samedi 27 juillet 2019

Les fantasmes de Lucie (62)



Dessin de Georges Topfer

Il a voulu faire la connaissance de Cordelia.
– Que je voie à quoi elle ressemble cette fameuse copine.
Et il a attaqué d’emblée. À peine le temps de dire bonjour. De s’asseoir.
– Alors comme ça, c’est vous ! C’est vous qui flanquez des fessées à Lucie quand elle n’est pas sage ?
C’était elle, oui !
– Je n’en crois pas un mot.
– Pardon ?
– Vous êtes de mèche, toutes les deux. Ça saute aux yeux. Vous couvrez qui ? C’est qui le charmant jeune homme qui lui tambourine allègrement le popotin derrière mon dos ?
Elle a levé sur lui des yeux stupéfaits.
– Hein ? Mais personne !
– Prenez-moi bien pour un imbécile ! Vous croyez que je vois pas clair dans votre petit jeu ?
Et moi c’était dans le sien que je voyais clair. Je discernais parfaitement où il voulait en venir…
Il a enfoncé le clou.
– Vous feriez beaucoup mieux d’avouer…
J’ai adressé un discret signe d’intelligence à Cordelia.
Qui a tout aussitôt adopté un petit air contrit.
– C’est pas ma faute…
– Ben voyons !
– Si, c’est vrai, hein !
– Je veux pas le savoir. Je veux pas savoir qui a demandé quoi à qui. Qui a proposé quoi à qui. À mes yeux vous êtes aussi coupables l’une que l’autre.
Elle a baissé la tête.
– Et ce que vous mériteriez, toutes les deux, c’est une bonne fessée, tiens !
Il a marqué un court temps d’arrêt.
– Que je vais d’ailleurs vous donner.
Elle a supplié.
– Oh, non, non ! Pas la fessée !
– Parce que vous ne la méritez pas peut-être ?
Elle l’a fait venir de loin. De très très loin.
– Si !
– Eh bien alors !

Il s’est levé.
– On se déshabille. Toutes les deux. Et on ne discute pas.
Sur un ton qui ne souffrait pas la moindre réplique. Ce ton que j’aime tant. Qui me fait naître des frissons dans le bas du dos. Battre le cœur plus vite.
C’est moi qui ai commencé. En prenant tout mon temps. En repliant un à un mes vêtements. En les déposant, l’un après l’autre, sur le grand fauteuil, près de l’entrée. Il m’a regardée faire. Il a regardé faire Cordelia. Il nous a laissées nues, tête basse, un long moment devant lui. Et puis…
– C’est ensemble que vous faites vos petits coups en douce, alors c’est ensemble que vous allez être corrigées. Venez !
Il nous a emmenées dans la chambre voisine. Nous a poussées devant la grande glace en pied, tout au fond.
– Vous serez bien là ! Vous allez pouvoir vous regarder recevoir votre punition.
Avec un petit rire.
D’instinct, on s’est enlacées, Cordelia et moi. On s’est pressées l’une contre l’autre, flanc contre flanc.
C’est aussitôt tombé. Au martinet. À pleines fesses. Une fois l’une. Une fois l’autre. Ou les deux ensemble. Ça nous a fait sautiller dans la glace. D’un pied sur l’autre. De plus en plus haut. On n’a pas pu s’empêcher. Ça nous a fait ballotter les seins. Ça nous a fait grimacer. On a gémi. On a crié. Cordelia a enfoncé ses ongles dans ma hanche, a laissé tomber sa tête sur mon épaule. C’est tombé plus vite. C’est tombé plus fort. Et elle a joui, ses yeux dans les miens. Moi aussi. Juste comme elle finissait. Dans de grands râles.

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