jeudi 14 mai 2009

Aux délices d'Adeline ( 4ème jour )

- Entrez !

Ils y pensaient. Tous. Dès qu’ils voyaient que c’était moi…

- Bonjour, Messieurs dames… Le petit déjeuner…

Ils y pensaient. Ils ne pensaient qu’à ça. C’était dans leurs yeux. C’était dans leurs sourires. C’était dans leurs voix. C’était dans leurs silences. Dans leurs regards – je les sentais – posés avec insistance sur mes fesses dès que je leur tournais le dos pour regagner la porte…




A la 116 c’était eux. Le couple du croche-pied…

- Je vous mets le plateau où ?

- Là… Sur le lit… Entre nous…

Il ne m’a pas laissé le poser. Il s’est emparé de mes poignets… Les deux…

- Et si tu le renversais ?… On sait jamais… T’en serais bien capable, maladroite comme tu es… Tu imagines ?… Tu imagines les dégâts que ça ferait, là, sur le lit ?… Il serait pas content l’autre pingouin… Tu te ramasserais encore un de ces panpan cucul… Comme hier soir… Pire même… C’est une bonne idée, non ?… Parce que… qu’est-ce qu’on a apprécié, nous !… Quelle belle vue panoramique – et délicieusement approfondie – tu nous offrais sur tes replis les plus secrets !… Tu le faisais exprès ou tu pouvais pas t’en empêcher tellement il tapait fort ?… Tu veux pas le dire ?… Ca fait rien : on la connaît la réponse… En tout cas on en redemande… Encore !… Encore !… Il suffirait de pas grand chose, hein, regarde !… Que je te fasse un peu pivoter les poignets et tout basculerait… La catastrophe !… Ca viendra… En temps voulu… Faut jamais abuser des bonnes choses… Mais ça viendra…

Il m’a lâchée…

- Pose !… Vas-y !… Pose !… Mais tu trembles !… Qu’est-ce qu’il y a ?… C’est nous ?… On t’intimide ?… Il y a vraiment pas de quoi…

J’ai filé vers la porte. Sa femme lui a chuchoté quelque chose à l’oreille…

- Ah oui… Attends !… Attends !… Te sauve pas comme ça… T’es bien pressée…

Il a ouvert le tiroir de la table de nuit…

- Tiens !… Ta culotte… Tu l’as oubliée en bas hier soir…

Il me l’a lancée. Elle est tombée à mes pieds…




La quatrième serveuse – Laurianne – il a fallu aller la chercher à la gare…

- Tu t’en occuperas, Raphaëlle…

Elle était affalée sur un banc au milieu de ses sacs…

- Je crois pas que je vais venir…

- Ah bon !?… Pourquoi ?… Qu’est-ce tu vas faire ?

- Rentrer chez moi… Là-haut… En Belgique…

- C’est toi qui vois… Mais avoir fait tout ce voyage pour rien !…

- Non, je viens pas… Non…

- Bon, ben salut alors !… Moi, je retourne là-bas… Il y a du boulot en pagaille…

Elle m’a rattrapée dans le hall…

- Non… Attends !… Attends !… Je sais pas en fait… J’en sais rien… J’ai envie, mais en même temps je t’ai une de ces trouilles…

- Ca, c’est normal, tu connais personne… Mais tu seras vite dans le bain, tu verras…

- C’est pas ça qui me fait peur…

- C’est quoi alors ?!… T’en es quand même pas à ta première fessée ?

- Ben si !… Justement !…

- C’est pas vrai !… Mais ils recrutaient que des serveuses vraiment expérimentées, ils avaient dit…

- J’ai menti…

- Ah !

- Oui… Je lui ai raconté des tas d’histoires à la femme pour qu’elle me prenne… J’ai beaucoup d’imagination…

- Mais pourquoi t’as fait ça ?

- Parce que j’avais envie que les trucs que j’inventais ils m’arrivent en vrai… De loin comme ça ça me paraissait tout simple… Ca allait de soi… Mais au fur et à mesure que l’échéance approchait… Et ça fait un mois que je sais plus où j’en suis… Il y a des jours où je suis super excitée, où j’ai hâte qu’on y soit… Et d’autres où je me dis que c’est une connerie monumentale, que je suis complètement folle… Hier soir encore je me jurais de ne jamais mettre les pieds ici… Et ce matin, à la première heure, je prenais le train… Et maintenant…

- T’as plus qu’une idée, c’est de t’enfuir… Bon… Tu vas rentrer chez toi… Il va se passer quoi ?… Tu vas t’en vouloir à mort… Tu vas te traiter de tous les noms… Et tu vas te remettre à en rêver… Nuit et jour… A danser d’un pied sur l’autre… Des occasions se présenteront… Que tu ne saisiras pas… Jusqu’au jour où tu finiras enfin par te jeter à l’eau… N’importe où… N’importe comment… Avec n’importe qui… Ici au moins on sait où on va… On ne court pas de véritable danger… Et une fois qu’on y a goûté…

Elle a repris ses sacs…

- On y va… Je te suis… C’est par où ?




Il a recommencé. A tendu la jambe dans l’allée. Mais plus mollement. Et en me laissant largement le temps de l’éviter…

- Qu’est-ce tu croyais ?… Que j’allais encore te faire tomber ?… Mais non !… Je suis pas comme ça… Faut savoir varier les plaisirs… Et puis il faut bien que tes petites camarades s’amusent, elles aussi. Il a fait signe à Coralie. Qui s’est approchée…

- Alors ?… Paraît que c’est ton tour aujourd’hui ?… Qu’on te réserve une jolie petite surprise pour le dessert…




- Pourquoi il a dit ça ?… T’es au courant de quelque chose ?…

- Rien… Non… Rien… Mais de toute façon faudra bien que t’y passes un jour ou l’autre…

- Oui, mais de savoir qu’il y a un truc qui se manigance derrière mon dos… Qu’est-ce ça peut bien être ?

- Tu verras bien…



- Mademoiselle, s’il vous plaît…

- Oui…

- Une petite question… C’est encore tout rouge d’hier soir ou ça a déjà commencé à s’estomper…

- Excusez-moi !… J’ai du travail…

Mais ils sont revenus à la charge. Trois types. Deux vieux, mais vraiment vieux. Et un jeune…

- Vous nous avez pas répondu…

Chaque fois que je passais à leur hauteur…

- C’est très désagréable… On est en droit de savoir…

- Si ça continue on va se plaindre au majordome là-bas…

- Il vous le fera bien dire… Ou il en remettra une couche…

- Mais qu’est-ce que vous voulez savoir au juste ?

- Ben ça !… Dans quel état c’est…

- Ben oui, c’est rouge !… Evidemment que c’est rouge…

Ils ont paru se satisfaire de la réponse, se sont lancés dans une longue conversation animée à voix basse…




Au dessert il ne s’était rien passé. Coralie a soupiré…

- C’est sûrement pour demain alors… Mais qu’est-ce que ça peut bien être ?

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