Tableau d’Anders Zorn
Il
m’a réveillée à petits coups de baisers éparpillés un peu
partout.
– Tu
te lèves ?
J’ai
poussé un vague grognement.
– Tu
te lèves ? Il fait jour depuis longtemps. Et il y a l’un de
nos voisins qui tourne autour de la maison. Alors ce qui serait bien…
Il
n’a pas eu besoin de préciser.
Je
me suis levée, mais je ne me suis pas habillée. Je suis descendue.
J’ai un peu virevolté en bas. De ci. De là. Au hasard. Un bon
moment. Qu’il ait le temps de bien profiter, le voisin. De bien
faire connaissance avec moi. Et de constater que mon derrière était
orné d’une jolie fessée toute neuve. Et puis je suis allée
m’asseoir sur un banc, dans le petit renfoncement à droite de la
cheminée. Pour me donner une contenance, j’ai fait mine de
raccommoder une pelisse en peau de mouton qui traînait là. Est-ce
que, les yeux au ras de la fenêtre, il me regardait le type ?
Oui, évidemment qu’il me regardait. Je le savais. Je le sentais.
Il me buvait des yeux. Pas question de vérifier, pourtant. J’en
brûlais d’envie, mais non, pas question. Ça aurait tout gâché.
Le
pas de Victor dans l’escalier. Il s’est approché, penché à mon
oreille.
– Il
se branle. Et toi, je suis sûr que tu mouilles comme une petite
cochonne. Avoue !
– Mais
non, mais… Si !
Il
m’a passé la main sur la joue.
– On
le laisse se finir et je m’occupe de ton cas.
Il
s’en est occupé. Là-haut. On a roulé sur le lit.
– Tu
aimes ça qu’on te voie, hein !
– Oui,
Victor, oui.
– Qu’on
t’admire…
Je
n’ai pas répondu. Je me suis serrée contre lui.
– Et
qu’on se branle en te regardant.
– Viens,
Victor, viens ! Oh, viens !
Et
je me suis jetée à grands coups de bassin contre lui. J’ai
hululé. Clamé mon plaisir. À pleine gorge.
J’ai
continué. Qu’il ait le sien. Eu une nouvelle fois le mien. Que
j’ai encore proclamé.
On
s’est blottis l’un contre l’autre.
– Eh
ben, dis donc ! Quelle déferlante ! On devait t’entendre
jusqu’à Los Angeles.
Il
m’a déposé un baiser sur la pointe du sein.
– S’il
était toujours là, Maxime, et c’était sûrement le cas, il a pas
dû être déçu du voyage.
Et
on a recommencé.
– On
va faire un tour ?
S’il
voulait, oui.
On a
pris un chemin qui s’enfonçait sous les arbres. Quelques dizaines
de mètres. Un ancien corps de ferme. Rénové. Il en a pris la
direction.
– C’est
chez qui ?
– Tu
n’en as pas une petite idée ?
Si !
Évidemment que si !
Il a
ouvert la porte, nous a gratifiés d’un large sourire. Un bel
homme. Aux yeux gris. À la quarantaine florissante.
– Entrez !
Entrez ! Restez pas là ! Asseyez-vous ! Qu’est-ce
que je vous sers ? Un petit café ?
Il
s’est affairé.
– Alors ?
De retour ? Vous êtes là pour longtemps ?
– On
sait pas encore.
Je
le regardais aller, venir. Il m’avait vue nue. Il s’était donné
du plaisir en me contemplant. Il y pensait. Il y pensait forcément.
Et moi aussi, j’y pensais. Je ne pouvais même penser qu’à ça.
Il
s’est assis avec nous. En face de nous.
– Même
pas une petite idée ?
Victor
est resté dans le vague.
– Quatre
ou cinq jours, sûrement. Quelque chose comme ça.
Il a
intérieurement poussé un grand soupir ravi, le voisin. Quatre on
cinq jours ! Quatre ou cinq jours à pouvoir profiter de moi. À
pouvoir me mater tout son saoul.
Victor
a enfoncé le clou.
– Oh,
mais on reviendra. Bientôt.
À
mon tour de me sentir intérieurement délicieusement ravie. Il avait
dit « on ». Ça faisait deux fois qu’il disait « on ».
Il
nous a proposé un second café. Qu’on a refusé.
– Non,
merci. Ça ira.
Il
s’est tourné vers Victor.
– Alors,
comme ça, vous avez fini par vous décider à vous mettre en couple…
Il
n’a pas répondu. Il m’a souri.
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