Cordelia a dégoté je ne sais trop où une gravure de l’année
1680 qui représente une boutiquière derrière son étal de godes.
– Et,
apparemment, elle vend que ça. Du coup, doit falloir qu’elle en
débite un bon paquet pour s’en sortir !
– Sans doute
que oui. Parce qu’il y a pas mal de clientes, on dirait.
– Forcément !
Le matériel est de qualité. Bien ressemblant, bien tendu et bien
ferme. Pour autant qu’on puisse en juger. Si elles parviennent pas
à leurs fins avec ça, à moi la peur !
Et c’était ce qui
pouvait leur arriver de mieux. Parce qu’elles avaient pas l’air
franchement épanoui.
– Tu parles !
Avec les maris qu’elles ont !
Je suis entrée dans
le jeu.
– Comment
ça ?
– Ben, la
première, c’est une gourmande, ça se voit tout de suite. C’est
pas qu’il y mette de la mauvaise volonté, le mari, non, mais il
arrive un moment où il rend les armes. À l’impossible, nul n’est
tenu. Et c’est précisément, comme par hasard, à ce moment-là
que, chez elle, l’excitation atteint son paroxysme.
– La pauvre !
– Tu l’as
dit ! Et le temps qu’il recharge les accus… Surtout qu’il
n’est plus de toute première jeunesse.
– Elle
pourrait prendre un amant.
– Elle y a
bien pensé. Seulement, un amant, c’est des complications à n’en
plus finir. Il faut se cacher, courir le risque d’être découverte.
Et puis, c’est pas forcément disponible chaque fois qu’il le
faudrait, un amant. Tandis qu’un gentil compagnon comme celui-ci,
c’est toujours là, toujours prêt à rendre service. Non, pour
elle, c’est vraiment la solution de sagesse.
– Et la
deuxième ? Celle juste derrière ?
– Oh, alors
celle-là ! C’est pas qu’elle ait de gros besoins, mais elle
en a quand même. Comme tout le monde. Seulement son mari, lui, il a
la tête ailleurs. Maintenant qu’il lui a fait quatre gosses, il
estime que le contrat est rempli, qu’il peut se tourner vers autre
chose. Et autre chose, c’est la taverne où il passe le plus clair
de son temps. Quand il rentre enfin à la maison, il tombe comme une
masse. Tant et si bien que ça fait pas loin de six mois qu’il l’a
pas touchée, sa femme. Au début, elle faisait contre mauvaise
fortune bon cœur. Et puis elle a fini par se confier à une voisine.
Qui lui a donné de judicieux conseils, montré sa collection
personnelle, accepté de lui en prêter un. Dont elle est tombée
quasiment amoureuse. Elle est devenue une inconditionnelle de la
chose. Il lui en a fallu d’autres. Beaucoup d’autres. Et elle est
maintenant l’une des clientes les plus assidues de cette petite
échoppe.
– Et la
troisième ? Non, attends ! À mon tour de raconter. La
troisième, elle est cocue jusqu’aux yeux. Du plus loin que son
mari aperçoit un jupon, il faut qu’il se mette en chasse. Il peut
pas s’empêcher. Et tant qu’il est pas arrivé à ses fins, il
lâche pas l’affaire. Seulement, il peut pas se démultiplier comme
ça un peu partout et se trouver, de surcroît, en forme pour
contenter sa femme. Qui, du coup, a décidé de s’occuper d’elle
toute seule. Au vu et au su de son mari. Puisqu’il se cache pas,
lui ! Il y a pas de raison !
– Ben,
tiens ! Sans compter que ça peut le remettre en forme, va
savoir !
– On a de
l’imagination quand même !
– Et on est
peut-être pas si loin que ça de la réalité finalement ! Bon,
mais tu sais ce qu’on pourrait, là, maintenant ? C’est
aller dans un sex-shop. Jeter un coup d’œil sur les godes.
– Et y aller
de nos petits commentaires ? Ça marche. Go !
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire