Jose Jimenez Aranda Bajo los naranjos
Récit
d’Amanda
– Tu
sais quoi, Anne ? Je l’ai vu.
– Qui
ça ?
– Ben,
José, tiens ! Le type de l’autre soir au bal. Même qu’on a
passé l’après-midi ensemble.
– C’est
pas vrai ! Et alors ?
– Quand
je pense que, pendant des semaines et des semaines, j’ai pris des
tas d’itinéraires compliqués pour essayer de lui tomber dessus
sans jamais y arriver, et que là, sans le faire exprès, paf, on se
trouve nez à nez.
– Il
t’a reconnue ?
– Tu
parles s’il m’a reconnue ! Il m’ a foncé droit dessus,
oui ! Avec un grand sourire. « Ben alors ! Vous avez
filé comme une voleuse, l’autre soir ! Et moi qui me faisais
une telle fête de vous inviter à danser !»
– Ah,
ben d’accord ! Et qu’est-ce que tu lui as répondu ?
– Rien.
J’étais plantée là, à le regarder comme une imbécile, sans
pouvoir sortir le moindre mot. Il m’a prise doucement par le bras.
« On marche un peu ? Vous voulez bien ? » Tu
parles si je voulais bien ! On a pris un sentier sous les arbres
et il m’a dit des tas de choses. Qu’il m’avait remarquée tout
de suite, l’autre soir, dès que j’étais entrée dans la salle.
Que je lui avais fait un effet, mais un effet ! Que j’avais un
visage bouleversant. C’est le mot qu’il a employé. Bouleversant.
Non, mais tu te rends compte ? « Laisse-moi le regarder !
S’il te plaît ! » On s’est arrêtés. On s’est fait
face. Et alors ses yeux ! Oh, là là, ses yeux ! Ils
étaient tellement tout pleins de moi, ses yeux. De son envie de moi.
Et ses mains ! Il les a approchées. Il me les a délicatement
posées sur les tempes. Qu’il a caressées, du bout du pouce. Et
puis, après, les paupières, les joues, les lèvres. Ça me rendait
folle. Il me rendait folle.
– Déjà
que tu flashais complètement dessus avant.
– Il
s’est penché. Plus près. Encore plus près.
– Et
il t’a embrassée.
– Voilà,
oui. Et alors là, si tu savais !
– Non,
mais j’imagine… Bon, et je suppose que, vu que vous en creviez
d’envie autant l’un que l’autre, vous vous êtes trouvé un
petit coin tranquille et que vous vous êtes envoyés en l’air.
– Oui.
Enfin, non. Ça s’est pas vraiment passé comme ça.
– Ah…
– Non,
parce que… Bon, c’est vrai qu’au bout d’un moment, à force
de s’embrasser sans arrêt, tous les trois mètres, on a fini par
aller s’asseoir à l’ombre. Et là, forcément, il a commencé à
vouloir aller plus loin.
– Ce
qui n’était pas pour te déplaire, avoue !
– Surtout
que comment il sait y faire !
– Et
vous êtes pas allés jusqu’au bout ? Je comprends pas tout,
là…
– C’est
que… Je t’ai bien raconté…
– Quoi
donc ?
– Les
fessées.
– Ah !
Et t’en avais reçu une.
– Hier
soir.
– Oh,
zut !
– Je
serais morte de honte s’il s’était rendu compte. Et, vu comment
ça se passait, il s’en serait forcément rendu compte. Surtout que
j’ai le derrière dans un état ! Ç’aurait été des tas de
questions du coup. En plus !
– Comment
tu t’es tirée d’affaire ?
– En
lui disant que c’était pas prudent. Que quelqu’un pouvait passer
et nous surprendre.
– Il
a pas insisté ?
– Oh,
si ! Et pas qu’un peu ! Mais j’ai tenu bon. Et fini par
avoir gain de cause. À condition de lui jurer qu’on se reverrait
bientôt. Très bientôt. Quelque part où on serait tranquilles.
– Tu
l’as fait ?
– Évidemment !
D’autant qu’il est amoureux de moi.
– Oh,
tu crois ?
– Je
crois pas. Je suis sûre. Il y a des signes qui ne trompent pas. Je
suis heureuse. Si tu savais !
Récit
de José
– Tu sais que je l’ai revue, la petite caille du bal ?
– Ah, oui ? Et alors ? C’était quoi la raison
pour qu'elle disparaisse, comme ça, au bout d’à peine une heure ?
– Je lui ai pas demandé.
– Je vois… Vous aviez mieux à faire.
– Oui. Enfin, disons que j’ai posé des jalons. Parce que ça
tombait plutôt mal.
– Mal ?
– J’avais passé la nuit avec Inès. Et tu la connais. Faut
pas lui en promettre à elle.
– Ah, ça ! Elle te met carrément sur les rotules, oui.
Je suis bien placé pour le savoir.
– Sauf que des petits lots comme Amanda, c’est pas tous les
jours que t’as l’occasion. Faudrait être idiot pour la laisser
passer.
– Et t’as trop présumé de tes forces.
– Je me suis pas posé la question en fait. J’ai foncé.
– Pour te prendre le mur en pleine tronche.
– C’est la première fois que ça m’arrive. En tout cas à
ce point-là. Au début je m’affolais pas trop. Bien roulée comme
elle était. Et une fille que j’avais encore jamais eue en plus. Ça
allait forcément finir par venir. Oui, ben t’as qu’à y croire !
Il y avait strictement rien à faire. J’ai eu beau farfouiller tant
et plus dans son corsage, lui mettre les nénés à l’air. Des
nénés bandants que le diable en plus. Tout juste comme je les aime.
Pas trop gros. En pente douce. Avec de larges aréoles brunes. Le
rêve, quoi ! Eh, bien rien ! Pas le plus petit début de
commencement de bandaison. Mais c’était pas possible, ça, merde !
– Et plus tu te concentrais dessus, plus tu voulais que ça
vienne et moins ça le faisait. Classique.
– Peut-être que si elle me l’avait prise en main… mais la
première fois, c’est rare qu’une fille, elle ose. Et puis même…
T’imagines que je lui sois resté tout flasque entre les doigts ?
Oh, la honte !
– Faut reconnaître que c’est le genre de situation…
– Ça m’obligeait à des tas de contorsions en plus. Pour
qu’elle se colle pas à moi. Qu’elle sente pas qu’il y avait
peau de zob, c’est le cas de le dire.
– Et tu t’en es sorti comment ?
– C’était bien là tout le problème. Comment m’en
sortir ? Sans la froisser. Et sans passer pour une bille. Je
voyais pas vraiment de solution. Alors je continuais. La fuite en
avant. Je me suis faufilé sous sa robe. J’ai entrepris une lente
ascension de sa cuisse. En me disant, sans y croire vraiment, qu’avec
un peu de chance, quand j’arriverais là-haut, je retrouverais
peut-être enfin tous mes moyens. Elle m’a pas laissé terminer
l’escalade. Elle m’a arrêté. Repoussé. Soi-disant qu’elle
avait peur qu’on nous surprenne. Tu parles ! Il passe jamais
personne là-bas.
– Et c’était quoi la vraie raison alors ?
– Je suppose qu’elle voulait pas que je la prenne pour une
fille facile. Qui couche au bout d’une demi-heure. Ça
m’arrangeait, moi ! Pour une fois, ce que ça pouvait
m’arranger ! Ce qui m’a pas empêché de jouer les désolés.
De me montrer insistant. Un peu. Pas trop. J’avais vraiment pas
l’intention d’obtenir gain de cause. C’était pas le jour.
– Va falloir que t’assumes maintenant.
– Que j’assume ? Que j’assume quoi ?
– Quand une nana demande à un mec de pas coucher, ou du moins
pas tout de suite, et qu’il accepte, il y a neuf chances sur dix
qu’elle en tombe amoureuse. Alors, après…
Excellent
RépondreSupprimerMerci. À bientôt en des lieux que nous fréquentons aussi assidûment l'un que l'autre.
RépondreSupprimerUne question me vient en lisant ce texte drôle et... bien troussé : qui avait fessé Amanda ?
RépondreSupprimerC'est une question qui reste en suspens.Pour Anne et Amanda la réponse va de soi. Mais le lecteur, quant à lui, ne peut qu'imaginer. En fonction de ses attentes ou de son vécu. Ce qui n'est pas forcément plus mal.
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