lundi 23 septembre 2019

Escapade (3)



Tableau de Franz von Defregger

Léontine m’attendait. Elle a chuchoté dans la semi-obscurité et la touffeur de la chambre.
– Alors ? Tu l’as vu ?
– Je l’ai vu, oui.
– C’est vrai ? Ben raconte, quoi !
– Attends ! Laisse-moi d’abord me déshabiller.
Appuyée sur un coude, elle m’a regardée faire.
– Wouah, mais qu’est-ce t’as ? Au derrière ? Qu’est-ce t’as ? C’est tout rouge. Tu t’es pris une fessée, on dirait. Mais oui, c’est ça ! Qu’est-ce qui s’est passé ?
Je me suis étendue sur mon lit.
– C’est le jardinier. Il m’est tombé dessus à la grille. C’était le prix à payer pour qu’il me laisse sortir.
– Eh ben, dis donc ! Il s’est rendu compte, Rodolphe ?
– Non. C’est au retour que j’y ai eu droit.
– En attendant, en douce que t’as vraiment une tête de crevée.
– Et pour cause !
– Vous l’avez fait, hein !
– Trois fois.
– Trois fois ! Eh, ben dis donc ! Et c’était bien ?
– Sublime. Ah, pour donner, je peux te dire que ça a donné. Heureusement qu’il est désert, le coin, parce que sinon…
– Dommage qu’au retour…
– Oui, oh !
– Toute nue, il te l’a donnée, la fessée ? Oui, forcément ! Vu l’état de ton derrière. Comment je serais morte de honte, moi ! Pas toi ?
– Si, dans un sens, mais…
– C’était pour la bonne cause. T’aurais pas pu le voir, Rodolphe, sinon… Peut-être que j’aurais fait pareil, je sais pas. Il a tapé fort ? T’as eu mal ? T’as crié ?
– Un peu. Beaucoup, même. Mais c’était moins pire que ce que je croyais. Faut que je m’habitue de toute façon…
– Comment ça ?
– Ben, si je veux le revoir, Rodolphe, j’ai pas le choix.

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