– Tiens
donc, Mademoiselle Lise !
– Madame…
Je suis mariée maintenant, Basile. Madame.
– Mes
compliments. Vous voilà donc revenue au pays ?
– Pour
quelques jours. Seulement pour quelques jours. Le temps d’une
petite plongée au milieu de mes souvenirs.
– Oh,
vous trouverez pas bien de changement, vous savez. Tout est resté à
peu près en l’état. Comme avant.
– Ah,
je t’en ai fait voir à l’époque, mon pauvre Basile, hein !
– C’est
du passé, Mademoiselle Lise.
– Il
n’empêche. Qu’est-ce que je pouvais être infecte avec toi !
Quand j’y repense…
– Il
faut bien reconnaître que vous n’étiez pas facile. Et que plus
vous avanciez en âge…
– Pire
c’était. J’en ai bien conscience. Je te poussais délibérément
à bout. Je te provoquais. Tant et si bien qu’excédé tu as fini,
un jour, par me flanquer une magistrale fessée.
– Dame,
c’est vrai que ce jour-là…
– Je
l’avais amplement mérité. Comment j’avais saccagé le jardin !
– Ah,
ça, vous y étiez pas allée de main morte.
– Et
toi non plus ! Près de trois jours ça m’a brûlé. Ce qui
m’a pas empêchée de recommencer.
– Au
pire moment. Quand tout sortait à nouveau de terre.
– Ce
qui m’en a valu une deuxième. Beaucoup plus sévère encore que la
première.
– Tout
ce travail accompli en vain…
– J’avais
beau avoir… Quel âge déjà au juste ? Vingt-et-un ?
Vingt-deux ? J’étais complètement immature. Faut dire aussi
que mes parents se souciaient de mon éducation comme d’une guigne.
Peu leur importait ce que je faisais du moment que leur petite
tranquillité n’en était pas affectée. Tu es le seul à m’avoir
posé des limites. À m’avoir ramenée, par la suite, chaque fois
qu’il le fallait, dans le droit chemin.
– Vous
voir partir à la dérive me désespérait.
– Ah,
tu m’en auras donné, au bout du compte, des fessées !
– C’était
pour votre bien.
– Je
l’ai, avec le recul, parfaitement réalisé. Et je t’en suis
infiniment reconnaissante. D’ailleurs…
– Oui,
Mademoiselle ?
– Non,
rien. Enfin, si !
– Mademoiselle
ne serait-elle donc pas venue ici aujourd’hui par hasard ?
– J’ai
honte, Basile.
– Les
mauvais penchants de Mademoiselle auraient-ils repris le dessus ?
– Ce
que j’ai fait, Basile…
– Mérite,
une fois de plus, une correction exemplaire.
– Oui.
– Eh
bien, allons, Madame, allons ! Par ici… Ce bon vieux tabouret
va reprendre du service.
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