jeudi 13 février 2020

Agathe et la fessée (5)


‒ Tu sais quoi ? Ben, elle est venue. Si ! Oui. Tout à l’heure. Elle a sonné. Comme ça. Sans raison. Juste pour parler. « Parce qu’entre proches voisines, ce serait quand même dommage qu’on n’essaie pas de faire plus ample connaissance, non ? » J’étais bien d’accord. Tu parles si j’étais d’accord !
‒ Et alors ?
‒ Ben, on a discuté. Ça, pour discuter, on a discuté. Un peu de tout au début. De son métier à lui. Il est agent d’assurance. À son compte. De la chance qu’elle a qu’il ramène suffisamment d’argent pour qu’elle ne soit pas obligée de travailler. « Je sais que c’est pas très bien vu, au jour d’aujourd’hui, de se faire entretenir. Même par son mari. Mais bon, je m’en fiche un peu de ce que les gens pensent. Pour pas dire complètement. » Ce qu’elle voit, c’est que ça lui laisse du temps. Pour faire ce qu’elle a envie. Pour se livrer, entre autres, à sa passion.
‒ Et c’est quoi, sa passion ?
‒ Tu penses bien que je lui ai demandé. Elle écrit. Elle rêve d’être publiée.
‒ Ah ! Et elle écrit quoi ?
‒ Un roman. Un truc au long cours. Plus de cinq cents pages, ça devrait faire au final. Elle me montrera, elle m’a dit. Oh, mais de plein d’autres trucs encore on a parlé. Figure-toi qu’elle aussi, elle a vécu à Angers. Quatre ans. À peu près à la même époque que moi. On aurait pu se rencontrer là-bas. C’est trop marrant, non ? On y refera peut-être un saut ensemble un de ces jours, du coup. Enfin bref, près de trois heures on y a passé. Et c’est à la fin, juste au moment de partir… « Oh, là, vous avez vu l’heure ? Faut vraiment que j’y aille ! » qu’elle m’a demandé comme ça, de but en blanc, s’ils faisaient pas trop de bruit. Je m’attendais vraiment pas à ça. J’ai été prise de court. Je me suis troublée. J’ai rougi comme une imbécile. J’ai balbutié que non. Non. Pas du tout. Mais elle n’a pas été dupe. « Si, hein ! On entend tout d’un appartement à l’autre dans ces immeubles. Donc vous avez entendu. Vous entendez. » Elle n’a pas précisé quoi. Mais on savait aussi bien l’une que l’autre de quoi il s’agissait. « Je voudrais pas que vous le jugiez mal, Lucas… » Elle s’est rassise. Du bout des fesses. Sur le bord du canapé. « Non, parce que vous allez me trouver complètement contradictoire mais, si écrire est ma grande passion, je suis aussi d’une paresse phénoménale. J’ai toujours dix mille prétextes à ma disposition pour retarder le moment de me mettre au travail. C’est pour ça : à ma demande, on a passé un accord, tous les deux, Lucas et moi. Si, quand il rentre le soir, je suis dans l’incapacité de lui donner au moins deux pages à lire, et des pages qui tiennent la route, il me punit. Pour mon bien. Sinon, il sera jamais fini, ce bouquin. Alors que c’est la chose que je souhaite le plus au monde. » Elle a jeté un coup d’œil à sa montre, s’est levée. Pour de bon, cette fois. « Et là, ce soir, je vais y attraper, c’est couru. Parce que, aujourd’hui, j’ai pas écrit une seule ligne. » J’ai culpabilisé. Oh, mais c’était de ma faute, avec mon bavardage. J’étais désolée.
Je l’ai attirée contre moi.
‒ Tu parles que t’étais désolée ! Je suis bien tranquille qu’à la perspective de l’entendre, ce soir, gémir et crier sous les claquées, tu devais mouiller allègrement ta petite culotte.
‒ Je
‒ Non ?
‒ Mais pourquoi je suis comme ça ?
J’ai glissé une main dans son corsage, enrobé un sein dont la pointe s’est instantanément dressée.
‒ Attends, Maxime, attends ! Tout à l’heure. Quand

Elle a passé la soirée aux aguets, sursautant au moindre bruit en provenance d’à côté.
Et elle a brusquement bondi.
‒ Ça y est, Maxime ! Écoute ! Ça y est ! T’entends ?
J’entendais, oui. J’entendais qu’il lui reprochait de n’avoir pas écrit la moindre ligne. « J’ai pas eu le temps. » « Tu te fous de moi ? T’as que ça à faire. T’as encore passé ton après-midi devant Netflix, je suis sûr. » « Non. J’ai un peu discuté avec la voisine. » « Mais pas toute la journée, j’imagine ! Bon, mais trêve de discussions. Tu sais ce qui t’attend » Elle n’a pas protesté. Il y a eu, presque aussitôt, un bruit de claques, en rafale, rapprochées, crépitantes, qui lui ont arraché une longue plainte ininterrompue. Et Agathe a voulu.
‒ Viens, Maxime, viens !
Passionnément. Éperdument. Quand elle a chanté son plaisir, la fessée, à côté, n’était pas encore terminée.

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