Émilie a éclaté de rire.
‒ T’as
de ces questions, toi !
‒ Te
moque pas ! Dis-moi !
‒ Non,
mais attends ! Tu jouis comme une petite folle. Tu brames à en
faire trembler les murs. Et tu me demandes si on s’est rendu
compte ? Mais faudrait être sourd. Et aveugle.
‒ On
aurait pu croire…
‒ Quoi ?
Que c’était des cris de douleur ? Mais bien sûr !
Prends-les bien pour des lapins de trois semaines ! Quand on
jouit, on jouit. Et ça ressemble à rien d’autre. Sans compter que
t’avais une façon de gigoter de la croupe qui ne laissait planer
absolument aucun doute.
‒ Ils
ont dû…
‒ Ah,
ben ça ! Tu penses bien que tout le monde s’est régalé.
Surtout les mecs. Les mecs, ce sera toujours des mecs.
‒ Ils
te l’ont dit ?
‒ Pas
directement, non. Évidemment.
Mais j’ai eu des échos par Bérengère et Océane.
‒ Et
Étienne ? Il a réagi comment ?
‒ Il
m’a rien dit. Et il me dira rien. Lui, de toute façon, pour savoir
ce qu’il pense. Mais il donnait pas vraiment l’impression de
s’ennuyer. D’autant qu’il était à la manœuvre.
‒ Quand
j’y pense… Non, mais
j’ai honte. Comment j’ai honte !
‒ Et
t’adores ça.
‒ Hein ?
Oh, non, Émilie, non !
‒ Tu
peux le dire, tu sais ! Ça me choque pas.
‒ Oui,
mais quand même, non !
‒ T’en
es si sûre que ça ?
‒ Oui.
‒ C’est
un oui qui manque sacrément de conviction…
‒ Je
t’assure…
‒ Dis-moi,
Lucile, qu’est-ce que
tu vas faire
aujourd’hui ?
‒ Aujourd’hui ?
Je sais pas.
‒ Moi,
si ! Tu vas aller trouver, tour à tour, Océane
et Bérengère. Pour leur reposer exactement la même question que
celle que tu viens de me poser. Pour avoir un autre son de cloche ?
Non. Tu la connais la
réponse. Tu sais très exactement ce qu’il en est. Non. Pour la
réactiver ta honte. Et pour avoir honte d’aimer avoir honte.
‒ Tu…
‒ Ça
te déstabilise complètement. C’est normal. C’est tout nouveau.
C’est quelque
chose que tu n’avais encore jamais éprouvé. Qui est forcément un
peu effrayant au début, mais quand tu te seras habituée, quand
tu auras accepté que ce soit en toi, tout
t’apparaîtra d’une façon complètement différente, tu verras.
‒ Tu
crois ?
‒ Non.
Je suis sûre. Ferme les yeux !
‒ Pourquoi ?
‒ Allez,
ferme les yeux, j’te dis ! Et imagine ! Il y a un café,
à côté de la fac, où j’ai mes habitudes. Où
il n’y a que des étudiants. Ou pratiquement. Je t’y emmène. On
est une dizaine, là, à la même table. Je te présente. « C’est
Lucile. Une amie. Elle vient de se prendre une de ces fessées ! »
Tous les regards convergent vers toi. Il y a des sourires. Ironiques.
Des rires. Des filles chuchotent aux oreilles les unes des autres.
J’enfonce le clou.
« Non, parce que j’aime pas qu’on me prenne pour une
imbécile. » Tu es morte de honte, toi, la femme mûre, devant
tous ces petits jeunes qui ricanent. Qui se moquent. Et qui salivent.
« On pourrait pas voir le résultat ? » Imagine !
Tu ressentirais quoi ?
‒ Je…
‒ Oui ?
‒ C’est
horrible. Effrayant.
‒ Et
tellement jouissif. Non ?
‒ Si !
‒ Alors
imagine le jour où ce sera pour de bon !
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