lundi 30 septembre 2013

Le Centre ( 39 )



Elle avait un petit sourire en coin la mère Thevenot…
– Alors ? Paraît que t’es virée…
– Virée ? Ah, non… Non… Je démissionne…
– Ah, ben bravo ! Bravo ! C’est génial… T’auras droit à rien comme ça… Pas la moindre indemnité…
– J’m’en fous ! J’en ai trop plein le cul de voir vos gueules à tous ici…
– T’es vraiment complètement irresponsable, ma pauvre petite… J’espère que t’as de quoi voir venir au moins…
– Oui… Enfin non… Ça fait rien…
– Ça fait rien ?! Et tu vas t’en sortir comment ?
– J’en retrouverai du boulot… Je vais en retrouver…
– Ben voyons ! C’est sûr que ça court les rues en ce moment…

– Je vous dérange pas ?
– Non… Entre… Qu’est-ce qui t’amène ?
– Rien… C’est juste que j’avais envie de vous voir… De parler avec vous…
– Venant de ta part c’est assez inattendu… Mais bon… Assieds-toi ! Et raconte… Qu’est-ce que tu deviens ?
– Rien… Enfin si ! J’en avais retrouvé du boulot, mais ça a pas été…
– Encore !
– Ben oui… Oui… J’ai plus un rond du coup… Et vu que je peux plus payer on me fout à la porte de mon logement…
– Ah, nous y voilà…
– Mais non, mais…
– Mais tu t’es dit qu’en lui passant un peu de pommade dans le dos cette bonne vieille mère Thevenot allait bien consentir à t’héberger… Tu la traitais pourtant de grosse conne quand on était là-bas, non ?
– Je suis désolée…
– Tu peux…  
– Ce que j’ai été idiote… De démissionner…
– Ça… Je te le fais pas dire…
– J’en pouvais plus… Invivable c’était devenu…
– À qui la faute ?
– Tout le monde était sans arrêt après moi…
– Forcément… Quand on se rend insupportable… Qu’on agresse en permanence… Qu’on est vindicative… Prétentieuse… Qu’on affiche un souverain mépris pour ses collègues de travail il faut pas s’étonner si on a des retours de bâton…
– Je suis quand même pas si épouvantable que ça ?
– À peine ! Non, mais tu te rends pas compte ! Tu te rends pas compte… Le nombre de fois où ce que t’aurais mérité, c’était tout simplement une bonne fessée… Dommage que personne ait eu le culot de te la flanquer… Ça t’aurait fait le plus grand bien… Et remis, une bonne fois pour toutes, les idées en place… Oh, arrête de chialer ! J’ai horreur de ça… Et puis à quoi ça t’avance, hein, tu peux me dire ?
– C’est pas de ma faute… Si je suis comme ça… Imbuvable… C’est pas de ma faute…
– Non… C’est de la mienne…
– Personne s’est jamais occupé de moi… Jamais… Personne m’a jamais rien montré… Il a toujours fallu que je me débrouille toute seule… Pour tout… Alors, oui, je les accumule les conneries, oui… Dans tous les domaines… Je le fais pas exprès… Je sais pas me comporter avec les gens… J’ai jamais su… Vous croyez que j’en je rêve pas des fois que quelqu’un me prenne en mains, me dirige ? M’apprenne… M’explique… Me dise ce qu’il faut que je fasse… Et qui me punisse même… Oui… Qui me punisse si il faut…
– C’est ce qui pourrait t’arriver de mieux…
– Je me le dis aussi des fois… Mais je sais pas qui… Pour trouver…
– T’es sans logement quand ?
– La semaine prochaine…
– Tu pourras venir – temporairement – ici…
– Oh, merci… Merci…
– Où je m’occuperai sérieusement de toi… Très sérieusement…
– Je veux bien, oui…
– On va même commencer dès maintenant… Histoire de te faire passer l’envie de me traiter de grosse conne… Et de tant d’autres choses… Allez ! Mets-nous vite ce petit derrière à l’air… 

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