J’ai raccroché, ulcérée. Non, mais pour qui il se prenait ce
Clément ? C’était la première fois qu’il me voyait, il me
connaissait pas et il se permettait de porter sur moi des jugements
péremptoires et définitifs. Quel imbécile !
J’étais
en train de fulminer contre lui quand on a sonné. Bérengère. Qui
venait aux nouvelles. Ah, elle tombait bien, elle, tiens !
Elle
a attaqué d’emblée, d’un petit air compatissant.
– T’as
pris cher, à ce qu’il paraît, hier soir.
– Ben
justement, à ce propos, ton Clément…
– Oui,
il m’a raconté. Comment t’as dû avoir honte !
– À
ce qu’il paraît qu’il a décidé que j’étais exhibitionniste…
– Oui,
oh, Clément, tu sais ! Faut en prendre et en laisser avec lui.
À ses yeux, n’importe comment, on est toutes comme ça. On pense
qu’à se faire reluquer. C’est une obsession chez lui. Limite si,
quand un coup de vent te fait voltiger ta robe, tu l’as pas fait
exprès. J’ai l’habitude depuis le temps. J’y prête plus
vraiment attention. Bon, mais parlons de toi plutôt. Ça a pas dû
être facile quand Julien t’a obligée à rester comme ça devant
eux, non ?
– Ce
le serait pour personne.
– Ah,
ça, moi je sais que j’aurais du mal à m’en remettre. Mais si tu
me racontais ? Il s’est passé quoi au juste ?
– Clément
t’a déjà dit, je suppose.
– Oui,
oh, Clément… Il a vu ça à sa façon à lui. C’est un mec. Il
était beaucoup plus préoccupé par ce que t’avais à montrer que
par tes réactions à toi. Il en avait rien à foutre de si t’avais
honte ou pas. De si ça se voyait. De comment tu te comportais. Non,
il matait. Fallait pas lui en demander beaucoup plus. N’empêche
que t’as dû passer un sacré sale quart d’heure.
– Non !
Tu crois ?
Ce
qu’elle pouvait être lourde quand elle s’y mettait !
– Déjà
qu’Océane et Émilie, ça se voyait que c’était vraiment pas
une partie de plaisir. Et pourtant on était qu’entre nanas. Alors
devant des mecs ! Ah, non, j’aurais pas pu, moi !
J’aurais vraiment pas pu. Je sais pas comment t’as fait.
Elle
a eu un petit rire.
– C’est
trop drôle, avoue ! Parce que, de nous quatre, c’est moi qui
la mérite le plus, la fessée et il y a que moi qui l’ai pas
reçue. Et qui la recevrai pas.
– T’es
bien sûre de toi…
– Oh,
pour ça, oui !
– Parce
que ? T’as mis un terme avec ce type, là ?
– Sûrement
pas ! On s’éclate trop, tous les deux. Non, j’en ai même
pris un autre pour faire bonne mesure. Je sais pas comment je me
débrouille, mais je tombe toujours sur des mecs qui baisent comme
des dieux. À croire que je les attire.
– Mais
alors…
– Clément ?
S’il avait vraiment voulu me gauler, il y a longtemps qu’il
l’aurait fait. Non. En fait ça fait un petit moment qu’il
s’occupe plus vraiment de ce que je fabrique derrière son dos, je
crois bien. Fessée ou pas, il sait que de toute façon j’irai voir
ailleurs. Que je peux pas m’en empêcher. Il en a pris son parti.
Me plaquer ? Il veut pas. Il veut plus. Il a bien trop peur de
rester tout seul. Alors il fait l’autruche. Il s’aperçoit de
rien. Théoriquement, notre pacte tient toujours : je le trompe,
ou on en reste là tous les deux ou il me flanque une fessée. Mais
pratiquement je ne cours plus le moindre risque. Il préfère ne pas
voir. Et ne pas savoir.
– Méfie-toi
quand même ! Il y a des retours de bâton des fois.
– Oh,
mais pas là ! Pas là ! Surtout maintenant que vous avez
décidé que c’est devant les maris ou copains qu’elles auraient
lieu les fessées. Parce que voir les autres nanas en recevoir, ça,
il dira pas non. Il en redemandera même. Par contre, mettre
publiquement à l’air le cul de la sienne, pas question… Elle
peut bien aller voir ailleurs si elle veut, mais ça, non. Non.
Océane
à qui j’ai rapporté notre conversation a levé les yeux au ciel.
– Elle
croit ce qui l’arrange, mais j’ai bien peur qu’elle tombe de
haut. Et bien plus vite qu’elle ne l’imagine.
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