Source de l’illustration :
Jerzy Gorecki sur Pixabay
Je
me suis mordu les lèvres. Ça y était. C’était dit.
J’ai
passé la soirée à me le reprocher. Et une partie de la nuit.
C’était pure folie. Non, mais qu’est-ce qui m’était passé
par la tête ? C’était pure folie, oui, mais, en même temps,
et c’est là-dessus que je m’efforçais de faire porter
obstinément l’accent, en même temps j’allais être délivrée
de tout ça. Définitivement. Une fois, une seule fois. Et la vie
allait enfin pouvoir reprendre son cours d’avant.
Il
était comme d’habitude. Exactement comme les autres matins.
Peut-être même un peu plus lointain, un peu plus distant. Quant à
moi, je m’appliquais à m’absenter de moi-même, à faire
totalement abstraction de ce qui allait se passer, à concentrer
toute mon attention, avec plus ou moins de succès, sur les mails
auxquels il me fallait répondre.
À
midi, on ne s’était pas encore adressé une seule fois la parole.
Les
collègues se sont levés. Ont enfilé leurs manteaux. Il est passé
derrière moi.
‒ Je
t’attends en bas.
Discrètement.
Mon
cœur s’est emballé. Il était encore temps. De refuser. De
renoncer. D’échapper.
Je
suis descendue.
‒ Tu
me suis ?
À
bonne distance. Qu’ils n’aillent pas s’imaginer, les autres,
s’ils nous apercevaient, qu’il y avait entre nous ce qu’il n’y
avait pas.
Une
petite rue à droite. Une autre. Encore une autre. Devant la porte de
l’hôtel, j’ai marqué un long temps d’arrêt. Et je me suis
bravement lancée.
L’escalier,
je l’ai monté à ses côtés.
En
tenant à préciser.
‒ Une
seule fois, Ugo, hein !
‒ Mais
oui !
J’ai
insisté.
‒ Sûr ?
‒ Mais
oui !
Dans
la chambre, il m’a doucement, mais fermement, prise par le bras.
Fait agenouiller sur le seul fauteuil de la chambre, face à un grand
miroir.
‒ Que
tu puisses contempler, tout du long, ton petit minois.
Et
il a parlé. De derrière moi. Longtemps. D’une voix douce, suave,
la main tranquillement posée au creux de mes reins, à la lisière
de ma jupe.
Ce
qu’il disait ? Je n’en savais rien. Je n’écoutais pas. Je
n’entendais pas. C’était un flot ininterrompu de mots au velouté
desquels je m’abandonnais sans la moindre résistance. Sans
chercher à en pénétrer le sens. Ils me couraient le long de
l’échine en ondes incessantes, s’y déployaient, m’escaladaient
la nuque, redescendaient, se ramifiaient, me pétrissaient d’un
étrange bien-être.
Le
silence, d’un coup.
‒ Non ?
Il
attendait une réponse. Que j’ai donnée à tout hasard.
‒ Si !
‒ Alors…
Et
ma jupe m’est tombée aux genoux.
Et
sa main s’est posée sur mes fesses. Se les est longuement
appropriées.
(à
suivre)
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