lundi 14 octobre 2019

Les fantasmes de Lucie (72)



Dessin d’Escobar

Elle s’est pelotonnée contre moi.
– Merci. Merci de m’avoir punie. Et puis du reste. De me l’avoir fait. De m’avoir…
– Baisée ?
Elle s’est pressée plus fort encore.
– Oui.
– Bon… Et maintenant si tu me racontais ?
– Si je te racontais quoi ?
– Quand tu imagines que t’en reçois des fessées, c’est comment ?
– Humiliant. Toujours très humiliant.
– Tu aimes ça que ce le soit, hein !
– Plus ça l’est et plus j’aime.
– Qui c’est qui te punit ?
– Oh, plein de monde. Ça dépend. J’en ai tout un tas des situations dans ma tête. Je puise dedans. En fonction du moment. De ce qui s’est passé dans ma journée. De comment je suis lunée.
– La dernière fois, la toute dernière fois, c’était quand ?
– Hier.
– Tu racontes ?
– Tu connais le magasin de sapes, avenue Berlioz ?
– Qui ne le connaît pas ?
– Dans l’après-midi, j’y suis passée. J’ai fureté. J’ai fouiné. J’ai pris tout mon temps. Tellement de temps qu’elles ont fini par me jeter des regards soupçonneux, la patronne et sa vendeuse. Toutes les deux. Comment ça m’a mise mal à l’aise ! Je me sentais coupable, mais coupable ! Comme si j’avais vraiment quelque chose à me reprocher. T’es idiote, mais t’es vraiment idiote ! N’empêche qu’il se lisait sur ma figure, mon mal-être. Et dans toute mon attitude. J’avais beau essayer de me contrôler, il y avait rien à faire. Tant et si bien que les deux autres, je le voyais bien, elles étaient de plus en plus soupçonneuses. Je me suis enfuie, rouge de confusion. Et, une fois à la maison, j’ai imaginé. J’avais vraiment volé quelque chose. Une jolie bague. Sur le petit présentoir qu’elles ont près de la caisse. Elles m’ont arrêtée. Juste au moment où j’allais sortir. « Pas si vite ! Qu’est-ce tu caches, là ? » « Rien. Rien du tout, je vous assure ! » « On va voir ça ! » Elles se sont emparées de mon sac, y ont presque aussitôt découvert mon larcin. La vendeuse a triomphé. « Je vous l’avais dit ! Elle a la tête à ça. Et il y a autre chose, si ça tombe. Oui, il y a sûrement autre chose. » « On va vérifier, c’est facile. » Et elles m’ont fouillée. Leurs mains dans mes vêtements, malgré mes protestations. Sous mes vêtements. Sur moi. Elles n’ont rien trouvé. « Vous filez ! Je veux plus vous revoir ici. » La vendeuse s’est scandalisée. « Non, mais vous n’allez tout de même pas la laisser partir comme ça ! Faut la punir ! Une bonne fessée. Que ça lui serve de leçon » J’ai protesté. « Ah, non, hein ! Non ! Pas une fessée ! » Mais elles n’ont rien voulu savoir. « C’est ça ou les gendarmes. » Elles m’ont forcée à m’agenouiller sur une chaise, elles m’ont relevée ma robe, baissé ma culotte. La patronne m’a tenu par les poignets pour m’empêcher de la rabattre ou de mettre les mains et la vendeuse m’a fouettée. J’ai crié, je me suis tortillée. Que ça faisait mal ! Mon Dieu, que ça faisait mal ! Il y a des gens qui sont entrés. Des clients. Une femme. Et puis un couple. Qui se sont approchés. Qui ont regardé. Qui ont ri. Et fait tout un tas de réflexions. L’homme surtout. Comment j’avais honte !
– Et comment t’aimais ça, avoir honte ! Parce que rien que d’en parler, de raconter, t’es toute trempée…
Elle a souri, m’a glissé une main entre les cuisses.
– Toi aussi !

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