En
mille éclats. Son vase. En faisant les folles toutes les deux. Son vase. Le
vase qu’oncle Charles, avant de mourir, avait rapporté de Cochinchine. Auquel
elle tenait comme à la prunelle de ses yeux…
La
catastrophe…
–
Aide-moi ! Ramasse… Vite… Avant que quelqu’un arrive…
–
On en fait quoi des morceaux ?
–
On les cache… Qu’est-ce tu veux en faire d’autre ?
On
les a emportés, rassemblés dans nos robes relevées… Et dissimulés tout au fond
de notre coffre. Sous nos jouets depuis des années inutilisés…
–
Personne n’ira les chercher là…
–
Quel vase ? Ah, oui, tiens ! Il n’est plus là le vase…
–
On l’a pas vu, non… Qu’est-ce qu’il est devenu ?
Il
a haussé les épaules…
–
Je me tue à vous le répéter, ma chère amie… L’un de vos domestiques l’aura
emporté…
–
Pour en faire quoi, grands dieux !
–
Pour le vendre, parbleu ! Que voulez-vous qu’il en fasse d’autre ?
–
Je les ai tous interrogés… Aucun d’entre eux…
–
Qu’espériez-vous donc ? Que le coupable allait se dénoncer derechef et
implorer votre pardon à genoux ? Votre naïveté, ma chère, n’a d’égale que
votre candeur…
–
Qu’allons-nous faire ? Nous ne pouvons tout de même pas…
–
Les soumettre à la question… C’est effectivement impossible… Jetons-en un
dehors… Au hasard…
–
Ce serait fort injuste…
–
Mais le seul moyen d’amener le coupable, s’il lui reste une once de sens moral,
à se dénoncer…
–
Ils l’ont fait… Ils l’ont mise à la porte…
–
Qui ça ?
–
Fanchon…
–
Pourquoi elle ?
–
Parce que c’est elle qui nettoie le petit salon… Qu’elle s’y trouve le plus souvent
toute seule…
–
Elle est partie ?
–
Non… Elle rassemble ses affaires… Et elle pleure toutes les larmes de son
corps… Qu’est-ce qu’on fait ?
–
Ben rien… Qu’est-ce tu veux faire ?
–
Leur dire… Leur dire que c’est nous…
–
Ah, non, non… On va être punies…
–
Mais Fanchon ?
–
Elle retrouvera à se placer Fanchon… Te fais pas de souci pour elle…
–
Tu crois ?
–
Ben évidemment…
–
Vous ne savez toujours rien, Mesdemoiselles, de ce qu’il est advenu de ce vase ?
–
Rien… Vraiment… Comment le pourrions-nous ?
–
Il s’en est retrouvé un morceau sous la crédence…
–
Alors sans doute quelqu’un l’aura-t-il cassé…
–
Et qui, selon vous ?
–
Nous ne le savons pas…
–
Vraiment ?
–
Vraiment…
–
On vous a pourtant vu emporter quelque chose, dans les replis de vos robes, ce
matin où il a disparu…
–
On se sera trompé…
–
Et les morceaux s’en sont retrouvés dans votre coffre à jouets…
–
Quelqu’un les y aura dissimulés…
–
Vous nierez donc jusqu’au bout l’évidence ?
–
C’est pas notre faute…
–
C’est celle de Fanchon sans doute ? Celle de Fanchon que vous avez laissée
renvoyer, sans mot dire, sous une accusation infamante…
–
Non, mais…
–
Taisez-vous ! Vous êtes deux petites menteuses effrontées et lâches…
Avez-vous seulement le moindre remords de la façon dont vous vous êtes
comportées ? Même pas… Vous devriez avoir honte… Mais sans doute
ignorez-vous ce qu’est la honte… Eh bien vous l’allez apprendre… À vos dépens…
Vous allez être fessées… Et proprement… Vous allez être fessées… Devant toutes
celles et tous ceux sur lesquels vous avez laissé se porter aussi injustement les
soupçons…
–
Oh, non ! S’il vous plaît… On ne le fera plus… On vous jure…
–
Et vous l’allez être sur-le-champ… Faites-les venir, mon ami… Et vous,
dévêtez-vous ! Allons !
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