Dessin de Jim Black (Luc Lafnet)
Elle
m’étonnera toujours, Cordelia. Elle connaît tout un tas de gens.
Tout un tas de trucs.
– Ah,
faut que t’ailles à Lyon ce week-end ? Il y a une copine à
moi qu’a un hôtel là-bas. Vas-y de ma part, si tu veux.
D’ailleurs…
Elle
a eu un petit sourire.
– D’ailleurs
quoi ? Ben, dis !
– J’y
ai passé de sacrés bons moments, moi, dans cet hôtel. Parce qu’il
y a une des chambres, elle a un miroir sans tain. Le mec, de l’autre
côté, il est persuadé que t’es pas au courant. Que tu sais pas
qu’il te mate. Ça l’excite comme un fou. Et toi, ce qui t’excite
devant ta glace, là, c’est de savoir qu’en réalité, c’est
toi qui diriges les opérations. Tu montres un peu. Beaucoup. Ou pas
du tout. À ta guise. Comme ça te chante.
– Eh,
mais c’est que…
– Ça
te tenterait bien.
– T’as
tout compris.
– Je
m’en occupe. Je vais lui parler de toi. Et te réserver la chambre.
Mais c’est top secret, hein, tu me promets ? Qu’elle ait pas
d’histoires.
– Évidemment !
Ça coule de source.
C’était
un coquet petit hôtel, dans un quartier un peu excentré.
– Je
viens de la part de Cordelia.
La
patronne m’a souri, complice.
– Ah,
vous êtes Lucie ? Pauline va vous montrer la chambre.
Ce
que ladite Pauline s’est empressée de faire.
– Elle
est là, la glace.
Avant
de m’entraîner dans celle d’à côté.
– On
voit tout, hein ! Comme si on y était. Vous allez bien vous
amuser.
Avec
un petit clin d’œil.
– Et
lui aussi d’ailleurs !
En
refermant la porte.
C’était
qui, ce lui ? Je pouvais savoir ?
Elle
m’a ramenée dans ma chambre.
– On
vous a pas dit ? C’est monsieur Albert. Souvent, c’est
monsieur Albert. Il est complètement accro. Dès qu’elle
l’appelle, Madame Fontanges, il se précipite.
– Il
est vieux ?
– Oh,
non, non ! Dans les trente-cinq. Par là. Et il est beau mec.
Oh, mais vous le verrez tout-à-l’heure, au restaurant. Pas très
loin de lui on vous a mise. Que vous puissiez vous rendre compte à
quoi il ressemble. Et qu’il puisse, lui, vous savourer un peu à
l’avance. Et penser, pendant tout le repas, qu’il va vous voler
toute nue sans que vous le sachiez. Bon, mais en attendant, je vais
vous laisser. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, vous hésitez
pas…
Il
était effectivement bel homme. Un brun, élancé, dont le regard
velouté m’a effleurée, à plusieurs reprises, sans vraiment
s’attarder sur moi. Dont il n’allait pas être désagréable du
tout d’éveiller le désir. Comment au juste ? Je n’avais
que l’embarras du choix. Je pouvais très bien ne rien lui montrer
du tout. Chou blanc. Il en serait quitte pour caresser ses espoirs
déçus. Ou bien alors lui montrer un peu. Juste un peu. Le rendre
fou de l’envie d’en voir davantage. En vain. Une autre fois
peut-être. Un autre jour. Je reviendrais. Ou bien encore lui offrir
plus. Beaucoup plus. Mais pas tout. Qu’il lui reste quelque chose à
espérer. La dernière solution enfin…
Quand
il s’est levé, qu’il a pris la direction de sa chambre, je ne
m’étais pas encore décidée. Je ne suis pas montée tout de
suite. Je suis allée, plus d’une demi-heure durant, profiter
au-dehors de la douceur du soir.
Et
puis, après, une fois en haut, j’ai encore longtemps tourné,
viré, virevolté avant de m’engouffrer dans la salle de bains où
j’ai passé un temps infini.
Je
me suis décidée d’un coup. Et c’est nue que j’en suis sortie.
Entièrement nue que je suis venue m’asseoir devant le miroir. Que
j’ai jeté un châle sur mes épaules. Que je lui ai laissé mes
seins. Je les ai enduits de crème, doucement massés. Longtemps. En
me fixant droit dans les yeux.
Et
puis je me suis levée, lentement. Je lui ai tourné le dos. Et je
lui ai offert le spectacle de mes fesses cramoisies.
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