lundi 11 mars 2019

La servante trompée


Dessin de Helga Bode

– Madame est satisfaite ?
– Satisfaite ? Et de quoi donc devrais-je être satisfaite, Jeanne ?
– Des services de Guillaume. Qui est un excellent amant. Non ? Madame ne trouve pas ?
– Qu’est-ce que vous racontez ? Vous perdez la tête, Jeanne.
– Faut dire que monté comme il est !
– Sortez ! Sortez immédiatement !
– Ah, ça, quand il pilonne, lui, on met pas trois jours à venir. Madame en sait quelque chose, à ce qu’il m’a dit. Même qu’elle criait comme une perdue. Qu’elle lui a griffé le dos. Et qu’elle l’a supplié de le lui renfiler, son truc. Trois fois.
– Écoutez, Jeanne…
– Madame compte aller y remettre le nez, j’imagine ? Oh, mais qu’elle se rassure ! Je suis partageuse. Et puis Guillaume trouve l’idée de se taper sa maîtresse extrêmement savoureuse. C’est un plaisir dont, vous en serez bien d’accord avec moi, il serait cruel d’envisager de le priver. Monsieur, lui, par contre, prendrait certainement fort mal d’apprendre que son épouse…
– Il ne la saura pas. Jurez-le moi, Jeanne ! Jurez-moi qu’il ne le saura pas.
– Cela ne dépend que de Madame…
– Que voulez-vous dire ?
– Que toute faute mérite châtiment. Et que celle que Madame a commise – et s’apprête à commettre à nouveau – est l’une des plus graves qui se puisse rencontrer. Alors un châtiment…
– Un châtiment !
– Un châtiment, oui. Et le plus approprié serait assurément une bonne correction administrée à Madame, à la badine, sur ses fesses dénudées.
– Vous n’y pensez pas !
– J’y pense d’autant plus qu’il me faut bien avouer que j’y prendrais incontestablement, pour ma part, j’en suis convaincue, un incomparable plaisir.
– C’est hors de question.
– Si je puis me permettre, il est dans l’intérêt de Madame de se montrer raisonnable.
– Pas à n’importe quel prix.
– Que Madame réfléchisse ! Je l’engage à réfléchir.

* *
*

– Vous êtes où, Jeanne ? Ah, vous êtes là ! Écoutez ! Est-ce qu’il ne serait pas possible de…
– Il n’est pas possible, non. Ou Madame se résout à accepter d’être punie ou tout-à-l’heure, dès le retour de Monsieur…
– C’est ignoble !
– Que Madame se décide ! Et rapidement.
– Je n’ai pas le choix.
– Vous ne l’avez guère, en effet !
– Que voulez-vous que je fasse ?
– Que vous vous installiez là, face au miroir. Vous y serez aux premières loges pour vous regarder grimacer sous les coups. Comme ça, oui. Vous êtes bien installée ? Alors on va vous mettre les fesses à l’air. Allons ! Allons ! Laissez-vous faire ! C’est juste un mauvais moment à passer. Et un très bon pour moi. Là ! Vous êtes prête ? Alors feu ! À volonté.
– C’est horrible, Jeanne ! Horrible !
– Madame n’a encore rien vu. Ce sont juste quelques premiers préliminaires.
– Pas si fort, Jeanne ! Pas si fort, je vous en supplie…
– Le cul de Madame commence déjà à s’orner de magnifiques rougeurs. Mais oui ! Piaulez, Madame, piaulez ! J’adore… Et remuez-le bien, votre popotin. Le spectacle que vous m’offrez là est absolument exquis et – dois-je vous l’avouer ? – me met singulièrement en appétit. Mais c’est quelque chose dont Guillaume, que je vais m’empresser d’aller retrouver dès que j’en aurai terminé avec vous, saura tirer le meilleur des partis. Pour son plaisir et pour le mien.
– Par pitié, Jeanne !
– Que Madame prenne patience ! On va tirer un joli petit bouquet final et c’en sera fini. Pour cette fois…

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire