avec Benjie ? C’est qu’on allait se voir beaucoup plus souvent tous les deux… Surtout qu’en plus en ce moment il a pas de nana attitrée… Ça aide… Vous verrez… Il est très sympa… Parce que je vais quand même pas vous laisser vous geler comme ça à chaque fois pendant des heures dans la voiture… Non… Vous monterez…  Et vous attendrez à côté… Dans le séjour… Il a vachement envie de vous connaître en plus… Parce que je lui ai parlé de vous… De comment c’était nous deux… Ça le fait complètement halluciner… « Je voudrais trop voir la tête qu’il a, c’t’oiseau ! » Il verra…



– Non, mais j’y crois pas… Vous entendez ? Ils remettent ça… Elle va lui avoir la couenne, oui, à force… En tout cas ce qu’il y a de sûr, c’est que demain vous pouvez vous attendre à le tenir encore tout seul votre magasin… Parce que je vois pas comment elle pourrait réussir à émerger avant midi…             

jeudi 24 mai 2012

Escobarines: Recherche d'emploi ( 6 )


– J’en ai pris une hier soir… Et une sévère… Par ta faute, Justine…
– Par ma faute ? Comment ça ?
– Par ta faute, oui… Parce que je lui ai parlé de toi… Et qu’il a compris – il est pas idiot – que je t’avais mise au courant de son projet… Et ça il me l’avait formellement interdit…
– Je suis désolée…
– Oh, ça fait rien… C’est pas la première que je reçois… Et ce sera pas la dernière…
– Et pour moi ? Il a dit quoi pour moi ?
– Que ça pose pas de problème… Que si tu es vraiment décidée, mais alors là vraiment, il te garde…
– Ben oui, je le suis… Même si… Mais je le suis, oui…
– Alors à ta place je tarderais pas trop à le lui prouver… Que pour lui les choses soient claires… Qu’il soit sûr que tu vas pas te défiler…

– Et à quatre heures elle aspergeait malencontreusement tout un étalage de pâtisseries de Javel pure… Par inadvertance bien entendu…
– Bien entendu…

– Alors ?
– Oh, la la… Si tu savais !
– Si je savais quoi ?
– Je pars… Je m’en vais…
– Il t’a virée ?
– Non… Je démissionne… C’est trop la honte…
– Mais qu’est-ce qui s’est passé enfin ?! Raconte…
– Ben… Il m’a fait venir… Et à tout un sermon j’ai eu droit… Que la marchandise coûtait cher… Que la nourriture ça se respectait… Qu’il y avait des tas de gens qui crevaient de faim… Au moins un quart d’heure ça a duré… Et puis il m’a dit que puisque c’était comme ça… Puisque j’étais pas fichue de faire attention à ce que je faisais je méritais d’être punie… Non ? Je croyais pas ? Ben si ! Oui… Et c’était quoi que je méritais comme punition ? Je savais pas… Je savais pas ? Vraiment ?! Non… Je savais pas… Enfin si… Peut-être… Peut-être que je savais… Et alors ? C’était quoi ? « Dites-le ! Je veux que vous le disiez… » « Une fessée… » « Une fessée… Parfaitement, oui… Et cul nu… » Il m’a attirée vers lui… Il a passé ses mains sous ma robe… Et il a descendu mon string… D’un coup… Jusqu’en bas… Et puis en travers de ses genoux il m’a allongée… Et t’avais raison…
– J’avais raison ?
– Oui… C’est pas si désagréable que ça finalement… Parce que oui, ça brûle… Oui, ça mord… Mais c’est pas déplaisant du tout… Au contraire… Et même… Plus ça avance… Plus ça dure… Plus ça retombe au même endroit…
– Et plus t’as envie que ça continue…
– Voilà, oui… Et en plus il y a l’idée… De ce qui est en train de se passer… De ce qu’on est en train de te faire… De ton derrière qui gigote et qui rougit sous le nez du patron… De ce qu’il doit penser… De tout ce qu’il doit voir en réalité…
– Ça ! Faut bien reconnaître qu’il y a pas grand-chose qui doit lui échapper… Bon… Mais et après ?
– Il a bien fallu que ça finisse par finir… Il m’a fait relever… « Filez là-bas, Mademoiselle… Et profitez-en pour méditer… » Au coin… « Le nez contre le mur on met… Allez ! Et on le laisse à l’air le petit derrière… Bien haut on la relève la robe…
– Et alors ?
– Ben je l’ai fait… Et c’est là que… Pas au début, non… Parce qu’au début je suis restée comme ça – comme il m’avait dit – sans bouger… Lui, il était à son bureau… Je l’entendais remuer des papiers… Toussoter… Et sûrement qu’il devait me jeter des coups d’œil… Tant qu’il pouvait… Tant qu’il voulait…
– T’inquiète pas qu’il a pas dû s’en priver…
– Et ça a été à force de rester comme ça, les fesses toutes chaudes, à me demander combien de temps il allait me laisser là… À repenser à ce qui venait de se passer… À le sentir derrière… Une envie… Une envie de me toucher… Une envie comme jamais… J’ai résisté… Tant que j’ai pu… Mais ça insistait trop… Ça s’incrustait… Ça voulait… Alors… Juste un peu… Presque pas… Du bout du doigt… Et je l’ai vite enlevée ma main… Remise en haut… La tête appuyée dessus… Sur le bras… Pour m’empêcher de… Cinq minutes j’ai tenu… Peut-être un peu plus… Peut-être un peu moins… Et puis je suis redescendue… J’ai pas pu m’empêcher… Et encore… Un peu plus… Plus fort… Plus appuyé… Plus longtemps… Mais non… Non… Fallait pas… Non… Pour quoi j’allais passer ? Et je suis retournée en haut… Et alors, lui, de derrière, d’une voix toute tranquille... « Oh, mais vous pouvez vous branler, hein ! Je n’y vois personnellement aucun inconvénient… » J’ai tenu bon… Un peu… Pas longtemps… Je suis revenue… Et alors là !... Là… J’ai complètement perdu la tête… Ça a déferlé… Ça m’a emportée… J’ai rugi… J’ai hurlé… Je sais plus… Ce que je sais, c’est que j’étais… Oh, la honte !
– Et lui ?
– Lui ? Il disait rien… Il faisait rien… Il a pas bougé… Jusqu’à la fin… Et puis… « Vous pouvez y aller… » Seulement ça… « Vous pouvez y aller… » Et juste au moment où j’allais passer la porte… « Ton string… Viens ramasser ton string… » À ses pieds… Sous son fauteuil… Non, mais comment c’est trop la honte… Je vais partir… J’ai pas le choix…
– Te précipite pas ! Laisse passer un peu de temps… Tu vas l’aimer ta honte… Tu vas voir comment tu vas l’aimer…  

lundi 21 mai 2012

Un mariage ( 7 )


– Ça le fait quand même pas trop mal tous les deux, hein, finalement ! Si, c’est vrai… J’ai pas trop à me plaindre… Et vous savez pourquoi ? Vous la connaissez la raison ? Non ? Moi, si… Parce qu’au lit il se passe rien entre nous… Et pour cause… Et que du coup vous essayez de vous rattraper autrement… De compenser… De toutes les façons possibles… Vous savez pas quoi inventer pour me faire plaisir… Je suis devenue une petite reine moi, pour vous, là-dedans… Sans rien à faire… Pas de bouffe… Pas de courses… Pas de ménage… Rien… Juste la déco… Parce que j’aime ça… Le reste du temps je me promène… Je regarde des films… Je me lève des mecs… Ça pourrait être pire, hein ! Et j’en connais tout un tas des nanas qui demanderaient pas mieux que d’être à ma place… Alors autant vous dire les choses franchement : c’est pas la peine que vous perdiez votre temps dans tous vos bouquins, là… Parce que même que vous deviendriez une bête de sexe j’aurais pas vraiment envie avec vous… Je le sais… Je le sens… C’est le genre de truc qui se commande pas ça… Alors le mieux, c’est qu’on reste sagement comme on est maintenant tous les deux… Chacun y trouvera son compte… Et puis voilà…



– C’est ce soir qu’elle vient s’installer ici Delphine… Vous vous rappelez quand même ?
Avec quatre gros cartons que je suis descendu chercher dans le coffre de sa voiture…
– Le reste on ira le récupérer plus tard… Il y a rien qui presse… Mais allez manger, vous ! Nous attendez pas… Faut qu’on déballe tout ça… Qu’on le range…
En grands éclats de rire… Qui ont résonné tard dans la nuit…
Quand elle m’a rejoint, dans la chambre, il était quatre heures du matin…



– Vous dormez pas ? Non ? Elle est chiante Delphine… Parce que vous savez pas ce qu’elle vient de me dire, là, en discutant ? Que j’étais vache de vous avoir laissé passer des heures et des heures à étudier toute votre documentation, vos revues, vos bouquins, tout ça, pour, à l’arrivée, vous dire que j’en avais rien à foutre et que de toute façon ça vous passera toujours sous le nez… Ce qu’elle pense, elle, c’est que si ça y a vraiment changé quelque chose tout ça je devrais quand même le faire avec vous… Pas souvent… Juste une fois de temps en temps… Et elle m’a expliqué pourquoi… Ça se tient… Seulement je vous dirai pas… Je suis pas idiote… Ça vous regarde pas… Par contre, à son avis, si c’est toujours pareil, alors là… là… faut pas que je me gêne pour continuer à vous faire faire tintin… Bon… Mais il y a qu’un moyen de savoir… J’en connais pas douze mille… Allez… Vous êtes prêt ? On regarde ce que ça donne ?



– Alors ?
Elles étaient toutes les deux dans la salle de bains dont elles avaient laissé la porte grande ouverte…
– Alors ? Ben alors c’est pas allé jusqu’au bout… Je lui ai tout fait arrêter… Un vrai massacre c’était… Pire qu’avant…
– À ce point ?
– T’as même pas idée… J’ai carrément failli éclater de rire, oui… Non, mais imagine… Imagine le mec qu’essaie d’appliquer à la lettre les trucs qu’il a appris… C’est consciencieux… C’est appliqué… C’est besogneux… Et ça te laisse complètement de marbre…
– C’est peut-être pas complètement désespéré…
– Tu l’aurais vu à l’œuvre tu dirais pas ça… Bon, mais maintenant au moins je sais à quoi m’en tenir… Je le savais dès le départ n’importe comment…



– Qu’est-ce que vous fichez là derrière la porte, vous ? Vous êtes pas encore parti ?!
– Elle est pas prête Delphine ?
– Elle viendra pas Delphine… Quand elle a pas son compte de sommeil, elle, c’est même pas la peine… Elle va se traîner toute la journée et vous multiplier les conneries… C’est ça que vous voulez ? Eh ben alors ! Filez ! L’attendez pas ! Pour une fois vous en mourrez pas de le tenir tout seul votre magasin…

jeudi 17 mai 2012

Escobarines: Recherche d'emploi ( 5 )


– Justine…
– Oui ?
– Je voudrais te voir… C’est important… Je voudrais te parler… Mais pas ici… Tu peux me retrouver, après le service, au bar en face de la mairie ?

– Me v’là… Qu’est-ce qu’il y a ? Tu m’as fait peur… T’avais un air tellement…
– Oh, non, non… Il y a rien de grave… Enfin si ! Quand même… Mais d’abord tu me promets… tu me jures que ça va rester entre nous… Que tu répèteras rien… À personne… Jamais…
– Bien sûr… Évidemment… Je t’écoute… Vas-y !
– Tu sais ce qui m’est arrivé ?
– Quoi ? La fessée ? Ben oui… Comment je saurais pas ? Il se parle que de ça… Je comprendrai d’ailleurs jamais que tu…
– Oh, ben si ! Si ! C’est facile à comprendre… Il m’avait mis le marché en mains… Ou j’acceptais d’être punie « comme ça » ou elle me passait sous le nez la place… Et comme j’avais impérativement besoin de travailler…
– Quand même… C’est pas une raison… Moi en tout cas si la question s’était posée…
– Justement… Elle risque de se poser…
– Comment ça ?
– Il a l’intention de remplacer peu à peu – mais ça devrait quand même aller assez vite – tout le personnel actuellement en poste par des employés embauchés aux mêmes conditions que moi…
– Hein ? Mais c’est dégueulasse ! Il a pas le droit…
– C’est lui le patron…
– Il y a des lois…
– Qu’il n’aura aucun mal à contourner… Il est malin… Il saura parvenir à ses fins sans se mettre dans son tort…
– C’est écoeurant… Je suis écoeurée…
– Mais c’est comme ça… J’ai préféré te prévenir… Que tu puisses prendre tes dispositions… Parce que… C’est vrai qu’il y a pas longtemps que je suis là… Qu’on se connaît pas beaucoup, mais t’as toujours été très sympa avec moi… Mais alors pas un mot, hein ? À personne… Je compte sur toi…
– Ça va de soi… Évidemment… Ça va de soi…

– Et elle va rien avoir de plus pressé que d’aller mettre tout le monde au courant… Ça va te faire une ébullition là-dedans…
– Je crois pas, non… C’est plutôt le genre à se la jouer perso… D’une façon ou d’une autre… À essayer de tirer son épingle du jeu…
– Et si c’est pas le cas ?
– Je pourrai toujours prétendre qu’elle a tout inventé… De A à Z…
– Tu es machiavélique…

– Tu sais pour ce que tu m’as dit hier… Toute la nuit ça m’a trotté dans la tête… Et je me demande un truc… Il va toutes nous remplacer ou bien tu crois qu’il les garderait s’il y en avait qui voulaient bien en recevoir des fessées ?
– Oh, il les garderait… Sûrement qu’il les garderait… Il y a pas de raison d’aller chercher ailleurs ce qu’on a sous la main… Mais pourquoi tu me demandes ça ?
– Oh, comme ça… Pour rien… Pour savoir…
– Tu y as pensé, hein ! Tu y penses…
– Non… Enfin si ! Un peu… Mais juste comme ça… Parce que ça me ferait vraiment chier de la perdre ma place… Je suis bien, moi, ici…
– Eh ben alors tu sais ce qui te reste à faire…
– Ça fait vraiment très mal ?
– Ça fait mal, oui… Je vais pas te dire le contraire… Mais en même temps c’est pas si désagréable que ça… Au contraire…
– Comment ça ?
– C’est difficile à expliquer… Quand tu la recevras tu comprendras…
– Oui, mais alors… suppose que je décide que je veux bien… Comment il le saura ? Je peux quand même pas aller le trouver pour lui dire comme ça de but en blanc…
– Je m’en occuperai… C’est pas un souci… Ça, je m’en occuperai… Tu peux compter sur moi…

– Je voulais vous dire… C’est en bonne voie… En très bonne voie… Le fruit est mûr… Vous allez pouvoir le cueillir…
– Parfait… Je vois que vous vous acquittez à merveille des tâches qui vous sont confiées… Et quelle est l’heureuse élue ?
– Justine…
– Justine ! Et, de surcroît, vos choix sont judicieux… Que voilà un petit derrière qu’il va être infiniment agréable de dénuder et de faire rougir… Mais en attendant c’est du vôtre qu’on va s’occuper… Parce que je suppose que, pour convaincre quelqu’un comme Justine, il vous a fallu mentir de façon éhontée… Inventer des histoires à dormir debout… Non ?
– Un peu…
– Vous allez être punie pour ça… J’ai une sainte horreur du mensonge… Alors on se dépêche de se déshabiller et on va gentiment s’installer sur les coussins là-bas… 

lundi 14 mai 2012

Un mariage ( 6 )


Elle a jeté son sac sur le canapé, allumé la télé…
– C’est prêt ? La bouffe ? J’ai une de ces faims… Qu’est-ce vous avez fait de bon ?
– C’est pas prêt, non…
– C’est pas prêt ? C’est vrai ? Mais qu’est-ce vous avez foutu ?
– J’avais toutes les commandes à passer… La compta à boucler… En plus on a fermé en retard…
– Non, mais vous trouvez pas que vous exagérez ? Parce que moi je cours à droite et à gauche toute la sainte journée… Pour vous… Pour vous arranger votre maison… Pour qu’elle ressemble enfin à quelque chose… Je suis quand même en droit d’espérer qu’en rentrant j’aurai plus qu’à me mettre les pieds sous la table… Eh ben non… Même pas…
– Ben oui, mais…
– Mais quoi ? La compta… Les commandes… Vous pouvez très bien faire ça après… Pendant que je regarde le film… Bon… Ben vous savez pas ? Vous avez plus qu’à m’emmener au restaurant pour la peine…



– C’est bon, vous ? Moi, ça va… Du moment que c’est des ris de veau… Ça les ris de veau, c’est un truc… Surtout que là ils sont super bien cuisinés en plus… En attendant vous m’avez pas dit…
– Je t’ai pas dit quoi ?
– Comment vous trouvez la façon dont j’arrange votre maison… Vous vous en foutez ?
– J’m’en fous pas, non…
– Mais un peu quand même… J’m’en fous n’importe comment que vous vous en foutiez… Et même… j’aime mieux… Comme ça vous vous en mêlez pas… Vous me laissez faire à mon idée… En douce que ça a été vite, hein, finalement… Dans deux jours c’est fini… Comme quoi quand ils veulent se donner la peine… Après… à moi de jouer… C’est le plus agréable, ça… Les détails… Le fignolage… Et alors vous savez pas ce que j’ai pensé ? Parce que finalement la petite chambre verte du fond elle va servir à rien… C’est qu’elle pourrait bien venir habiter ici Delphine… Avec nous… Vous avez vu tout le trajet que ça lui fait depuis chez elle ? L’hiver en plus, c’est la galère… Ce sera obligé qu’elle arrive en retard… Obligé… Non… Et puis même pour moi… Ce sera quand même plus sympa de l’avoir là à côté… Pour se raconter des trucs de filles… Se faire nos confidences… Regarder des films ensemble… Tout ça… C’est pas que je m’ennuie avec vous, non, faut pas croire… Mais on n’a pas du tout les mêmes goûts, vous et moi… Et si j’ai pas quelqu’un avec qui je peux parler de tout ça va pas le faire… Sûr qu’au bout d’un moment ça va pas le faire… Alors ? Qu’est-ce vous en pensez ? Hein ? Je lui dis de venir ? Oui ? Elle va être contente… Parce que vu comme on s’entend bien toutes les deux… Et depuis toujours…



– Qu’est-ce vous faites ? Mais si ! C’est quoi que vous cachez ? Allez, faites voir… Faites voir ! Attention, je vais me fâcher… C’est quoi tout ça ? « Comment satisfaire une femme à coup sûr », « Vaginales et clitoridiennes », « De quelques idées reçues sur le plaisir féminin »… Et il y en a tout un tas ! Une vraie bibliothèque… Mais vous avez raison… Instruisez-vous ! Ça sera pas du luxe… Je vous laisse… Moi, pendant ce temps-là, je vais aller m’en trouver un qui les a finies ses études… Et depuis un bon moment…
– Qui ça ?
– J’en sais rien qui ça… Je verrai bien…



– Et il dort ! Il dort !
– Hein ? Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? Quelle heure il est ?
– Quatre heures il est ! Et ça fait trois plombes que je le fais sonner votre portable…
– Il est dans la salle de bains… J’ai pas entendu…
– Ça se garde à portée de main un portable… Ça sert à rien sinon…
– Qu’est-ce qui s’est passé ?
– Il s’est passé que je suis tombé en rade en pleine pampa… En revenant de chez l’autre là-bas… « Clac » elle a fait la bagnole et elle a plus rien voulu savoir… Va trouver un dépanneur, toi, au milieu de la nuit… Heureusement qu’il y a deux jeunes sympas qui ont fini par passer… Et qui m’ont ramenée… C’est la courroie de distribution, à ce qu’il paraît, d’après eux… Enfin vous verrez bien demain quand vous irez la chercher… Mais en attendant heureusement que je suis tombée sur eux… Vous vous rendez compte ce qu’aurait pu m’arriver si c’était des tordus qui s’étaient arrêtés ?! Rien que d’y penser… Non… Non… La prochaine fois je vous emmène, il y a pas photo… Vous attendrez dans la voiture… Ou ailleurs… C’est un détail, ça… Mais je vous emmène…    

jeudi 10 mai 2012

Escobarines: Recherche d'emploi ( 4 )


– Je voudrais te demander un truc, là… Mais t’es pas obligée de me répondre…
– Ben, vas-y ! Quoi ?
– À ce qu’il paraît qu’il t’a flanqué une fessée le patron hier soir… Cul nu… À cause que tu lui as répondu à Mademoiselle Tirieix… C’est vrai ?
– Ben oui, c’est vrai… Oui…
– Wouah ! Alors c’est vrai… J’y croyais pas, moi ! Eh ben dis donc ! Quand je vais leur raconter ça aux autres… Ils vont pas en revenir… Bon, mais j’y vais… J’y vais…

– Et évidemment t’as eu droit à tout un tas d’allusions toute la journée… De sourires entendus… De petites réflexions derrière ton dos…
– Pas par derrière, non… Carrément par devant… Sans se gêner… Les nanas comme les mecs…
– C’était pas trop dur ?
– Non… Franchement… Non… Et même…
– Je sais pas comment tu fais… Je pourrais pas, moi ! Jamais je pourrais supporter un truc pareil !

– Qui vous a autorisée, Mademoiselle, à aller raconter à qui veut l’entendre ce qui s’est passé, avant-hier soir, dans ce bureau ?
– C’est pas moi ! C’est Ophélie… Elle savait déjà n’importe comment…
– Et, comme si cela ne suffisait pas, vous vous permettez d’accuser vos collègues !
– Mais non, mais…
– Par votre faute règne, depuis hier, dans mon établissement, un climat d’agitation et de fébrilité qui nuit à la qualité du service… En conséquence Mademoiselle Tirieix vous infligera tout à l’heure, en présence de la collègue que vous avez honteusement calomniée, le châtiment que vous savez… Retournez travailler… Je vous appellerai…

– Et ?
– Ben tu te doutes… Elle m’en a mis une…
– Elle tape fort ? Plus que lui ?
– C’est pas qu’elle a tapé plus fort… C’est que c’était beaucoup plus humiliant…
– Ah, oui ?! Comment ça ? Qu’est-ce qu’elle t’a dit ?
– Rien… Elle a pas parlé… Elle a pas lâché un seul mot… Non… C’était une façon qu’elle avait – je sais pas comment – de me faire sentir qu’elle m’avait complètement en son pouvoir… C’était…
– C’était ?
– Quelque chose de très fort… De très intense… Que j’avais jamais connu… Je regrette pas… Ah, non, alors !
– Et la fille, là ? Ophélie… Elle était là ? Elle a assisté ?
– Elle en a pas perdu une miette…
– Et n’a rien eu de plus pressé, en sortant de là, que d’aller faire un rapport circonstancié à ses petites camarades…
– Probable, oui…
– Et c’est encore toi qui vas trinquer…
– Je sais pas… Je verrai bien… J’espère… Oui… J’espère finalement…

– Faisons le point, Mademoiselle, si vous le voulez bien… Je n’ai nullement à me plaindre de la façon dont vous effectuez votre travail…
– Merci, Monsieur…
– Et pas davantage de la manière dont vous respectez notre contrat… Vous faites preuve d’une docilité dont je n’ai qu’à me louer…
– Je m’y étais engagée…
– En effet… Et reconnaissez avec moi que, chaque fois que vous avez été châtiée, vous l’aviez amplement mérité…
– Je le reconnais…
– Si seulement vos collègues voulaient bien faire montre d’autant de lucidité et de bonne volonté que vous… La façon dont certaines d’entre elles accomplissent leur tâche justifierait – vous en conviendrez – qu’elles soient soumises au même traitement que celui qui vous est réservé…  
– Ce n’est pas à moi d’en juger…
– Mais c’est peut-être à vous de les en persuader… Au moins les plus paresseuses et les moins motivées d’entre elles…

– Tu vas le faire ?
– Il m’a pas laissé le choix… Il me donne quinze jours pour en convaincre une… N’importe laquelle…
– Tu vas t’y prendre comment ?
– Alors ça ! Si je savais !   


  

lundi 7 mai 2012

Un mariage ( 5 )


Elle a dormi pendant une bonne partie du trajet de retour…
– C’est pas vrai qu’on est déjà là ?! Mais on est presque arrivés ! Laissez-moi l’appeler Delphine… Que je la mette au courant pour le magasin… Ben oui, c’est moi, oui ! Super ! Ah, oui, super ! Plein de trucs il s’est passé… Je te raconterai… Lui ? Il est aux petits soins pour moi… Tout ce que je veux j’en fais… Pour le cul ? Ah, ça, par contre, non, c’est pas le top… T’avais raison… Enfin pas vraiment… Mais ça revient au même au bout du compte… Je te raconterai aussi… Bon… Mais c’est pas tout ça… Ta grande surface, là, tu peux t’en libérer quand ? Ben évidemment que tu l’as la place… Je te l’avais dit… Je te l’avais pas dit ?  



Dix fois, vingt fois elle a fait, en soupirant, le tour de l’appartement…
– Qu’est-ce que c’est nul chez vous ! Vous avez vraiment de ces goûts de chiottes… En tout cas comptez pas me faire vivre là-dedans ! Parce qu’au bout de huit jours je déprime complètement…  Alors de deux choses l’une : ou bien vous me laissez réaménager tout ça, à ma façon, de fond en comble… Ou bien on s’achète une maison pas trop loin où j’installe tout en repartant de zéro… À vous de voir…
– C’est-à-dire que…
– Que quoi ?! Vous allez quand même pas me faire croire que vous avez pas les moyens ! Avec un magasin qui tourne comme il tourne… Je suis bien placée pour le savoir… C’est la grande mode en plus tous ces trucs bio et compagnie… Que les gens ils s’imaginent que ça les protège du cancer et de tout le reste… Que vous pouvez bien prendre toutes les marges que vous voulez – et vous vous en privez pas – ils en ont rien à foutre… Ils achètent quand même… Bon, mais réfléchissez… Vous me direz…



– On reste là ? Oui ? Alors… feu !
Et elle a passé la semaine à contacter des entrepreneurs… À faire établir des devis…
– Vous allez plus la reconnaître votre baraque… Ce qui vaut mieux d’ailleurs… Parce que franchement…
À consulter des catalogues… À compulser des nuanciers…
– Le carrelage de la cuisine il faut le changer… Celui de la salle de bains aussi… Après je m’occuperai des revêtements de sol… Dans les chambres… Dans la salle de séjour… Et puis des papiers peints… C’est tout qu’il faut reprendre… Tout… De fond en comble… Il y a pas d’autre solution…



– Je vous ai pas demandé… Comment ça se passe au magasin avec Delphine ?
– Oh, bien… Bien… Elle s’est vite adaptée…
– J’en étais sûre… Delphine du moment qu’on la prend pas à rebrousse-poil… Et ça, c’est pas votre style à vous…



Le samedi elle ont filé toutes les deux…
– Je vous l’emprunte Delphine… Vous en mourrez pas de tenir le magasin une après-midi tout seul… Parce que faut que j’aille jeter un œil pour les meubles… Ce qu’on mettra quand ce sera fini les travaux… Et je voudrais bien son avis… Elle est d’excellent conseil là-dessus…



– Ah, commencez pas à râler…
– Mais j’ai rien dit !
– Oui, oh, je vous connais… Vous êtes furieux à l’intérieur… Alors que je vous explique… À courir les magasins comme ça pendant des heures on était complètement moulues… Et on a voulu se faire un petit resto… Entre filles… Histoire de se reposer un peu… Seulement on était à peine installées qu’il y a deux vieux copains à nous qui nous sont tombés dessus… On a discuté… Discuté… Et on n’a pas vu le temps passer… Quand j’ai réalisé il était minuit… J’allais quand même pas vous appeler à une heure pareille ! Au risque de vous réveiller…
– Je dormais pas…
– Oh, mais il faut, hein, quand c’est comme ça ! Faut pas m’attendre… Surtout que quand on se retrouve entre jeunes c’est forcé que ça finisse en boîte… Obligé…
– Tu as dormi où ?
– Ah, je l’attendais celle-là… Je l’attendais… C’est si j’ai couché que vous voulez savoir, hein, c’est ça ?! Ben évidemment… Ça fait des années et des années qu’on se connaît avec Nico… Ça fait des années qu’on couche quand on se voit… Même si c’est pas souvent…  Vous voudriez quand même pas que j’arrête comme ça du jour au lendemain… Sans raison… Il comprendrait pas… Et puis de toute façon…
– De toute façon ?
– Vous savez qu’on en a parlé de vous avec Delphine ? De ce qu’au lit vous êtes vraiment pas opérationnel… Oh, mais quoi ! Faites pas cette tête-là ! Vous êtes comme ça vous êtes comme ça… Il y a pas de quoi en faire tout un plat… Faut assumer, c’est tout… N’importe comment avec Delphine on s’est toujours tout dit alors… Et ce qu’elle pense, elle, c’est que, de ce côté-là, vous faites aucun effort… Qu’un type, quand c’est comme ça, s’il veut, il peut toujours apprendre… Parce qu’il y a des sexologues… Il y a des bouquins… Il y a des revues… Tout un tas de trucs… C’est pas ça qui manque… Alors, à son avis, vous vous en fichez complètement de me garder ou pas… Sinon vous feriez ce qu’il faut pour… Et peut-être qu’elle a pas si tort que ça finalement…     

jeudi 3 mai 2012

Escobarines: Recherche d'emploi ( 3 )




– Si je vous ai convoquée pour un entretien, Mademoiselle, ce n’est pas que j’aie, dans l’immédiat, un impérieux besoin de personnel supplémentaire… Non… Les temps sont durs… Très… Mais enfin si vous vous montrez réellement disposée à accepter les châtiments auxquels vous vous dites prête, dans votre lettre, à vous soumettre …
– Mais je le suis, Monsieur, je le suis… Je peux vous assurer que je le suis…
– Au point de me le prouver ?
– Quand vous voudrez…
– Eh bien allez alors !

– C’est pas vrai ! Comme ça ! Au bout de deux minutes… Il manque pas d’air, dis donc, celui-là ! Et alors ? T’as fait quoi ?
– À ton avis ? Elle était trop belle l’occasion... J’allais l’avoir la place… Suffisait d’enfoncer le clou… Alors ? Ben j’ai pas hésité… Je me suis mis le cul à l’air… Je me suis courbée, à l’équerre, sur son bureau… Et j’ai attendu… Un bon moment… Il a fait durer, mais durer ! Et puis il s’est levé… Il a marché… Il s’approchait… Il s’éloignait… Il recommençait…
– Comment ça devait être stressant !
– Je te le fais pas dire… Mais il a quand même fini par s’arrêter… Il m’a posé la main sur la nuque… « Ainsi donc elle est toute disposée à se montrer très très docile cette grande fille… Très très obéissante… C’est bien… C’est très bien… Et elle aura tout intérêt d’ailleurs parce que sinon… Sinon… Qu’est-ce qui lui arrivera ? Hein ? Dites-le ! Qu’est-ce qui vous arrivera ? – J’aurai la fessée… – Vous aurez la fessée, oui… Déculottée… Et je peux vous assurer qu’elle sera carabinée… » Il l’a enlevée sa main… Et il est allé la poser en bas… Au creux des reins… Elle débordait juste un peu sur le haut des fesses… « On l’inaugure ce gentil petit derrière ? On lui fait voir de quel bois on se chauffe ? Hein ? Qu’est-ce que vous en pensez ? » S’il voulait… Comme il voulait… À lui de décider… «  Eh bien non… Tout compte fait non… Ça se mérite une fessée… Ça se donne pas comme ça en l’air… Sans raison… Mais je suis bien tranquille que vous n’allez pas tarder à m’en donner des raisons… Bonne fille comme vous êtes ! Bon, mais allez ! Reculottez-vous ! »
Pendant qu’il préparait le contrat… Qu’il m’a aussitôt fait signer…

– Déjà ! Vous vous êtes déjà fait remarquer… Dès le deuxième jour… Ça n’a pas perdu de temps, dites donc !
– C’est elle ! C’est elle qui m’a cherchée… Non, mais comment elle m’a cherchée… J’allais quand même pas me laisser marcher sur les pieds comme ça !
– Vous lui avez tenu des propos ! Et sur un ton !
– Et elle alors ! C’est elle qu’a commencé… Vous auriez entendu tout ce qu’elle m’a dit !
 – Je veux pas le savoir… Mademoiselle Tirieix est chef de rang… Vous êtes sous ses ordres et je lui fais aveuglément confiance... Si elle m’affirme que vous vous êtes comportée de façon inacceptable, c’est que vous vous êtes comportée de façon inacceptable… Vous savez ce que ça signifie…
– Oui, mais…
– Il n’y a pas de mais qui tienne…

– Et alors ?
– Et alors… ben rien… Enfin, si ! Il m’en a collé une… Qu’est-ce tu veux d’autre ?
– Fort ?
– Ah, pour ça, oui… Je peux te dire qu’il y est allé de bon cœur… Comment que ça m’a brûlé ! Mais c’est pas ça le pire…
– Ah, oui ? C’est quoi ?
– C’est qu’il m’a envoyée au coin après… Avec la culotte et tout descendu sur les cuisses… Et qu’il l’a fait venir l’autre, la Tirieix, pour qu’elle profite du spectacle…
– Oh, non !
– Eh, si ! Odieuse elle a été… Odieuse…
– Comment ça ?
– Ben… Elle était en position de force… Elle en a profité… « Eh, mais c’est qu’elle a pris de jolies couleurs la petite dinde… Ça lui va bien… Ça lui va très très bien… Du coup elle fera moins la fière à l’avenir… Du moins il faut l’espérer » Et lui : « Oh, mais c’est qu’elle a tout intérêt… Parce que je ne la louperai pas… Il suffira d’un mot de vous, Mademoiselle Tirieix, d’un seul mot, et je sévirai aussitôt… Vous pouvez compter sur moi… » Elle m’a posé une main sur l’épaule… Forcée à me retourner… «  Vous allez malheureusement être amené à le faire souvent… Très souvent… Parce qu’on a manifestement affaire là à une nature profondément viciée… » Elle m’a soulevé le menton… Du bout du doigt… « Baisse les yeux… Je t’ordonne de baisser les yeux… »
– Et tu l’as fait ?
– Évidemment que je l’ai fait…
– Ma pauvre ! Je te plains… Comment tu dois regretter de t’être lancée là-dedans…
– Ah, non, je regrette pas… Non…
– Non ? C’est vrai ?
– Non… Au contraire… Mais tu peux pas comprendre…