samedi 21 avril 2018

Un dîner presque parfait

Dessin de Kal.

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C’est à l’École hôtelière qu’on avait sympathisé tous les cinq. Et on était restés en contact une fois nos diplômes obtenus. On se voyait souvent. On passait, de temps à autre, un week-end ensemble. Curieusement, aucun d’entre nous n’avait finalement fait carrière dans l’hôtellerie ou la restauration. On souffrait, du coup, de ce qu’on appelait, entre nous, le syndrome de « la cuisine rentrée. » Et on se lançait des défis.
– Challenge Forêt noire !
Ou…
– Challenge croustade de ris de veau aux morilles.
Et chacun avait à cœur de donner le meilleur de lui-même.

C’est Benoît qui a eu l’idée. Ou peut-être Kevin. En tout cas l’un des deux garçons.
– Et si on faisait comme à la télé… L’émission, là… Un dîner presque parfait.
– Et ce serait quoi, le prix ? Pas de l’argent quand même !
– Une fessée !
– Comment, ça ?
– Le gagnant – ou la gagnante – flanquerait une fessée au perdant – ou à la perdante –.
Armelle s’est récriée.
– Ça va pas, non ? Vous êtes pas bien, il y a des jours.
J’ai, moi aussi, protesté. Du bout des lèvres.
– Vous avez de ces idées !
Mais Aurélie, elle, elle était partante.
– Parce que vous faites les malins, les mecs, mais moi je suis bien tranquille que c’est l’un de vous deux qui va y attraper. Et même, avec un peu de chance c’est moi qu’aurai le plaisir de la lui aministrer cette fessée.
Armelle a fini par donner, elle aussi, son accord. Après tout, elle n’avait guère qu’une chance sur cinq de perdre et comme c’était l’une des meilleures d’entre nous.
Quant à moi, je me suis bien fait tirer un peu l’oreille, pour la forme, mais j’ai fini par me ranger à l’avis de la majorité.

Pour la forme, oui. Parce qu’en réalité je buvais du petit lait. Une fessée ! Des éternités que j’aspirais à en recevoir une. Depuis deux ans. Depuis que Jean m’avait initiée à ces plaisirs douloureux, mais si savoureux. J’allais perdre, ah, ça, sûr que j’allais perdre. J’allais faire ce qu’il fallait pour. Discrètement, pour que personne ne se doute de rien, mais j’allais perdre.
Et j’imaginais la main de Kevin s’abattant sèchement sur ma croupe, y déposant impitoyablement de brûlantes rougeurs. Ou bien celle de Benoît, sans doute moins âpre, moins percutante, mais infatigable et, au bout du compte, tout aussi efficace.

Il y a d’abord eu Kevin, puis Armelle, puis Benoît. Qui avaient, tous les trois, sorti le grand jeu. Qui nous avaient concocté des repas impeccables.
J’ai, le samedi suivant, brillé à mon tour de tous mes feux. Sauf pour le dessert. Que j’ai délibérément et lamentablement raté. Ma note allait inévitablement s’en ressentir et j’allais l’avoir, cette fessée tant désirée. J’allais l’avoir. Et devant eux tous en plus ! J’étais aux anges.

Restait quand même à venir la prestation d’Aurélie. Dont je savais que je n’avais strictement rien à craindre. Tout, quand elle cuisinait, était toujours absolument irréprochable.
Sauf que ce jour-là… La sauce de son saumon à l’oseille était en liquette. Quant à son tiramisu, il est resté dans les assiettes.
– Je suis désolée.
Oui, ben ça, elle l’était pas tant que moi.
– Je sais pas ce qui s’est passé.
Je le savais, moi, ce qui s’était passé. Je le savais même très bien. Quelle garce ! Non, mais quelle garce !

Mais, en attendant, c’est elle qui s’est retrouvée, robe relevée au-dessus de la taille, en travers des genoux de Benoît. Un Benoît qui, après quelques petites tapes-préludes, a rapidement pris sa vitesse de croisière. Comme il y allait ! À grandes claques tonitruantes qui s’abattaient dru sur son derrière. Qui l’ont très vite égayé d’un rouge flamboyant du plus bel effet.
Je l’encourageais mentalement. « Allez, vas-y, Benoît, ! Vas-y ! Elle en veut ? Donne-lui en ! Donne-lui en même tellement que ça lui en fasse passer définitivement l’envie. » Et on aurait dit qu’il m’entendait. Parce que de plus en plus fort il tapait. Et de plus en plus vite.
Quand il s’est enfin arrêté, j’ai fait remarquer…
– C’était pas une vraie fessée ! Une vraie fessée, ça se donne déculottée.
Une brève hésitation et puis il la lui a baissée, la culotte. Et il a tout repris à zéro.

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