jeudi 31 mai 2018

Quinze ans après (8)

Il y avait Andrea. Que j’avais revue. Deux fois. À qui j’avais, chaque fois, administré une retentissante fessée. Dont j’avais, comme convenu, enregistré les cris et les supplications. Qui en était absolument ravie.
– Avec le bruit des claques par là-dessus, ça fait un effet ! Tous les soirs, je l’écoute. Dix fois de suite. Je m’en lasse pas. C’est un peu comme si on était ensemble. Comme si on recommençait.
– Et tu te caresses.
– Ben oui, ça, forcément !
J’en avais conservé une copie.
– Ça t’ennuie pas ?
– Oh, non ! Non ! Bien sûr que non. Tu l’écoutes ?
– Quelquefois, oui.
– J’aime bien que tu le fasses. J’adore…
– D’ailleurs, à ce propos, ça t’ennuierait que je la fasse écouter à quelqu’un ? Sans lui dire qui tu es, évidemment.
– À qui ?
– Un ami. Un passionné de fessée. Depuis toujours.
– Tu peux. Bien sûr que tu peux, mais à une condition, c’est que tu me racontes. Ce qu’il a dit. Ce qu’il a pensé. Tout.

Il y avait aussi Eugénie.
Qui maintenant voulait qu’on se voie tous les jours. Qui ne me parlait plus que de mon amoureux supposé. Qui voulait tout savoir de lui. Absolument tout. Comment on s’était rencontrés. Comment il me faisait l’amour. Quand il allait enfin revenir.
– C’est long !
– Il fait pas toujours ce qu’il veut.
Coxan se frottait les mains.
– On la tient. Alors faisons-la mariner encore un peu. Je vais y passer une semaine de plus au Canada, mais alors à mon retour…

Et puis il y a eu Camille. Qui m’a contactée sans grande conviction.
– Parce que moi, les fessées…
– C’est pas ton truc.
– Non. Enfin, si ! C’est un peu compliqué.
– Eh ben, explique !
– Ce dont j’ai besoin, c’est d’obéir. Sans discuter. Sans réfléchir. Quoi qu’on veuille. Quoi qu’on me demande. Aussi difficile que ce soit. Surtout, si c’est difficile. Faut qu’on m’impose. Faut qu’on s’impose. Alors, bien sûr, les fessées, ça peut en faire partie. Ça doit en faire partie. Mais faut que ça aille au-delà. Bien au-delà.
– En somme, si je comprends bien, ce à quoi tu aspires, c’est être sous la coupe de quelqu’un, sous son emprise, vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
– C’est exactement ça.
– Oui, ben c’est à pas toi de décider.
Il y a eu un long blanc au téléphone. Et puis :
– Oui, vous avez raison. Entièrement raison.
– Tu es où ? Tu habites où ?
– À Angoulême.
– Alors tu te débrouilles comme tu veux, mais demain, à quinze heures, tu seras devant la fontaine Saint-Michel à Paris.
– J’y serai.

– Et tu vas en faire quoi, sans indiscrétion ?
– Je sais pas. J’aviserai sur place. Quand je l’aurai vue. Mais tiens-toi prêt, toi aussi. Parce qu’en voilà une avec qui, à mon avis, on va pouvoir brûler les étapes.

lundi 28 mai 2018

L'intrus


Alexandre Chaponnier. La soubrette

– Oh, pardon ! Je suis confus. J’ignorais…
– Voulez-vous bien vous retirer, petit drôle !
– En fait, je cherche…
– Retirez-vous, vous dis-je !

– Il est reparti ?
– Il est reparti, oui, mais il ne s’est guère empressé de le faire.
– C’était le comte de Coulas, n’est-ce pas ?
– Non. Son fils. Qui savait ce qu’il faisait, allez ! Il n’est pas entré ici par hasard.
– Crois-tu, Jeanne ?
– Assurément. Il fréquente assidûment le vicomte de Santry. Qui lui aura probablement confié, sous le sceau du secret, qu’il enjolive parfois le séant de Madame d’un rouge flamboyant du plus bel effet. Il aura voulu se rendre compte par lui-même et aura profité du moment où je donne ses soins à Madame pour feindre s’être trompé de porte…
– Ce jeune Coulas est un fripon.
– Qui s’est effrontément repu, pendant le peu de temps dont il a disposé, du fessier généreusement exposé de Madame.
– Et Santry un bavard.
– Les hommes ne savent pas tenir leur langue. Surtout s’agissant de nous, les femmes.
– Mais ses claquées sont si voluptueuses…
– Que Madame ne saurait y renoncer pour rien au monde.
– Ni à elles ni à ce qui s’ensuit.
– Il m’avait semblé, en effet…
– Dis-moi, Jeanne, ce petit Coulas est vraiment très joli garçon.
– Il fait fondre bien des cœurs.
– Pourquoi l’avoir si vite chassé ?
– Sa présence offusquait la pudeur de Madame.
– Peut-être reviendra-t-il ?
– Ce serait faire preuve d’une insistance malséante.
– À moins qu’on ne l’y encourage…
– Si tel est le souhait de Madame…
– Tu sais être diplomate, Jeanne. Et efficace. Tu me l’as, à maintes reprises, prouvé.
– Madame sait qu’elle peut compter sur moi. Dans quelque circonstance que ce soit.
– Alors fais en sorte que ses mains viennent prochainement s’abattre sur mon séant. Implacables et vigoureuses. Mais aussi douces et sensuelles.
– Cela sera.
– Et fais aussi en sorte que je paraisse ne m’avouer vaincue qu’après longue résistance acharnée.
– Madame peut me faire confiance.
– Merci, Jeanne.

samedi 26 mai 2018

Les fantasmes de Lucie (1)


Ça vit un fantasme. Ça naît. Ça prend son essor. Ça comble son ou sa « propriétaire ». Trois jours. Ou trois semaines. Ou trois mois. Et puis ça s’étiole. Ça s’épuise. Ça disparaît. C’est remplacé par d’autres qui, à leur tour…
Il y a ainsi une foule de fantasmes dont on perd jusqu’au souvenir de les avoir un jour caressés avec passion. D’en avoir fait, pendant un certain temps, un usage quasi quotidien. Et c’est dommage. Parce qu’ils nous parlent de nous, nos fantasmes. De ce qu’on est, même si on ne le voudrait pas toujours. De ce qu’on a été. De ce qu’on se refuse parfois à être pleinement. De ce qu’on redeviendra peut-être. Ils sont, pour ainsi dire, notre patrimoine personnel. Un patrimoine qu’il est de notre devoir de préserver. Au même titre que les autres. C’est pourquoi j’ai décidé de tenir dorénavant, aussi méthodiquement que possible, le journal de mes fantasmes.

Dans la plupart des histoires que je me raconte, on me corrige, on me fesse, on me fouette à qui mieux mieux. On me fait subir mille avanies. On me soumet à des interrogatoires humiliants. On fait preuve d’une imagination débordante pour m’amener, vaincue et repentante, à la raison. Soyons clairs : ce sont des comportements qui, dans le monde réel, sont parfaitement inacceptables. Et condamnables. Mais le fantasme nous projette dans une autre dimension. Et si je m’abandonne d’aussi bonne grâce, et en y prenant un incontestable plaisir, à ce qu’on y exige de moi, c’est qu’en réalité, c’est moi qui mène le jeu. Mes « bourreaux » ne m’imposent que ce que je décide qu’ils m’imposent. Que ce qui me convient à moi. C’est aussi que les coups, aussi violents soient-ils, ne sont que virtuels. Qu’ils ne laisseront pas la moindre trace. Ni sur le corps ni sur l’esprit.

Deux « filons » alimentent principalement mes « imaginations »
D’abord, bien évidemment, la vie quotidienne. Il peut suffire d’une phrase anodine, d’un regard croisé par hasard, dans la rue ou ailleurs, pour que la machine se mette en marche et m’entraîne aussitôt sur des routes improbables.
Souvent plus consistants, en tout cas plus durables, sont celles qui mettent en scène des personnes avec lesquelles je suis amenée à être fréquemment en contact. Tel voisin, par exemple, avec qui j’échange de temps à autre quelques mots par-dessus la haie, ignorera toujours qu’il lui arrive régulièrement de m’administrer de vigoureuses et retentissantes fessées, déculottée, de ses grosses mains calleuses, parce qu’il me surprend à fouiller, chez lui, dans ses affaires. Et j’y retourne. C’est plus fort que moi.
Cette autre voisine, au bout de la rue, me découvre en pleine action avec le Jérémie dont elle est follement éprise. Et me fait passer, chaque fois, un très mauvais quart d’heure.
Et le boulot ! C’est une mine, le boulot. À de très rares exceptions près, j’ai eu affaire, sous un prétexte ou sous un autre, à tous mes collègues de travail. Hommes et femmes. Et, bien sûr, aux chefs.
Sans oublier les commerçants, livreurs et autres professionnels de toute sorte avec lesquels je suis régulièrement en contact. On voit que je ne manque pas de matière.

Le deuxième filon, dans lequel je puise abondamment, ce sont mes lectures. Il surgit parfois quelque chose d’inattendu, au détour d’une page, que j’éprouve l’impérieux besoin de m’approprier. De toute urgence. Et puis il y a l’Histoire. Dont j’ai toujours été férue. L’Histoire qui m’ouvre tant de portes. Il y a tant d’événements auxquels je peux participer. De personnages auxquels je peux m’identifier. D’époques au cœur desquelles je peux me projeter. La Rome antique, l’Inquisition, la Révolution française sont, pour des raisons que l’on comprendra aisément, mes périodes de prédilection. Auxquelles je ne cesse de revenir encore et encore.

Bon, mais il est temps d’entrer dans le vif du sujet.

jeudi 24 mai 2018

Quinze ans après (7)

Avec Eugénie, c’était une autre paire de manches.
– On arrivera à rien, je t’assure, Coxan. Parce que pour parler, ça, elle parle… Elle fait même que ça. Quant au reste : même aller boire un café quelque part toutes les deux, pas question. Elle se défile systématiquement. C’est d’un décourageant ! Et t’as vraiment l’impression de perdre ton temps à force.
– Oui, mais si, au final, ça débouche sur ce qu’on espère, ce n’en sera que plus savoureux.
– Alors ça ! J’imagine franchement pas cette nana se laissant filmer en train de recevoir la fessée. Faudrait déjà qu’elle accepte qu’on lui en flanque une. Et c’est loin d’être gagné.
– C’est quoi, le problème, à ton avis ? Le mari ? Elle a peur qu’il s’aperçoive de quelque chose ?
– Il y a peut-être un peu de ça, oui, mais ce que je crois surtout, c’est que c’est la fantasmeuse de base. Et qu’elle sautera jamais le pas. Qu’elle en a jamais eu vraiment l’intention.
– Et c’est quoi ses fantasmes ?
– SON fantasme, tu veux dire ! Il y en a qu’un. Auquel elle revient toujours. Obsessionnellement. Elle couche avec le mari d’une autre. Qui découvre le pot-aux-roses et qui se venge en lui flanquant une mémorable fessée.
– Eh, bien, invente-toi un petit copain ! Raconte-lui que tu vas te marier avec. Que c’est imminent. Et je te parie qu’avant quinze jours tu l’auras rencontrée. Qu’elle fera des pieds et des mains pour que tu le lui présentes. Ce que tu feras…
– Mais…
– Mais c’est un rôle que je jouerai à la perfection, tu verras… Et avant trois mois on est arrivés à nos fins.

Il n’avait pas tort. J’ai senti s’éveiller aussitôt chez elle un intérêt manifeste pour cet amoureux d’invention.
– Ah, oui ! Mais tu m’en as jamais parlé de ce type.
– Ça s’est pas trouvé.
– Il fait quoi ?
– Ingénieur.
– Et alors, comme ça, vous allez vous marier…
– On en parle…
Le poisson était ferré.
Coxan a poussé à la roue.
– Bats le fer tant qu’il est chaud ! Rencontre-la !
Elle ne s’y est pas refusée. Et on a passé l’après-midi ensemble. À parler de lui, de lui et encore de lui.
On s’est revues le surlendemain. Et encore la semaine suivante.
– Plus je t’entends en parler et plus je me dis qu’il est en or, ce type.
– Je crois en effet que j’ai beaucoup de chance.
Elle a fini par se lancer.
– Tu sais ce qu’on pourrait ? C’est que tu me le présentes. Ça donne envie à force de t’entendre en parler. Et puis tu sais quoi ? J’ai une sorte de sixième sens. Quand je vois deux personnes ensemble, tout de suite je sais si elles sont faites l’une pour l’autre, si c’est appelé à durer. Je te dirai…

Coxan était aux anges.
– Et voilà ! Je te l’avais dit. Je te l’avais pas dit ? C’est quasiment dans la poche. Bon, mais on va quand même la faire mariner un peu. Qu’elle ait le temps d’en rêver. Dis-lui que je suis en mission quelque part. Pour une quinzaine de jours. Au Cambodge. Ou au Canada. N’importe où. On s’en fout.

lundi 21 mai 2018

Gertrude, cuisinière fesseuse

Dessin de Louis Malteste


Elle a reposé sa tasse, froncé les sourcils.
– Il y a des gens qui se disputent quelque part, on dirait…
– En bas, oui.
– Des femmes. Ce sont des voix de femmes.
– L’entente n’est en effet pas toujours des plus harmonieuses au sein de mon personnel féminin.
– Et vous n’intervenez pas ?
– Rarement. Je laisse le plus souvent Gertrude, ma cuisinière, régler les conflits qui surviennent. Elle le fait de façon très efficace et, il faut bien l’avouer, parfois fort plaisante.
– Comment cela ?
– Le ton monte. Venez ! Descendons ! Vous verrez par vous-même.

– Elle a recommencé, Madame ! Elle a recommencé. Elle peut pas s’empêcher. Alors…
– Je vois, Gertrude, je vois…
– Il y a que ça qu’elle comprend. C’est la seule solution avec elle. Ah, garce, je vais te le rougir ton pétrousquin, moi, tu vas voir ! Même que tu vas pas pouvoir t’asseoir d’un moment !
– S’il te plaît, Gertrude !
– Quoi ? C’est pas la première fois que Madame te voit les fesses à l’air. Quant à l’autre Madame, elle est sûrement pas née de la dernière pluie non plus.
– Ça fait bien trop honte devant elles.
– Parce que voler dans le garde-manger et dans les réserves, ça, par contre, ça te fait pas honte. Accuser effrontément les autres de ton forfait non plus…
– Je le ferai plus.
– Ah, non, tu le feras plus, non. Parce que je vais t’en faire passer l’envie.
– Ça fait mal !
– Tu m’en diras tant… C’est ça, gigote ! Et laisser les autres faire la besogne à ta place pendant que tu te roules dans le foin avec Basile, ça non plus, ça te fait pas honte. Quand on a le feu au cul, hein !
– S’il te plaît, Gertrude ! Je t’en supplie…
– Là, au moins, tu vas l’avoir pour quelque chose le feu au cul ! Et ce que t’as fait le soir de la Saint-Ignace, tu veux que je leur raconte aux madames ? Tu veux ?
– Oh, non, hein ! Non !
– Alors arrête tes simagrées. C’est ça, chiale ! Tu pisseras moins. Mais si tu crois que c’est ça qui va m’apitoyer, tu te fourres le doigt dans l’œil, ma petite, et jusqu’au coude.

– Vous reprendrez bien une tasse de thé, ma chère ?
– Volontiers, oui. En tout cas, on peut pas dire… Votre cuisinière a la main lourde.
– N’est-ce pas ?
– Et après la correction qu’elle vient de recevoir, je doute que cette petite servante soit tentée de récidiver.
– Victoire ? Détrompez-vous ! La leçon portera un mois. Peut-être deux. Et elle recommencera. Elle est incorrigible.
– Et les autres ? Votre cuisinière les soumet-elle au même traitement ?
– Pas toutes, non. Loin de là. Mais il y a trois ou quatre indociles, ou paresseuses, ou étourdies dont c’est fréquemment le lot.
– Oh, mais je sens que je vais venir prendre le thé beaucoup plus souvent chez vous, moi !
– Quand vous voudrez, ma chère ! Quand vous voudrez… Ce sera avec plaisir.

samedi 19 mai 2018

Les voisins

Dessin de Kal

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C’est d’abord en sourdine. Feutré. Des claques. Toutes timides. Légères. Espacées. Et puis, peu à peu, ça prend son envol. Ça se fait plus rythmé. Plus intense. De plus en plus bruyant. De plus en plus énergique. Elle gémit. Elle crie. Elle feule. Et puis le silence. Et puis son plaisir.

Le jeudi, tous les jeudis, elle va faire ses courses pour la semaine. Le matin. Moi aussi. Je la croise dans les rayons. On échange un rapide bonjour. Un sourire. Sans plus. Bien que proches voisins, on ne se connaît que de vue. Je joue les affairés. Je voltige des surgelés aux produits d’entretien. Des viennoiseries aux conserves. Mais, en réalité, je suis à l’affût. Je saisis la moindre occasion de jeter, surtout si elle a eu droit la veille à une bonne claquée, autant de regards que possible, aussi discrètement que possible, sur ses délicieuses petites fesses. Je m’en repais. Là-dessous, sous la robe, sous la jupe ou sous le pantalon, ça brûle de mille feux. Ça rougeoie. J’essaie, le cœur battant, de me représenter. J’imagine. Je « vois ».

Il m’aborde sur le palier. Lui. Le mari. Tout sourire.
– C’est un peu idiot, vous trouvez pas ?
– Quoi donc ?
– Ben, on habite côte à côte depuis des mois et on s’est seulement pas donné la peine de faire connaissance. Ce serait quand même la moindre des choses, non ?
En effet, oui. Je suis bien de son avis. Complètement.
– Bon. Mais il est jamais trop tard pour bien faire. Passez ce soir. On boira l’apéro.

– Alors, voilà. Elle, ma gentille petite femme, c’est Mylène. Moi, c’est Étienne. Et vous ?
– Clément.
– On se tutoie ? Ce sera mieux, non ?
On se tutoie. On parle de choses et d’autres. De l’immeuble. Qui est bien situé. Pas trop loin de la gare. Et propre. De leurs métiers. Elle est secrétaire médicale. Il est commercial chez Volvo.
– Et toi ?
– Je travaille chez moi. Sur ordi.
– Ah, on se disait aussi…
Il se râcle la gorge, repose son verre.
– Et justement on voulait te demander… On fait pas trop de bruit ? On te dérange pas ?
– Oh, non, non ! Pas du tout !
– Parce que c’est du papier à cigarettes les murs ici. On entend tout ce qui se passe chez toi. Alors forcément dans l’autre sens… On te choque pas ? Parce qu’on a parfois des jeux…
– Oh, quand même ! On n’est plus au Moyen-Âge.
– Oh, alors ça ! Il y en a, c’est carrément à la Préhistoire qu’ils sont restés.
Mylène contemple quelque chose, très loin, par la fenêtre.
– Vous tracassez pas pour moi, je vous assure ! J’ai l’esprit large.
– Tant mieux ! Tant mieux ! Parce que, pour te parler franchement, on avait tendance à se brider un peu, mais maintenant qu’on sait que ça te pose pas de problème, on va plus se gêner. Ah, non, alors !

Et effectivement ! Pour se débrider, ça s’est débridé. Des orgies de claques. De lanières qui cinglent. Un martinet. Ou un fouet. On une cravache. Ou les trois. Alternativement. Selon l’humeur du moment. Et puis ses plaintes. Ses lamentations éperdues. Ses cris à pleins poumons. Et ses supplications. « Encore, Étienne, encore ! Et plus fort ! S’il te plaît, plus fort. »

Le jeudi matin, là-bas, aux courses, maintenant on échange rapidement quelques mots. On se demande si tout baigne. Et chacun reprend son périple de son côté. On se croise. On se recroise. J’ai parfois l’impression qu’elle se penche à l’équerre plus longtemps que nécessaire sur le bac aux légumes surgelés quand elle me sait derrière elle. Ou sur le coffre de sa voiture pour y ranger ses courses.
Et puis il y a ce matin-là où je me retrouve derrière elle à la caisse, où je l’aide à sortir ses achats du chariot et à les déposer sur le tapis. Où nos visages sont à quelques centimètres l’un de l’autre. Où ça m’échappe d’un coup, dans un souffle.
– S’ils savaient, les gens ! S’ils se doutaient !
Elle soutient mon regard.
– Eh bien ?
– Ils ne pourraient plus penser qu’à ça.
Un très léger sourire, du bout des yeux, avant de se détourner.

Étienne remplit nos verres. Il a l’air outré.
– Tu sais ce qu’elle m’a dit ? Non, mais tu sais pas ce qu’elle m’a dit ?
Elle, elle est assise, toute penaude, auprès de lui, sur le canapé.
– Je te le donne en mille. Elle prétend que t’en perds pas une miette, toi, à côté, l’oreille collée à la cloison et que ça te met dans tous tes états. Non, mais tu te rends compte ?
Je me rends compte, oui.
– Ça mérite, avoue ! Ça mérite une bonne fessée, non, tu crois pas ?
Je suis bien de cet avis.
– Et toi, Mylène ?
– Aussi. J’aurais pas dû. Je mérite.
– Eh bien, allez, alors !
Elle se lève. Elle s’approche. Il lui baisse lentement, très lentement, le pantalon jusqu’à mi-cuisses. Et elle vient, d’elle-même, s’allonger en travers de ses genoux.

jeudi 17 mai 2018

Quinze après (6)

Elle s’est relevée en se frottant vigoureusement les fesses.
– Hou là là là là là ! Comment ça me cuit !
– Tu pleures.
– Oui, mais ça fait rien, ça ! Tant pis. Tant mieux. Comment c’est bon que ça cuise. J’aurais jamais cru. Enfin, si ! Je me doutais. Mais pas à ce point-là.
– Viens ! Dans ma chambre. Viens ! Je vais te passer de la crème.
Sur le ventre. Sur mon lit. La tête dans mon oreiller.
J’ai étalé. Doucement massé.
– T’as pas arrêté quand je t’ai suppliée.
– C’est ce que tu m’avais demandé.
– J’avais peur que tu le fasses. Comment j’ai trop aimé.
– Ça te soulage, la crème ?
– Un peu, oui.
– En tout cas, qu’est-ce que t’as braillé !
– C’est vrai ? Je me suis pas rendu compte. Ça craint, non, pour tes voisins ?
– Alors ça, j’en ai strictement rien à battre. Et qu’est-ce que t’as gigoté ! Je n’ignore plus rien de ton anatomie. Qu’est-ce qu’il y a ? Ça va pas ?
– Oh, si, si ! Seulement si tu continues comme ça avec la crème, et avec ta main, il va se passer quelque chose.
– Oh, tu crois ?
Et j’ai poursuivi. Et il s’est passé : elle s’est soulevée, a ondulé sous mes doigts, doucement gémi son plaisir, la tête enfouie dans l’oreiller.
– C’était bon ?
– Un peu que c’était bon. Tu es machiavélique.

Au matin, on s’est réveillées l’une auprès de l’autre.
– Quelle heure il est ? Oh, là là ! Va falloir que j’y aille. Le devoir m’appelle.
– Oui, mais pas avant de m’avoir fait voir l’étendue des dégâts.
Elle s’est retournée sur le ventre.
– Alors ?
– Impressionnant ! Tu verras ça dans la glace de la salle de bains, mais impressionnant… Ça a viré déjà. Ça a commencé.
J’y ai passé un doigt.
– Ah, non ! Remets pas ça ! Pas maintenant. Jamais je vais pouvoir aller travailler, moi, sinon…
– Tu serais pas mieux là, avec moi ?
– Si ! Bien sûr que si ! Mais j’ai pas le choix. Déjà que ma paye est toute maigrichonne.
– File vite alors !
– Aujourd’hui, remarque, ça va pas être désagréable du tout de me dire que j’ai le cul en feu et que personne se doute de rien. Les collègues qui vont continuer à me raconter leurs petites histoires. À se prendre la tête pour des conneries. Les clients, à la caisse, qui seront à cent mille lieues d’aller imaginer… J’adore… On se reverra, hein ? On recommencera…
– Évidemment ! La question se pose même pas.
– Non, parce que… Pour une fois qu’il se passe quelque chose d’intéressant dans ma vie…

Coxan s’est frotté les mains.
– Tu es géniale. Absolument géniale. On va y arriver. Je suis sûr qu’on va y arriver. Et tout le monde va y trouver son compte. En plus !
– Tu crois pas si bien dire…
– Parce que ?
– Parce que tu sais ce qu’elle m’a demandé ? Que, la prochaine fois, on l’enregistre sa fessée. Qu’elle puisse la réécouter, après, chez elle, tout à loisir.

lundi 14 mai 2018

Oh, l'autre! Comment il l'embrouille la fille!


Villiam Thomas Smedley. One day in June.

– Va-t-en, Guillaume, allez, va-t-en maintenant ! S’il te plaît…
– Tu me chasses ?
– Tu sais bien que non. Mais du labeur m’attend.
– Il peut encore attendre.
– Holà, non ! Si je n’ai point fini ma besogne quand la maîtresse va rentrer…
– Eh bien ?
– Eh bien je passerai un sale quart d’heure.
– Elle va te punir ?
– Qui sait ?
– Elle te punit quelquefois ? Oui, hein ! Comment ? Attends ! Dis rien ! Laisse-moi deviner… Elle te donne des fessées.
– Que tu es bête !
– Tu as rougi…
– Mais non !
– Ah, si, si ! Et tu rougis encore. C’est que c’est vrai alors si tu rougis ! Souvent elle t’en donne ? Tu l’as eue quand la dernière fois ? Hier ?
– Jamais de la vie !
– Fais voir !
– Que je… Non, mais et puis quoi encore ?
– Tu veux pas ?
– Bien sûr que non !
– Ben, tiens ! Et pour cause… Elle a tapé fort ? Elles sont très rouges ? Tu peux au moins me dire si elles sont rouges.
– Mais non qu’elles sont pas rouges. Elles peuvent pas être rouges puisque j’en ai pas eu, j’te dis.
– Jamais ?
– Jamais !
– Ma pauvre ! Tu sais pas ce que tu perds.
– Hein ?
– Ben, oui ! T’aimerais… Je suis sûr que t’aimerais…
– Non, mais ça va pas ? T’es vraiment pas bien par moments, toi, hein !
– Qu’est-ce t’en sais que t’aimerais pas ?
– Je le sais.
– Comment tu peux savoir puisque t’en as jamais reçu ?
– Je le sais quand même.
– Parce que t’en as reçu alors. Tu vois bien que t’en as reçu ! Tu m’as menti. Effrontément. Ça en mérite une, ça…
– La voilà ! Ma patronne… La voilà. Pars, Guillaume, pars, je t’en supplie.
– Pas avant que tu m’aies promis.
– Promis quoi ?
– Que tu me laisseras t'en donner une de fessée. Pour m’avoir menti.
– Sûrement pas!
– Alors je reste.
– Je promets… Je promets…
– Sûr?
– Mais oui !
– Jure-le !
– Je le jure. Mais va-t-en ! Va-t-en !

samedi 12 mai 2018

Joyeux anniversaire, Fräulein!

Dessin de Kal

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Schmidt était convaincu que, pour vendre nos produits aux Allemands, dont il voulait à tout prix décrocher la clientèle, il nous fallait un collaborateur de langue allemande.
– Qui pourrait, mieux que lui, pénétrer la mentalité de notre acheteur ? Ce n’est pas seulement qu’ils parlent la même langue. C’est qu’ils ont les mêmes approches. Qu’ils partagent la même culture et les mêmes préjugés.

Et, un beau matin, on a vu débarquer Fräulein Ilge. Qui était compétente, ravissante, parlait un français impeccable et détestait viscéralement les Américains.
– Ils se prennent pour les rois du monde, mais ils n’ont jamais rien inventé. Ils se sont toujours servis de façon éhontée chez les autres. Tiens le hamburger, par exemple… Tout le monde croit ça américain. Eh bien, pas du tout. C’est une spécialité de Hambourg. Ils se la sont appropriée. Comme tant de choses.

Elle avait des exemples à foison. Qu’elle dégainait à la moindre occasion.
– C’est comme la fessée d’anniversaire ! Elle existait en Allemagne bien avant qu’elle devienne à la mode chez eux.
Romain était dubitatif. Faisait semblant de l’être.
– Ça existe pas vraiment ces trucs-là…
– Ah, si, si ! Va voir sur Internet.
– Oui, oh, mais c’est des mises en scène. Pour faire de l’audimat.
Elle s’agaçait.
– Mais pas du tout enfin ! Tu nous verrais, nous, à Görlitz. C’est extrêmement rare qu’il y ait un anniversaire sans fessée.
Il faisait la moue.
– Tu parles ! Trois ou quatre petites claques, comme ça, par-dessus la jupe ou le pantalon. On peut pas vraiment appeler ça des fessées.
– Mais t’en sais rien ! Qu’est-ce t’en sais ? Tu y étais ?
– Alors, en fait, ce que t’es en train de nous dire, c’est que chez vous, là-bas, ça se passe le derrière à l’air.
– Pas toujours ! Pas systématiquement. C’est, le plus souvent, à même la culotte. Mais ça arrive aussi que ce soit sans. Ça arrive ! Surtout dans le milieu étudiant. Où on ne s’encombre pas de préjugés.
– Et à toi, ça t’est arrivé ?
– Ben, évidemment ! Tous les ans. Depuis que j’ai dix-huit ans, tous les ans.
– Cul nu ?
– Une fois. Pour mes vingt-cinq ans. Non, deux. L’an dernier aussi.
Romain n’était toujours pas convaincu.
– J’en crois pas un mot.

Erwan était hilare.
– Vous savez quoi ? C’est son anniversaire à Ilge la semaine prochaine.
– C’est pas vrai !
– Eh, si !
– Mais alors…
Mais alors, oui…
Et on lui a préparé une petite fête. Tous les cinq. Tous ceux du service. Avec gâteaux. Bougies. Le Saint-Émilion dont elle raffolait. Et de menus cadeaux.

– Joyeux anniversaire, Ilge !
Elle était ravie.
– Vous êtes des amours.
On a ri. On a parlé. On a bu. On a chanté.
Et puis Erwan a pris la parole.
– Nous savons, chère Ilge, que là-bas, à Görlitz, un anniversaire ne se conçoit pas sans fessée.
Elle a imperceptiblement accusé le coup.
– Nous savons aussi que c’est une tradition à laquelle tu es profondément attachée. Que cette journée, pour toi, serait incomplète – et finalement décevante – si elle n’était pas respectée.
Romain a renchéri.
– D’autant qu’en douze ans ce serait la première fois.
Et même Émilie.
– Ça te porterait malheur, du coup, de pas en recevoir une.
Elle était prise au piège. Le moyen de se défiler sans se déjuger ? Sans admettre qu’elle nous avait raconté des histoires ?
Erwan a posé son pied sur la petite table.
– Bon, ben allez, action ! Tu viens ?
Elle a bravement fait face, s’est avancée, penchée en avant.
– Ah, ben non, non ! Ça vaut pas par-dessus la jupe. Tu l’as dit toi-même.
Elle l’a retirée sans un mot, jetée derrière elle.
– Et même… C’est important trente ans ! C’est un cap dans la vie. Faut marquer le coup. Alors sans la culotte ce serait encore mieux, non, tu crois pas ?
Tout le monde a approuvé.
– Ah, ben oui, oui, c’est évident.
– Surtout que ce sera pas la première fois pour elle.
– Et que ça lui portera chance pour toute l’année.
Elle n’a pas protesté. Elle s’est docilement laissé déculotter, s’est penchée, d’elle-même, sur la cuisse d’Erwan.
– Joyeux anniversaire, Fräulein !
On a fait chorus.
– Joyeux anniversaire !
Et la première claque est tombée.

jeudi 10 mai 2018

Quinze ans après (5)

Elle m’a regardée, stupéfaite, et m’a reposé la question.
– Non, mais comment tu le sais ?
– Sur pratiquement toutes les vidéos que tu m’envoies, les nanas s’exposent généreusement, pendant la fessée, dans toute leur vérité. Il y a une chance sur mille, avoue, pour que ce soit imputable au seul hasard.
– Je le fais pas exprès.
– Raison de plus !
Elle a légèrement rougi.
– Je peux te poser une question, Andrea ?
– Bien sûr… Vas-y !
– T’en as déjà reçu ?
Elle s’est agitée sur le canapé, a croisé, décroisé, recroisé les jambes.
– C’est-à-dire… Oui… Enfin, non… Toute seule, mais je sais pas si ça compte pour de bon.
– C’est pas vraiment la même chose.
– Non, c’est pas vraiment la même chose. Parce que, même si on se dit qu’on va se taper fort, on le fait pas autant que si c’était quelqu’un d’autre. Et puis on peut pas avoir honte pareil.
– Ça te dirait ?
Elle a soutenu mon regard.
– Hein ? Ça te dirait ?
– Maintenant ?
– Et pourquoi pas ?
– Oui, mais alors, faut que je te demande… Si je te dis d’arrêter, tu le fais pas, hein ! Ni si je te dis de taper moins fort. D’accord ?
– Lève-toi, Andrea !
Elle l’a fait, ses yeux dans les miens. J’ai rassemblé ses deux poignets dans ma main et je l’ai doucement, tout doucement, attirée vers moi.
– T’es venue pour ça, hein ?
– Non. Si ! Quand même un peu.
– Un peu beaucoup, oui. Dis-le !
– Je suis venue pour ça.
– Pour quoi ?
– Pour que tu me donnes la fessée.
– Une fessée comment ?
– Cul nu.
– Cul nu, oui.
J’ai glissé mes mains sous la robe, me suis emparée des rebords de la culotte que j’ai lentement descendue, accompagnée jusqu’en bas. Elle en est sortie, un pied après l’autre.
– Penche-toi !
Elle a basculé en travers de mes genoux. Je l’y ai confortablement installée. J’ai relevé la robe. Très haut. Au-dessus des reins.
– Mais c’est que t’as un cul de rêve ! Il y manque juste un peu de couleur, mais ça, on va y remédier. Et sur-le-champ.
J’ai lancé une première claque. Sèche. Appuyée.
– Aïe ! Hou, la vache !
Elle s’est crispée dans l’attente de la seconde. Que je l’ai interminablement fait attendre. Que j’ai brusquement abattue. Une troisième. Une quatrième. En pluie. En grêle. En rafales. En tornade hurlante et mugissante.


lundi 7 mai 2018

Défaîte


Dessin : Louis Malteste

– Jamais on aurait dû la perdre, cette finale ! Jamais !
– Ah, ça !
– On était largement au-dessus d’elles, faut dire ce qui y est !
– Marthe a été vraiment lamentable.
– Elle a quasiment tout raté. C’est pas son habitude pourtant…
– Un jour sans. Ça arrive.
– Vous me faites rire, les filles ! Non, mais alors là, vous me faites trop rire. Vous avez vraiment rien vu ?
– Non. Quoi ?
– Elle le faisait exprès. C’est clair qu’elle le faisait exprès.
– Moi aussi, je me suis demandé.
– C’est vrai que ça paraissait bizarre. Elle était au-dessous de tout aujourd’hui.
– Pourquoi elle aurait fait ça ?
– Pourquoi ? Ils sont riches à millions en face.
– Tu veux dire que…
– Qu’ils l’ont achetée, oui. L’argent et elle, ça a toujours été une grande histoire d’amour.
– Oh, quand même !
– À votre avis, elle est où, là ?
– C’est vrai, ça, pourquoi elle est pas avec nous ? Il y a qu’elle qu’est pas là.
– Elle est partie chercher ses sous, tiens ! Moitié avant le match. Et moitié après. En général c’est comme ça que ça se passe.
– Et en plus elle nous fait ça quasiment sous le nez.
– Quelle garce !
– Tiens, ben la v’là justement !

– T’étais où ?
– Là-bas… Je discutais.
– Gros sous ?
– Non. Pourquoi tu dis ça ?
– On est au courant, Marthe.
– Au courant ? Mais au courant de quoi, grands dieux ?
– Fais bien l’innocente !
– Vide tes poches, plutôt ! Vide tes poches ! Non, pas celle-là. L’autre devant. Celle qu’est bien gonflée. Qu’est-ce t’es empotée ! Attends, je vais t’aider… Là ! Voilà ! C’est quoi tout ce blé ?
– C’est à moi !
– Et ça sort d’où ?
– De… Je… J’ai travaillé.
– Fous-toi bien de nous ! En plus !
– Mais non, mais…
– On la connaît la vérité. Quelqu’un t’a balancée. Quelle espèce de petite saloperie tu fais ! Parce que, nous, on a passé des heures et des heures à s’entraîner pour cette finale. On y croyait. On s’est investies. On a consenti tout un tas de sacrifices pour la gagner. Et toi, au dernier moment, tu nous plantes un poignard dans le dos.
– Je suis désolée.
– Ça nous fait une belle jambe. En tout cas, je peux te dire qu’il va y en avoir du monde au courant de ce que t’as fait ! Les dirigeants, bien sûr. Nos familles. Nos amis. Tous ceux à qui on aura l’occasion de le faire savoir. D’une façon ou d’une autre.
– Vous allez pas faire ça !
– On va se gêner !
– Pour qui je vais passer, moi !
– Pour ce que t’es !
– Je vous en supplie…

Pénélope et Mathilde se sont concertées à voix basse.
– Oh, oui, oui. C’est une idée, ça !
Se sont tournées vers elle.
– Ou bien alors on te flanque une bonne fessée déculottée. Au choix !
– Une fess… Oh, non, non.
– Comme tu voudras.
Et elles lui ont tourné le dos.
– Attendez !
– T’as changé d’avis ?
– Non !
Elles ont fait mine de s’éloigner.
– Oui. Si !
Elles sont revenues.
– T’as raison ! C’est qu’un mauvais moment à passer. Tandis que sinon, c’est tous les jours que t’auras le nez dedans. Bon, ben allez !
Elles ne lui ont pas laissé le temps de se raviser.
Pénélope l’a fait tomber à genoux, lui a relevé la robe, enserré la taille avec son bras.
Et Mathilde l’a déculottée.
– La ménagez pas, hein, les filles ! Qu’elle le sente passer.
– Et faites-lui honte. Surtout ça ! Bien honte.
– Comptez sur nous. Elle va s’en souvenir.
Et la première claque est tombée.

samedi 5 mai 2018

Procrastination

Dessin de Kal:

http://kalidwen.wordpress.com

http://fesseeo.net


– Ah, c’est toi !
– C’est moi, oui. Ça te dérange ?
– Non. Bien sûr que non. Mais je suis un peu pressée, là.
– J’en ai pas pour longtemps. Je passe juste, comme convenu et comme tu me l’as toi-même demandé, faire ma petite visite de contrôle anti-procrastination. J’ai d’ailleurs pu constater, en arrivant, que ton jardin était dans un état pitoyable. Une véritable jungle.
– Je sais, oui. J’ai pas eu le temps.
– Pas eu le temps ? C’est sans doute que tu avais des choses beaucoup plus urgentes à faire ?
– Voilà, oui.
– Pas la vaisselle en tout cas. Qu’est là à traîner depuis trois jours – au moins – dans l’évier. C’est si compliqué de l’enfourner dans le lave-vaisselle ?
– Mais non, mais…
– Je suppose que c’est la même chose pour le repassage. Qu’il y en a des monceaux, non ? Ben, tiens ! Qu’est-ce que je disais !
– Je le ferai. Je vais le faire. Ce soir. Sans faute. C’est prévu.
– Ben, voyons ! Et ton courrier, t’es à jour ?
– Oh, oui, oui ! Ça, oui !
– Et ces lettres recommandées, là, sur le dessus, c’est quoi ? Des impayés, j’aurais dû m’en douter. Tu crois pas que t’exagères ? Tu fais quoi alors de tes soirées et de tes week-ends ?
– Mais rien.
– Rien, justement. C’est bien là le problème. Bon, mais tu sais ce qu’on avait dit. Que si tu ne t’amendais pas… Allez, viens ici !
– Non, José, attends !
– Attendre ? Attendre, quoi ?
– Demain…
– Demain, évidemment ! Comme tout le reste.
– Non, c’est pas ça ! C’est que, ce soir, je dois voir Julien. Et que je peux quand même pas m’amener chez lui les fesses en feu. Tu le connais. T’imagines ?
– Si tu t’y prends bien…
– Sauf que la baise, avec Julien, c’est à quatre pattes, le cul en l’air, et en pleine lumière… Alors, même avec la meilleure volonté du monde…
– Effectivement. Ah, tiens, à propos, je l’ai eu au téléphone ce matin, Julien. Il est à Naples. C’est là-bas que tu le rejoins ce soir ?
– Mais non, mais…
– Mais quoi ?
– Non, rien.
– C’était bien essayé, mais c’est raté. Allez, viens là !
– Ça peut pas attendre, t’es sûr ?
– Certain. Et toi aussi, d’ailleurs, tout au fond de toi-même, tu en es convaincue. Non ?
– Si !
– Tu vois bien… Allez, on met ce petit cul à l’air…

jeudi 3 mai 2018

Quinze ans après (4)

Bon, mais commenter des vidéos de fessée, comme ça, quasiment tous les soirs, c’était bien. C’était même très bien. Mais les regarder ensemble, côte à côte, ç’aurait été encore mieux, non ?
Elle ne demandait pas mieux, Andrea. Ah, non, alors ! Au contraire. Ça faisait même déjà un sacré moment que, de son côté, ça la démangeait de me le proposer.
– La seule chose, c’est que, si ça t’ennuie pas, je préfèrerais que ça se passe chez toi. À cause des voisins. Parce que, chez moi, les murs sont quasiment en carton-pâte.
Coxan s’est frotté les mains, ravi.
– Ce qui signifie, à l’évidence, qu’elle ne compte pas se contenter de regarder sagement des vidéos en ta compagnie. Ça sent la fessée à plein nez, ça… Maintenant, à toi de bien savoir mener ta barque.

– Salut !
Toute blonde toute menue, souriante, l’air mutin.
– Eh ben, entre ! Reste pas là ! Assieds-toi ! Mets-toi à ton aise !
– Ça fait tout drôle… En douce que je te voyais pas du tout comme ça…
– Ah, oui ! Et tu me voyais comment ?
– Je sais pas… Mais pas comme ça… Plus grande. L’air plus sévère. Plus intimidante en fait.
– T’es déçue ?
– Oh, non ! Non ! Pas du tout, non. Va pas croire ça…
J’ai lancé une vidéo.
– Allez, on perd pas de temps. On entre dans le vif du sujet.
C’était l’histoire d’une jeune femme qui avait accepté une peine de substitution : cinquante coups de badine en lieu et place de trois ans de prison. La caméra s’attardait complaisamment sur les préparatifs : lecture du jugement, déshabillage. Une femme médecin lui faisait subir un examen médical en règle. Puis deux assistantes prenaient tout leur temps pour l’installer sur la table d’exécution, lui enserrer poignets et chevilles dans des bracelets en cuir, lui attacher la taille avec une longue ceinture, les genoux avec une autre.
Andrea a frissonné.
– T’as tout le temps d’appréhender quand ça dure des éternités comme ça… Ce qui fait partie de la punition, faut croire.
– Le pire moment… Ou le meilleur, c’est selon.
Elle a levé les yeux sur moi, hoché la tête, souri.
L’exécutrice s’est enfin présentée. Elle a vérifié que tout était bien en place, les bracelets et les liens suffisamment serrés. Elle a choisi soigneusement une badine parmi un lot d’une demi-douzaine, l’a fait claquer en l’air, s’est lentement approchée.
Le premier coup est tombé.
Andrea a fermé les yeux, tressailli.
Les autres ont aussitôt suivi, méthodiques, réguliers.
Elle les a regardés s’inscrire, fascinée, en longues traînées rosâtres sur les fesses impuissantes de la condamnée.
La femme médecin a réclamé une interruption, vérifié que la condamnée était en état de supporter son châtiment, fait signe que oui… oui… il pouvait se poursuivre.

– T’as aimé ?
– Oui.
– Ça a pas l’air.
– Oh, si, si ! Seulement…
– Seulement ?
– Je préfère quand elles crient…
– Elle a bien crié…
– Pas vraiment. Pas comme j’aime. C’était trop étouffé. Pas assez abandonné. Non, et puis aussi…
– Et puis aussi… entravée comme elle l’était, elle pouvait pas se contorsionner et gigoter, laisser voir tout son saoul tout ce qu’elle a à montrer. Et ça, t’adores…
– Hein ? Mais comment tu le sais ?