Tableau de Jacques Wely
Dans mon
demi-sommeil, je l’entends. Je l’entends de l’autre côté de
la cloison. Notre voisin. Le petit étudiant. Beau comme un cœur. Et
rougissant comme une adolescente. Je l’entends. Il s’est douché.
La cafetière a crachoté. Le micro-ondes a vrombi. Maintenant il est
sagement assis à son bureau. Il a mis la musique en sourdine. Pour
ne pas me réveiller. Il ne faut surtout pas qu’il me réveille. Il
ne faut surtout pas que je me lève. Parce que si, à dix heures
tapantes, quand Christophe va rentrer, je ne suis pas levée, je vais
me prendre une fessée. Il le sait. Carabinée. Une fessée dont il
va pouvoir suivre tout à loisir les péripéties, le cœur battant,
l’oreille collée à la paroi.
Plus que dix
minutes. Il doit prier tous les saints du paradis. Pourvu qu’elle
ne se lève pas. Pourvu… Pourvu… Je le fais quelquefois. Je
m’extirpe des couvertures. Au dernier moment. En riant sous cape.
Comme il doit être déçu !
Mais pas
aujourd’hui. Aujourd’hui j’ai décidé d’être gentille.
Bonne fille. Je vais attendre, bien calée dans mes oreillers, le
retour de Christophe. Et ma fessée. Je tousse. Je me retourne dans
mon lit. Qu’il entende le sommier grincer. Qu’il se rassure :
Non. Non. Elle n’est pas levée.
La porte. Et
Christophe.
Un petit coup d’œil
dans la direction de la cloison.
Il a compris. Et il
explose.
– Non, mais
c’est pas vrai ! C’est pas vrai que t’es encore au pieu !
– Je me lève,
Christophe. Je me lève.
– Il est bien
temps ! Tu devais pas aller chercher du travail ?
– Si !
Mais j’y vais ! J’y vais !
– J’espère
bien, mais d’abord…
– Non !
Non ! Pas la fessée ! Ah, non, hein !
– Ah, si !
Et comment ! Parce que j’en ai assez, figure-toi ! Assez
de faire les postes, de me crever la nuit au boulot alors que toi, tu
te prélasses toute la sainte journée au lit.
Et il m’empoigne.
Me force à me tourner sur le ventre.
J’entre pleinement
dans mon rôle. Je me débats. Je vocifère. Je proteste. Je supplie.
Je menace.
Lui aussi, il est
dans le sien. Il relève ma chemise de nuit.
– Non,
Christophe, non !
Il me découvre les
fesses. Et il tape. Ça tombe dru. Bien claquant. Bien sonore. Sûr
que l’autre à côté il doit entendre.. Et se régaler. Il a beau
avoir une belle petite gueule d’ange à qui on donnerait le Bon
Dieu sans confession, pas besoin de t’en faire qu’il est quand
même comme les autres. Qu’elle doit être dressée toute droite sa
queue. Qu’il doit s’acharner dessus comme un perdu. Et qu’il va
jouir. Pour moi. Grâce à moi.
Je piaule de plus
belle. Je m’époumone tant que je peux.
– Ça fait
mal ! Oh, que ça fait mal !
Et tellement de
bien. C’est tout trempé entre mes cuisses.
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