Frédéric
Bazille. La toilette.
Je
lis – je dévore – tout un tas de Mémoires, Souvenirs,
Journaux intimes écrits à la fin du XVIIIème siècle et au début
du XIXème. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’elles
n’étaient pas spécialement prudes, ces belles dames du temps
jadis. Les madame du Châtelet, les madame Balbi, les Pauline
Bonaparte et consorts. Ça prend son bain devant les domestiques. Ça
se balade tranquillement, en tenue d’Ève, sans la moindre gêne,
devant les familiers, voire même, à l’occasion, devant des
étrangers.
Alors,
moi aussi. Il y a pas de raison. Moi aussi.
Comme
tous les matins, mes deux femmes de chambre attitrées, Magda et
Violaine, procèdent à ma toilette. Elles me donnent mon bain. Elles
me frottent. Elles me parfument. Elles m’habillent. Je m’abandonne.
C’est le moment de ma journée que je préfère. Elles le savent.
Et elles le font durer. Elles l’étirent au maximum.
– Madame
la comtesse…
C’est
Amélie, ma dame de compagnie. Qui vient de surgir.
– Oui,
Amélie…
– Madame
la comtesse, il y a là, en bas, le chevalier Faublas. Qui vous
apporte des nouvelles de Varsovie. Urgentes, assure-t-il.
– Fais-le
monter…
– Que
je le…
– Mais
oui, fais-le monter, te dis-je !
– Comme
Madame la comtesse voudra.
– Eh
bien, chevalier, je vous écoute.
Je
suis assise sur mon sofa, quasiment nue. Je n’ai pour tout vêtement
qu’un voile de lin blanc qui recouvre ma jambe droite et dissimule
mon entre-cuisses aux regards. Le sien effleure brièvement mes
seins, s’en détourne aussitôt, va se perdre dans les arabesques
de la tenture derrière moi.
– Je
vous écoute, chevalier.
– Je
reviens de Varsovie.
– Oui.
Amélie m’a dit. Au fait, mon ami, au fait.
Ses
yeux revienent à moi, s’accrochent une nouvelle fois, une fraction
de seconde, à mes seins, s’efforcent de s’en éloigner. Y
reviennent. En repartent.
– Vous
disiez ?
Il
se trouble, cherche ses mots.
– À
Varsovie… Le comte… Vous savez… Podowski…
Magda
m’enfile ma pantoufle.
– Ce
cher Podowski. Comment va-t-il ?
– Bien.
Il m’a chargé de vous dire…
Il y
a du tremblement dans sa voix.
– De
me dire ?
– Que
sa proposition tient toujours.
– Vraiment ?
– Il
vous conjure d’y donner suite.
Je
me lève. Je suis nue. Entièrement nue devant lui. Sa glotte
tressaute furieusement.
Violaine
me tend mon vêtement. Je ne l’enfile pas. Pas tout de suite.
– Vous
direz au comte Podowski que les décisions que je prends, je m’y
tiens. Je vous salue, chevalier.
Et
je lui tourne le dos. Je lui tourne les fesses.
Pauvre homme.. Ou comment perdre ses moyens...
RépondreSupprimerPas si pauvre que ça finalement! Il a pu se régaler les yeux…
RépondreSupprimerAu XVIIème, tout gentilhomme de talent savait très bien apprécier les belles rondeurs.
RépondreSupprimerDans mon pays Il en est témoin un sonnet de Don Tomás de Iriarte, intitulé “Reponse à une dame qui me questionna sur ce que je trouvais de plus beau dans son corps”.
En effet, le goût pour les femmes filiformes est très récent. Au début du XXème siècle encore il y a quantité de photos de modèles bien en chair. Quant au sonnet dont vous parlez, je ne le connais pas. Je vais le rechercher.
RépondreSupprimerJe vous le sers tout de suite, assorti des peintures de François Boucher.
RépondreSupprimerDu coup, je vois que j’ai fait une erreur de transcription; evidemment je voulais parler du 18ème.
https://maripeli8.wordpress.com/2012/10/06/respuesta-de-don-tomas-de-iriarte-a-una-dama-que-le-pregunto-que-era-lo-mejor-que-hallaba-en-su-cuerpo/
Merci. Bonne journée à vous!
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