jeudi 29 mars 2018

Mémoires d'une fesseuse (30)

 – Tu n’as pas honte, Marie-Clémence ?
– De quoi donc ? Qu’on ait vu mes fesses ? Oh, ben si ! Si ! Tu sais bien. Ça lui a plu, en tout cas, au vieux. T’as entendu ce qu’il a dit ? Et puis rien que ses yeux ! Ah, il a pas fini d’y repenser. J’adore l’idée qu’un type il va pas arrêter de penser à moi. Que ça va le mettre dans tous ses états. Les trois autres, par contre, ils en avaient strictement rien à battre.
– En es-tu si sûre ?
– Je suis pas allée les regarder sous le nez non plus, mais ils ont pas cherché à s’approcher. Rien.
– Il y en avait un, c’est clair qu’il était coincé, mais les deux autres, je peux t’assurer qu’ils en perdaient pas une miette. Même de loin.
– J’aime trop ça. On recommencera, hein ? En mieux, même, si on peut.
– En mieux ? C’est-à-dire ?
– Ailleurs. Avec plus de monde. Plein de gens. Qui regardent. Qui font des tas de réflexions. Qui se moquent. J’y pense, souvent. Par exemple, que je suis sur la plage en mini-maillot. Tout le monde voit que j’en ai pris une. Ils passent les gens. Ils repassent. Exprès pour regarder. Et pour commenter. De plus en plus fort. Exprès pour que j’entende. Il y a surtout des hommes, mais il y a aussi des femmes. Et puis alors elles, je peux te dire qu’elles me ménagent pas. D’autres fois, c’est à l’hôpital que ça se passe. J’ai fait un malaise. On m’a gardée en observation. Et, évidemment, tout le monde s’est rendu compte. Les infirmières, les médecins. Ils disent rien, mais ça se voit ce qu’ils pensent. Et c’est encore pire. Il y a plein d’autres trucs. La fois où je descends, avec un copain, dans les gorges de Galamus. On est tout seuls. Il y a personne. On en profite: On se met à poil. Et, de fil en aiguille, il me donne une grosse fessée. Sauf qu’au moment de repartir, on s’aperçoit qu’on nous a piqué nos vêtements. Tous nos vêtements. Pas d’autre solution que de remonter comme ça jusqu’à notre voiture. Dont on nous a évidemment volé les clefs avec le reste. On s’abrite comme on peut derrière tout en faisant, avec les bras, de grands gestes désespérés. Un automobiliste compatissant, accompagné de sa femme, finit par s’arrêter et accepte de nous ramener chez nous. Je vous dis pas tout ce qu’on entend tout au long du trajet.
– T’es bien en verve, toi, aujourd’hui, dis donc !
– Il y a aussi les fois où c’est devant tout un tas de gens que je la reçois la fessée.
– Gauvain et ses petits camarades n’attendent que ça.
– Oui, oh, mais eux !
– Ça te tente plus ?
– Pas vraiment, non. Je les connais trop, finalement. Et puis on a déjà fait des trucs ensemble. Alors ce serait pas pareil. J’aimerais mille fois mieux devant des inconnus.
– Ils vont être déçus. Depuis le temps qu’on leur promet.
– Oui, oh, on peut bien quand même. S’il y a que ça pour leur faire plaisir.
– Et toi, Ernesta ? C’est quoi, ton truc ?
– Oh, moi, vous savez bien. C’est qu’on me voit les fesses, mais qu’on se rende pas compte.
Marie-Clémence s’est plantée devant elle.
– Qu’on se rende pas compte de quoi ? C’est quoi tous ces mystères que vous faites toutes les deux ?
– Montre-lui, Ernesta !
Elle a baissé son pantalon.
– Ben, quoi ? C’est ses fesses. Comme tout-à-l’heure.
S’est retournée.
– Oh, la vache ! Elle a une bite ! Non, mais j’y crois pas ! Elle a une bite. Jamais, au grand jamais, à la voir, on irait s’imaginer un truc pareil. Quand on voit comment elle fait fille. Elle peut pas rester un peu à poil ? Le temps que je m’habitue ?
À la fin de la soirée, elle n’était toujours pas vraiment habituée.
– Non, mais j’hallucine, là. J’hallucine complètement. Oh, mais je vais voir tout ça d’un autre œil, moi, maintenant, quand on ira ensemble toutes les trois au sex shop. Ou ailleurs.

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