– T’en fais une tête ! Ça va
pas ?
– Je suis dans une merde, mais une
merde ! J’te dis même pas…
– Qu’est-ce qui t’arrive ?
– Des problèmes de fric… Et des
gros…
– Hein ? Mais je croyais…
– Qu’on était pleins aux as ?
On l’était… On l’est plus…
– Qu’est-ce qui s’est passé ?
– C’est moi… J’ai fait des
conneries…
– C’est-à-dire ?
– Le tiercé… Complètement accro j’y
suis devenue à ça…
– Ah…
– J’ai tout bouffé… Toutes nos
économies… On n’a plus rien… Enfin si ! Des dettes… Par-dessus la tête…
– Et il prend ça comment
Victor ?
– Il est pas au courant Victor… Pas
encore… Mais quand il va savoir ! Alors là quand il va savoir ! Rien
que d’y penser ! Et ça devrait pas tarder… Parce qu’il a été très clair le
banquier… « Ou vous régularisez, Madame Duprat… Avant jeudi… Ou bien
alors… » Banque de France… Interdiction… Et tatati et tatata… Non… Faut
que je gagne du temps… Faut absolument que je gagne du temps… Parce que dans
quinze jours c’est le prix d’Amérique…
– Et alors ?
– Et alors là je suis sûre de mon
coup… Des tuyaux de première main j’ai… Je vais me refaire… Un grand bol d’air…
En attendant de me rétablir complètement… Non… La seule chose, faudrait pas que
l’autre animal de banquier déclenche le cataclysme avant… Et ça… Ça, faut
absolument que je réussisse à l’empêcher…
– Tu l’as vu ?
– Je l’ai vu, oui… Il a été odieux…
Absolument odieux…
– Ah, ben ça, les banquiers…
– Il a rien voulu entendre… Mais
alors là ce qui s’appelle rien… « Mais puisque je vous dis que c’est
l’affaire de quelques jours, Monsieur Tiroin… » « Vous m’avez déjà si
souvent amusé de belles promesses… » « Oui, mais cette
fois-ci… » « Et on peut savoir d’où vont provenir ces fonds sur
lesquels vous semblez tant compter ? » « C’est… Ça, c’est mon
affaire… » « Le douze dans la troisième course ? C’est ça ?
Nous habitons une petite ville, Madame Duprat, où tout se sait… Personne
n’ignore où sont passés les millions que vous avez si allègrement dilapidés… À
l’exception – notable – de votre mari qui préfère fermer obstinément
les yeux sur vos fredaines… Vous vous comportez comme une gamine irresponsable,
chère Madame… Et je regrette qu’il ne se soit pas trouvé quelqu’un pour vous
remettre, quand c’était nécessaire, les pendules à l’heure… Une bonne fessée
vous aurait fait le plus grand bien… » « Je ne vous permets pas… Mais
je ne vous permets pas… » « Il n’est pas trop tard… Il n’est jamais
trop tard… Vous voulez que je vous accorde un nouveau délai ? Soit ! En
échange de quoi je vais vous infliger, à cul nu, cette correction que je rêve
de vous administrer depuis fort longtemps et que vous avez
– reconnaissez-le ! – amplement méritée… » « Non, mais
ça va pas ? Vous n’êtes vraiment pas bien, hein ! » Et je me suis
levée, furieuse… « Comme vous voudrez ! Mais ne vous étonnez pas si, dès
demain matin, au courrier… » « Vous êtes un monstre… » Et j’ai
claqué la porte…
– Tu crois qu’il va vraiment le
faire ?
– Non… Non… Parce que je suis
revenue sur mes pas…
– Ah…
– La mort dans l’âme… Mais j’avais
pas le choix… C’était la seule solution… Si je voulais pas que… Et puis que
Victor…
– Et alors ?
– Et alors… ben tu te doutes…
– Il t’en a vraiment mis une ?
J’y crois pas !
– Ben si ! Si ! C’est un
salaud ! Un véritable petit salaud… Oh, mais il me paiera ça ! Je
peux t’assurer qu’il me le paiera…
– Comment ?
– Je sais pas… Oh, mais je
trouverai… Je trouverai…
– Et déculottée il te l’a
mise ?
– Avec une grande règle en bois… On
dirait pas comme ça, mais en fait ça fait hyper mal ce truc…
– T’as pas pleuré au moins ?
T’as pas crié ? Tu lui as pas fait ce plaisir ?
– Mais non !
– C’est vrai ? C’est
sûr ? T’as pas l’air bien convaincue…
– Oh, mais t’en as pas marre de me
poser toutes ces questions ? Tu m’emmerdes à la fin ! Tu m’emmerdes
vraiment !
– Il a fait cinquième ton cheval…
– Je sais, oui…
– T’en as pris une pour rien alors
finalement… C’était reculer pour mieux sauter… Tu vas quand même y être à la
Banque de France…
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