lundi 17 décembre 2018

Bijoux


Dessin de Dagy

– Où sont mes bagues ?
– Vos bagues ? Quelles bagues ?
– Celles que j’avais posées là, dans la petite soucoupe, à l’entrée.
– Je les ai pas vues.
– Faites bien l’innocente ! Vous me les avez volées, hein, c’est ça ?
– Moi ?
– Vous, oui !
– Mais jamais de la vie !
– Bien sûr que si ! Ce qui va vous coûter cher. Parce que, si je ne m’abuse, vous avez déjà été condamnée pour des faits de même nature. À la prison. Avec sursis.
– C’est une vieille histoire.
– Pas si vieille que ça…
– Je vous jure que je n’ai pas volé vos bagues. Je vous le jure.
– Oui, oh, alors ça ! Qui a bu, boira. C’est bien connu. Et, de toute façon, je vous ai vue faire, de mes yeux vue. Par la petite fenêtre, là-bas. C’est d’ailleurs ce que je dirai aux enquêteurs. Sous la foi du serment. Parce que vous n’allez pas vous en tirer comme ça : je vais porter plainte.
– Vous pouvez pas faire ça !
– Je vais me gêner…
– Si je suis reconnue coupable, mon sursis va sauter.
– Il fallait y réfléchir avant.
– Mais je suis innocente, comment faut vous le dire ? Je suis innocente.
– Ça, il vous faudra le prouver ! Et je peux vous assurer que je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que vous n’y parveniez pas. Ce qui me sera d’autant plus facile qu’avec les antécédents que vous avez… Bon, mais assez perdu de temps ! Assez discuté ! Je m’en vais, de ce pas, vous dénoncer aux gendarmes.
– Non, attendez !
– Que j’attende ? Mais que j’attende quoi ?
– Je ferai tout ce que vous voudrez. Mais pas les gendarmes ! Je vous en supplie, pas les gendarmes !
– Je suis pas mauvaise fille, au fond, vous savez ! Et je ne tiens pas spécialement à vous enfoncer. Mais reconnaissez quand même que ce serait vous rendre un très mauvais service que de passer l’éponge. Vous méritez une sanction, c’est indéniable. Ne serait-ce que pour vous dissuader de recommencer. Alors voilà ce que je vous propose : je vous flanque une bonne fessée et tout ça reste entre nous. Il y aura pas de suites.
– Une fessée, mais…
– C’est à prendre ou à laisser. Et décidez vous. Vite. On va pas y passer la journée.

* *
*

– Bon, ben voilà ! Vous voyez que c’était pas la mer à boire. En tout cas, ça lui a donné de très très belles couleurs à votre joufflu. Ah, si, si ! Et j’ai adoré la jolie petite chanson que vous nous avez poussée. Vous y avez mis tout votre cœur. Quant à votre jeu de jambes, un véritable délice… Non, j’ai passé, quant à moi, un excellent moment. Pas vous ?
– Je les ai pas volées vos bagues, vous savez…
– Mais oui que je le sais ! Bien sûr que je le sais. Elles sont dans ma poche. Mais ça faisait des mois et des mois que je rêvais de vous mettre le derrière à l’air et de vous le tambouriner. Une opportunité s’est présentée. Je l’ai saisie. C’est de bonne guerre, non ? D’autant qu’avec vos antécédents, je jouais sur du velours…

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