jeudi 28 décembre 2017

Mémoires d'une fesseuse (17)

– Hélène ? Viens ! Je t’attends.
– J’arrive.
Un petit quart d’heure plus tard, elle sonnait à ma porte.
– T’étais au boulot, non ?
– Oui, mais ça fait rien. Ça n’a pas d’importance. Je me débrouillerai.
– Déshabille-toi ! Déshabille-toi et, en même temps, raconte-moi ! Qu’est-ce t’as fait depuis la dernière fois qu’on s’est vues ? Je veux tout savoir. Qui t’as rencontré. À quoi t’as pensé. Tout.
Rencontré ? Non. Elle n’avait rencontré personne. Absolument personne. Ce n’était pourtant pas les occasions qui lui avaient manqué.
– Parce que c’est comme si j’irradiais quelque chose maintenant. Depuis… depuis que je te connais. On n’arrête pas de me solliciter. Sur le site, oui, mais pas seulement.
– Et tu ne donnes pas suite ?
– J’aime trop ça quand c’est toi. J’ai pas envie avec d’autres.
– Tu y as pensé ?
– À quoi ? À ce que tu me fouettais ? Bien sûr. Tous les jours, j’y pense.
– Et tu te l’es fait ?
– Non.
– Parce que ?
– Tu ne m’y avais pas autorisée.
– Je ne te l’avais pas interdit non plus.
Je l’ai laissée finir de se déshabiller. Nue. Entièrement nue. Je l’ai prise par le bras, fait pivoter sur elle-même.
C’était vrai. Pas la moindre marque. Pas la moindre trace de quoi que ce soit.
– Et du plaisir ? Tu t’en es donné ?
– Non plus, non. Pour moi, l’un ne va pas sans l’autre. Jamais.
– Tu vas me raconter ça. Ça m’intéresse.
– Oh, c’est assez banal, tu sais, mon histoire, finalement. À plein de filles ça arrive d’être déçues la première fois. Tu te dis que t’es mal tombée. Ce que les copines te confirment à qui mieux mieux. « Attends ! Tu verras ça, ce feu d’artifice, quand t’auras trouvé le bon. » T’en essaies un deuxième. Un troisième. D’autres encore. Toujours rien. Alors tu te dis que sûrement ça vient de toi. Que t’as quelque chose qui tourne pas rond. Et les mecs, tu finis par laisser tomber. Tu te demandes si ton truc à toi, après tout, ce serait pas les filles. Tu vas voir de ce côté-là. Sans plus de succès. Alors t’en prends ton parti. T’organises ta vie à côté de ça. En-dehors de ça. Des années et des années ça a duré. Jusqu’à ce que me tombe dessus une petite Aude de vingt ans à peine – j’en avais trente-deux –, sûre d’elle, déterminée, qui n’y est pas allée par quatre chemins. Elle avait envie de moi. Elle l’a dit. Elle l’a montré. Elle m’a emportée dans sa chambre quasiment comme un trophée. Sa chambre où ce fut comme d’habitude. Exactement comme d’habitude. Ce qu’elle a très mal pris. « Dis tout de suite que je sais pas y faire… » « Mais non, mais… » « Mais quoi ? Tu vas me payer ça, ma petite ! Je peux te dire que tu vas me payer ça ! » Et elle s’est mise aussi sec à me flanquer une vigoureuse et retentissante fessée. J’étais tellement estomaquée que je l’ai laissée faire. Sans rien dire. Sans me défendre. Curieusement, ce n’était pas désagréable du tout. C’était même assez agréable. De plus en plus agréable. Elle s’est brusquement interrompue et saisie d’une ceinture dont elle m’a énergiquement cinglée. Et là ! Alors là ! Pour la première fois, un orgasme. D’une intensité ! D’une puissance ! Quand ça a été fini, je me suis réfugiée, émerveillée, dans ses bras. Des bras qu’elle a refermés sur moi. Six mois on est restées ensemble. Six mois de folie. De jouissance éblouie. Et puis elle s’est évanouie dans la nature, un beau matin. Sans crier gare. Sa grande hantise, c’était de s’attacher. Jamais j’ai retrouvé ça. Jamais. Avec personne. Jusqu’à… Jusqu’à toi.
Je l’ai doucement prise par le bras, conduite jusqu’à la table de la cuisine où elle s’est, d’elle-même, inclinée. À l’équerre.
J’ai avancé la main. La lui ai glissée entre les cuisses.
– Tu es trempée. C’est de m’avoir raconté tout ça, hein !
Elle a fait signe que oui. Oui.
J’ai débouclé ma ceinture, l’ai fait claquer en l’air.
Elle a frissonné.
Je me suis penchée à son oreille.
– Mais on va d’abord attendre le retour de Marie-Clémence, ma colocataire. Qu’elle en profite, elle aussi.
Et je lui ai déposé la ceinture entre les omoplates.

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