1-
Il fait une chaleur torride… J’essaie, tant bien que mal, de protéger ma maîtresse Livia, l’épouse du richissime banquier Lucius Cecilius Jocundus, des rayons d’un soleil accablant. Assise dans les gradins, elle a les yeux rivés sur l’entrée de l’arène, de l’autre côté là-bas… Un frémissement… Un murmure… Une clameur… On se lève… Elle se lève… Il est là… Il salue… Lui… Le rétiaire Nitimus… La coqueluche du tout Pompei… On crie… On se pâme… Elle tend les bras vers lui… Elle hurle avec les autres… Ses yeux brillent… Sa gorge palpite… Elle me broie l’épaule…
Il a vaincu… Sous leurs encouragements… Sous leurs clameurs… Sous leurs acclamations… Il n’a pas épargné son adversaire… Elles ne l’ont pas voulu, pouce baissé… Il l’a égorgé sous leurs yeux… On a aussitôt répandu du sable dans l’arène et les travées se sont lentement vidées dans l’odeur âcre de la sueur et du sang… Elle est rentrée sans un mot…
Je suis le seul de ses esclaves en qui elle ait vraiment confiance… Elle me l’a dit… Elle me l’a répété… Et elle m’a chargé d’un message à aller porter, là-bas, à la caserne des gladiateurs…
- En mains propres… Tu m’as bien compris ?… En mains propres… Et personne – absolument – personne ne doit être au courant…
Il ne me regarde pas… Il lit… Il hoche la tête…
- Je vois qui c’est, oui… J’ai eu affaire à son mari…
Il sourit…
- C’est quand elle veut… Ce soir si elle veut… Je l’attends…
- Ce soir ?…
Elle presse ses mains contre sa poitrine…
- Ce soir ?… Tu es sûr ?… Tu m’accompagneras… Envoie-moi mes servantes… Toutes… Tout de suite… Qu’elles viennent tout de suite…
Elle ramène sa palla sur son visage, se dissimule dans ses replis et on se fond tous les deux silencieusement dans la nuit, rasant les murs… Je la suis… Aux aguets… A l’affût du moindre danger qui pourrait surgir… Qu’elle pourrait courir…
- Ne bouge pas d’ici !… Attends-moi !…
Les gardes la laissent passer… S’engouffrer derrière les colonnes… Disparaître… Ils échangent à mi-voix des commentaires salaces… Rient grassement… Je l’attends… La nuit d’été est pleine d’odeurs subtiles et fortes… Une chouette pousse obstinément son cri… Je l’attends… Interminablement…
Quand elle ressurgit enfin, une première traînée de jour s’effiloche à l’horizon… Elle s’engage sur le chemin du retour… Sans rien dire… Sans un regard pour moi…
- Tu étais où cette nuit ?…
Ses servantes l’entourent… Elles sont en train de la coiffer…
- Je dormais, maîtresse…
- Tu dormais en effet… Ne l’oublie pas… Tu n’as pas quitté ta couche… Il faut que tu t’en souviennes… On va faire en sorte que tu t’en souviennes…
Un signe… Ils sont trois… Qui me dénudent, qui m’agenouillent… Et qui me fouettent… Ca mord… Ca brûle… Je crie… Je supplie… Elle les arrête…
- Approchez-le!…
On me traîne à ses pieds… Elle regarde… Elle fait la moue…
- Il braille pour pas grand chose… Continuez !…
Les servantes rient, ravies… Cherchent mes yeux…
On tape encore… Je n’ai plus de larmes… Je n’ai plus de cris…
- Tu t’en souviendras ?…
- Oui, maîtresse, oui…
Il y a encore d’autres nuits… Beaucoup d’autres nuits… Des nuits étouffantes d’Août… Où les Pompéiens s’attardent dans les rues… Restent longtemps à prendre le frais aux carrefours… S’accoudent aux fenêtres et s’interpellent d’une maison à l’autre… Il lui faut partir tard… Quand tout s’est endormi… De plus en plus tard… On emprunte des itinéraires compliqués… Qu’elle exige que je choisisse… Qu’elle me punit, le lendemain, d’avoir mal choisis si d’aventure on y a croisé un promeneur attardé…
On sait… Il s’en parle… Il s’en rit… Quand il entre dans l’arène, c’est elle qu’on regarde… C’est encore elle qu’on regarde quand il triomphe… C’est elle qu’il vient saluer, au pied des gradins, tout auréolé de victoire… On sait… Elle l’ignore… Elle feint de l’ignorer…
Il fait une chaleur torride… J’essaie, tant bien que mal, de protéger ma maîtresse Livia, l’épouse du richissime banquier Lucius Cecilius Jocundus, des rayons d’un soleil accablant. Assise dans les gradins, elle a les yeux rivés sur l’entrée de l’arène, de l’autre côté là-bas… Un frémissement… Un murmure… Une clameur… On se lève… Elle se lève… Il est là… Il salue… Lui… Le rétiaire Nitimus… La coqueluche du tout Pompei… On crie… On se pâme… Elle tend les bras vers lui… Elle hurle avec les autres… Ses yeux brillent… Sa gorge palpite… Elle me broie l’épaule…
Il a vaincu… Sous leurs encouragements… Sous leurs clameurs… Sous leurs acclamations… Il n’a pas épargné son adversaire… Elles ne l’ont pas voulu, pouce baissé… Il l’a égorgé sous leurs yeux… On a aussitôt répandu du sable dans l’arène et les travées se sont lentement vidées dans l’odeur âcre de la sueur et du sang… Elle est rentrée sans un mot…
Je suis le seul de ses esclaves en qui elle ait vraiment confiance… Elle me l’a dit… Elle me l’a répété… Et elle m’a chargé d’un message à aller porter, là-bas, à la caserne des gladiateurs…
- En mains propres… Tu m’as bien compris ?… En mains propres… Et personne – absolument – personne ne doit être au courant…
Il ne me regarde pas… Il lit… Il hoche la tête…
- Je vois qui c’est, oui… J’ai eu affaire à son mari…
Il sourit…
- C’est quand elle veut… Ce soir si elle veut… Je l’attends…
- Ce soir ?…
Elle presse ses mains contre sa poitrine…
- Ce soir ?… Tu es sûr ?… Tu m’accompagneras… Envoie-moi mes servantes… Toutes… Tout de suite… Qu’elles viennent tout de suite…
Elle ramène sa palla sur son visage, se dissimule dans ses replis et on se fond tous les deux silencieusement dans la nuit, rasant les murs… Je la suis… Aux aguets… A l’affût du moindre danger qui pourrait surgir… Qu’elle pourrait courir…
- Ne bouge pas d’ici !… Attends-moi !…
Les gardes la laissent passer… S’engouffrer derrière les colonnes… Disparaître… Ils échangent à mi-voix des commentaires salaces… Rient grassement… Je l’attends… La nuit d’été est pleine d’odeurs subtiles et fortes… Une chouette pousse obstinément son cri… Je l’attends… Interminablement…
Quand elle ressurgit enfin, une première traînée de jour s’effiloche à l’horizon… Elle s’engage sur le chemin du retour… Sans rien dire… Sans un regard pour moi…
- Tu étais où cette nuit ?…
Ses servantes l’entourent… Elles sont en train de la coiffer…
- Je dormais, maîtresse…
- Tu dormais en effet… Ne l’oublie pas… Tu n’as pas quitté ta couche… Il faut que tu t’en souviennes… On va faire en sorte que tu t’en souviennes…
Un signe… Ils sont trois… Qui me dénudent, qui m’agenouillent… Et qui me fouettent… Ca mord… Ca brûle… Je crie… Je supplie… Elle les arrête…
- Approchez-le!…
On me traîne à ses pieds… Elle regarde… Elle fait la moue…
- Il braille pour pas grand chose… Continuez !…
Les servantes rient, ravies… Cherchent mes yeux…
On tape encore… Je n’ai plus de larmes… Je n’ai plus de cris…
- Tu t’en souviendras ?…
- Oui, maîtresse, oui…
Il y a encore d’autres nuits… Beaucoup d’autres nuits… Des nuits étouffantes d’Août… Où les Pompéiens s’attardent dans les rues… Restent longtemps à prendre le frais aux carrefours… S’accoudent aux fenêtres et s’interpellent d’une maison à l’autre… Il lui faut partir tard… Quand tout s’est endormi… De plus en plus tard… On emprunte des itinéraires compliqués… Qu’elle exige que je choisisse… Qu’elle me punit, le lendemain, d’avoir mal choisis si d’aventure on y a croisé un promeneur attardé…
On sait… Il s’en parle… Il s’en rit… Quand il entre dans l’arène, c’est elle qu’on regarde… C’est encore elle qu’on regarde quand il triomphe… C’est elle qu’il vient saluer, au pied des gradins, tout auréolé de victoire… On sait… Elle l’ignore… Elle feint de l’ignorer…
Moi , je l'aime pas cette Livia!:( l'est pas sympa du tout!:(((
RépondreSupprimerC'est vrai qu'au premier abord elle n'est pas extraordinairement sympathique... Mais on l'apercevra peut-être parfois, au fil du temps, sous un jour beaucoup plus favorable...
RépondreSupprimerDe toute façon, en se promenant ainsi à travers les différentes époques on sera forcément amené à rencontrer des personnages fort peu recommandables... Ils n'ont pas manqué...