Les fantasmes de Lucie (68)

Dessin de Léon Pierre.

Du petit réduit où la direction nous a remisées, Cordelia et moi, avec nos ordinateurs, on entendait rire Émilie dans le couloir. De bon cœur.

Cordelia a soupiré.

– Je me demande des fois.

– Tu te demandes quoi ?

– Si elle s’en prend des fessées, elle.

– Peut-être. Va savoir !

– Elle a un cul qu’en appelle résolument en tout cas. Tu trouves pas, toi ? Quand elle te tourne le dos, tu peux pas ne pas y penser. Moi, c’est à chaque fois, quand je suis derrière elle. Comment j’aimerais ça, lui en coller une.

– Moi, ce serait plutôt Tiphaine. Sauf que je sais pas ce que je préférerais au juste. Lui faire. Ou qu’elle me le fasse.

– Et Cynthia ! Je suis sûre qu’elle braillerait tout ce qu’elle sait, elle. Et qu’elle gigoterait comme une perdue.

– Ah, ça te plairait ça, hein !

– Franchement, oui. Pas toi ?

– Si !

Elle a glissé une main sous son bureau.

– On n’aurait pas dû parler de ça.

Son coude et son épaule ont bougé.

Dehors Émilie a encore ri. Et il y a eu la voix de Bianca.

– Oh, moi j’adore ! J’adore vraiment.

– Qu’est-ce qu’elle adore, cette petite mijaurée ?

Et elle a bougé plus vite.

– Oh, si elle pouvait y attraper ! Il faut qu’elle y attrape. Tu y attraperas, Bianca.

Encore plus vite. Elle a fermé les yeux.

– Imagine ! On se retrouverait un soir. Quelque part. À cinq ou six. Toutes des filles de la boîte. Ou bien alors carrément ici. Après la fermeture. Quand il y aurait plus personne.

J’ai écarté le bord de ma culotte. Effleuré mon bouton.

– Imagine ! Toi, tu t’occuperais de Tiphaine et moi de Bianca. Pour commencer. On irait de bon cœur.

– Ah, ça, c’est sûr ! Et comment !

Je l’ai tourbillonné plus ardemment, mon bouton.

– Et puis après, ce serait au tour d’Émilie et de Cynthia.

Dans le couloir, là-bas, Bianca a proclamé.

– Oh, moi, ça me dérangerait pas, alors là !

Mais de quoi elle parlait ?

Émilie a encore ri.

– Tu le feras pas. Alors là, je suis bien tranquille que tu le feras pas.

Et Cordelia a joui. En se mordant les lèvres et en s’agitant sur son siège.

Moi aussi. En raclant par terre avec mes pieds.

– Tu paries ?

Elles ont parié.

On est petit à petit revenues à nous.

– Tu sais ce qu’il faudrait ?

Je savais, oui.

– Que ça se fasse pour de bon.

– Ça devrait être possible. En la jouant fine. On tente le coup ?

– Et pourquoi pas ?

– Tu sondes Bianca ? Et moi, Émilie ?

– Marché conclu.