Ça n’a pas été tout de suite.
– Le
temps de trouver un créneau qui leur convienne à tous les trois.
Et…
Il
m’a posé une main sur l’épaule. M’a souri.
– Et
aussi le temps que tu réfléchisses. Que tu appréhendes. Beaucoup.
Longtemps. Dans ton cas c’est encore ce qui sera le plus efficace.
Pour
appréhender, j’appréhendais, ça ! Être déculottée et
fessée devant trois hommes dont deux avaient à peine la moitié de
mon âge. J’appréhendais mais, en même temps, je me sentais
soulagée. Il m’arrêtait. Il m’arrêtait à temps. Je savais
trop bien sur quelle pente savonneuse je m’étais une nouvelle fois
engagée. Je savais trop bien qu’une fois lancée, seule, j’aurais
été incapable de m’arrêter. Et que je nous aurais mis
financièrement gravement en danger.
Les
filles me plaignaient.
– Tu
vis ça comment ?
Je
haussais les épaules.
– Comme
vous toutes, j’imagine.
Océane
s’en voulait.
– C’est
ma faute, tout ça ! C’est ma faute.
Je
la rassurais. Comme je pouvais.
– J’aurais
replongé de toute façon. J’essayais de me le faire croire mais je
savais bien, tout au fond de moi, que je n’étais pas complètement
guérie.
En
attendant, il y en avait un qui l’agaçait. Qu’est-ce qu’il
pouvait l’agacer !
– Ton
Valentin ?
– Valentin,
oui. Parce qu’il joue les indifférents. « C’est jamais
qu’une fessée. », mais en réalité comment il a hâte de te
voir la recevoir. Ça l’excite. Ça l’excite d’une force !
Deux fois hier il a fallu que je passe à la casserole. Et déjà une
fois ce matin. Il peut pas s’empêcher d’en parler. À tout bout
de champ. Il essaie bien, mais il y arrive pas. Il parle plus que de
ça. Et sa grande hantise, c’est que ça n’ait finalement pas
lieu. Que tu réussisses à convaincre Julien de renoncer à te la
donner devant eux. « On sait jamais ! Les femmes, c’est
jamais à bout d’arguments. » Tu peux être sûre en tout cas
qu’il va ouvrir tout grand les yeux et qu’il en perdra pas une
miette. Quant à moi, faudra que j’assure quand il va rentrer. Ça,
je m’y attends.
Le
Clément de Bérengère, c’était le seul que je ne connaissais
pas, que je n’avais jamais vu.
– Oui,
ben justement ! Justement ! Il trouve la situation des plus
cocasses, lui. Et des plus improbables. « T’imagines ?
Je sais même pas à quoi elle ressemble et j’aurai à peine le
temps de lui dire bonjour qu’elle va se retrouver les fesses à
l’air devant moi. Et gigoter du croupion. Avoue quand même que
c’est pas banal. » Et il arrête pas de me harceler de
questions. T’es comment ? Brune ? Blonde ? Et tes
yeux ? Ils sont de quelle couleur, tes yeux ? T’es plutôt
enveloppée ou longiligne ? Et ta poitrine ? Elle déborde
de partout ou bien elle est toute menue ? Mais dès que
j’esquisse le moindre début de commencement de réponse, il me
fait taire. « Non, non, dis rien ! Dis rien ! Je
préfère avoir la surprise. »
Celui
que j’appréhendais le plus, c’était, et de loin, l’Étienne
d’Émilie. Vu la sortie qu’il m’avait faite, chez lui, le jour
où il l’avait fessée…
– Il
réagit comment ? Il dit quoi ?
Elle
a haussé les épaules.
– Pas
grand-chose. Rien. Il a pas fait vraiment de commentaires. Juste
qu’il espérait que Julien te ménagerait pas. « Parce qu’il
y a des choses qu’on peut vraiment pas laisser passer. »
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