lundi 22 janvier 2018

Embarquements (2)

James Tissot The Gallery of HMS Calcutta (Portsmouth) (vers 1876) Souvenir d’un bal à bord.

Embarquements ne devait pas avoir de suite, mais sur la suggestion d'Helea (que vous pouvez retrouver ici http://chroniquespetitecigale13.blogspot.fr ) un deuxième épisode est venu compléter le premier. Qu'elle en soit remerciée.

EMBARQUEMENTS (2)

Pour le bal de bienvenue du capitaine elle avait revêtu une superbe robe blanche ornée de gros nœuds jaunes.
Et j’ai, bien sûr, été le premier à l’inviter à danser.
– Tu es absolument ravissante.
– Merci.
– Et je suis aux anges de pouvoir faire cette traversée avec toi.
– Ce qui m’expose, j’en ai bien peur, à huit jours de fessées quasi quotidiennes.
– Peur ?
– C’est une façon de parler.
– Celle d’hier soir ne semble pas t’avoir vraiment déplu.
– Veux-tu bien te taire !
– Tu t’es montrée très expressive.
– On a entendu, tu crois ?
– Tes voisins les plus proches, ça ne fait pas l’ombre d’un doute.
– Lesquels voisins sont d’ailleurs, pour l’heure, accoudés là-bas, au bastingage.
– En effet.
– Nous sommes suffisamment à l’aise ensemble, toi et moi, et ce depuis suffisamment longtemps, pour que je puisse me permettre de te demander une faveur.
– Je t’écoute.
– Je vais aller prendre place à leurs côtés et jouer les belles indifférentes, dissimulée derrière mon éventail. Et toi, pendant ce temps-là…
– Compris. Va vite…

Ils l’ont d’abord poliment ignorée. Et puis ils se sont enhardis. Elle d’abord. Qui lui a jeté de brefs regards, à plusieurs reprises. Qui a murmuré quelque chose, en riant, à l’oreille de son compagnon. Son regard s’est attardé sur son dos, sur ses reins, et puis, plus longuement sur sa croupe. Elle a encore chuchoté, toujours en riant. Lui aussi a ri. Plus ouvertement. Et s’est goulûment et longuement repu de ses fesses sous la robe.

Elle est revenue et on est retourné danser.
– Alors ?
Elle m’a écouté avec infiniment d’attention.
– Et c’est tout ?
– C’est pas si mal, non ? Ce qu’il y a de sûr, en tout cas, c’est qu’ils vont désormais être très attentifs à ce qui se passe dans ta cabine. Surtout quand je viendrai t’y rejoindre. Et ils ne seront sans doute pas les seuls d’ailleurs. D’autres aussi, ici ou là, ont dû entendre. Ou entendront.
Elle s’est laissée aller contre moi.
– Et c’est une situation qui ne semble pas faite pour te déplaire, avoue !
– Tu ne devrais pas être censé t’en apercevoir.
On a valsé un long moment en silence, les yeux dans les yeux.
– Je peux te poser une question ?
– Dis toujours…
– Une question à laquelle, jusqu’à présent, tu n’as jamais voulu répondre.
– Oh, toi, je te vois venir.
– Ces fessées, de ma main, que tu sollicitais si obstinément jadis, elles avaient pour but de te punir de quoi ?
– Tu veux vraiment savoir ?
– Puisque je te le demande…
– Tu me punissais d’être amoureuse de toi. Alors que je n’en avais pas le droit. Que j’étais fiancée à un autre.
– Et aujourd’hui ? Je te punis de quoi ? De la même chose ? Tu n’as toujours pas le droit. Tu es mariée cette fois. À moins que…
– Tais-toi ! Je t’en supplie, tais-toi !

6 commentaires:

  1. La voilà, la suite ! Merci François-Fabien.
    Heu, un troisième épisode ? J'abuse ? Ok, je me tais lol.

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  2. Tu serais pas un peu gourmande, toi, des fois? ;)

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  3. Le tableau, encore plus que d’habitude, s’accorde à merveille xD. Sans doute vous êtes un expert en peinture.

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    1. Je ne suis pas du tout un expert en peinture. J'aime bien, par contre, errer dans les musées ou me plonger dans des œuvres d'art. J'ai trouvé l'idée d'en utiliser certains pour leur donner un sens qu'ils n'avaient pas au départ, séduisante. Et je m'amuse beaucoup en procédant à ces "falsifications".

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