- T’étais où cette nuit ?
- Qu’est-ce ça peut te foutre ?
Elles se sont défiées du regard. Face à face. Immobiles. Nues. Laurianne dégoulinante d’eau, Sarah la tête pleine de shampooing…
- T’étais avec lui, hein ?
- Je te le dirai pas…
Elles se sont jetées l’une sur l’autre comme deux furies. Se sont agrippées aux cheveux. Ont roulé par terre en ahanant. Milàn a voulu s’interposer. Je l’ai retenue par le bras…
- Pas toi, Milàn… T’en mêle pas… T’en mêle surtout pas… Pas toi…
Fournier a surenchéri…
- Ah non, non, t’en mêle pas !… Qu’on puisse se rincer l’œil… Parce que quand ça se frite comme ça tout ce que ça montre !… Allez-y, mes chéries, allez-y !… Vous gênez surtout pas pour nous… Offrez-nous de gentils petits aperçus…
C’était tantôt l’une tantôt l’autre qui avait le dessus. Sarah s’asseyait alors à califourchon sur elle et la giflait à tour de bras. Laurianne, elle, lui enfonçait un genou dans le ventre, lui plaquait les deux épaules au sol et exigeait qu’elle lui demande pardon…
- Plutôt crever…
Et ça repartait de plus belle…
- Bon, allez, maintenant ça suffit !… On a vu tout ce qu’on voulait voir… Alors vous vous relevez et vous vous rhabillez…
Elles ne l’ont pas écouté. Il en a empoigné une par les cheveux, a repoussé l’autre d’une grande claque sur les fesses…
- Circulez, dégagez !… Et je veux plus rien entendre…
Il leur a emboîté le pas dans le couloir…
- Qu’est-ce qui leur a pris ?
- Devine !…
- Encore !…
- Ben oui, mon cher !… La rançon du succès…
- Ca devrait bien finir par leur passer…
- Oh, alors ça !… Mais dis-moi un truc… Si j’étais pas là… Si j’étais plus là… Si je partais… il y aurait quelque chose entre elles et toi ?
- Tu vas t’en aller ?!
- Non… Non… Bien sûr que non… Mais on sait jamais ce qui peut se passer… Tu coucherais avec laquelle ?… Sarah ou Laurianne ?… Peut-être toutes les deux… Ou bien une autre… Caroline… Des tas d’autres… T’aurais que l’embarras du choix… Tu serais stupide de pas en profiter…
- En attendant laquelle c’est qui m’a fait faire le pied de grue toute la nuit ?
- J’ai pas pu venir, Milàn… Elles dormaient pas les filles…
- Ce soir alors ?
- Je sais pas… Si je peux… Ca dépend… On verra…
Il a voulu…
- Tu n’as plus peur que quelqu’un vienne ?
- Non… Plus maintenant, non… Ca m’est égal… Tout m’est égal…
Pernelle était assise sur le lit de Catherine. Elle n’a pris ni la peine ni le temps de me dire bonjour…
- T’as encore trouvé le moyen de faire des tiennes, hein ?… Tu es décidément incorrigible… Dès qu’on te laisse livrée à toi-même… Qu’on veut te faire confiance…
- Mais non c’est pas ça, mais…
- Mais, pour commencer, tu vas me perdre cette détestable habitude de nier l’évidence et d’ergoter comme ça à propos de tout… Dorénavant tu ne seras plus autorisée à t’exprimer devant moi que lorsque j’en aurai explicitement formulé la demande… Est-ce que c’est clair ?
- Oui…
- Bien… Ensuite… Dès que tes patrons t’auront remerciée – ce qui, selon les informations dont je dispose, ne saurait tarder – tu te trouveras placée directement sous mon autorité… Tu le resteras – et cela dans ton intérêt – aussi longtemps que je le jugerai nécessaire, c’est-à-dire tant que je considérerai que tu ne peux pas être véritablement autonome et te diriger dans l’existence en toute connaissance de cause… Il va de soi qu’en contrepartie j’attends de toi une obéissance et une docilité absolues… Mais, de ce côté-là, je sais que ça ne présentera pas, pour toi, trop de difficultés… J’ai pu constater l’année dernière que tu y étais très spontanément portée… En tout cas avec moi… Ce qui m’a donné l’occasion de débroussailler déjà pas mal le terrain… Tu es d’un fonctionnement extrêmement simple finalement… C’en est même bien souvent frustrant… Mais bon, on fera avec… D’autant que ce que ça a, malgré tout, de positif c’est qu’on va pouvoir entrer très vite dans le vif du sujet… Entreprendre – ensemble – de t’améliorer et de te corriger puisque, seule, tu en es parfaitement incapable… Non ?… Tu ne crois pas ?
- Si…
- Et obtenir des résultats spectaculaires puisque tu sembles vouloir faire preuve de beaucoup de bonne volonté… Mais retourne vite travailler… On va te chercher…
Monsieur Ménisson m’a fait signe…
- Adeline t’attend… Elle veut te parler…
- Mais vous aviez dit que…
- Peu importe ce que j’ai dit ou n’ai pas dit… Ce que je te dis MAINTENANT c’est qu’Adeline t’attend…
- Si j’y vais vous allez pas me mettre dehors ?…
- Bien sûr que si !…
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