mardi 12 mai 2015

Fessées croisées (27)

30 juillet 2012


– Alors ? Charles hier soir ?
– Ben, rien ! Rien… Pas la moindre allusion… Comme s’il s’était jamais rien passé… Qu’il s’était pas rendu compte que… Ce qu’il peut m’agacer quand il est comme ça… Que t’arrives pas à savoir ce qu’il pense… Ni ce qu’il sait ou ce qu’il sait pas… Ce qu’il croit ou ce qu’il croit pas… Je sais pas sur quel pied danser du coup… Il y a des moments j’ai l’impression qu’il l’a gobée mon histoire… Et puis d’autres qu’il fait semblant… Qu’il attend son heure pour me tomber dessus…
– Faut reconnaître qu’il y a quand même de quoi se poser des questions… Que n’importe qui, à sa place, s’en poserait… Bon, mais enfin, si Mélanie se débrouille bien – et, de ce côté-là, je lui fais entièrement confiance – dès cet après-midi il sera pleinement rassuré…
– J’espère… Parce qu’il me manque Jaufret… Tu peux pas savoir ce qu’il me manque… Et si je peux pas le revoir rapidement, je sens que je vais finir par faire une connerie…
– À ce point-là ?
– Tu peux pas savoir…
– Un peu quand même, si !
– Ah, oui, c’est vrai… Enzo…
– Enzo, oui… Je l’ai dans la peau d’une force !
– Dans quelle galère on est allées se fourrer toutes les deux…
– Ah, ça, tu peux le dire…



11 heures


Mélanie a enjambé le rebord de la baignoire… Fermé les yeux…
– Ah, ça fait du bien…
– Tu les as vus ?
– J’ai même déjeuné avec… Comme hier…
– Et alors ?
– Ben alors comment je les ai manœuvrés ! Mais ça ! Des mecs, c’est pas bien compliqué d’en faire ce que tu veux… Qu’est-ce qu’ils sont benêts au fond… Et tous, hein ! C’est jouissif dans un sens, mais dans l’autre qu’est-ce que c’est frustrant… T’aimerais quand même qu’il y ait du répondant… Un minimum de résistance…
– Tu leur as raconté quoi ?
– Ben qu’en fait j’en savais rien du tout de ce que vous faisiez l’après-midi… Parce qu’on se séparait… Moi, j’allais de mon côté retrouver un copain… Et vous, vous alliez du vôtre… Faire quoi ? Je savais ? Ah, ben ça ! Je vous surveillais pas, mais de la bronzette sûrement… Qu’est-ce que vous auriez bien pu faire d’autre ? Et elle était où cette plage ? Je savais ? Ben oui, je savais, oui… Parce qu’une fois – une seule – j’y étais allée avec vous… Et il y avait du monde sur cette plage ? Personne, non… Vous étiez toutes seules… Bon, mais c’était où ? Alors ça, tu penses bien que je me suis pas fait prier pour le leur expliquer… Et à tous les coups vous allez les avoir planqués au-dessus, cet après-midi, à vous épier… Vous aurez plus qu’à…
– Tu crois vraiment qu’il faut que je lui donne la fessée à Christine ?
– Oh, ben oui, attends ! Oui… On en a parlé dix mille fois hier… Il aura toujours le soupçon que ça ait pu être un mec sinon… Il voudra en avoir le cœur net… Alors si vous voulez avoir des chances qu’il vous foute la paix…
– Je sais, oui, mais bon…
– T’as pas l’air vraiment motivée…
– C’est pas ça, non…
– Ben, c’est quoi alors…
– C’est que j’ai peur…
– Peur ? Mais peur de quoi ?
– De moi… De trop aimer ça, la lui donner la fessée à Christine…



11 heures 45


– Allô, oui ?
– C’est moi, Enzo…
– Enzo ? Mais qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce qui se passe ?
– Rien… J’avais envie de te parler… D’entendre ta voix…
– C’est de la folie ! Je t’avais dit de pas appeler… Tu te rends compte si j’avais pas été toute seule ?
– Mais tu l’es… J’ai envie de toi… De te toucher… De te serrer dans mes bras… J’en peux plus…
– Moi non plus, Enzo… Moi non plus…
– Viens alors ! Cet après-midi… Je t’attends…
– Je peux pas… Tu sais bien…
– Mais quand alors ? Quand ?
– Bientôt… Je te dirai… On vient… Je raccroche… Ne rappelle pas… Je t’aime, Enzo…

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