jeudi 30 novembre 2017

Mémoires d'une fesseuse (13)

– Tu peux pas t’asseoir, Marie-Clémence ? Tu me donnes le tournis.
Ça faisait un quart d’heure qu’elle arpentait de long en large la cuisine.
– Si ! Oui. Mais je voulais te demander… Les photos…
Elle s’est agenouillée sur la chaise.
– Quelles photos ?
– Ben… De l’autre soir…
– De ton derrière tout rouge ? Quand t’étais au coin ?
– Voilà, oui.
– Tu les veux, c’est ça ? Je t’en ferai une copie, c’est pas un problème.
– Non, mais surtout… Ce que j’aimerais savoir… Tu… Tu les as montrées ?
– Évidemment ! Quel intérêt sinon… T’as de ces questions !
– À qui ?
– Tes copains à la fac…
Elle a pris un air horrifié.
– T’as pas fait ça !
– Ben si, pourquoi ? Fallait pas ? Ils étaient enchantés. Ils te découvraient sous un jour complètement différent.
– Oui, oh, ben alors là, je remets pas les pieds là-bas, moi ! C’est hors de question.
– Mais non, idiote, je les ai pas montrées. Mais je le ferai. Pas à eux. À d’autres. Tu perds rien pour attendre.
– À qui ?
– Tu connais pas. Pas encore. Mais ça ne saurait tarder. Tu les as encore les marques ?
– Un peu.
– Fais voir !
Elle s’est exécutée, robe relevée sur les hanches, culotte baissée à mi-cuisses.
– T’appelles ça un peu, toi !
Elles étaient magnifiques. Patinées à souhait. Bien ancrées en profondeur. Avec des coloris subtils et généreux. Une petite merveille. Un vrai délice.
J’en ai voluptueusement redessiné les contours, du bout du doigt. Longtemps.
Et je me suis brusquement ressaisie.
– Va vite enfiler un string.
– Un string ?
– Oui. Qu’on aille faire un peu de shopping.
Quelque chose de radieux et de terrifié tout à la fois est venu, très vite, habiter son regard.

On a virevolté un long moment entre les portants.
– Bon, alors tu te décides ? On va pas passer l’après-midi là !
Deux femmes d’une quarantaine d’années, qui flânaient à proximité, ont levé sur nous un regard amusé.
Après avoir longtemps tergiversé, elle a arrêté son choix sur un pantalon moulant en cachemire blanc.
– Ça devrait m’aller, ça…
– Le meilleur moyen de le savoir, c’est encore d’aller l’enfiler, non, tu crois pas ?
Elle s’est engouffrée dans une cabine, s’y est enfermée. Assises juste en face, en compagnie d’un homme plus âgé, deux jeunes femmes attendaient qu’une troisième ait terminé ses essayages. J’ai laissé passer quelques instants et puis j’ai résolument écarté le rideau.
– Bon, alors ça y est ? T’en es où ?
Ça y était pas, non. Elle avait le pantalon sur les chevilles. Et elle nous tournait le dos.
L’une des femmes s’est esclaffée.
– Oh, la tannée qu’elle s’est prise, la fille !
L’autre a fait chorus.
– Putain, oui ! Elle a dû le sentir passer !
J’ai laissé retomber le rideau.


lundi 27 novembre 2017

La jeune Madame

Vallotton. Die Kranke, 1892

– Alors ? Comment elle va, notre jeune Madame, ce matin ? Mieux ?
Elle fait de la place, sur la table de nuit, pour pouvoir y déposer la tasse qu’elle apporte.
– Un peu. Je ne vomis plus, non, mais j’ai toujours des nausées. La tête qui tourne. Et de la fièvre, sûrement.
–Vous savez ce que le docteur a dit. Il vous faut être patiente. Bien prendre vos remèdes. Et vous reposer. Vous reposer le plus possible.
– Ah, je m’en souviendrai, Bénédicte, de mes vingt ans ! Au lit, je les fête. Au lit !
– Vous êtes jeune. Vous en aurez d’autres, des anniversaires. Beaucoup d’autres.
– Oui, mais vingt ans, ce n’est pas un anniversaire comme les autres. Et Norbert qui n’est pas là. En plus !
Bénédicte redresse l’oreiller, remet la courtepointe en place.
– La mère de votre époux est au plus mal. Sa place, à lui, est tout naturellement à son chevet.
– Je sais, Bénédicte, je sais, mais avoue que tout semble se liguer contre nous en ce moment.
– Il ne sert à rien de broyer du noir.
Elle lui tend la tasse.
– Allez, avalez-moi ce breuvage tant qu’il est chaud. Et puis nous ferons un brin de toilette.
– Demain, Bénédicte, demain. Attendons demain. J’irai mieux demain.
– C’est ce que vous avez déjà dit hier. Non, non. Une toilette s’impose. Je reviens. Je vais chercher ce qu’il nous faut.

* *
*

Elle ramène la chaise au bord du lit, y dépose broc, cuvette et serviettes.
– Allez, on retire cette petite chemise.
– Demain, Bénédicte, va !
– Pas demain, non. Aujourd’hui. Ce n’est pas parce qu’on est malade qu’on doit se négliger. Allez, hop !
Elle repousse draps et couvertures.
– Soulevez-vous !
Et s’empare, d’autorité, des rebords de la chemise qu’elle lui fait passer par-dessus la tête.
– Là ! D’abord le dos. Tournez-vous ! Sur le ventre. Et laissez donc ce drap tranquille ! Qu’est-ce que c’est que ça ? Faites voir ! Ah, si, si, faites voir ! Lâchez ! Oh, là là ! Vous avez le derrière dans un état, mais dans un état !
Elle fronce les sourcils.
– Qui, mais qui vous a arrangée de cette façon-là ? Ni Monsieur votre père ni Madame votre mère, assurément. Jamais ils ne lèveraient la main sur vous.
– Leur dis pas, Bénédicte ! Tu vas pas leur dire, hein !
– Quant à Monsieur votre époux, il est, depuis plus d’une semaine, à des centaines de kilomètres d’ici. Alors qui ?
– Je veux pas qu’on sache.
– Eh bien alors, expliquez-moi !
– C’est à cause de l’an dernier, au couvent.
– Au couvent !
Elle s’assied, à ses côtés, au bord du lit.
– Oui, parce qu’avec deux autres filles, un jour, là-bas, en cachette, on s’est amusées à se donner la fessée.
– Et ça vous a plu.
– Un peu.
– Et vous avez recommencé. Souvent ?
– Quelquefois.
– Tant et si bien que, maintenant, vous ne pouvez plus vous en passer.
Elle lui soulève le menton. Du bout du doigt.
– Regardez-moi ! Et répondez-moi ! C’est ça, hein ?
– Oui.
– Et à qui demandez-vous donc de bien vouloir vous corriger ? Certainement pas à votre époux. Il en serait scandalisé, le pauvre jeune monsieur. Et, de toute façon, il est absent. Alors à qui ?
– À personne. Je m’arrange.
– Toute seule ? Et vous y trouvez vraiment votre compte ?
– J’essaie, mais…
– Si je puis me permettre…
– Oui, Bénédicte ?
– Au cas où la jeune Madame souhaiterait que je lui rende ce menu service, il lui suffirait de l’exiger de moi.
– Et tu me garderais le secret ?
– Le plus absolu.
– Alors vas-y !
– Maintenant ?
– Maintenant, oui. Par-dessus l’autre. Et tape, hein ! Fais pas semblant.
– Oh, pour ça, la jeune Madame peut me faire confiance. Elle va s’en souvenir.
Et elle lance une première claque. À toute volée.


samedi 25 novembre 2017

Amandine (2)

Le lendemain soir, elle a attaqué d’entrée de jeu.
– Vous savez, je lui ai raconté à Aurore pour les bouquins que j’ai laissé tomber, hier, dans l’entrée. Elle s’est bien fichue de moi, tiens, en attendant ! « Il t’arrive toujours de ces trucs à toi ! » Je peux m’asseoir ? Merci. Où on en était ? Ah oui ! Si elle m’a dit ça, c’est à cause de ce qui s’est passé un jour sur le campus, à la fac. J’étais chargée que le diable : mes cours à gauche, un sac de sapes à droite. Et mon portable à la main. En plus ! D’un seul coup, sans prévenir, il s’est levé un grand coup de vent, mais alors là, le méga truc. Et qu’a duré en plus. Il faisait beau. J’avais une jupe en tissu léger. Alors, forcément, elle a voltigé. Et pour la rabattre, encombrée comme je l’étais, c’était la croix et la bannière. Mission quasi impossible. Mais le pire, c’est qu’en-dessous, non seulement j’étais en string, mais surtout, j’avais les fesses écarlates d’une fessée toute neuve de la veille. Qu’Aurore m’avait généreusement octroyée. Il était midi. L’heure où il y a le plus de monde dehors. Alors, évidemment, il y en a plein qu’ont vu. Et qu’ont même eu le temps de sacrément bien voir. Il y a eu des tas de réflexions du coup. Des rires. Des coups de sifflet.
– Ça, j’me doute…
– Et elle, c’est dix mille fois qu’il a fallu que je lui raconte quand elle a eu appris. Elle voulait tout savoir. Bien en détail. Combien de temps ça avait duré au juste. Et qui c’était le monde autour. Surtout des filles ou surtout des garçons ? Et c’était quoi les réflexions qu’on faisait ? Et des regards ? J’en avais croisé des regards ? Ils étaient comment ? Rigolards ? Moqueurs ? Des fois, je pouvais répondre. Et d’autres fois, pas du tout. Mais ce qu’il y a de sûr, c’est que ça la mettait dans tous ses états cette histoire.


– Et elle a voulu que tu recommences, mais en toute connaissance de cause, cette fois, et en sa présence.
Elle m’a jeté un regard stupéfait.
– Comment vous le savez ?
– C’est pas bien compliqué à deviner.
– Elle m’entraîne dans de ces trucs ! Où il faut toujours qu’on se rende compte que j’y ai attrapé. Sans que ça ait l’air d’être fait exprès. Et elle peut avoir une de ces imaginations quand elle veut.
– Et toi ?
– Quoi, moi ?
– Ça te plaît, tout ça ?
Elle a haussé les épaules.
– Au début pas trop. Pas vraiment. J’étais pas à l’aise. Pas du tout même. J’avais honte d’une façon qu’était pas agréable. Si je le faisais, c’était pour lui faire plaisir. Parce que je voyais bien qu’elle en crevait d’envie et que c’était hyper important pour elle. Et puis, petit à petit, j’y ai vraiment pris goût. Ça a un côté un peu enivrant, finalement, tous ces regards qui se concentrent sur toi. Tous ces gens que ça interpelle. Qui se posent des tas de questions. Qui s’apitoyent ou se scandalisent. Que ça excite, certains. J’ai toujours honte, dans un sens, oui, bien sûr, mais c’est plus la même honte. Elle a quelque chose de… comment dire ? Sensuel. Oui, c’est ça. C’est le mot.
Elle s’est brusquement interrompue.
– Quelle heure il est ?
– Sept heures.
– Déjà ! Faut que j’y aille ! Faut vraiment que j’y aille. Parce qu’elle vient, Aurore, ce soir. Et c’est la première fois qu’elle met les pieds chez moi. Alors…
Elle s’est retournée sur le pas de la porte.
– Ah, oui, j’oubliais…
Elle a paru hésiter. Chercher ses mots.
– Il y a des chances que j’en prenne une tout-à-l’heure.
Elle est revenue sur ses pas.
– C’est pas seulement qu’il y a des chances, c’est que c’est sûr. Elle me l’a promis. Et s’il y a quelqu’un qui tient toujours ses promesses…
Est repartie dans l’autre sens.
– Vous allez entendre. Forcément ! Vu comment c’est insonorisé ici !
A posé sa main sur la poignée de la porte.
– Ce qu’elle voulait que je vous dise aussi, c’est que c’est de votre faute si je vais l’avoir, la fessée. Parce qu’ils sont tombés par terre les bouquins. Que j’avais qu’à faire attention.


jeudi 23 novembre 2017

Mémoires d'une fesseuse (12)

Chaque fois que j’avais besoin de faire le point, d’y voir clair, c’était toujours, systématiquement, à Philibert que j’avais recours.
– Je suis un peu perdue, là.
– Parce que ?
– Parce qu’elle a raison, Hélène. J’y prends vraiment du plaisir à tout ça. Et de plus en plus.
– Oui. Et alors ? Il est où le problème ?
– Il est que ça me perturbe complètement. Je me voyais pas comme ça.
– Tu fais connaissance avec toi-même. C’est jamais simple. Pour personne.
– Et puis, en même temps, je le soupçonnais que c’était là, tout au fond de moi. Mais je voulais pas le voir. Si j’avais accepté d’être un tant soit peu lucide…
– Tu as fini par l’être. La preuve…
– Ça me fait peur. Parce que où ça va m’emmener tout ça ? Maintenant que j’ai ouvert la boîte de Pandore…
– Tu fais de mal à personne. Au contraire. Si j’ai bien compris, elles sont très demandeuses. Et elles y trouvent leur compte. Aussi bien l’une que l’autre.
– De manière différente, mais oui… Oui.
– Eh bien, alors !
– Avec Hélène, au moins, je sais où je vais. C’est clair. C’est limpide. Faut que je la dérouille. Ça lui fait prendre son pied. Et comme c’est loin de me déplaire, t’as pas besoin de t’en faire que je vais m’en donner à cœur-joie.
– Peut-être que ça va beaucoup plus loin que ça…
– Oh, ça, c’est sûr. Elle crève d’envie de m’appartenir, Hélène. Corps et âme. De s’engluer à moi. Et je peux te dire que, si je mets le paquet, elle est pas près de pouvoir se désenlacer.
– Je le crois aussi.
– Avec Marie-Clémence, par contre, je vais sans doute tâtonner un moment dans le brouillard.
– Parce qu’elle sait pas vraiment ce qu’elle veut ?
– Oh, si ! Si ! Son truc à elle, c’est la honte. Et je peux lui faire honte tant et plus, c’est pas le problème. Surtout que pour moi ça a aussi son charme. Sauf que ça a ses limites. On peut pas tourner indéfiniment en rond à deux. À un moment ou un autre, faut bien changer de registre. Passer la vitesse supérieure. Ce qui implique de faire intervenir d’autres personnes. Seulement, qui ? J’ai bien prospecté, sur des sites spécialisés, mais sans résultats vraiment probants. À part avoir fait la connaissance d’Hélène…
– Ce qu’est déjà pas si mal.
– Oui, bien sûr ! Mais question recrutement, c’est vraiment pas ça qu’est ça. Les mecs, j’évite. Parce que je suis pas née de la dernière pluie. Je sais bien qu’il y a toutes les chances qu’ils aient des tas d’idées derrière la tête. Et que ça risque d’être des embrouilles à n’en plus finir. Quant aux nanas, elles se bousculent pas au portillon. Si elles sont là, c’est, le plus souvent, dans l’intention plus ou moins avouée de se faire tanner le cul par un type avec qui il finira par se passer autre chose. Alors regarder une fille tambouriner le derrière d’une autre, ça les branche pas vraiment.
– Tu veux que je t’en trouve, moi ?
– Tu pourrais ? Ce serait super sympa.
– Mais des mecs alors… J’ai que ça sous la main.
– Des homos, comme toi ? Je suis partante. Avec eux au moins, je suis tranquille qu’il y aura pas de lézard.
– Il t’en faudrait combien ?
– Quatre ou cinq. Mais alors qui sachent bien lui faire honte. Avec des réflexions. Des moqueries, tout ça.
– Oui, j’ai compris. Dans quelle tranche d’âge tu les voudrais ?
– Plutôt jeunes. Ce sera beaucoup plus efficace.
– Je m’en occupe. Je m’en occupe et je te tiens au courant.
– Merci. T’es un amour. Ah, si je t’avais pas !

lundi 20 novembre 2017

Au plaisir des dames (3)

Félix Vallotton. Quatre torses, 1916


– Géniale, cette soirée, non ?
– Ah, oui alors !
– Et puis, ils cuisinent sacrément bien, en attendant, pour des mecs.
– Sans compter que, dans le jardin, c’est une chose, mais de les avoir là, à poil, dans leur cuisine, à aller et venir, à s’asseoir, à se relever…
– Ah, ça t’a plu, ça, hein !
– Pas à toi, peut-être ?
– À un moment, la conversation avait pris un tour sacrément coquin, n’empêche. Et sûrement que si on avait un peu insisté…
– Ils se seraient mis à combattre pour nous.
– Je crois aussi, oui. Oh, mais ce n’est que partie remise si on veut. Et si on sait manœuvrer…
– On saura. D’autant que c’est à leur tour de venir demain soir. Et pas question de les laisser repartir sans avoir fait avancer le schmilblick.

– L’impression qu’ils donnent, c’est qu’ils seraient pas contre, hein, finalement.
– Mais pas avec les mêmes règles du jeu. À nous de la ramasser, la fessée, sur ce coup-là. À celle de nous deux, du moins, qu’aura fait le mauvais choix.
– Ce qu’est nettement moins drôle que de la leur donner.
– Et, si j’ai bien compris, c’est le gagnant qui la lui flanquerait. Pour la punir de pas avoir pris parti pour lui. Avant d’aller s’enfermer dans la chambre avec l’autre. Machiavélique, non ?
– Oui, mais tout ça, c’était plutôt dit sur le mode de la plaisanterie. Faut pas y attacher trop d’importance.
– Oui, oh, alors là, j’en mettrais pas ma main au feu. On ne plaisante jamais complètement au hasard. Il y a toujours un fond de vérité derrière.
– Tu crois ?
– Évidemment ! Oh, mais je vais en avoir le cœur net, n’importe comment. Et pas plus tard que cet après-midi. En continuant son portrait à Gilles. Quand on n’est que tous les deux, il se lâche complètement.

– Alors ?
– Ben alors, c’est quand on veut. Ils demandent que ça.
– C’est sûr ?
– Sûr et certain ! On fait quoi ? C’est toi qui décides. Ce sont tes voisins.
– D’un côté…
– Ça te tente bien. Depuis le temps que tu les reluques et que tu rêves de te pâmer dans leurs bras, mais, de l’autre…
– Avec la chance que j’ai, je vais forcément miser sur le perdant.
– Et une fessée, on peut pas dire que ça te tente. Oui, mais ça, quand on joue, on n’est jamais sûr de gagner. Ce serait trop facile.
– Tu choisirais lequel, toi ?
– Gilles… Ça coule de source.
– Je crois quand même que Nicolas est plus costaud.
– Oui, oh, ben alors ça, je suis bien tranquille que non.
– Si ! Il est plus râblé. Plus nerveux. Il en ferait qu’une bouchée de ton Gilles, je suis sûre.
– On parle dans le vide, là, n’importe comment.
– Pas tant que ça, moi, je pense…
– On vérifie ?
– On vérifie.
– Eh bien, allez, alors ! Ils nous attendent.

– Comment ils y ont mis tout leur cœur, n’empêche ! On voyait vraiment qu’ils voulaient tous les deux gagner.
– Et qu’est-ce que ça a duré ! Ah, on a eu le temps d’en profiter…
– Jamais je serais allée imaginer que Nicolas se défonce autant pour moi. Qu’il ait autant envie de moi finalement.
– Sauf qu’à l’arrivée…
– Oui, bon, ça va. Pas la peine d’en rajouter. D’autant que ça s’est joué à pas grand-chose au bout du compte.
– Mais le résultat est là. Gilles était le plus fort. Et alors je te dis pas après…
– Ben ça, on a entendu.
– Un jeune mec comme ça, beau, bien musclé, bien monté, bien endurant, j’avoue que, même dans mes rêves les plus fous, je pensais pas que ça redeviendrait un jour possible. Faut dire aussi que tu nous as bien aidés. Parce que t’avoir collé une fessée juste avant, ça l’avait sacrément mis en appétit.
– Et il y est pas allé de main morte, c’est le moins qu’on puisse dire. Ça va peut-être te surprendre, mais, en attendant, c’était pas si désagréable que ça.
– C’est bien ce qu’il m’a semblé. Ben, il y a plus qu’à recommencer alors !
– C’est quand tu veux. Et quand ils veulent.
– Même si c’est encore Gilles qui gagne ? Ce qu’est couru d’avance.
– Même…

samedi 18 novembre 2017

Amandine

Quand je les ai découverts sur ses blogs:



les dessins et les textes de Didou m'ont tout de suite parlé. S'en est suivie l'idée de réaliser quelque chose en commun. Et j'ai écrit une histoire qu'elle a eu la gentillesse d'illustrer.

En voici le premier volet. ( il y en aura quatre )


AMANDINE




– Je vous dérange pas ?
C’était Amandine, la petite étudiante du dessus.
– Pas du tout, non. Entrez !
– Vous allez me trouver d’un sans gêne ! Surtout qu’on se connaît pas beaucoup.
Ça, c’était une évidence. Bonjour-Bonsoir quand on se croisait. Et on en restait là.
– J’ai longtemps hésité. Et puis je me suis dit que vous n’alliez pas me manger. S’il veut pas, il veut pas et puis voilà…
Oui, mais si je voulais pas quoi ?
– M’en prêter, des livres. À ce qu’il paraît que vous en avez des quantités.
– Venez !
Elle a roulé des yeux effarés.
– Tout ça ! Mais combien il y en a ?
– Pas loin de six mille.
– Vous les avez tous lus ?
– La plupart. Bon, mais je vous laisse. Regardez ! Choisissez ! Prenez tout votre temps !
Elle n’a fait sa réapparition que trois heures plus tard.
– J’abuse…
Et en a emporté quatre.
– Je peux ? C’est pas trop ?
Précieusement serrés contre elle.


Elle est revenue souvent. Elle passait un temps fou à côté. Au milieu de mes livres. S’attardait aussi parfois à discuter avec moi. De plus en plus souvent. De plus en plus longtemps.
– Ça me fait du bien. Si, c’est vrai, hein ! Parce que c’est pas souvent qu’on peut parler vraiment avec les types. Ceux de mon âge, à part les jeux vidéos et le sport, il y a rien qui les intéresse. Quant aux plus vieux, eux, une petite jeune, ils vont manœuvrer tout ce qu’ils savent pour coucher avec. Il y a que ça qui compte pour eux. Mais vous, on sent tout de suite que c’est pas pareil. Et puis en plus, ce que vous dites, ça me donne toujours à réfléchir. Si, c’est vrai, hein !

Et, petit à petit, elle est entrée sur la voie des confidences. Des confidences de plus en plus intimes. Sur ses parents, avec lesquels elle ne s’était jamais vraiment entendue. Sa mère, surtout.
– C’est bien pour ça : dès que j’ai pu prendre mon indépendance, tu penses bien que j’ai pas hésité…
Sur ses petits copains.
– Trois, j’en ai eu. En tout et pour tout. Copies conformes les uns des autres. À croire que je suis programmée pour toujours tomber sur le même genre de pièges. Ou qu’ils sortent tous du même moule.
Et sur Aurore.
– Alors là, Aurore…
Elle s’animait. Ses yeux se mettaient à briller.
– C’est une fille extraordinaire. Tu ne peux pas ne pas en tomber amoureuse. C’est impossible.
Elle en était effectivement tombée amoureuse.
– Et pire que ça encore !


Elle venait deux à trois fois par semaine. Elle emportait et remettait en place les ouvrages qu’elle désirait lire. Sans que je vérifie jamais de quoi il s’agissait. Ça ne regardait qu’elle. Sauf que ce mardi soir-là, en se retournant, dans l’entrée, pour me dire au revoir, elle a buté dans la petite table basse, trébuché, voulu se rattraper à la console et a laissé échapper les trois livres qu’elle serrait, avec son coude, contre sa hanche. Elle a eu beau se précipiter pour les ramasser, j’avais eu le temps de les reconnaître. « Osez la fessée » « Guide de la fessée et de la flagellation » « L’étrange passion. »
– Excusez-moi ! Excusez-moi !
Elle s’est enfuie avec sans demander son reste.

Et est revenue le lendemain.
– Qu’est-ce que vous allez penser de moi maintenant !
– Holà ! Beaucoup de mal.
Elle m’a jeté un long regard contrit.
J’ai éclaté de rire.
– Mais non, idiote !
Elle s’est un peu détendue.
– Remarquez, ce que je me suis dit, cette nuit, quand je dormais pas, c’est que si vous les aviez dans votre bibliothèque ces bouquins, c’était pas juste pour décorer. C’est que vous aussi ça vous intéresse. Non ?
– Ben, évidemment.
– Moi, c’est à cause d’Aurore. Elle adore ça m’en mettre. Et comme je peux rien lui refuser…
Elle a semblé contempler quelque chose longtemps, très loin, par la fenêtre.
– Enfin… C’est vrai et c’est pas vrai… Parce que moi aussi, j’aime bien. Surtout après. Quand elle me prend sur ses genoux, qu’elle me câline et qu’elle me console.




jeudi 16 novembre 2017

Mémoires d'une fesseuse (11)

C’est le sentiment d’une présence dans ma chambre qui m’a réveillée en sursaut, sur le coup de deux heures du matin. J’ai allumé. Marie-Clémence était toujours au coin. Là où je l’avais envoyée en début de soirée. Elle n’avait pas bougé.
– Qu’est-ce tu fous là ? Va te coucher !
L’image d’Hélène, penchée à poil sur sa table, m’a effleurée. Est-ce qu’elle non plus n’avait pas bougé, attendant patiemment que je vienne la délivrer ? Peut-être. Sûrement même. On verrait ça. Plus tard.
Et je me suis rendormie.

À neuf heures, j’ai déjeuné. Je me suis douchée. Habillée. Ce n’est qu’ensuite, bien après, que je l’ai appelée. Ça a d’abord sonné sept ou huit fois dans le vide avant qu’elle ne finisse par décrocher.
– Hélène ?
– Oui.
– Tu m’as désobéi. Tu n’es pas restée comme je te l’avais dit.
– Ah, mais si ! Si ! Je t’assure.
– Ah, oui ? Et comment t’as fait pour attraper ton téléphone alors ? Il était dans la cuisine.
Il y a eu un long silence.
– Tu vois bien… Non seulement tu me désobéis, mais, en plus, tu me mens. Bon, mais j’arrive. On va régler ça.

Je ne lui ai pas adressé un seul mot. Je me suis emparée du martinet et je l’ai aussitôt fouettée. Les coups de lanière s’abattaient sur sa croupe avec un bruit sec, s’y incrustaient en relief, la faisaient haleter, gémir et trépigner d’une manière dont je ne pouvais pas ne pas reconnaître, quand bien même je l’aurais voulu, qu’elle m’était extrêmement agréable. De plus en plus agréable au fur et à mesure que la correction se poursuivait et que son fessier se couvrait de longues zébrures boursouflées. Elle semblait y prendre, elle aussi, un incontestable plaisir. Ses fesses s’étaient progressivement mises à onduler lascivement d’une façon qui ne pouvait laisser planer aucun doute sur la nature de ce qu’elle ressentait.
Je me suis interrompue. J’ai glissé une main entre ses cuisses. Je suis remontée. Elle était trempée. J’ai un peu séjourné sur les rebords de sa fissure intime. M’y suis brièvement aventurée. Elle a poussé un long râle de satisfaction.
J’ai repris le martinet et j’ai recommencé à cingler. Toujours les fesses, mais très bas. Le plus bas possible. Elle a geint. De plus en plus vite. De plus en plus fort. Et elle a proclamé, à pleins poumons, une jouissance qui l’a fait basculer sur le côté. Dont elle a mis un temps infini à émerger.
– Merci. Oh, merci. Si tu savais !
Si je savais quoi ?

Je l’ai aidée à se redresser. On est allées s’asseoir.
Hein ? Si je savais quoi ?
– Comment c’est fabuleux un pied que tu prends, comme ça, pendant qu’on te corrige. C’est unique. À rien d’autre ça peut se comparer. Et c’est pas si souvent que ça arrive.
Elle m’a lancé un regard tout humide de gratitude.
– Mais ça, c’est parce que comment ça se sentait le plaisir que t’avais à diriger. À avoir les pleins pouvoirs. Et à taper. T’en étais tout enivrée. Toute dilatée. Un vrai bonheur pour moi.
Elle a posé sa main sur la mienne.
– La seule chose… c’est que tu peux lâcher tes coups, tu sais, si tu veux. Encore plus. Complètement. Plus ça fait mal et plus…
Elle n’a pas terminé sa phrase.

lundi 13 novembre 2017

Au plaisir des dames (2)

William Etty Male Nude Kneeling from the back; 1835-1845

– À l’abordage !
– T’as l’air bien décidée. Tu vas où comme ça ?
– Chez tes voisins. Leur porter un cageot de prunes. Ce qui me donnera l’occasion de voir les leurs de plus près. Et d’entamer un dialogue qui, je l’espère, sera constructif. Tu viens avec moi ?
– J’ai plein de trucs à faire.
– Bon, ben je te raconterai alors ! À tout de suite.

– T’en as mis un temps !
– Oh, fallait bien ça.
– Pour ? Eh bien, raconte, quoi !
– En tout cas, ils sont charmants. Et hyper bien foutus. De près ça saute encore plus aux yeux. Comment tu te régales ! T’as loupé quelque chose, là. T’aurais dû venir.
– Vous avez discuté ?
– On n’a même fait que ça. Et je peux te dire que le Nicolas, il s’y connaît sacrément bien en peinture. Quant à Gilles, on est tombés d’accord. Je vais faire son portrait. En pied.
– Comment ça, tu vas faire son portrait en pied ? À poil ?
– Évidemment, à poil ! Quel intérêt, sinon ? Demain on commence. Tu pourras venir si tu veux. C’est vraiment pas le genre de type que ça va déranger.

– T’as causé… T’as causé… Et tu l’as pas beaucoup peint le Gilles du coup.
– Mais toi, par contre, t’as beaucoup reluqué en douce.
– Ça s’est vu, tu crois ?
– Je sais pas. Je crois pas qu’ils aient fait attention. Tu t’en fous n’importe comment. Qu’est-ce ça peut faire ?
– Oui, non, mais quand même ! Faudrait pas qu’ils aillent s’imaginer…
– Que quoi ? Que tu les trouves à ton goût ? T’es sûrement pas la première. Et c’est le genre de chose qui fait plutôt plaisir, non ? Tout le monde adore ça. En attendant, moi, tu peux être tranquille que je vais prendre mon temps, mais alors là, vraiment tout mon temps. Sous toutes les coutures je vais le peindre le Gilles. Et l’autre aussi, là, le Nicolas, bien pris, il va y attraper pareil. Faut pas qu’il s’imagine qu’il va s’en sortir comme ça. Ah, tu peux t’attendre à m’avoir un bon moment à squatter chez toi.
– Tout le temps que tu voudras. C’est pour la bonne cause.

– T’aurais dû venir. Parce que t’as vraiment loupé quelque chose, là.
– Oui, mais comme je t’ai dit. Pas à chaque fois.. Toi, t’as une raison pour y aller. Moi, j’en ai pas. Et j’aurais trop l’air de vouloir surveiller tout ce qui se passe.
– Remarque, dans un sens, valait peut-être mieux que tu sois pas là aujourd’hui. Qu’on soit que tous les deux. Il était plus à l’aise pour parler.
– Pour parler de quoi ?
– Je lui ai dit que t’avais remarqué qu’ils avaient les fesses rouges des fois.
– T’as pas fait ça !
– Ben si ! Pourquoi ? Ce qui l’a beaucoup amusé… « Comme quoi, elle est pas aussi miro qu’elle le prétend ! » Et j’ai eu le fin mot de l’histoire. Ils font de la lutte tous les deux. À haut niveau. Ils sont taillés pour, faut dire.
– De la lutte ? Oui. Et alors ? Je vois pas le rapport.
– Mais si ! C’est que les deux filles, là, quand elles viennent, elles se prennent chacune un champion. Ils combattent. Et le gagnant, celle qui l’avait choisi, elle l’emmène dans la chambre. Quant à l’autre, il reste sur la béquille. Et la fille qui comptait sur lui, ben elle le punit. D’autant plus vigoureusement qu’elle se sent plus frustrée. C’est un jeu entre eux, quoi, en somme.
– Ah, je comprends mieux.
– Ça te laisse rêveuse, on dirait.
– Un peu.
– On jouerait bien, nous aussi, non ?
– Oui, mais faut pas rêver.
– Eh, qui sait ? Si on s’y prend bien… Moi, je suis bien décidée à tenter le coup. D’autant qu’on y mange ce soir. Ils nous invitent.



jeudi 9 novembre 2017

Mémoires d'une fesseuse (10)

Une fois dehors, j’ai hésité. Et maintenant, je procédais comment ? Je remontais, très vite, lui administrer une bonne fouettée ? Ce qui, je dois bien le reconnaître, me démangeait fortement. Ou bien est-ce qu’au contraire je faisais durer ? Est-ce que je la laissais comme ça, penchée sur la table, les fesses à l’air, à attendre indéfiniment mon retour ? À l’espérer et à l’appréhender tout à la fois ? Ce qui, maintenant que je m’étais installée aux commandes, que j’avais pris le pas sur elle, allait très probablement asseoir définitivement mon pouvoir. Perspective enivrante. Très. Non, il n’y avait pas à hésiter le moins du monde.

Et je suis rentrée chez moi. Sans bruit. Pour ne pas réveiller Marie-Clémence. Marie Clémence que j’ai découverte, quand j’ai poussé la porte de ma chambre, installée dans mon lit. Dont elle est sortie en toute hâte. À poil.
– Ben, qu’est-ce tu fous là ?
– Je m’en vais… Je m’en vais…
– Et c’est quoi, tout ça ?
Des photos, des dessins, étalés sur ma couverture, qu’elle s’est empressée de dissimuler à mes regards. Qu’elle a glissés sous son bras. Et elle a voulu s’enfuir.
Je l’ai empêchée de passer.
– Non. D’abord, tu m’expliques…
– T’avais dit que tu rentrerais pas cette nuit.
– Oui. Et alors ?
– Ben…
– T’en as profité pour venir te branler dans mon lit.
Elle a baissé la tête.
– Eh, bien ? Réponds !
– Oui.
– Et ça t’arrive souvent ?
– Oh, non !
– Menteuse ! Chaque fois qu’une occasion se présente, oui, tu veux dire ! Alors là, je suis bien tranquille… Bon, mais c’est quoi, là, tout ça, que tu caches sous ton bras ?
– C’est à moi.
– Je te demande pas si c’est à toi. Je te demande ce que c’est. Donne ! Allez, donne ! Fais attention, Marie-Clémence ! Fais bien attention !
Elle a donné. À contre-cœur.
Des photos. De moi. Une en pied, appuyée à un arbre. Une autre sur la plage, en petit maillot moulant noir. Et trois de mon visage. En gros plan. Des photos qui provenaient de mes albums. Qu’elle avait très probablement discrètement scannées en mon absence.
Et des dessins. Des dessins faits par elle. Une dizaine. Sur toutes, on me voyait en train de la fesser devant des rangées de spectateurs rigolards. Qui se moquaient ouvertement d’elle.
– La honte, hein ? Toujours la honte. En attendant, tu as vraiment un excellent trait de plume.
Elle a tendu la main pour les reprendre.
– Non. Confisqué.
Et je les ai jetés sur mon bureau où je me suis alors aperçu que traînait ma jolie ceinture de cuir jaune.
– Qu’est-ce ça fait là, ça ?
Elle a balbutié, rougi.
– C’est qu’elle…
– Enflammait ton imagination. Je vois… Bon, mais il y a pas que ça qu’elle va enflammer.
Je lui ai indiqué mon lit. De mon bras tendu.
– Retournes-y, puisqu’il te plaît tant.
Elle est allée tout droit s’y allonger. Sans un mot. Sur le ventre. Docilement. A enfoui sa tête dans l’oreiller.
J’ai aussitôt cinglé. Cinq ou six coups très rapprochés qui lui ont arraché des gémissements étouffés. Et puis d’autres, plus espacés, mais plus appuyés, qui la faisaient, chaque fois, se soulever du derrière.
J’ai brusquement cessé.
– Au coin ! Va au coin…
Elle a trottiné jusque là.
– Les mains sur la tête !
Elle a obéi.
Et j’ai longuement photographié son postérieur tuméfié. Barré de longues traînées carminées.
Elle n’a rien dit. Elle n’a pas protesté. Elle n’a rien demandé. Elle ne s’est pas retournée non plus.

lundi 6 novembre 2017

Au plaisir des dames (1)

Henri Herbert La Tangue. In the Orchard, 1893

– Et c’est souvent qu’ils se baladent à poil comme ça, tes voisins ?
– À longueur de journée. S’il fait beau, évidemment. Soi-disant qu’ils sont naturistes. Oh, mais ils sont très corrects, hein ! Ils sont d’abord venus me demander si ça me dérangeait pas. Comme je leur ai dit… « Mes pauvres enfants ! Vous faites bien ce que vous voulez. De toute façon, j’y vois plus grand-chose, moi, maintenant, vous savez ! »
– Tu parles ! À d’autres ! T’y vois comme à vingt ans.
– Oui, mais, comme ça, ils se sentent plus libres.
– Et toi, tu peux te rincer l’œil tout ton saoul.
– Si, à mon âge, on peut même plus s’offrir le plaisir de reluquer des beaux mecs, alors qu’est-ce qu'il reste comme satisfaction dans la vie ? Il y a plus qu’à crever.
– Faut reconnaître qu’ils sont sacrément bien foutus. Moi, si j’avais des voisins comme ça…
– Tu passerais ta vie au jardin. C’est bien ce que je fais.
– Non, mais regarde-moi ces petites fesses ! Elles sont pas à croquer ?
– Tu prêches une convaincue.
– Si je devais choisir…
– Tu pourrais pas. Moi non plus. J’aurais à peine opté pour l’un que je regretterais de ne pas avoir choisi l’autre.
– De toute façon, la question se pose pas. Qu’est-ce qu’ils peuvent bien avoir à fiche de nous, tu parles ! D’autant qu’ils doivent avoir toutes les filles qu’ils veulent à leurs pieds.
– Peut-être.
– Non ? T’as l’air dubitative. Remarque, deux types qui vivent comme ça sous le même toit, il y a quand même pas mal de chances pour qu’ils soient homos.
– Je sais pas. D’un côté, il y a des trucs qui me donneraient à penser que oui.
– Quels trucs ?
– Ben, par exemple, c’est souvent que Gilles, il fait la sieste dehors…
– Lequel c’est, Gilles ?
– Le plus petit. Le brun. Et que Nicolas le regarde dormir. Et qu’il bande en le regardant. Il arrête pas de bander.
– Oui, oh, ben alors !
– Mais, d’un autre côté, souvent il y a des filles qui passent. Qui restent tout le week-end. Et, quand elles repartent, ils ont le derrière tout rouge.
– Comment ça ?
– Ben, ils se sont pris une fessée. Faut quand même pas que je te fasse un dessin ?
– C’est pas vrai ! Et ils sortent dans le jardin comme ça ?
– Ils sont persuadés que j’y vois quasiment rien, je te rappelle…
– C’est qui, ces filles ?
– Je n’en ai pas la moindre idée.
– Peut-être qu’elles savent des trucs sur eux. Et qu’elles les font chanter. Ou la fessée ou on vous dénonce.
– J’y ai pensé aussi.
– Ou bien alors ils adorent qu’on leur tanne le cul. Que des femmes leur tannent le cul.
– Je croirais plutôt ça.
– Et toi, pendant ce temps-là, tu restes tranquillement assise là, à regarder tout ça de loin ! Si c’est ça, mais faut y aller. Faut foncer.
– Je sais pas, je…
– Mais bien sûr que si ! Parce qu’ils attendent qu’une chose, si ça tombe. C’est que tu leur en colles une. Tu penses bien que c’est pas un hasard s’ils viennent te balancer comme ça leurs petits derrières tout rouges sous le nez.
– Tu crois ?
– C’est pas que je crois, c’est que je suis sûre. Bon, mais allez ! On lance l’opération « voisins ». Et je te parie qu’avant trois jours ils viennent nous offrir leurs fesses, docilement allongés en travers de nos genoux…

(à suivre)

jeudi 2 novembre 2017

Mémoires d'une fesseuse (9)

Chez elle, j’ai aussitôt voulu prendre les choses en mains. Faire preuve de détermination. Qu’elle n’aille pas s’imaginer que je n’étais pas à la hauteur. Et regretter de m’avoir fait confiance. Je me suis donc installée, d’autorité, dans le fauteuil qui trônait, à la place d’honneur, devant la cheminée.
– T’as sûrement un martinet quelque part ?
Elle avait, oui.
– Va me le chercher…
Ce qu’elle s’est empressée de faire.
– Donne !
Je l’ai fait claquer en l’air. Plusieurs fois.
– Là ! Et maintenant désape-toi !
D’un ton sec. Cassant. Elle m’a lancé un bref regard de satisfaction. Et elle a obéi. La robe. Dont elle a fait glisser, dans le dos, en se contorsionnant, la fermeture-éclair. Qu’elle a passée par-dessus la tête. Le soutien-gorge. Dont elle a ramené l’attache devant, sous les seins, après les avoir extirpés des bonnets. Sans se détourner. Elle l’a dégrafé, jeté derrière elle. Et puis elle a attendu. Quelque chose. Un ordre. Ou un encouragement. Que je me suis bien gardée de lui donner. J’ai attendu, moi aussi, impassible, impénétrable, sans la quitter un seul instant des yeux. Il s’est passé du temps, beaucoup de temps, avant qu’elle se résolve enfin à sortir de sa culotte. Une jambe après l’autre. Un pied après l’autre. Et elle est restée là, intégralement nue devant moi, les bras ballants le long du corps, la tête basse.
Je l’ai longuement détaillée. De haut en bas. De bas en haut. En m’attardant longuement ici ou là. Et puis j’ai ri. D’un long rire offensant sur les raisons duquel je lui ai laissé tout loisir de s’interroger.
Je me suis ensuite lentement levée, approchée.
– Tu n’as pas honte ?
Elle a gardé les yeux obstinément baissés.
– Hein ? Tu n’as pas honte ? Eh, bien ? Réponds !
– Si !
D’une toute petite voix.
– Tu vas être punie pour ça…
Je l’ai prise par le bras, menée jusque devant la grande table en chêne.
– Penche-toi !
Je lui ai pesé, de toutes mes forces, sur la nuque, l’ai obligée à s’incliner, à l’équerre, la joue écrasée contre la table.
– Là ! Et on bouge plus.
Je lui ai lentement, très lentement, promené les lanières du martinet tout au long de la colonne vertébrale, puis du sillon entre les fesses.
Elle a frémi. J’ai recommencé. Deux fois. Trois fois. J’ai alors jeté le martinet, à côté d’elle, sur la table.
– C’est tout pour aujourd’hui…
– Oh, non !
– C’est moi qui décide ! C’est pas moi qui décide ?
– Si !
– Alors tu restes là ! Tu restes comme ça… Tu bouges pas… Et je veux pas t’entendre.
Et je me suis mise à errer, tout à loisir, dans son appartement. J’ai visité les pièces, ouvert les placards, les penderies, sorti ce qu’il y avait dans les tiroirs.
– C’est pas mal chez toi, dis donc !
J’ai longuement exploré la bibliothèque.
– Houla ! Zola… Flaubert… Balzac… Comment c’est sérieux, tout ça ! Il y en a d’autres, je suis sûre. Bien planqués quelque part. Tiens, qu’est-ce que je disais ! « Les délices du fouet. » Tout en haut et tout derrière. Je te l’emprunte. Je te le ramènerai.
Et je me suis dirigée vers la porte.
– Bon, ben j’y vais, moi ! Mais t’inquiète pas, je vais revenir ! Dans cinq minutes. Ou dans une heure. Ou dans dix. Ou demain. Mais je reviendrai. Promis. En attendant, toi, interdiction de bouger de là. C’est bien compris ?
– Oui.