lundi 28 mars 2016

La clef USB (2)

Antoine m’a gratifiée d’un large sourire. Déposé un baiser sur chaque joue.
– Excellente année, Christina ! Je te souhaite le meilleur du meilleur…
– Merci… À toi aussi !
Il a aussitôt enchaîné.
– Je peux te demander un service ? J’ai un monceau de cadeaux dans la voiture. Tu voudrais pas venir m’aider à les décharger ?
Il m’en a entassé trois ou quatre sur les bras, s’est brusquement interrompu.
– Tu dors bien en ce moment ?
– Hein ? Mais pourquoi tu me demandes ça ?
– Parce que… t’as une tête à faire peur ! Une vraie mine de déterrée. Faudra qu’on parle tous les deux du coup. Ça s’impose…
Bon, ben voilà. Voilà, ça y était. Il l’avait dit. Ou c’était tout comme. Il avait vu. Il savait. Et, bizarrement, j’ai ressenti un immense soulagement. Au moins, maintenant, les choses étaient claires. C’en était fini de ces épuisantes et interminables interrogations qui me pourrissaient la vie. Il allait falloir faire face, oui, mais en toute connaissance de cause.

En fin d’après-midi, ça s’est mis à danser. Il en a profité pour venir aussitôt m’inviter.
– Bon… On joue franc jeu ?
Il n’a pas attendu la réponse.
– Tu sais que j’ai d’abord cru que c’était délibérément que tu me l’avais donnée cette clef ?
– Hein ! Ah, mais non ! Non. Pas du tout ! Je peux t’assurer… Ah, non, alors là ! Tu te goures complètement. C’est suite à un malheureux concours de circonstances que…
– T’emballe pas ! T’emballe pas ! Mea culpa… Quand j’ai vu ta tête en arrivant tout à l’heure, j’ai réalisé… J’avais fait fausse route, c’était clair comme de l’eau de roche. En attendant, ça fait une semaine que tu te ronges les sangs, hein ? Il y a pourtant vraiment pas de quoi !
– Pas de quoi ? Non, mais tu te rends pas compte !
– Si ! Enfin non ! Peut-être pas après tout. J’en sais rien. Parce que je n’en ai vu qu’une de ces vidéos. Je l’ai longuement savourée. Une vingtaine de fois au moins je me la suis passée et repassée. Avec toujours autant de plaisir.
Il attendait manifestement que je lui demande laquelle. Je mentirais si je prétendais ne pas avoir été tentée de lui poser la question, mais je me suis bien gardée de m’aventurer sur ce terrain-là. Ç’aurait été m’enfoncer dans des sables mouvants.
Il a souri… Laissé passer une bonne trentaine de secondes.
– Les autres, je vais les explorer une à une. Les découvrir pas à pas. Il doit y avoir de véritables petits joyaux là-dedans.
J’ai tenté le tout pour le tout.
– Je suppose qu’il est inutile que je te demande de me la rendre…
– Bien sûr que si que je vais te la rendre. Et pas plus tard que tout à l’heure…
– La copie que tu en as faite aussi ?
– Tu peux pas me demander ça. Des vidéos qui vont ensoleiller ma vie pendant des mois et des mois. Non. C’est au-dessus de mes forces.
– Est-ce que je peux au moins compter sur ta discrétion ?
– Et moi sur ta compréhension ?
– C’est-à-dire ?
– On a bien conscience, l’un comme l’autre, que si ces vidéos tombaient entre de mauvaises mains, tu serais vraiment en très mauvaise posture. Alors mon silence mérite bien quelques compensations, non ?
– Si t’as l’intention de coucher avec moi…
– Tout de suite les grands mots… Il y a d’autres solutions. Beaucoup plus subtiles. Et tout aussi satisfaisantes.
– Lesquelles ?
– Si je me lance là-dedans, il y en a pour un sacré moment… Et on risque d’attirer l’attention… Je t’appelle demain… On en parlera tranquillement…

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