33-
Les bœufs qui tirent notre chariot s’affaissent dans la neige, épuisés… Ils n’iront pas plus loin…
Ça tombe épais… Dru… À gros flocons…
– Si seulement on savait où on est… Mais on n’y voit rien… Rien…
Scapin prend les choses en mains…
– Léandre et moi, on va aller chercher du secours… Mettez-vous à l’abri, derrière, sous les bâches… Et ne bougez pas d’ici… Sous aucun prétexte…
Serrés les uns contre les autres… Transis… Frigorifiés…
La nuit tombe… La nuit est tombée…
Isabelle se blottit contre moi…
– C’est la fin du voyage… On va tous mourir là…
Je lui réponds d’une caresse sur la joue…
Des appels dans l’obscurité… Des galops de chevaux… Des torches… Des valets… Et Scapin… Et Léandre…
– Venez !
On nous emmène… On nous emporte… On nous enlève…
Un château… Des lumières… De la chaleur… Une longue table garnie de victuailles dont le propriétaire – un marquis – fait le tour à grands pas… En lançant ouvertement à Zerbine des œillades appuyées…
– Sustentez-vous ! Rassasiez-vous !
On ne se fait pas prier…
– Ainsi donc vous êtes comédiens… Mais on en parlera demain… Quand vous serez reposés…
Scapin nous impose le silence…
– Chut ! Ecoutez tous… Voici ce que le marquis des Bruyères nous propose… Il nous héberge… Il nous nourrit… Et même…
Il brandit une bourse…
– Il nous paie… Pour que nous montions une pièce dont il a eu l’idée et qui sera jouée, dès que, les uns et les autres, nous connaîtrons nos rôles devant un parterre de ses amis…
– Vive le marquis !
Et une salve d’applaudissements salue son entrée…
Isabelle soupire…
– Au moins pendant ce temps-là n’aurons-nous plus faim… Ni froid…
Derrière la porte de sa chambre le rire de Zerbine…
– Arrêtez ! Non… Vous me chatouillez…
Et la voix du marquis…
– Quelle drôlesse tu fais...
Leurs rires s’emmêlent…
Scapin tire une figure longue d’une aune…
– Oui… Mais non… Ça va pas être possible…
– Quoi donc ? Qu’y-a-t-il ?
– Il veut que… Dans sa pièce le personnage que doit jouer Zerbine reçoit, sur scène, une magistrale fessée…
Tous les regards convergent vers elle…
– Écoutez, les amis… Ça fait des mois et des mois qu’on tire le diable par la queue… Qu’on mange à notre faim un jour sur trois… Et encore ! Qu’on espère en vain chaque soir que le lendemain sera meilleur… Et enfin… enfin la chance nous sourit… Nous allons jouer, grâce au marquis, devant de nobles et puissants personnages qui, si nous parvenons à les persuader de notre talent, nous prendront sous leur protection… Sans doute finirons-nous – le marquis en est en tout cas convaincu – par nous produire à la Cour… Devant le Roi… S’il faut pour cela qu’on me tambourine le derrière… Et bien qu’on me le tambourine… Autant qu’on voudra… Allons, Scapin ! Commençons ! Apprenons ! Répétons !
Les bœufs qui tirent notre chariot s’affaissent dans la neige, épuisés… Ils n’iront pas plus loin…
Ça tombe épais… Dru… À gros flocons…
– Si seulement on savait où on est… Mais on n’y voit rien… Rien…
Scapin prend les choses en mains…
– Léandre et moi, on va aller chercher du secours… Mettez-vous à l’abri, derrière, sous les bâches… Et ne bougez pas d’ici… Sous aucun prétexte…
Serrés les uns contre les autres… Transis… Frigorifiés…
La nuit tombe… La nuit est tombée…
Isabelle se blottit contre moi…
– C’est la fin du voyage… On va tous mourir là…
Je lui réponds d’une caresse sur la joue…
Des appels dans l’obscurité… Des galops de chevaux… Des torches… Des valets… Et Scapin… Et Léandre…
– Venez !
On nous emmène… On nous emporte… On nous enlève…
Un château… Des lumières… De la chaleur… Une longue table garnie de victuailles dont le propriétaire – un marquis – fait le tour à grands pas… En lançant ouvertement à Zerbine des œillades appuyées…
– Sustentez-vous ! Rassasiez-vous !
On ne se fait pas prier…
– Ainsi donc vous êtes comédiens… Mais on en parlera demain… Quand vous serez reposés…
Scapin nous impose le silence…
– Chut ! Ecoutez tous… Voici ce que le marquis des Bruyères nous propose… Il nous héberge… Il nous nourrit… Et même…
Il brandit une bourse…
– Il nous paie… Pour que nous montions une pièce dont il a eu l’idée et qui sera jouée, dès que, les uns et les autres, nous connaîtrons nos rôles devant un parterre de ses amis…
– Vive le marquis !
Et une salve d’applaudissements salue son entrée…
Isabelle soupire…
– Au moins pendant ce temps-là n’aurons-nous plus faim… Ni froid…
Derrière la porte de sa chambre le rire de Zerbine…
– Arrêtez ! Non… Vous me chatouillez…
Et la voix du marquis…
– Quelle drôlesse tu fais...
Leurs rires s’emmêlent…
Scapin tire une figure longue d’une aune…
– Oui… Mais non… Ça va pas être possible…
– Quoi donc ? Qu’y-a-t-il ?
– Il veut que… Dans sa pièce le personnage que doit jouer Zerbine reçoit, sur scène, une magistrale fessée…
Tous les regards convergent vers elle…
– Écoutez, les amis… Ça fait des mois et des mois qu’on tire le diable par la queue… Qu’on mange à notre faim un jour sur trois… Et encore ! Qu’on espère en vain chaque soir que le lendemain sera meilleur… Et enfin… enfin la chance nous sourit… Nous allons jouer, grâce au marquis, devant de nobles et puissants personnages qui, si nous parvenons à les persuader de notre talent, nous prendront sous leur protection… Sans doute finirons-nous – le marquis en est en tout cas convaincu – par nous produire à la Cour… Devant le Roi… S’il faut pour cela qu’on me tambourine le derrière… Et bien qu’on me le tambourine… Autant qu’on voudra… Allons, Scapin ! Commençons ! Apprenons ! Répétons !
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