Dessin
de Georges Topfer.
J’ai
passé le week-end à la plage. En petit avant-goût des vacances. Un
week-end de rêve. Il faisait un temps magnifique. Et les maîtres
nageurs sauveteurs étaient de sortie. Beaux comme des dieux. Et en
nombre. Une douzaine. Au moins. Un vrai régal des yeux. Torses de
rêve, biscoteaux à foison, fesses musclées, bronzages généreux.
Je ne savais plus où donner de la tête. Je volais de l’un à
l’autre. Je m’attardais ici. Je repartais là. Je revenais au
premier. J’en essayais un troisième. Un quatrième. Sans parvenir
à arrêter mon choix. Mais, après tout, picorer à droite et à
gauche pouvait aussi avoir son charme.
Une
flopée de petites dindes évaporées voletait autour d’eux en
jacassant à qui mieux mieux et en ricanant bêtement. Non, mais
attends que j’allais te l’éparpiller leur basse-cour, moi !
Je me suis lentement levée. J’ai posément rajusté mon maillot,
l’ai fait claquer contre ma cuisse et je me suis majestueusement
laissée dériver jusqu’au bord de l’eau. Mains sur les hanches,
j’ai longuement contemplé la mer. Qui m’a léché les pieds. Les
chevilles. Les mollets. Qui m’a appelée. Je m’y suis aventurée.
Jusqu’aux hanches. Jusqu’aux seins. Là-bas, sur la plage, un
sauveteur avait ses jumelles braquées sur moi. C’était bon.
C’était le moment. J’ai perdu pied. Fait semblant. En réalité,
je nage comme un gardon. J’ai battu désespérément des bras.
Lancé de pathétiques appels au secours. Ça n’a pas boité :
ils se sont précipités. À trois. M’ont extirpée de l’eau. Il
y en a un – un grand, fort, avec des yeux, mais des yeux ! –
qui m’a prise dans ses bras. Serrée contre lui. Déposée sur la
plage.
– Ça
va ?
Penché
sur moi.
Ça
allait, oui. À peu près.
Il a
pris un air sévère.
– Quand
on sait pas nager, on reste près du bord.
Le
deuxième a renchéri.
– Ou
on met des brassards.
Quant
au troisième, il m’a donné le coup de grâce.
– Non,
mais franchement vous avez quel âge ?
Et
ils m’ont plantée là.
Oh,
mais ils n'allaient pas s’en tirer comme ça.
Ah,
non, alors ! Ils s’en tirent pas comme ça. Parce qu’à
l’hôtel, dans ma chambre, je reste étendue quelques instants sur
le sable, et puis je retourne à l’eau. Au même endroit. Aussi
loin. Encore plus loin. Et je reperds pied. Il revient. Tout seul
cette fois. Il est furieux, ça se voit. Ses gestes, pour s’emparer
de moi, pour me ramener, sont plus brusques, plus énergiques.
– Vous
croyez qu’on n'a que ça à faire ?
Il
s’arrête. On est encore dans l’eau. J’en ai jusqu’aux
genoux. À peine.
– Vous vous comportez en gamine écervelée. Eh bien, on va vous traiter en
gamine écervelée.
Et,
avant même que j’aie eu le temps de réaliser, de dire quoi que ce
soit, de protester, il me renverse sur son genou, il me met le cul à
l’air, là, devant tout le monde et il me flanque une fessée. Une
de ces fessées ! À pleine main. À pleines fesses. À toute
volée.
– Non,
mais ça va pas ! Arrêtez ! Mais arrêtez enfin !
Il
n’écoute pas. Il s’en moque. Au contraire : il tape plus
fort. Beaucoup plus fort. Ça fait mal. Ça pique. Ça brûle. Je
crie. Je voudrais m’empêcher, mais je peux pas. Je crie. Et ça
attire l’attention des gens. Qui regardent. Tout le monde regarde.
Les autres baigneurs autour. Les gens sur la plage. Les autres
sauveteurs, là-haut. Les petites dindes. Que ça amuse beaucoup. Qui
rigolent tout ce qu’elles savent.
Et c’est là, devant elles,
devant eux, que mon plaisir me surprend. M’envahit. Me submerge.
Pour ma plus grande honte. Mais c’est si bon !
J’étouffe
mon ravissement dans l’oreiller.
Rafraichissant. Tiens allez j'y vais ce matin, moi, à la plage !
RépondreSupprimerC'est sûr que par ces chaleurs…
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