jeudi 10 novembre 2011

Escobarines:Rendez-vous manqué


- Ah, vous êtes là ?...
- Comme vous pouvez le constater, je suis là, oui. Mais… et vous ? Que faites-vous donc par ici ?
- Moi ? Oh, je… Rien ! Rien… Je me promenais.
- Seule ? Ce n’est pas bien prudent. Vous auriez au moins pu demander à Rose de vous accompagner.
- Elle était occupée et…
- Mon fils serait à coup sûr fort mécontent s’il savait que son épouse s’octroie de telles libertés.
- Que pourrait-il donc bien m’arriver ici, à deux pas de la maison ?
- C’est bien souvent que vous venez errer de ce côté-ci, à ce qu’il semble.
- Non point tant…
- Qu’y trouvez-vous donc de si attrayant ?
- On y respire un air si pur ! La nature y est si belle ! Bon… Mais nous pourrions peut-être rentrer ?
- Vous voilà bien pressée tout à coup. Ma compagnie vous serait donc importune ?
- Que non point !
- Mais ?
- Non. Rien. Restons si vous le souhaitez…

- Ah, tiens, un jeune homme ! Qui vient par ici… Le connaîtriez-vous ?
- Moi ?.. Jamais de la vie ! Comment le connaîtrais-je ?
- Il nous a vues… Il s’éloigne…
- Nous l’aurons effarouché…
- Vous auriez été seule qu’il se serait sans doute approché davantage…
- Oh, non ! Non ! Qu’allez-vous imaginer ?
- Vous l’étiez hier…
- Hier ? Je ne sais pas… Je ne sais plus…
- Et vous êtes allée à sa rencontre…
- Moi ?
- Vous, oui !
- Quelqu’un aura cru me voir... M’aura confondue avec une autre…
- C’était vous… Il n’y a, là-dessus, aucun doute possible… C’était vous… Vous qui l’avez laissé vous tenir les mains… Vous prendre un baiser… Fourrager dans votre corsage… Et si vous n’aviez pas entendu du bruit en contrebas, dans les sapins, je gage qu’il serait allé, sans que vous ayez à cœur de l’en empêcher, beaucoup plus loin…
- Je vous jure que…
- Ne jurez point ! Vous savez très bien que vous l’auriez laissé faire… Sans doute d’ailleurs l’avez-vous déjà, à quelque moment, laissé faire…
- Cela aussi je vous jure que…
- C’est pourtant ce dont sera très vraisemblablement persuadé Roland quand il rentrera et qu’il apprendra…
- Vous n’allez pas lui dire ?!
- C’est mon devoir de mère…
- Oh, non, non ! Je vous en supplie ! Pardon… Je ne le ferai plus… Je ne le verrai plus… Je ne viendrai plus ici… Plus jamais…
- Ce ne sont que promesses…
- Que je tiendrai… Soyez-en certaine…
- Vous ne l’êtes pas vous-même… Non… Il faut que mon fils sache, dans son intérêt et dans le vôtre, quelle femme il a réellement épousée… Il faut qu’il puisse prendre, en toute connaissance de cause, les mesures qu’il jugera nécessaires…
- Quelle opinion il va avoir de moi !
- Une opinion à l’évidence beaucoup plus proche de la réalité que celle qu’il avait jusque là… Mais à qui la faute ?
- Non ! Non ! Ce n’est pas moi… Je ne voulais pas… Je ne veux pas… Oh, s’il vous plaît ! Ne lui dites pas ! Je ferai ce que vous voudrez… Tout ce que vous voudrez… Punissez-moi si vous voulez… Oui, punissez-moi ! Mais ne lui dites pas !
- Vous punir ? Reconnaissez que ce serait amplement mérité…
- Je reconnais, oui… Je reconnais…
- C’est tout à votre honneur… Et une bonne fessée devrait remettre durablement dans le droit chemin la petite évaporée que vous êtes…
- Une… ?
- …fessée, oui. Y verriez-vous un inconvénient ?
- Non… Non… Pourvu que vous ne lui disiez pas… Qu’il ne sache rien… Vous ne lui direz pas, hein ?!
- Nous verrons… Allons ! Venez ici ! Et troussez-vous ! Là… A la bonne heure…

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