Dessin
de Georges Topfer.
« Dame
de condition recherche servante motivée, compétente, honnête,
consciencieuse et d’une docilité à toute épreuve. Appointements
généreux. Non conformes s’abstenir. »
Je
l’ai lue, relue encore et encore, cette annonce. Je l’ai
découpée. « D’une docilité à toute épreuve ». Elle
entendait quoi par là ? Oh, c’était clair, non ?
Suffisamment explicite. Et l’occasion ou jamais. Est-ce que
j’allais me décider enfin à sauter le pas ? Ou continuer à
me contenter de rêver mes aspirations les plus secrètes sans
chercher à leur donner vraiment consistance ? Tu te défiles
toujours, ma pauvre fille. Pour tout. Est-ce que tu vas enfin te
décider à regarder les choses en face ? Et, surtout, à te
regarder, TOI, en face ?
Et
je me suis décidée d’un coup. Ne pas réfléchir. Foncer.
C’était
une demeure cossue, entourée d’un grand parc soigneusement
entretenu.
J’ai
sonné. Deux fois. Trois fois. J’allais renoncer, tout à la fois
soulagée et désappointée, quand la porte s’est brusquement
ouverte sur une femme d’une cinquantaine d’années, à l’allure
imposante, aux larges épaules, au regard inquisiteur.
Elle
m’a examinée des pieds à la tête.
– Entrez !
Dans
un coquet petit salon. Elle s’est assise. M’a laissée debout.
Encore longuement considérée.
Moi,
je dansais d’un pied sur l’autre, sans savoir où poser mon
regard ni quelle contenance adopter.
– Vous
venez pour l’annonce ?
C’était
ça, oui. Oui. Pour l’annonce.
– Vous
avez bien compris de quoi il s’agit ?
– Il
me semble.
–Il
vous semble ou vous êtes sûre ?
Sûre,
oui. J’étais sûre.
– J’exige
de mon personnel une obéissance absolue. Et qu’il accepte de
recevoir, sans la moindre protestation, les châtiments que j’estime
qu’il a mérités. Me fais-je bien entendre ?
– Oui,
Madame.
– Êtes-vous
prête à accepter ces conditions ?
– Je…
– C’est
oui ou c’est non.
– Oui.
– Fort
bien. Avez-vous déjà quelque expérience en la matière ?
– Un
peu.
– C’est-à-dire ?
– J’ai
été quelque temps au service de…
– Vous
mentez… Vous n’avez été au service de personne. Du moins dans
ces conditions-là. C’est évident. Il suffit de vous regarder.
J’ai
bredouillé. Lamentablement bafouillé.
– Je…
Si… Enfin non… C’est plutôt que…
– Vous
feriez mieux de reconnaître que vous mentez.
J’ai
baissé la tête.
– Eh
bien ?
– Je
mens, oui.
– Vous
commencez fort, vous, on peut pas dire… Ce va nous être l’occasion
de tester votre motivation. Parce que je ne laisse jamais passer le
moindre mensonge. Là-dessus, je suis absolument intraitable. Alors
vous vous déshabillez…
– Que
je…
– Oui.
Je vais vous punir.
Je
n’ai hésité qu’une fraction de seconde. C’était la situation
dans laquelle j’avais maintes et maintes fois rêvé que je me
trouvais. Une voix autoritaire. Impérieuse. Devant laquelle je me
sentais toute petite. Une femme qui décidait. Qui voulait. Qui
exigeait de moi. Pour ma plus grande honte. Et ma plus grande
volupté.
Elle
m’a regardée faire.
– Tout !
Vous enlevez tout.
Le
bonheur de l’obéissance. Le bonheur à nul autre pareil de
l’obéissance.
Et
j’ai été nue.
– Venez !
Ce sera le martinet. Pour le mensonge, c’est toujours le martinet.
Vingt coups. Parce que c’est la première fois. Mais si vous
récidivez…
Je
l’ai suivie.
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