lundi 19 janvier 2015

Fessées croisées (10)

14 heures


– Je sais pas toi, mais moi, Gilles, pas un mot sur ces deux fessées… Rien…
– Charles non plus…
– Ben, tiens ! Motus et bouche cousue, tu parles ! Faudrait pas qu’une fois au courant il nous toque à l’idée de rester là l’après-midi… Histoire de garder un œil sur ce qui se passe… Et surtout sur eux… Ils veulent avoir les coudées franches…
– Et pouvoir profiter tant et plus du spectacle… Sans nous avoir par les pieds… Ils ont regardé par la fenêtre, tu crois ?
– Tu penses qu’ils se sont gênés ! Et que ça a dû y aller les commentaires après… Ils se sont toujours entendus comme larrons en foire tous les deux…
– Et si Jacques – ou Geneviève – les avait vus ?
– Ils étaient bien trop occupés avec Mélanie… Et puis, quand il le faut, ils savent être très discrets nos petits maris…
– Bon, ben on fait quoi, nous, du coup alors ? On reste là ? On laisse tomber Toulon ?
– Oui, oh, c’est pas couru qu’elle s’en reprenne une cet après-midi… Ça va pas être tous les jours non plus…
– Oui… Et puis n’importe comment…
– N’importe comment s’ils peuvent se rincer l’œil tout leur saoul, à l’arrivée on va en profiter nous deux… C’est ça que tu veux dire ?
– C’est un peu ça, oui… Et puis je sais pas toi, mais moi, c’est une sacrée bouffée d’oxygène Toulon… Et j’ai pas franchement envie de m’en priver…
– Bon, ben allez, en route alors…

Ils nous attendaient sur le ponton… Comme prévu… On a embarqué… On s’est installées dans les transats… Et on s’est laissé bercer… Par les vagues… Par la brise… Par leurs voix chaudes et ensoleillées… J’ai somnolé… Je me suis endormie…

Au réveil, on était en train d’accoster…
– On est où ?
C’était une sorte de crique…
– On sera tranquilles ici… Il vient jamais personne…
On s’est étendus tous les quatre sur le sable… On a parlé de tout… De rien… Et puis ils ont voulu aller se baigner…
– Vous venez ?
– On n’a pas nos maillots…
– Oui, ben alors ça, ici, il y en a vraiment pas besoin…
– Oui, mais quand même… Quand même… Non…
– Comme vous voulez… Mais vous avez tort… Comment elle doit être bonne… Avec le temps qu’il fait…
Ils ont quitté leurs vêtements… Tous leurs vêtements… Et ils ont parcouru, complètement nus, les trois ou quatre mètres qui les séparaient de la mer… On les a longuement regardés nager… S’éclabousser… Se poursuivre…
– Qu’est-ce qu’ils sont beaux n’empêche…
– Ah, ça !
J’ai soupiré…
– Qu’est-ce qu’on peut être compliquées des fois quand même ! Parce que… comment il me décevrait Enzo s’il se montrait entreprenant… Mais en même temps il y a quelque chose, tout au fond de moi, qui lui en veut de pas l’être…
– On est surtout sacrément connes, moi, j’trouve ! Parce qu’attends! Des mecs comme ça c’est pas tous les jours que l’occasion se présente… Et on est là à barboter dans nos scupules… Tu crois qu’ils en auraient autant, eux, nos bonshommes, si une fille leur tombait toute rôtie dans le bec ? D’ailleurs…
– D’ailleurs quoi ?
– Je jurerais pas mes grands dieux que Charles ait pas, à l’occasion, donné quelques coups de canif dans le contrat…
– Pas Gilles…
– T’en es si sûre que ça ?
– À cent pour cent, non, mais…
– Tu vois bien… Non… L’essentiel, c’est de faire ça proprement… Discrètement… De pas faire de mal à l’autre… Et Charles il peut bien s’en taper une autre de temps en temps du moment que ça restera… Tiens, les v’là… Les v’là qui reviennent nos Apollon…



22 heures


Je suis allée jeter un œil sur l’ordi de Gilles… C’est pas ce que j’ai fait de mieux, je sais, mais elle m’avait mis le doute Christine tout à l’heure… Rien dans Outlook… Rien de significatif non plus dans ses documents… Ni ailleurs… J’ai eu beau farfouiller à droite et à gauche… Non… Je crois vraiment pas qu’il ait quelqu’un… Mais alors, par contre, ce que j’ai trouvé dans les téléchargements…

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