On était tous là. Assis dehors Sous la tonnelle. Il y avait Océane
et Valentin. Émilie et Étienne. Julien et moi. Et puis Clément.
Mais pas Bérengère.
– Ben
non, elle se prépare. Et elle nous prépare l’apéro.
Il
nous a fixées à tour de rôle, Clément. Nous, les femmes. Toutes
les trois. Que nous.
– Et,
bien sûr, vous, vous étiez au courant. Depuis le début. Et
personne n’a jugé bon de me prévenir. J’étais cocu jusqu’aux
blanc des yeux et c’était la conspiration du silence. Solidarité
féminine, j’imagine. En tout cas…
Il
s’est tourné vers Émilie.
– En
tout cas, toi, t’as tout intérêt à filer droit. Et à te tenir à
carreau. Parce que si jamais je suis amené, comme c’est convenu, à
te flanquer une fessée, je peux te dire que tu vas la sentir passer.
Tu paieras pour tout le monde.
Océane
a voulu prendre notre défense.
– On
n’est pas des balances.
– Je
l’attendais, celle-là !
Il
l’a contrefaite.
– On
n’est pas des balances… Va voir ce qu’elle fabrique, tiens,
plutôt ! Puisque vous êtes si bonnes copines.
Elles
sont revenues toutes les deux, portant chacune un plateau. Bérengère
était nue. Entièrement nue. Elle a posé le sien sur la table, sans
oser regarder personne.
– Tu
nous fais le service, ma chérie ?
Elle
a demandé à chacun, tour à tour, ce qu’il souhaitait boire, a
rempli les verres, les a portés à domicile.
– Bon,
ben à la vôtre ! Santé !
Tout
le monde a trinqué.
Clément
l’a appelée.
– Viens
voir là !
Il
l’a fait asseoir sur ses genoux. Ils se sont chuchoté quelque
chose à l’oreille. Un bon moment. Et puis il l’a fait relever.
– Allez,
va vite !
Elle
a trottiné jusqu’à Valentin. Devant qui elle s’est plantée.
– Je
suis prête.
– À
quoi ?
– À
recevoir la fessée que j’ai méritée.
Et
elle s’est d’elle-même courbée, allongée en travers des genoux
de Valentin. Qui a pris possession de ses fesses. Qui y a
négligemment posé une main.
Océane
s’est penchée à mon oreille.
– Tu
paries qu’il bande ?
– Il
se rince copieusement l’œil, ce qu’il y a de sûr.
Il a
lancé une première claque. Pas très fort. A fait longuement
attendre la suivante. Une deuxième. Une troisième. Et puis ça a
pris sa vitesse de croisière. Fermement appliqué. Régulier.
Sonore. Une fesse après l’autre.
Elle,
elle restait les yeux obstinément fixés au sol et ponctuait chaque
coup d’un petit grognement de fond de gorge.
Bras
croisés, profondément attentif, Clément regardait, impassible, le
derrière de sa compagne s’empourprer.
Julien,
lui, avait ce petit tressautement involontaire de la cuisse que je
connaissais si bien et qui s’emparait de lui chaque fois que
quelque chose le troublait.
Quant
à Étienne, il cherchait ostensiblement mon regard que je ne
parvenais pas toujours, malgré tous mes efforts, à lui dérober. Et
ce que j’y lisais alors, c’était une menace sans la moindre
équivoque : « Toi, ma petite, quand tu vas me tomber
entre les griffes, et tu vas forcément y tomber un jour ou l’autre,
je peux te dire que je vais tout particulièrement te soigner. »
Et je rougissais comme une imbécile. Je m’agitais sur ma chaise.
Je m’efforçais désespérément de lui échapper. Sans succès. Et
je me maudissais.
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