jeudi 26 décembre 2019

Fessées punitives (35)


C’est la dernière personne à laquelle j’aurais imaginé avoir un jour recours. C’est pourtant lui que j’ai appelé. Étienne. Aussitôt Océane partie. Parce que j’avais éprouvé un tel plaisir à la cingler que j’en étais absolument terrifiée.
Il m’a écoutée lui exposer tant bien que mal la situation au téléphone. Sans jamais m’interrompre.
Il s’est contenté, quand j’ai eu terminé, d’un « Venez ! Je vous attends ! » péremptoire.
Et j’ai pris la route, regrettant déjà mon initiative. « T’as de ces idées, ma pauvre fille ! Tu vas en prendre plein la gueule pour pas un rond. Et, si ça tombe, déclencher des catastrophes en série dont tu n’as pas la moindre idée. T’aurais bien mieux fait de te tenir tranquille. » Mais il était trop tard pour reculer.

Il m’a avancé un fauteuil.
‒ Asseyez-vous !
A pris place en face de moi, m’a fixée un interminable moment sans rien dire. J’ai croisé, décroisé, recroisé les jambes, encombrée de moi-même. J’ai fini par me résoudre à prendre la parole.
‒ Si je suis venue…
Il m’a sèchement coupée.
‒ C’est que vous avez pris un pied pas possible à fouetter Océane. Et que ça vous a complètement déstabilisée. J’ai bien compris, oui. De quel droit ?
Je me suis troublée.
‒ C’est parce que… La façon dont elle s’est comportée Par rapport à Julien… Elle a cherché à nous séparer.
‒ Et alors ! C’est pas une raison.
J’ai bafouillé.
‒ Je l’ai pas forcée non plus. Elle était d’accord. C’est même elle qu’a demandé. Pour que je lui pardonne. Pour que ça redevienne comme avant toutes les deux.
‒ En somme, ce qu’il s’est passé, c’est que vous avez fait votre petite soupe, toutes les deux, sans en parler à personne. Derrière notre dos à tous. C’est bien ça ?
‒ Non. Enfin, si ! Oui, mais
‒ Vous avez joué avec le feu, Lucile. Ce n’était absolument pas à vous de punir Océane. Il fallait nous en parler à nous. Nous aurions avisé et pris, le cas échéant, la décision qui convenait. Vous ne pouvez pas être à la fois juge et partie.
‒ Je croyais J’ai cru
‒ Eh bien, vous avez eu tort. Vous n’aviez pas, vous n’avez pas à punir qui que ce soit. Ou pas encore. Cela viendra peut-être. En son temps. Mais, pour l’heure, c’est à tout le moins prématuré. Alors pas étonnant que vous vous sentiez aussi désorientée, aussi perturbée. Vous avez cru bon d’endosser un rôle qui ne pouvait pas, qui n’avait pas à être le vôtre. Et vous avez mérité d’être punie pour ça. Non ?
Hein ? Je croyais pas, non. Peut-être. Je savais pas en fait.
‒ Bien sûr que si que vous savez. C’est même pour ça que vous êtes venue me trouver. Pour que je vous punisse d’avoir pris cette initiative malheureuse. Et d’en avoir éprouvé une satisfaction intense. Parce que vous êtes parfaitement convaincue, tout au fond de vous-même, qu’il n’y a guère qu’une bonne fessée qui puisse vous débarrasser, au moins partiellement, du sentiment de culpabilité qui vous a investie depuis. Et qui vous ronge. Je me trompe ?
Non. Non, il ne se trompait pas. Ça m’est brusquement apparu comme une évidence absolue. J’en avais besoin de cette fessée. Un besoin impérieux. Pour me retrouver en accord avec moi-même. Pour arriver à me pardonner. Oui, il me la fallait. De toute urgence.
Je me suis levée. Je me suis approchée de lui.
‒ Punissez-moi !
Il m’a fait relever.
‒ Vous le serez. Promis ! Bientôt. Très bientôt. Mais pas ici. Pas maintenant. Là-bas. Chez vous. Devant tout le monde.

jeudi 19 décembre 2019

Fessées punitives (34)


‒ On déjeune ensemble ?
Oh, elle demandait pas mieux, Océane. Elle demandait pas mieux. Au contraire.
Et, à midi, je suis passée la chercher au magasin.
L’arrière-salle du petit restaurant derrière la mairie. On s’est attablées. On a commandé. Et elle a froncé les sourcils.
‒ Qu’est-ce t’as ? Tu fais la gueule ?
‒ Il y a de quoi, non ?
Elle m’a jeté un regard interrogateur.
‒ De quoi ! Je vois pas. Explique-toi !
‒ Tu vois pas ! T’as pas essayé de me séparer de Julien peut-être ?
‒ Mais non !
‒ Arrête ! Je t’en prie, arrête ! Tu me l’as pas débiné tant que tu pouvais. Qu’il était prétentieux. Qu’il était pas fiable. Que sûrement c’était quelqu’un qui faisait ses petits coups en douce. J’en passe et des meilleures.
‒ Je t’ai expliqué. C’est avec tout le monde que je suis comme ça. Je vous ai pas particulièrement visés, Julien et toi.
‒ Ce qui change pas grand-chose au problème.
‒ Ça arrivera plus. Maintenant que j’en ai pris conscience. Et que c’est pour ça, entre autres, que j’ai été punie l’autre jour.
‒ Ce qui t’empêchera sûrement pas de recommencer.
‒ Je te jure que non.
‒ N’empêche que ça me reste en travers de la gorge. Et que ça pourra plus jamais être comme avant maintenant, toutes les deux.
‒ Tu m’en veux tant que ça ?
‒ Franchement, oui.
‒ Mais c’est pas possible, enfin ! On est amies. Je veux qu’on le reste. Absolument. J’en ai besoin, moi. Qu’est-ce que je peux faire ? Qu’est-ce que tu veux que je fasse ? Dis-moi ! Tu veux me punir ? De ta main ? Fais-le !
‒ Ça me défoulerait à défaut d’autre chose.
‒ Eh bien, allez alors ! Allez ! Je pose mon après-midi.

Et on s’est retrouvées toutes les deux chez moi.
‒ Déshabille-toi !
Elle l’a fait. Sans un mot. Complètement. Entièrement. Et elle est restée là, nue, tête basse, à attendre.
‒ Tu n’as rien à me dire ?
‒ Si ! C’est moche ce que je t’ai fait. Très moche. Je regrette. Je te demande pardon.
Je l’ai saisie par la nuque, entraînée jusqu’au canapé, fait s’agenouiller, se pencher en avant.
Les marques de la fessée que Julien lui avait donnée étaient encore bien présentes. En pourpre. En rouge grenat. Et en jaunâtre par endroits. Ou en bleuâtre.
Je les ai longuement contemplées. Avec un intense sentiment de satisfaction dont je ne me suis pas défendue. Que j’ai, au contraire, accueilli sans en éprouver, cette fois, la moindre culpabilité.
J’ai passé mon doigt sur toute la surface de son derrière meurtri. Je l’y ai enfoncé par endroits.
‒ Ça fait mal ?
Elle gémissait.
‒ Oui.
‒ Et là ?
‒ Aïe ! Aussi. Pire.
Je lui ai susurré à l’oreille.
‒ C’était rien, ça. Rien du tout. C’est à la ceinture, maintenant, que je vais te le faire. Une ceinture de Julien. Comme il se doit.
Elle a frémi. Elle s’est crispée. Et elle a murmuré.
‒ Fais ce que tu veux ! J’ai mérité que tu me punisses.

jeudi 12 décembre 2019

Fessées punitives (33)


Dans un demi-sommeil, j’ai vaguement perçu qu’il faisait jour, que Julien se levait sans bruit, qu’il se douchait, qu’il venait me déposer un rapide baiser sur les lèvres.
‒ À ce soir, amour !
J’étais bien. J’ai longuement somnolé. Des images me sont venues. Revenues. Les mêmes que la veille au soir. Océane. Océane, le cul à l’air, se faisant copieusement fesser par Julien. Océane criant sous les claquées. Océane se tortillant de douleur et ne laissant rien ignorer de la façon dont elle était faite. Je les ai longuement caressées, ces images. Je m’en suis délectée. Je m’en suis repue.
Et puis, c’est Bérengère qui a voulu venir prendre sa place. Je l’ai repoussée avec agacement. Qu’est-ce qu’elle venait fiche là, elle ? Que j’aie du plaisir à évoquer la fessée d’Océane, oui, rien de plus légitime. Elle avait tenté de me séparer de Julien. Mais Bérengère ! Elle ne m’avait rien fait, Bérengère. Et pourtant ! Ça a insisté. Ça a absolument venu s’imposer. Mes doigts se sont égarés à la recherche de moi-même. Je me suis secouée.
‒ Tu es folle, ma pauvre fille ! Tu es complètement folle !
Je me suis levée. Je me suis activée. La lessive. Le ménage. Mais c’est resté là toute la matinée en arrière-fond. Une interrogation. Une inquiétude. Est-ce que j’étais détraquée ? Ou pire, perverse ?

C’est en tout début d’après-midi que je me suis décidée à aller voir Émilie. C’était la seule à qui je pouvais parler de tout ça à cœur ouvert. Océane ? Il n’en était évidemment pas question. Quant à Bérengère, c’était Bérengère. Et mes états d’âme risquaient de lui passer à cent mille lieues au-dessus de la tête.
Émilie m’a écoutée avec beaucoup d’attention. A souri.
‒ Tu crois que j’ai fait quoi, moi, hier soir, juste après ? Eh bien, je suis allée voir mon copain Alex. Qu’est super. Qui pose pas de questions. Et qui me dépanne quand j’ai impérieusement besoin d’un mâle. C’est normal que ça excite d’assister à une fessée, attends ! Moi, en tout cas, ça me le fait à chaque fois. Mais c’est pas pour autant que j’ai recours à Alex à chaque fois, hein ! Ça dépend. De plein de trucs. Et toute seule, comme t’as fait, toi, là, c’est pas mal non plus.
‒ Mais je croyais que… Tu m’avais dit…
‒ Que c’était la recevoir qui m’excitait. Aussi, oui. C’est pas incompatible. Ça t’étonne ?
‒ Oui. Non. Je sais pas. Je suis un peu paumée.
‒ C’est les deux côtés de la même médaille en fait. Et maintenant que tu as goûté à celui-là, il y a toutes les chances que tu sois tentée par l’autre.
‒ Tu veux dire que ça va me plaire d’en recevoir ?
‒ En quelque sorte, oui.
J’ai fait la moue.
‒ Je me vois vraiment pas dans le rôle.
‒ C’est sans certitude absolue non plus, mais suppose que tu doives en recevoir une demain Comme ça t’a remuée d’assister à celle d’Océane hier et, rétrospectivement, à celle de Bérengère, l’autre jour, qu’est-ce que tu vas te dire ? Ben, que peut-être bien que les autres, elles vont ressentir la même chose que toi. Probable, même. Qu’elles vont prendre un certain plaisir à te voir en ramasser une. Moi, ce sera le cas, ce qu’il y a de sûr. Et ça va déclencher quoi, chez toi, de savoir ça ? Tu vas avoir honte. Encore plus honte que les autres fois, oui. Mais, en même temps, l’idée que, grâce à toi, elles éprouvent une certaine jouissance, est-ce que ça va te laisser indifférente ? Est-ce que ça ne va pas provoquer chez toi, en retour
‒ Oui. Je comprends. Ça se tient ce que tu dis là. Ça se tient.
‒ Après, tu verras par toi-même. Parce que les expériences des unes ne coïncident pas forcément exactement avec les expériences des autres.
‒ Oui, mais alors si ça devient aussi jouissif que ça d’en recevoir…
‒ Ça ne sera plus dissuasif ? On va délibérément chercher à en mériter ? Oui, eh bien alors là, détrompe-toi ! Pas du tout ! Au contraire. Parce que la honte qui va avec ces sensations-là, aussi agréables soient-elles, elle est d’une telle intensité, elle est si bousculante que t’as pas la moindre envie d’aller volontairement la chercher.

jeudi 5 décembre 2019

Fessées punitives (32)



Ça l’avait excité, Julien, de fesser Océane. Est-ce qu’il pouvait en être autrement ? Bien sûr que non ! Je n’étais pas complètement idiote. Aussi n’ai-je pas été surprise qu’il n’ait rien eu de plus pressé, une fois tout le monde parti, que de m’attirer contre lui, son désir déployé contre ma cuisse. De m’entraîner dans la chambre, de me pousser vers le lit et de me faire fougueusement l’amour. J’ai joui, heureuse, dans ses bras. Il était à moi. À moi ! Et à personne d’autre. Elle était à moi, sa queue. C’était en moi qu’elle se déversait. C’était en moi que cheminait sa semence.

Je n’ai pas réussi à m’endormir. Il était à moi, oui, mais Océane, de son propre aveu, s’ingéniait à briser les couples, s’y employait avec délectation. Alors est-ce qu’on y avait eu droit, nous aussi ? Est-ce qu’elle s’était efforcée de nous séparer, Julien et moi ? Si j’y réfléchissais tranquillement maintenant, à tête reposée ? Il m’est peu à peu revenu des conversations qu’on avait eues, des propos qu’elle avait tenus. Et oui. Oui. Pas le moindre doute possible. Oui. Et moi qui lui faisais confiance ! Quelle petite saloperie ! Ah, elle l’avait méritée, sa fessée, ah, oui, alors ! Et je me la suis repassée, bien en détail, avec délectation. Comment ils s’imprimaient bien en profondeur sur son derrière les doigts de Julien. Comment elle le trémoussait en cadence son petit croupion. Et ce rouge ardent dont il se colorait délicieusement ! C’était du plus bel effet vraiment ! Je me suis complaisamment attardée sur ces images. Je les ai fait revenir inlassablement. Encore et encore. Voluptueusement. Tant et si bien que c’est redevenu lancinant entre mes cuisses. Que je n’ai pas pu me retenir. Que j’y ai laissé s’aventurer un doigt. Qui y a clapoté. Qui a voulu s’aventurer plus loin. Qui s’est fait exigeant. Au risque de réveiller Julien.

Je me suis levée sans bruit. Je me suis rendue, à pas de loup, jusqu’à la salle de bains, assise, dans l’obscurité, sur le rebord de la baignoire. Et j’ai reconvoqué Océane. Je lui ai remis les fesses à l’air. Il les a à nouveau claquées, Julien. Avec conviction. Oui ! Qu’il tape ! Encore ! Plus fort ! Elle méritait. Comment elle méritait ! Vouloir nous séparer, lui et moi ! Non, mais quelle infâme petite ordure elle faisait ! Les claques s’abattaient. Avec force. Quel plaisir j’ai pris à voir rougir son cul. Qui s’agitait. Qui ondulait. Qui se tortillait. Qui ne laissait rien ignorer de ses secrets les plus intimes. Quel spectacle réjouissant c’était que de les voir ainsi exposés à la vue de tous. Comment elle devait avoir honte ! « T’arrête pas, Julien, hein, surtout ! Tape ! Le plus fort que tu peux. Tape ! Fais-la brailler ! Fais-la hurler ! Fais-la supplier ! » Lui, il ne demandait pas mieux. Au contraire. Et il a donné sa pleine mesure. Et elle s’est égosillée. Elle a bramé. Elle a meuglé. Elle a rugi. Moi aussi. J’ai feulé mon plaisir. À pleine gorge. Je l’ai déferlé sans la moindre retenue.

Je me suis immobilisée. J’ai retenu mon souffle. J’ai écouté. Aucun bruit en provenance de la chambre. De toute façon, Julien, lui, quand il dormait, la maison aurait bien pu s’effondrer que ça ne l’aurait pas réveillé.
Je suis restée assise sur le rebord de la baignoire. Maintenant que les ondes de mon plaisir s’étaient estompées, que j’avais recouvré mes esprits, je ne pouvais me défendre d’un certain sentiment de malaise. J’avais éprouvé une satisfaction intense à voir Julien fesser Océane. Et pire encore, je m’étais donné du plaisir en évoquant la scène. En la revivant. Ce n’était pas moi, ça. Ça ne me ressemblait pas. Et pourtant…
J’ai tenté de me rassurer. C’était parce qu’Océane avait envisagé de me séparer de Julien, tout ça. C’était humain comme réaction. Jamais par ailleurs… Jamais, lors des fessées qu’avaient reçues Émilie ou Bérengère, je n’avais éprouvé quoi que ce soit de cette nature. Jamais ? Une petite voix en moi, lancinante, n’en était pas si sûre, prétendait qu’il ne s’en était fallu d’un rien et que sûrement la prochaine fois, maintenant qu’un verrou avait sauté…
J’ai haussé furieusement les épaules. Oh, et puis zut ! Zut !
Et je suis retournée me coucher.

jeudi 28 novembre 2019

Fessées punitives (31)


C’est moi qui me suis chargée de contacter tout le monde.
Et de prévenir Océane.
– C’est pour ce soir…
– Déjà ! Mais que c’est que ça m’arrange pas, moi, ce soir !
– Parce que ?
Il y a eu un long silence.
– Allô… T’es toujours là ?
Elle était là, oui. Et elle a soupiré.
– Ça sert à rien de reculer n’importe comment. Vu que de toute façon faudra que j’y passe…
– Effectivement. Alors le plus tôt sera le mieux.

Julien a voulu que ce soit elle, Océane, qui dispose les chaises.
– De façon à ce que tout le monde puisse en voir le plus possible. Et dans les meilleures conditions.
On s’est assis.
Étienne à ma droite. Qui a voulu savoir si j’avais réfléchi.
– Un peu, oui, mais je n’ai rien trouvé.
Il a souri d’un air entendu.
– Ça viendra.
Et Valentin à ma gauche.
– Je devrais avoir le droit de filmer, moi, j’trouve ! Vu que c’est ma femme qui y attrape. Je pourrais lui repasser la séance comme ça. Peut-être que ça l’aiderait à arrêter de boire. Sûrement même ! C’est une idée, ça ! Faudra que je leur en parle aux autres quand on se verra uniquement entre nous.

Julien s’est installé. Face à nous. Et le silence s’est fait.
Un signe de lui. Et Océane s’est approchée.
– Plus près ! Encore ! Allez, encore !
Elle a obéi. Il lui a saisi les poignets. Les lui a emprisonnés.
– Tu as recommencé. Regarde-moi ! Tu as recommencé.
– Oui.
La tête basse.
– Tu n’as pas quelque chose à demander, du coup ?
– Si ! Qu’on me punisse ! Je l’ai mérité. Que ça me serve de leçon…
Il a passé les mains sous sa jupe. Des deux côtés. Il a descendu la culotte. Qui lui est tombée sur les chevilles.
– Retire-la ! Complètement. Que tu puisses gigoter tout à ton aise.
Elle l’a fait. Un pied après l’autre.
– Allez !
Il l’a saisie par la taille, fait basculer en travers de ses genoux. Elle s’y est docilement laissé allonger, caler.
Il lui a relevé la jupe au-dessus de la taille. Les fesses à découvert. Il en a pris possession, d’une main distraite.
– Prête ?
Il n’a pas attendu la réponse. Il a tapé. Une grêle de claques. Vigoureusement assénées. À un rythme soutenu.
– Je peux te dire que celle-là, tu vas t’en souvenir et qu’elle va te faire passer à tout jamais l’envie de boire quoi que ce soit.
Il n’y avait pas que ça. Il y avait aussi ce qu’elle et moi on était les seules à savoir. C’était pour ça aussi qu’elle était punie. C’était pour ça surtout que ses fesses étaient en train de virer au rouge incandescent. Que ses jambes étaient en train de battre désespérément l’air. Qu’elle gémissait comme une perdue.
Est-ce qu’elle avait également envisagé de me séparer de Julien ? Oui. Évidemment. Comme elle l’avait fait pour toutes les autres. Sale petite garce ! Qu’il tape ! Plus fort ! Encore ! Encore ! Là… Comme ça, oui.
Elle a crié.
Et ça a été tout mouillé entre mes cuisses.

jeudi 21 novembre 2019

Fessées punitives (30)


Je suis allée la secouer.
– Océane !
Elle a grogné.
– Oui. Quoi ?
– Il est neuf heures. Et tu bosses aujourd’hui, non ?
– J’irai pas. J’ai pas envie. J’appellerai.
Elle s’est redressée, a bâillé à se décrocher la mâchoire.
– Je suis pas en état de toute façon. Non, mais comment j’ai la tête dans le cul !
Et elle a brusquement proclamé, d’un ton péremptoire.
– Mais j’étais pas saoule hier soir, hein, faut pas croire !
– Saoule, non ! Mais bien entamée, oui. Ce qui revient finalement au même. Tu vas y avoir droit, ce qu’il y a de sûr. Et Julien ne va pas te ménager.
– Je sais, oui !
– Ce que je comprends pas… T’aurais pu y échapper. Tu serais allée à l’hôtel, t’aurais tranquillement cuvé et on n’y aurait vu que du feu. Mais non ! Il a fallu que tu viennes te jeter en direct dans la gueule du loup.
– Me défiler ? Pour traîner ma culpabilité pendant des semaines et des semaines ? Ah, non, non ! C’est moi qui ai demandé, et ce sans la moindre ambiguïté, à être punie, dans mon propre intérêt, chaque fois que je repiquerais à l’alcool. C’est la seule chose qui soit réellement efficace avec moi. Une bonne fessée. Pas le moindre doute là-dessus. Alors si je veux arriver à finir par complètement en sortir…
Elle s’est perdue quelques instants dans ses pensées.
– Non. Et puis il y a pas que ça. Il y a pas que pour avoir bu qu’il va me punir, ce coup-ci, Julien. Il y a autre chose. De beaucoup plus grave. Sur quoi il m’a fait mettre le doigt. Il est redoutable, ton mari, quand il veut. Il sait appuyer là où ça fait mal. Et il te lâche pas. Jusqu’à ce que t’aies le nez dessus. Et dedans. Alors personne le saura, personne s’en doutera, peut-être même pas lui, mais, dans ma tête à moi, c’est pour quelque chose de complètement différent que je vais la recevoir, la fessée.
– Je voudrais pas être indiscrète, mais si ça peut te faire du bien d’en parler…
– Ce qui me sidère, ce qui me sidère complètement, c’est qu’on peut faire des trucs, systématiquement, obstinément, pendant des années et des années, sans même s’apercevoir qu’on les fait.
– Quels trucs ?
– Je supporte pas que les autres soient en couple en fait. Dès que j’en ai un dans les parages, je fais tout pour le détruire. Systématiquement. Je me rendais pas compte, mais si, oui. Maintenant que j’ai le nez dessus, c’est une évidence. Et je peux être très très retorse si je veux. C’est à la nana que je m’en prends. Jamais au mec. Ça me sauterait trop aux yeux sinon ce que je suis en train de faire. J’aurais trop ouvertement l’air de la petite salope briseuse de ménages. Alors non. Je fais amie-amie avec la femme. J’entre en confidences. Réelles ou inventées. Je la pousse à s’épancher à son tour. À me parler de son compagnon. Et je cherche la faille. Il y en a toujours une. Un défaut, une manie chez lui qui la hérisse. Je monte ça en épingle. J’en rajoute une couche. J’en débusque d’autres, des défauts. De toute sorte. Elle le défend. Mollement. Avec moins en moins de conviction. Peu à peu, au fil de nos échanges, il lui apparaît sous un jour radicalement différent, fort peu séduisant. Et elle s’interroge. Non, mais comment est-ce qu’elle a pu aller s’enticher d’un type pareil ? Qu’est-ce qu’elle a bien pu lui trouver ? Comment elle arrive à le supporter ? Plus rien de ce qu’il dit, plus rien de ce qu’il fait ne trouve grâce à ses yeux. La séparation est toute proche. Ce n’est plus qu’une question de semaines, voire de jours.
– Mais à toi, ça t’apporte quoi, ça, à toi ?
– Je me le suis aussi demandé. Toute la soirée d’hier. Et j’ai fini par trouver. C’est qu’un type avec une nana, il est pas disponible pour moi. Et ça, je supporte pas. Ce que je voudrais, au fond, c’est qu’ils soient tous célibataires, sans attaches, que je puisse puiser à ma guise dans le tas, si j’ai envie.
– Eh, ben dis donc !
– Je sais oui, c’est pas très joli, tout ça ! Et j’ai honte maintenant que je sais, que j’ai réalisé. Tu peux pas savoir comment j’ai honte…

lundi 18 novembre 2019

Les fantasmes de Lucie (77)



Dessin de G.Topfer

À la pause de dix heures, on était toutes les deux, ce matin-là, Bianca et moi, à la machine à café. Au beau milieu d’une douzaine de collègues.
Elle a chuchoté.
– T’imagines s’ils savaient que tu me tannes tant et plus le cul ?
– Tu aimerais ?
– Dans un sens, j’adorerais. Et dans un autre, pas du tout.
– Peut-être que ça arrivera, va savoir !
– C’est trop génial d’en parler avec eux à côté. Qui se doutent de rien. Ça m’excite. Non, mais comment ça m’excite ! Et encore plus quand j’ai encore le cul tout rouge et tout chaud d’une fessée toute neuve.
– Ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
– Hélas, non !
– Et à quoi on remédiera dès ce soir. Que tu puisses demain matin profiter à plein de ta pause café.
– Je t’en aurai une reconnaissance éternelle

Et je l’ai emmenée à l’hôtel.
– À l’hôtel ? Mais pourquoi à l’hôtel ?
– Parce que. J’ai mes raisons.
– Je crains le pire.
– Tu peux.

On n’a pas perdu de temps.
– Allez, mets-moi ce petit cul à l’air !
Elle ne s’est pas fait prier. Elle s’est prestement déculottée, m’a jeté un long regard interrogateur.
– Mais c’est quoi, ce truc ?
– Une cordelette. Ça fait sacrément de l’effet, tu vas voir ! Comment tu vas piauler !
– Ah, oui ?
Et elle y a offert son derrière.
Un premier coup.
– Ouche ! Hou, la vache !
– Oui, hein !
Un autre. Une multitude d’autres. En prenant soin de recouvrir méthodiquement toute la surface. De bas en haut. De droite à gauche.
Elle ponctuait chaque coup d’un long cri déchirant qui résonnait dans tout l’hôtel.
Je me suis interrompue pour contempler mon œuvre.
– Pas mal… Pas mal… Mais insuffisant.
Et j’ai recommencé. Dans l’autre sens. De haut en bas. De gauche à droite.
Elle a hurlé de plus belle.

On s’est pelotonnées l’une contre l’autre.
– Comment tu as braillé !
– Tant que ça ? Je me suis pas rendu compte.
– Ah, il a dû se régaler, le type à côté…
– Comment tu sais que c’est un type ?
– Parce que je le connais. Et toi aussi…
– Moi aussi !
– Ben oui, forcément ! C’est un type du boulot.
– T’as pas fait ça !
– Ben si ! Pourquoi ?
– Parce que… Non, t’as pas fait ça. Je te crois pas.
– Peut-être. Et puis peut-être pas.
– C’est qui ?
– À toi de le découvrir. S’il existe…
– Tu es monstrueuse.
– C’est ce qui fait mon charme.
Elle s’est pressée plus fort contre moi, m’a mordillé le lobe de l’oreille, a chuchoté.
– J’ai envie.
J’ai fait rouler entre mes doigts la pointe dressée de son sein.
– De ça aussi il va profiter. Décidément, il va être ravi.

jeudi 14 novembre 2019

Fessées punitives (29)


Julien s’est installé au volant. A démarré.
– Alors ?
– Alors, quoi ?
– Cette soirée avec Étienne. T’en as retiré quoi ?
– Je sais pas. C’était bizarre. Il m’a complètement déstabilisée en fait.
– Ce qui n’est pas forcément un mal.
– Je me demande. Parce que chercher quelque chose quand tu sais pas ce que tu cherches au juste…
– Ça finira par affleurer, tu verras. Pour toi comme pour Océane. Qui est tout près, mais vraiment tout près, de mettre le doigt dessus.
– Ah, alors si je comprends bien…
– C’était une action concertée, oui. On a décidé, tous les quatre, de vous bousculer un peu. Parce que l’essentiel, c’est rarement ce qui saute aux yeux.
– Et c’est quoi alors, pour moi, selon toi, l’essentiel ?
– Je n’en sais fichtre rien. C’est à toi de le découvrir.
– C’est exactement ce que m’a dit Étienne tout à l’heure.
– Ah, ben tu vois !
– Et tu dis qu’Océane…
– A fait un grand pas en avant, oui. Mais c’est à elle de t’en parler. Si elle en a envie.

On venait tout juste de se coucher quand la sonnette de la porte d’entrée a retenti.
– À cette heure-ci ? Qui ça peut être ?
C’était Océane.
– Qu’est-ce qui t’arrive ?
– Rien. Enfin, si ! Je… Je pourrais pas dormir ici ?
– Tu t’es disputée avec Valentin, je parie…
– Oh, non ! Non ! Seulement on avait pris chacun notre voiture. Elle est en bas, la mienne et…
Julien a constaté.
– Tu pues l’alcool à plein nez.
– Oh, mais je suis pas saoule, hein ! Seulement c’est plus prudent que je la prenne pas. Je dois être limite. Et si je tombe sur les flics…
– Limite ? Plus que limite tu veux dire, oui ! Bon, mais on réglera ça ! Comme convenu. Dès que possible… Le temps de prévenir et de réunir tout le monde.
– C’est pas de ma faute !
– Ben, voyons !
– Si, c’est vrai, hein ! C’est à cause de tout ce qu’on a parlé tout à l’heure, à table. Comment ça m’a remuée ! J’avais besoin d’y réfléchir avant de rentrer, du coup…
– On peut réfléchir sans boire…
– Je sais bien, oui ! Seulement…
– Bon, mais on verra tout ça demain ! Il est tard. Alors, pour le moment, dodo !

Dans la chambre d’amis, de l’autre côté de la cloison, elle a reniflé, s’est bruyamment mouchée.
– Elle pleure, non ?
– On dirait, oui.
J’ai tendu la main vers lui.
– Comment c’est trop bien, nous deux, hein, Julien ! On se le dit pas assez souvent, moi, j’trouve !
Je lui ai doucement caressé le ventre. Je suis descendue. J’ai pris sa queue dans ma main. Elle s’est aussitôt dressée. Il s’est tourné vers moi, l’a calée contre ma cuisse. Il m’a suçoté les seins, pétri les fesses. Je me suis ouverte, tendue vers lui.
– Viens, Julien ! Viens ! J’ai trop envie.
Et ça a été un plaisir intense. Majeur. Que j’ai sangloté à pleins poumons. Qui s’est indéfiniment prolongé.
Je me suis réfugiée contre lui.
– Elle a entendu, tu crois ?
– Ah, ça, pour pas entendre ! Vu comment tu t’es lâchée…

lundi 11 novembre 2019

Les fantasmes de Lucie (76)



On ne se quitte plus, toutes les deux, avec Bianca. Elle me fascine. Elle me fascine littéralement. Je prends un plaisir fou à l’écouter. Même si… elle ment beaucoup. Tu ne sais jamais, avec elle, si c’est du lard ou du cochon, si ce qu’elle te raconte a vraiment eu lieu ou pas. Ce n’est pas vraiment qu’elle mente en fait, c’est que ses fantasmes sont, à ses yeux, aussi vrais que la réalité. Que ce qu’elle imagine, c’est comme si elle l’avait vécu pour de bon. Encore plus, parfois, que ce qu’elle a réellement vécu.
Au début, je tenais absolument à savoir.
– Mais c’est vrai ou pas ?
Elle me faisait taire d’un baiser.
– Mais bien sûr que c’est vrai ! Tout est toujours vrai quand on croit que ça l’est.
Et elle se lançait dans une nouvelle anecdote.
– Tiens, tu sais pas ce qui m’est arrivé un jour ? J’étais toute jeune. Dix-huit ans. Et j’avais une copine, un peu plus âgée que moi, qui avait toujours l’air de penser que j’étais complètement coincée. Ça m’énervait. Comment ça pouvait m’énerver ! Et je protestais. « Coincée, moi ? Peut-être moins que toi, si ça tombe. » « Ah, oui ? Eh ben, prouve-le alors ! » Quand elle voudrait. C’était pas un problème. Et elle m’a prise au mot. « Je connais des types, là, ils adorent ça donner des fessées… Alors si le cœur t’en dit… » Hein ? Des fessées ? Non, mais elle était vraiment pas bien, elle, dans sa tête ! « Oui, ben alors là, sûrement pas ! Et puis quoi encore ! » Elle a pris son petit air entendu. Dans le registre : « Tu vois, je le savais bien ! T’es complètement coincée. » Ce qui m’a mise en rage. Mais si, j’allais y aller ! Bien sûr que j’allais y aller ! Si elle croyait que c’était une fessée qu’allait me faire peur. En réalité, j’étais morte de trouille. Et d’appréhension. Comment ça devait faire mal, une fessée ! Et comment ça devait être humiliant ! Mais je n’aurais reculé pour rien au monde. Je n’allais sûrement pas lui donner cette satisfaction.
– C’est tout toi, ça !
– Et, un soir, je me suis retrouvée attachée sur un banc, sans plus pouvoir bouger, complètement entravée, avec cinq ou six types impassibles tout autour. Pas un mot. Pas une réaction. Rien. Tu peux pas savoir comment c’est angoissant.
– Oh, que si !
– Et ça a duré, comme ça, un temps qui m’a paru interminable. Ils fumaient. Ils tournaient autour du banc. Ils sortaient. Ils rentraient. J’en arrivais à espérer que ça tombe. Une bonne fois pour toutes. Qu’on en finisse ! De temps en temps ma copine s’approchait. « Alors, ça va ? Il est toujours temps de renoncer, si tu veux. » Il n’en était pas question. Sûrement pas alors là, non. C’est venu d’un coup, par derrière, par surprise. Une grande cinglée, une seule, au fouet, qui m’a arraché un cri déchirant. Et le type s’est éloigné. Le silence est retombé. On ne s’est plus préoccupé de moi. Il s’est passé une bonne dizaine de minutes et puis il y en a eu un autre qui, à son tour, m’a lâché, avec le même fouet, un grand coup sur les fesses. Et qui a ri : « J’aime bien comme elle piaule ! » Du temps est encore passé et puis il y en a eu un troisième. Même punition. Un coup, un seul. Et encore des rires : « Oui, elle a une belle voix. » C’est avec le quatrième que tout a changé. Des coups, avec lui, il y en a eu plusieurs. Une multitude. Assénés avec force. À intervalles réguliers. J’ai hurlé. Que ça faisait mal ! Oh, mon Dieu, que ça faisait mal ! Ça faisait mal, oui ! C’était insupportable. Et puis, en même temps, en arrière fond, ça avait quelque chose de pas si désagréable que ça. Quelque chose qui a pris corps. Qui s’est épanoui. Un plaisir. Qui s’est affirmé. Qui s’est fait intense. Et j’ai joui. J’ai joui comme une perdue sous les cinglées, sous leurs yeux, sous leurs rires. « Eh ben ! C’est qu’il faut pas lui en promettre à la petite jeune fille ! » On m’a détachée. Comment j’avais honte ! Mais ça aussi, la honte, comment c’était bon ! On m’a regardée me rhabiller. « Et tu reviens quand tu veux, hein ! »
– T’y es retournée ?
– Oui. Mais ça n’a pas été aussi intense que la première fois. Et de loin.
– Et ta copine ?
– Je l’avais mouchée. Et ça s’est considérablement distendu entre nous, du coup. Mais ça m’était bien un peu égal.
Elle est venue se blottir contre moi.
– Fais-moi l’amour ! Ça m’a trop excitée de te raconter tout ça…

jeudi 7 novembre 2019

Fessées punitives (28)


Océane avait quelque chose à m’annoncer.
– Tu sais pas l’idée qu’ils ont eue ?
– Non ? Quoi ?
– Ils veulent qu’on aille au restaurant tous ensemble. Tous les huit.
– Oh ben, pourquoi pas ?
– Tous ensemble, oui, mais à quatre tables différentes. Et éloignées les unes des autres. Ils veulent que chacune d’entre nous fasse plus ample connaissance avec celui qui est appelé à devenir son fesseur attitré.
– Ah ! Ce qui veut dire…
– Que tu vas déjeuner en tête-à-tête avec Étienne. Et moi avec ton mari. Pareil pour les deux autres. Clément avec Émilie. Et mon Valentin avec Bérengère.
Me défiler ? J’y ai songé. Mais il n’en était, à la réflexion, absolument pas question. Ç’aurait été faire preuve de faiblesse et lui donner un peu plus encore barre sur moi à Étienne. Alors non ! Non. J’allais l’affronter.

Et j’ai pris sur moi-même pour, d’emblée, dès qu’on a été assis l’un en face de l’autre, m’efforcer de mettre les choses au clair.
– Il faut que je vous dise tout de suite, pour qu’il n’y ait pas de malentendu entre nous : vous n’aurez pas l’occasion de…
Ils me fouillaient ses yeux. Ils me transperçaient. Ils attendaient. Et je me suis littéralement liquéfiée. J’ai perdu complètement contenance.
– De… Il ne faut pas… N’allez pas imaginer…
Il m’a laissée m’enfoncer, imperturbable. Balbutier. Bafouiller lamentablement.
Et il a repris la main.
– Je n’aurai pas l’occasion de quoi ?
– Ben, de…
– Vous flanquer une bonne fessée ? Bien sûr que si !
J’ai perdu pied.
– Non ! Non ! Je vous assure. Je ne jouerai plus. À quoi que ce soit. J’en suis absolument certaine.
– Ce qui prouve, s’il en était besoin, qu’une sévère correction débouche, dans l’immense majorité des cas, sur des résultats extrêmement satisfaisants. Non ?
Je me suis agitée sur ma chaise.
– Non ?
– Si !
Du bout des lèvres.
– Bon ! Mais que vous soyez désormais guérie de ce vice, j’en suis ravi pour vous. Seulement, il y a tout le reste.
Le reste ? Quel reste ? Qu’est-ce qu’il voulait dire ?
J’ai désespérément cherché un hypothétique secours autour de moi. Là-bas, Julien était en conversation animée avec Océane. De l’autre côté, une Bérengère que Valentin semblait en train de sermonner, pleurait à petits coups, le nez dans son mouchoir. Quant à Clément et Émilie, ils étaient trop loin et masqués.
– Vous m’écoutez ?
– Pardon ! Oui.
– Parce que le vice du jeu, c’est une chose répréhensible, certes, mais il y a plus grave. Beaucoup plus grave. Vous voyez de quoi je veux parler, j’imagine ?
Non. Pas du tout. Et en même temps, si ! Je sentais qu’il y avait en moi quelque chose de terrifiant, dont j’avais toujours plus ou moins soupçonné la présence, dont je ne pouvais qu’avoir immensément honte, dont je devais me sentir profondément coupable, mais sur quoi j’étais totalement incapable de mettre un nom. Quelque chose qui sommeillait au plus profond de moi depuis toujours. Quelque chose que lui avait vu. Débusqué. C’était quoi ? Je tremblais de peur à l’idée de le savoir. J’ai pourtant levé sur lui un regard interrogateur.
Il a souri.
– C’est à vous de le découvrir. Et de me demander, le moment venu, de vous punir pour ça.

lundi 4 novembre 2019

Les fantasmes de Lucie (75)



Dessin de Luc Lafnet

Elle ne s’était pas encore décidée.
– Pour le magasin de sapes, avenue Berlioz, là ! Enfin, si ! Si ! On ira. Mais pas tout de suite. Faut d’abord que je me fasse à l’idée.
– Que tu t’y fasses ou que tu la caresses longuement ? Et voluptueusement ?
Elle a ri.
– Peut-être bien les deux.
Et soupiré.
– C’est pas drôle, en fait. Parce que c’est sans arrêt que je me retrouve dans de ces situations ! À croire que je les cherche.
– Ce qu’est pas impossible.
– Non, parce que tu sais pas ce qui m’est arrivé un jour ?
– Oh, là là ! Je crains le pire.
J’étais au marché, tranquille. Je me baladais entre les étals, le nez au vent, quand il y a une marchande de fruits et légumes qui s’est mise à hurler : « C’est elle ! C’est elle ! Elle vient me narguer jusqu’ici, cette petite saloperie, en plus ! » Elle s’est précipitée sur moi. Hein ? Mais qu’est-ce qu’elle me voulait cette folle ? Elle m’a attrapée par le bras, solidement maintenue. « Alors ? Il te plaît bien, mon Baptiste, à ce qu’il paraît ? » « Mais pas du tout ! Mais lâchez-moi enfin ! » Elle m’a lancé une gifle, à toute volée. « Menteuse ! T’étais pas avec lui hier dans la grange du Léonard peut-être ? Même qu’on t’entendait miauler à des kilomètres ! » Une autre gifle. « Oh, mais tu vas me payer ça, ma petite ! Tu vas me payer ça ! Il va s’en souvenir, ton cul ! » Et elle m’a empoignée malgré mes véhémentes protestations, courbée en avant, mis le derrière à l’air, là, devant tout le monde, et elle a tapé. Avec un truc en cuir qui faisait un mal de chien. Qui m’a fait hurler et battre tant et plus des jambes. Il y avait tout un tas de monde autour à profiter du spectacle : les autres marchandes qui rigolaient et qui l’encourageaient tout ce qu’elles savaient. « Allez, vas-y, Émilienne ! Ces petites traînées, il y a que ça que ça comprend. » Et puis des clientes. De plus en plus de clientes au fur et à mesure que ça durait. Ça faisait tout un cercle. Des hommes aussi. Tu sais comment ils sont, ceux-là : ils n’en perdaient pas une miette. Et ils se pourléchaient les babines de me voir comme ça, à poil, en train de me faire corriger comme une gamine. Alors je peux te dire que, quand elle m’a enfin lâchée : « Et remets-y le nez à mon Baptiste pour voir ! », j’ai filé sans demander mon reste. Sous les huées et les éclats de rire.
– Elle t’avait prise pour une autre, en fait !
– Ah, ben ça ! N’empêche qu’elle m’avait mis le derrière dans un état ! Presque une semaine elles y sont restées les marques.
– Mais c’est un fantasme ou ça s’est vraiment passé ?
Elle s’est blottie contre moi.
– Je sais pas. Je sais plus. Mais je dois être un peu folle quand même ! Parce que tu sais ce que je préfère ? C’est les fessées qui sont pas justes. Que j’ai pas méritées. Et de loin.

jeudi 31 octobre 2019

Fessées punitives (27)


J’ai longuement hésité. Et puis j’ai fini par appeler Émilie.
– Faut que je te demande un truc…
– Je t’écoute.
– C’est rapport à Étienne. Parce que l’autre jour, pendant la fessée de Bérengère…
– Tu l’as pas quitté des yeux. Je sais, oui. J’ai vu. Ce qui peut se comprendre. Parce que c’est Étienne qui sera amené à te fesser si jamais tu récidives. Alors que tu sois tout particulièrement attentive à lui, à ses réactions, dans ce genre de situation, ça me paraît complètement normal. Tu crois que je l’ai pas eu dans le collimateur, moi, Clément, pendant ce temps-là ? Puisque c’est à lui que j’aurai affaire si je dysfonctionne encore. Même si je me suis certainement montrée beaucoup moins insistante que toi. Et s’il ne s’est rendu compte de rien, tout occupé qu’il était à regarder sa dulcinée gigoter sous les claquées de Valentin.
– Il t’a rien dit, Étienne ?
– À propos ? De ton attitude ? Rien. Pas un mot. Mais peut-être que ça ressortira un jour ou l’autre. Avec lui on peut pas savoir. On peut jamais savoir. Non, la seule dont il ait été question, c’est Bérengère. Mais c’est elle qui était sous le feu des projecteurs après tout.
– Tu crois, toi aussi ?
– Que ?
– Océane, elle pense que ça lui était pas si désagréable que ça, tout compte fait, de la recevoir, la fessée. Et qu’on la voie la recevoir.
Elle a marqué un long temps d’arrêt.
– Tu sais, après, juste après, quand ça a été terminé, qu’on est tous restés à discuter dehors…
– Oui. Eh bien ?
– J’ai voulu aller aux toilettes. C’était occupé. Par Bérengère justement. Et, de là-dedans, me sont parvenus des gémissements étouffés qui ne laissaient planer aucun doute sur la nature de l’activité à laquelle elle était en train de se livrer.
– Ah, ben d’accord !
– Comme tu dis…
– Elle s’est rendu compte ? Que t’étais là ? Elle s’en est aperçue ?
– Pas sur le moment, non. Je me suis discrètement éclipsée. Et puis, après réflexion, j’ai décidé de lui en parler. Ce que j’ai pas regretté finalement, parce que ça nous a permis de nous dire plein de choses toutes les deux. Des choses que ça te soulage et te rassure de te dire que tu n’es pas toute seule à les éprouver. Parce que je sais pas toi, mais moi, c’est très compliqué ce que je ressens quand je la reçois, la fessée. Et très ambigu. D’un côté, je trouve ça incroyablement mortifiant d’être déculottée et corrigée comme une gamine. Mais c’est aussi ce qui fait que c’est efficace. C’est ce qui me dissuade, la plupart du temps, de me laisser aller. Qui me pousse à me mettre sérieusement au travail quand j’aurais plutôt envie d’aller m’affaler devant une bonne série. Mais, en même temps, d’un autre côté, quand ça m’arrive, je ne peux pas m’empêcher d’éprouver, en arrière-fond, une certaine forme de plaisir. Bien sûr, il y a le fait que c’est une région particulièrement érogène par là. Ça compte. Ça ne peut pas ne pas compter. Mais il y a pas que ça. C’est pas ça, l’essentiel. Non, c’est quelque chose de beaucoup plus cérébral. En rapport étroit avec l’humiliation. Tu es profondément honteuse de ce qui t’arrive, mais en même temps, cette honte, elle a quelque chose d’incroyablement fascinant. Et de très agréable. Plus elle est forte, plus tu te sens délicieusement troublée. Plus tu te sens troublée et plus tu as honte de l’être. En spirale. À l’infini. Et tu vois, le paradoxe, c’est que ce plaisir, parce que tu en as honte justement, il participe à la punition. Il te la fait appréhender un peu plus encore. Et il contribue à t’inciter, au bout du compte, à rester dans les clous.
Elle a poussé un profond soupir.
– On est compliqués, nous, les humains, hein, finalement !
Il y a eu un long silence. Un très long silence.
– Je t’ai choquée ?
– Oh, non, non, pas du tout…
– Mais ça te fait te poser tout un tas de questions.
– Un peu, oui.

lundi 28 octobre 2019

Les fantasmes de Lucie (74)




On était pelotonnées l’une contre l’autre.
Elle a murmuré.
– Hou… Comment t’as tapé ! Bien plus fort que les autres fois. C’est un vrai brasier, mon cul !
A souri.
– Mais j’aime bien. Beaucoup. Énormément. Et j’aime bien que tu me laisses la main sur les fesses comme ça, après. Ça me fait me sentir un peu plus à toi encore. J’adore !
Elle s’est redressée sur un coude.
– Je t’encombre pas trop au moins ?
– Bien sûr que non !
– Parce que tous les soirs je suis là, avec toi, maintenant. T’as peut-être pas forcément envie. Tu me le dirais, hein !
– Mais oui !
– Promis ?
– Juré ! Mais faut que je te dise quelque chose…
Elle m’a jeté un regard anxieux.
– Quoi ? C’est grave ?
– Mais non ! T’inquiète pas comme ça ! Non. C’est juste que je suis passée au magasin de sapes, avenue Berlioz, histoire de voir à quoi elles ressemblent ces deux femmes qui ont été à l’origine de ton fantasme.
– Oui. Et alors ?
– Alors on a un peu discuté toutes les trois. Et je leur ai parlé de toi. Elles se souvenaient très bien. Je leur ai dit du coup.
– Tu leur as dit quoi ?
– Que tu leur avais volé une bague.
– T’as pas fait ça !
– Ben si ! Pourquoi ?
– Mais c’est pas vrai !
– Dans ton fantasme, si ! Elles s’en doutaient n’importe comment. Je leur ai même précisé que je t’avais punie pour ça. Une vigoureuse fessée. Ce qui les a manifestement ravies.
– Oh, la honte ! Jamais j’oserai y remettre les pieds, moi, là-dedans, maintenant !
– Il faudra bien pourtant. Parce que je leur ai promis que tu viendrais leur montrer tes fesses. Qu’elles voient que t’as vraiment été punie. Que je leur ai pas raconté des salades. Oh, mais fais pas cette tête catastrophée ! Je leur ai pas dit. Je suis pas idiote.
– Hou ! Tu m’as fait peur !
– Mais j’y suis vraiment allée. Et on a parlé. Pas mal. Longtemps. Des vols entre autres. C’est une véritable plaie pour elles. Surtout les petits objets, comme les bagues justement. Il y a pas de système anti-vol pour ça et ça se dissimule facilement. Alors tu penses bien que j’ai voulu savoir du coup : elles faisaient quoi quand elles en prenaient une sur le fait ? Elles ont haussé les épaules. Qu’est-ce que je voulais qu’elles fassent ? Au début, elles portaient systématiquement plainte. Ce qui n’aboutissait pratiquement jamais. « Et les gendarmes ont fini par être excédés à la longue. Tout juste s’ils nous reprochaient pas de vendre des articles qui se volent facilement. Alors maintenant, nos chapardeuses, on se contente de les sermonner et de les foutre dehors. Avec interdiction de revenir. Mais bon, c’est pas vraiment une solution. » J’ai suggéré : « Et une bonne fessée ? » Ah, ça, elles devaient bien reconnaître qu’elles y avaient pensé et que ça les démangeait souvent. « Mais bon ! Malheureusement, c’est inenvisageable. Ça nous retomberait dessus. » Oui, oh ben moi, j’avais une sœur, c’était plus fort qu’elle. Fallait qu’elle pique. Elle pouvait pas s’empêcher. Je supportais pas. Et je laissais pas passer : elle avait beau avoir trente ans bien sonnés, chaque fois que je m’en rendais compte, je lui en collais une. Et elle avait pas intérêt à broncher, alors là !
– Je vois.
– Je t’ai bien débroussaillé le terrain, avoue ! Et si jamais maintenant tu veux le vivre pour de bon, ton fantasme…
Elle a soupiré.
– Bien sûr que ça me tente ! Bien sûr ! Mais, en même temps, ça me fout une de ces trouilles !
Elle a reposé sa tête sur mon épaule.
– Je verrai. Je te dirai.

jeudi 24 octobre 2019

Fessées punitives (26)


Ce qui n’a pas loupé.
Une heure après, elle était là, Bérengère.
– Je te dérange pas ?
– Non. Bien sûr que non. Tu veux un café ?
Elle a ignoré la question. Ou ne l’a pas entendue.
– Tu trouves, toi aussi ?
– Je trouve que quoi ?
– Que j’en ai énormément montré.
– On montre toutes dans ces cas-là. Le moyen de faire autrement ? Ça fait partie de la punition n’importe comment.
– Oui, mais moi, à ce qu’il paraît qu’il y en a qui pensent que je l’ai fait exprès de montrer. Et d’en montrer le plus possible.
– Ton Clément ? Il a pensé exactement la même chose de moi, rappelle-toi !
– Non, pas Clément. Enfin si, oui ! Je lui ai pas demandé, mais oui, lui, forcément. Il nous voit toutes comme ça n’importe comment. Non, mais les autres. Julien, par exemple. Il t’a dit quelque chose, Julien ?
– Que t’étais bien foutue. Ce qui, pour rien te cacher, l’a mis en appétit. Ben, oui ! On pourra jamais empêcher un mec d’être un mec. Ils allaient pas garder leurs yeux dans leurs poches non plus. Tous autant qu’ils sont. Et je suis bien tranquille que le Valentin d’Océane, lui aussi… D’autant qu’il était aux manettes…
– Je sais, oui. Il a pas arrêté de bander tout le temps qu’il me l’a donnée, la fessée. J’ai eu tout du long son truc tout dur contre ma cuisse.
– Ah, tu vois bien ! Et Clément, me dis pas que le soir quand vous êtes rentrés…
– Ben si, oui…
– Et même Étienne, je suis sûre. Il a beau jouer les imperturbables, faire celui qui prend tout ça de haut, tu penses bien qu’une fois réfugié dans sa chambre, il est pas resté les deux mains sagement posées sur les couvertures. Ben, oui, c’est comme ça ! Faut se faire une raison. Après, qu’ils aillent s’imaginer tout un tas de trucs, qu’on fait exprès d’en montrer tant et plus ou je sais pas trop quoi, il faut te dire et te répéter que… et d’un ils auront jamais de certitude absolue là-dessus. Et de deux, que c’est leur problème, pas le nôtre. Le nôtre, c’est de savoir si ces punitions qu’on reçoit sont efficaces ou pas, si elles nous empêchent de courir à la catastrophe ou pas. En ce qui me concerne, la réponse est claire et nette. C’est oui. S’il y avait pas ça, je jouerais jusqu’à notre dernier sou, je me connais. Et il y a belle lurette qu’on serait à la banque de France et dans les pires galères. Sans compter que Julien m’aurait très certainement larguée. Personne n’a envie de vivre dans la misère. Et je serais très probablement à la rue. Alors moi, je les bénis, ces fessées. Et je les veux. Parce qu’il y a qu’elles qui peuvent me recadrer et m’empêcher de rechuter. Quand mes petits démons se manifestent, qu’ils se mettent à insister à tout-va, il me suffit d’y penser, de me dire que, si je flanche, ça va me valoir une humiliante fessée déculottée devant vous et c’est radical : elle me passe aussitôt l’envie d’aller faire un tour au casino ou d’aller craquer des cents et des mille en ligne. Surtout maintenant qu’il a été décidé qu’au moindre faux pas de ma part, ce serait Étienne qui me le ferait. J’aurais bien trop honte avec lui. Rien que d’y penser… Je sais pas pourquoi, mais alors il m’impressionne d’une force, ce type !
– C’est sa façon de regarder peut-être. De te faire te sentir en faute même quand t’as rien fait. Moi aussi, il me met mal à l’aise. N’empêche qu’ils les ont pas choisis au hasard, les binômes, hein ! Ils savaient très bien ce qu’ils faisaient. Parce que moi, comment ça m’a vexée, que ce soit Valentin qui me la donne la fessée ! Depuis le temps qu’on est amies, Océane et moi, tu parles si je le connais, lui ! Et jamais, au grand jamais, je serais allée m’imaginer qu’un jour je me retrouverais les fesses à l’air en travers de ses genoux. Et que ce serait mérité. Non, parce que comment j’ai déconné ! C’est pas possible de déconner comme ça. J’ai honte, tu peux pas savoir ce que j’ai honte. Ah, il a eu de la constance, faut avouer, Clément !
Elle s’est levée.
– Va falloir que j’y aille ! Mais n’empêche…
Elle a repris son sac.
– N’empêche que depuis qu’il y a eu ça, hier, je me sens mille fois plus amoureuse de lui. C’est bizarre, non, tu trouves pas ?
– Oh, non ! Non, c’est pas bizarre, non. Pas du tout.

lundi 21 octobre 2019

Les fantasmes de Lucie (73)



Aquarelle de Gottfried Sieben

Cordelia n’en parlait plus. Plus vraiment.
Je l’interrogeais du coup.
– Alors, Émilie ? Ça donne quoi ?
Elle haussait les épaules.
– Rien. J’avais cru, mais non. Elle est pas vraiment réceptive à tout ça, en fait. Et toi, Bianca ?
– Non plus, non. Je laisse tomber.

C’était faux. Archi-faux. Mais j’avais pas du tout envie de la partager avec elle, Bianca. Ni avec qui que ce soit. Surtout que maintenant qu’elle avait ouvert la boîte à fantasmes… Elle saisissait la moindre occasion.
– Tu vois ces types, là, à droite ?
On était au restaurant.
– Hein ? Tu les vois ?
Des militaires en uniforme.
Ben oui, je les voyais, oui.
– Ça me rappelle quelque chose.
Son regard s’est perdu dans les lointains.
– Oui, ça me rappelle… Je venais d’avoir une déception amoureuse. Le méga truc. J’étais au quatrième dessous et j’avais voulu foutre le camp. Le plus loin possible. À l’étranger. J’avais trouvé, un peu par hasard, une place de serveuse dans une auberge et, sur le moment, je n’en demandais pas plus. Sauf qu’il y en avait une autre de serveuse qui m’avait tout de suite prise en grippe. Je lui faisais de l’ombre. Elle était vieille, j’étais jeune. Pas trop mal foutue. On me tournait autour. Elle supportait pas. Et un beau jour, pendant mon service, grand branle-bas de combat dans les étages. Ça criait. Ça courait dans tous les sens. Ça a fini par surgir dans la salle en bas. On s’est précipité sur moi. Deux soldats. Plus un espèce de notable qui servait plus ou moins de juge de paix. Et les patrons. On me crie dessus. On parle vite. Je ne maîtrise pas bien la langue, mais je finis tout de même par comprendre qu’on me reproche d’avoir volé la recette de la veille, qu’on a fouillé toutes les chambres et qu’on l’a retrouvée sous mon matelas. J’ai eu beau protester, me débattre comme un beau diable. Rien n’y a fait. À leurs yeux, j’étais incontestablement et définitivement coupable. Il y a bien eu un simulacre de procès, vite fait, dans la pièce voisine. On a prononcé une sentence dont je n’ai pas compris la moitié des mots et je me suis retrouvée à genoux, la tête plaquée contre un tabouret, les fesses à l’air… Et il y a un des deux soldats qui m’a flagellée. Ah, il y est allé de bon cœur, le bougre ! Ça faisait mal, mais comment ça faisait mal ! Ça mordait, ça brûlait, ça déchirait. Et moi, je criais, je chialais, je suppliais. Ce qui lui était complètement égal. Il continuait, imperturbable. Avec l’autre espèce de saloperie de vieille serveuse dans l’embrasure de la porte qui se régalait à me voir gigoter et me tortiller
– C’était elle qui…
– Évidemment que c’était elle. Qui voulais-tu que ce soit ? C’était elle qu’avait planqué le pognon sous mon matelas. À cinquante coups j’ai eu droit. Cinquante. Après quoi on m’a virée comme une malpropre. Et je peux t’assurer que je suis pas restée à traîner dans les parages.
– J’imagine… Mais tu sais quoi, Bianca ?
– Non.
– Je mouille. Et pas qu’un peu.
– Oh, voilà une nouvelle qu’elle est bonne ! Finis vite ton dessert qu’on aille en profiter.