mercredi 4 février 2009

La classe des filles ( 6ème jour )

C’était une toute petite femme d’une soixantaine d’années, au teint mat, à la peau parcheminée, aux cheveux d’un noir intense qui nous a fait mettre en rang dans la cour et a attendu que tout le monde se soit tu pour nous donner l’ordre de monter. Qui, là-haut, en classe, nous a laissées longtemps debout à côté de nos pupitres avant de nous autoriser à nous asseoir…
- Bien… Alors on va jouer franc jeu... Histoire de mettre tout le monde à l’aise… Mon rôle ici consiste à vous donner des cours d’Anglais… Et à vous sanctionner en fonction des résultats que vous obtenez ou… n’obtenez pas… Soyons clairs : je me fiche éperdûment de vos résultats. Ou plutôt il n’y aura strictement aucun rapport entre les notes que je vous attribuerai et la valeur de votre travail… Je serai résolument et odieusement injuste… Pourquoi ?… Si j’ai accepté de venir passer ici un mois de mes vacances vous vous doutez bien que ce n’est pas pour la maigre compensation financière qu’on va me consentir... Non… C’est parce qu’on m’a assuré que j’aurais carte blanche pour administrer toutes les fessées que je voudrais comme je voudrais et à qui je voudrais… Je compte bien user et abuser de ce passe-droit… Avant tout pour mon plaisir et ma satisfaction à moi… Je me fiche complètement de vos états d’âme et des raisons qui ont amené les unes et les autres à vouloir venir séjourner ici… Ce qui m’intéresse c’est qu’il y a parmi vous cinq ou six petits minois que j’ai très envie de voir grimacer et se distordre pendant qu’on les fesse… Alors… oui… bien sûr… les apparences seront sauves : vous aurez des notes… celles qui justifieront mes préférences et mes choix…

Dans la cour quatre ou cinq garçons sont venus à notre rencontre en arborant de grands sourires…
- Alors ça y est ?!… Vous avez fait la connaissance de « Doigts de fée » ?… Elle a pas fini de vous en faire voir… Celles du moins qu’elle aura dans le collimateur… Parce qu’elle a ses têtes… Et pas qu’un peu…
- Et à vous elle vous en fait pas voir ?
- Oh, nous !… On l’intéresse pas, nous… On n’est pas des filles…
Noémie s’est insensiblement rapprochée de « polo vert », s’est légèrement appuyée de l’épaule, comme par mégarde, contre lui…
- Livon, en Maths, par contre, vous avez rien à craindre… Lui, c’est le contraire… Mesnier en sait quelque chose…
- Oui, bon, ben ça va… Ca va…
- Qu’est-ce qu’il y a eu ?…
- Il y a eu qu’il s’en est pris trois en une heure…
- Et des carabinées…
- Vous êtes beaucoup à en avoir reçu depuis le début ?
- Quatre… Non… Cinq en tout… Et vous ?
- En classe, nous, il y a eu que Noëlle…
- Qui c’est Noëlle ?
On la leur a toutes indiquée en chœur d’un même mouvement du menton… Tous leurs regards ont convergé vers elle qui les a bravement soutenus…
- Ben oui, c’est moi…
Du fin fond de la cour a surgi monsieur Ménisson qui a marché droit sur nous à grandes enjambées…
- Heu… Vaudrait mieux qu’on…
- On parlera demain n’importe comment… C’est samedi…

Le vendredi après-midi c’est leur jour de congé aux deux filles, en cuisine, mais elles ont été dix fois plus présentes encore que lorsqu’elles sont effectivement là. Parce que le chef-cuistot n’a pas arrêté de parler d’elles et de chanter leurs louanges…
- Deux petits bouts de femme adorables… Et qui n’hésitent pas à appeler un chat un chat… Ah, ils doivent pas s’ennuyer leurs petits amis… Parce qu’on peut pas dire : elles ont pas froid aux yeux… Si j’avais vingt ans de moins je peux vous dire que j’hésiterais pas une seule seconde et qu’elles y passeraient à la casserole… Toutes les deux… Parce que avec le cul qu’elles ont… Des occasions pareilles ça se laisse pas filer… Oh, mais même maintenant… Si je voulais vraiment… Surtout avec Mina… Suffirait de pas grand chose pour gagner le gros lot… Juste de la mettre en condition… Mais ça j’ai ma petite idée là-dessus… Et normalement dès lundi…
Il a sifflotté, tout guilleret, s’est arrêté d’un coup, absorbé dans ses pensées…
- Sauf qu’il y a quand même un truc qui me gêne… C’est comme ça avait l’air de les exciter, hier, l’idée de fesser une femme… Faudrait pas qu’elles soient du genre à se minoucher qu’entre elles et qu’au final ce soit moi le dindon de la farce… Non… Faudrait pas…
Il a disparu dans la réserve… Basile s’est penché à mon oreille…
- Il se fourre le doigt dans l’œil jusqu’au coude… Il l’aura jamais Mina…
- Mina, non… Mais l’autre – Adeline – je suis pas si sûre… Elle aurait des visées sur lui que ça m’étonnerait qu’à moitié…
- De toute façon qui c’est qui va trinquer ?…
- T’y vois un inconvénient ?
- Oh non !… Même si mes préférences personnelles iraient vers certains cas de figure plutôt que d’autres…
- Lesquels ?
Il a mis un doigt sur ses lèvres. Le chef-cuistot revenait de la réserve…

Au dortoir tout le monde courait dans tous les sens. Il y avait de grands éclats de rire. Des cavalcades effrénées. Les chefs de box ne disaient rien. On avait même l’impression qu’elles poussaient à la roue. En voyant mon air éberlué Cynthia a éclaté de rire…
- C’est le week end… Le réglement est entre parenthèses… Jusqu’à dimanche soir…
- On peut faire tout ce qu’on veut alors ?
- Tout… Pas vraiment… Il y a des limites… Ne serait-ce que celles que t’as intérêt à te donner à toi-même… Parce qu’on t’écoute… On t’observe… Et il y a beaucoup de choses qui risquent de te retomber sur le coin de la figure après si tu as dépassé les bornes… Sous une forme ou sous une autre…
Noémie a passé la tête…
- Qu’est-ce que vous faites, les filles ?… Restez pas là toutes seules… Venez avec nous… Comment on s’éclate là-bas !…

2 commentaires:

  1. Et bien....je viens de découvrir ton blog Fabien et je découvre cette "pension" un peu spéciale...j'avoue que ta façon de décrire tranquillement, jour après jour l'ambiance qui y règne me donne envie de m'y inscrire.

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  2. Je suis sûr qu'on t'y accueillerait à bras ouverts, Amoureuse, et que tu y trouverais bien des sujets de méditation et bien des satisfactions... A bien tôt...

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