mardi 21 juillet 2015

Fessées croisées (37)

4 août 2012


– No comment… S’il te plaît, no comment… Je le sais que j’ai une tronche à faire peur…
– T’as surtout la tronche de quelqu’un qu’a beaucoup pleuré…
– Toute la nuit…
– Jaufret ?
– Ben oui, Jaufret… Oui… Jamais j’aurais dû l’appeler hier soir… Il a été odieux… Mais au moins, maintenant, les choses sont claires…
– Peut-être que t’es mal tombée… Que si tu le rappelles…
– Te fatigue pas ! Quand un mec te dit que t’as juste été bonne à lui vider les couilles… Qu’à part ça tu présentes pas le moindre intérêt…
– Quel salaud !
– Ah, ça, tu l’as dit…
– Tu vas faire quoi ?
– Qu’est-ce tu veux que je fasse ? Je vais chialer un bon coup… Et essayer de l’oublier…
– Non, mais je veux dire… Pour Charles… Il s’est rendu compte de rien cette nuit ?
– Oh, tu sais, lui, quand il dort, il dort… Et puis la nuit je l’ai surtout passée dans la salle de bains… Alors…
– Sauf que s’il te trouve dans cet état-là, quand il va descendre, il va forcément se poser des questions… Et t’en poser…
– J’inventerai quelque chose…
– Quoi ?
– Je trouverai bien…
– Tu prends des risques… Ou alors faut vraiment que ce soit très très plausible… Parce qu’un homme qui voit sa femme pleurer, il y a toutes les chances qu’il finisse par soupçonner que c’est pour un autre…
– Oui… Non… J’ai pas besoin de ça… En plus du reste… Je vais aller faire un tour… Et je reviendrai quand je serai à peu près présentable…
– Tu veux que je t’accompagne ?
– Non… Merci… Non… Je préfère digérer ça toute seule…



10 heures


– Ça devait arriver… Un jour ou l’autre… Mais quand même… Je le connais bien Jaufret… Pour qu’il se montre aussi mufle, il a vraiment fallu qu’elle y mette du sien Christine… Et pas qu’un peu… Bon, mais c’est pas nos oignons, ça, n’importe comment…
– J’espère pour elle qu’elle va réussir à se reprendre… Et vite… Parce qu’il est pas idiot Charles… Il aura vite fait de flairer qu’il y a anguille sous roche…
– Sans compter que tu risques bien de te ramasser une balle perdue… Parce que si Charles découvre le pot-aux-roses, Gilles aussi pourrait bien se mettre à se poser des questions… Vu que ça fait des semaines et des semaines que vous êtes fourrées toute la journée ensemble toutes les deux… De là à en conclure que…
– J’y avais pas pensé, mais…
– L’occasion de recevoir enfin la bonne fessée dont tu rêves pour l’avoir trompé de façon éhontée…
– Si j’étais sûre que ça se passe comme ça… Et qu’il se contente de ça… Seulement pour savoir comment il réagirait… Je le sens pas Gilles en ce moment… On s’était rapprochés ces derniers temps… Si, c’est vrai… On était à nouveau très complices… Et puis, d’un seul coup, il est redevenu exactement comme avant… Distant… Lointain… Et ça, c’est depuis cette histoire de fessée avec Christine… Il en parle pas, il le dit pas, mais je suis sûre qu’il m’en veut de tout ça…
– Et pourtant pas besoin de t’en faire qu’il y trouve son compte… Et pas qu’un peu…
– C’est peut-être ça qu’il veut me faire payer finalement, va savoir…
– À moins que ce qu’il supporte pas, c’est que toi t’y trouves le tien et qu’il y soit pour rien… Que ça se passe en-dehors de lui… C’est peut-être d’ailleurs pour ça les détectives privés… Tout simplement… Pour se réapproprier ce qui lui échappe… Ce qui leur échappe à tous les deux…
– J’en sais rien… Il est compliqué Gilles… Il a toujours été imprévisible… Mais alors en ce moment ça bat les records… Et ça me déstabilise complètement…
– Tu vas pas arrêter au moins ?
– Arrêter ? Les fessées ? Je crois pas que ça y changerait grand’chose… Le mal est fait… Et puis, de toute façon, maintenant que j’y ai goûté… Je pourrais pas… Ça me manquerait trop…
– Oui, ben moi, très égoïstement, ça m’arrange… Parce que t’as une de ces façons de la donner la fessée… Ça me fait complètement fondre…
– Ça se voit…
– Et d’ailleurs si c’était pas trop te demander…
– Tu voudrais qu’on remette ça…
– Voilà, oui…
– Là ? Tout de suite ? Par-dessus l’autre tu risques de le sentir sacrément passer…
– Ça fait rien… Au contraire… J’ai trop envie…

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